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04/05/2023 | FRANCE | N°21BX04101

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 04 mai 2023, 21BX04101


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 12 avril 2021 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi, et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français de deux ans à son encontre.

Par un jugement n° 2102248 du 5 octobre 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. r>
Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 novembre 2021, Mme D......

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 12 avril 2021 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi, et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français de deux ans à son encontre.

Par un jugement n° 2102248 du 5 octobre 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 novembre 2021, Mme D..., représentée par Me Lemee, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 5 octobre 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté de la préfète de la Gironde du 12 avril 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à défaut, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa situation ;

4°) de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire.

Elle soutient que :

- elle réside en France de manière continue depuis 2007, ainsi qu'en attestent les pièces qu'elle verse au dossier ;

- sa demande de titre de séjour, déposée le 29 septembre 2017, a été instruite dans des délais déraisonnables ;

- la décision de refus de titre de séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle réside de manière continue en France depuis 2007, que ses parents sont décédés, qu'elle n'a plus de contact avec son mari et ses enfants restés en Inde ; son frère et sa nièce, avec lesquels elle entretient des liens forts, résident en France ;

- il appartenait à la préfète de saisir la commission du titre de séjour en application de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle réside en France depuis plus de dix ans ;

- un titre de séjour temporaire lui a été accordé le 11 septembre 2013 ;

- la décision de refus de titre de séjour méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; sa vie privée et familiale et sa situation professionnelle justifient l'octroi d'un titre de séjour sur ce fondement.

Par un mémoire en défense enregistré le 6 février 2023, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens de Mme D... ne sont pas fondés.

Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 16 décembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme C... B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D..., ressortissante indienne née le 1er mai 1970, entrée sur le territoire français en 2007 selon ses déclarations, a sollicité un titre de séjour sur le fondement des 7° et 11° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicables. Par un arrêté du 12 avril 2021, la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer le titre de séjour demandé, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français de deux ans. Mme D... relève appel du jugement du 5 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 avril 2021.

Sur l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

2. Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau de l'aide juridictionnelle du tribunal judicaire de Bordeaux du 16 décembre 2021. Par suite, ses conclusions tendant à l'admission à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. / Un décret en Conseil d'Etat définit les modalités d'application du présent article ".

4. Si Mme D... soutient qu'elle réside en France de manière continue depuis 2007, les pièces qu'elle verse au dossier ne permettent pas d'établir sa présence sur le territoire français entre le mois de mai 2010 et le mois de décembre 2012. Ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, elle ne justifiait pas de sa résidence habituelle en France depuis plus de dix ans, et n'est par suite pas fondée à soutenir que la préfète de la Gironde aurait dû soumettre sa demande d'admission exceptionnelle au séjour à la commission du titre de séjour.

5. Par ailleurs, si elle fait valoir qu'elle vit avec son frère, de nationalité française, et sa nièce dont elle se serait beaucoup occupée, il ressort des pièces du dossier qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches dans son pays d'origine où elle a vécu la majeure partie de sa vie et où résident encore sa mère, deux de ses frères et sœurs, ainsi que ses enfants majeurs. En outre, dès lors qu'il ressort également des pièces du dossier que le frère de la requérante ne dispose que d'un droit de visite et de garde secondaire auprès de sa fille, désormais âgée de 17 ans, Mme D... ne saurait soutenir que sa présence sur le territoire français, qui aurait pour but d'assister son frère dans l'éducation de sa nièce, serait indispensable. De plus, la seule circonstance qu'elle a exercé un emploi de garde d'enfant à domicile, qui a d'ailleurs désormais seulement un caractère ponctuel, ne permet pas de considérer que l'intéressée serait particulièrement insérée dans la société française, alors que Mme D... ne verse au dossier aucun autre élément attestant d'une telle insertion et qu'il est constant qu'elle a fait l'objet de quatre mesures d'éloignement, qu'elle soutient elle-même ne pas avoir exécutées. Ainsi, les éléments dont la requérante se prévaut ne caractérisent pas des motifs exceptionnels ou des circonstances humanitaires justifiant la délivrance d'un titre de séjour. A cet égard, la durée d'instruction de la demande de titre de séjour de Mme D..., qu'elle aurait déposée en 2017, ne saurait davantage justifier la délivrance d'un tel titre. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

6. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits de libertés d'autrui ".

7. Au regard des éléments rappelés au point 5 l'arrêté en litige ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de Mme D... dès lors notamment que la durée de séjour en France dont elle se prévaut résulte de son maintien sur le territoire français en dépit de quatre mesures d'éloignement prises à son encontre, et qu'elle dispose d'attaches en Inde, outre ses deux enfants majeurs avec lesquels elle ne serait pas restée en contact. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

8. Il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de la préfète de la Gironde du 12 avril 2021. Sa requête doit ainsi être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle présentée par Mme D....

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme D... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 13 avril 2023 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Claude Pauziès, président,

Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,

Mme Charlotte Isoard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 mai 2023.

La rapporteure,

Charlotte B...Le président,

Jean-Claude Pauziès

La greffière,

Marion Azam Marche

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 21BX04101 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21BX04101
Date de la décision : 04/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PAUZIÈS
Rapporteur ?: Mme Charlotte ISOARD
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : LEMEE

Origine de la décision
Date de l'import : 14/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-05-04;21bx04101 ?
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