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07/03/2023 | FRANCE | N°22BX02789

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 07 mars 2023, 22BX02789


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 22 février 2022 par lequel la préfète de la Gironde lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français.

Par un jugement n° 2201502 du 2 juin 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 octobre 2022, Mme A... B..., représentée par Me Aymard, demande à la

cour :

1°) d'annuler ce jugement du 2 juin 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 22 février 2022 ;...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 22 février 2022 par lequel la préfète de la Gironde lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français.

Par un jugement n° 2201502 du 2 juin 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 octobre 2022, Mme A... B..., représentée par Me Aymard, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 2 juin 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 22 février 2022 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil, en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

- elle a été prise au terme d'une procédure irrégulière dès lors qu'il n'est pas établi que l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a été pris de manière collégiale ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale, par voie d'exception, en raison de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour sur laquelle elle se fonde ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 novembre 2022, la préfète de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Elle s'en remet à ses écritures de première instance.

Mme A... B... a produit des pièces, enregistrées le 1er février 2023, non communiquées.

Mme A... B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 septembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Demurger, présidente ;

- et les observations de Me Aymard, représentant Mme A... B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... A... B..., ressortissante congolaise né le 1er janvier 1983 à Matadi (République démocratique du Congo), déclare être irrégulièrement entrée en France le 7 décembre 2009. Sa demande d'asile, présentée le 9 décembre 2009, a été en dernier lieu rejetée par une décision du 9 avril 2015 de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA). Elle a ensuite bénéficié d'un titre de séjour valable du 4 décembre 2017 au 3 septembre 2018 en qualité d'étranger malade. Ce titre n'ayant pas été renouvelé, Mme A... B... a néanmoins sollicité, le 27 mai 2021, son admission au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 22 février 2022, la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer ce titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme A... B... relève appel du jugement du 2 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".

3. La partie qui justifie d'un avis du médecin de l'OFII venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

4. D'autre part, aux termes de l'article R. 425-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'application de l'article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'office et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. ". Aux termes de l'article R. 425-13 du même code : " Le collège à compétence nationale mentionné à l'article R. 425-12 est composé de trois médecins, il émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du même article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. / L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission du certificat médical. Lorsque le demandeur n'a pas présenté au médecin de l'office ou au collège les documents justifiant son identité, n'a pas produit les examens complémentaires qui lui ont été demandés ou n'a pas répondu à la convocation du médecin de l'office ou du collège qui lui a été adressée, l'avis le constate. / L'avis est transmis au préfet territorialement compétent, sous couvert du directeur général de l'office. ". Aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 susvisé : " (...) un collège de médecins (...) émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : / a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis mentionne les éléments de procédure. / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que l'avis du 10 octobre 2021 porte la mention " Après en avoir délibéré, le collège des médecins de l'OFII émet l'avis suivant " et a été signé par les trois médecins composant le collège de médecins de l'OFII. Cette mention fait foi jusqu'à preuve du contraire de ce que l'avis du collège des médecins de l'OFII a été émis au terme d'une délibération collégiale, le cas échéant au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle, comme le permettent les dispositions précitées de l'arrêté du 27 décembre 2016. La seule circonstance que la date figurant sur l'avis du collège des médecins de l'OFII, à savoir le 10 octobre 2021, corresponde à un dimanche n'est pas de nature à remettre en cause le caractère collégial de la délibération. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure dont serait entaché cet avis doit être écarté.

6. En deuxième lieu, par son avis émis le 10 octobre 2021, le collège de médecins de l'OFII a estimé que, si l'état de santé de Mme A... B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont elle est originaire, vers lequel elle peut voyager sans risque, elle peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Pour déterminer si un étranger peut bénéficier effectivement dans le pays dont il est originaire d'un traitement médical approprié, au sens des dispositions précitées, il convient de s'assurer, eu égard à la pathologie de l'intéressé, de l'existence d'un traitement approprié et de sa disponibilité dans des conditions permettant d'y avoir accès, et non de rechercher si les soins dans le pays d'origine sont équivalents à ceux offerts en France ou en Europe. En l'espèce, Mme A... B... fait valoir qu'elle souffre de différents myomes et d'un stress post-traumatique et produit des certificats médicaux, en date des 24 mars 2021, 3 mars 2022, 12 juillet 2022 et 25 juillet 2022, dont certains sont postérieurs à la décision attaquée et qui se bornent à faire état de ses pathologies et à constater, de façon non circonstanciée, qu'elle " ne pourra pas bénéficier de soins nécessaires ", ainsi qu'un rapport de l'organisation suisse d'aide aux réfugiés (OSAR) intitulé " République démocratique du Congo : traitement des maladies mentales " du 28 février 2022. Toutefois, les éléments ainsi produits ne sont pas de nature à démontrer que la requérante ne pourrait pas bénéficier effectivement d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine. Par ailleurs, les pièces du dossier sont insuffisantes pour justifier que des traumatismes effectivement vécus dans le pays d'origine seraient tels qu'ils rendraient inefficace toute prise en charge en République démocratique du Congo. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

7. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que la décision portant refus de titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité. Par suite, l'exception d'illégalité invoquée à l'appui des conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français doit être écartée.

8. En second lieu, il convient d'écarter par adoption de motifs retenus à bon droit par les premiers juges le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, moyen que Mme A... B... réitère en appel sans apporter d'élément nouveau.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... B..., à Me Aymard et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 6 février 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Florence Demurger, présidente,

M. Fréderic Faïck, président-assesseur,

M. Anthony Duplan, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 mars 2023.

La présidente-rapporteure,

Florence Demurger

Le président-assesseur,

Fréderic Faïck

La greffière,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22BX02789

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX02789
Date de la décision : 07/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme DEMURGER
Rapporteur ?: Mme Florence DEMURGER
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : AYMARD

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-03-07;22bx02789 ?
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