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06/06/2023 | FRANCE | N°22BX03039

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 06 juin 2023, 22BX03039


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 13 septembre 2021 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2201570 du 14 juin 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 décembre 2022, M. C

..., représenté par Me Hugon, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal adminis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 13 septembre 2021 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2201570 du 14 juin 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 décembre 2022, M. C..., représenté par Me Hugon, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 14 juin 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 septembre 2021 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte, et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros à verser à Me Hugon en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le tribunal administratif a procédé indûment à une substitution de motif ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;

- faute de pouvoir présenter ses observations concernant son état civil, il a été privé de la possibilité de présenter des documents susceptibles d'influer sur le sens de la décision, laquelle est ainsi entachée d'un vice de procédure :

- l'arrêté litigieux est également entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté litigieux a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- l'illégalité de la décision portant refus de séjour prive de base légale la décision lui faisant obligation de quitter le territoire ;

- l'illégalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français prive de base légale la décision fixant le pays de renvoi.

Par un mémoire enregistré le 2 février 2023, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux du 15 septembre 2022.

Le président de la cour administrative d'appel de Bordeaux, par une décision du 27 avril 2023, a affecté Mme Karine Butéri, présidente-assesseure, à la 3ème chambre de la cour, pour l'audience du mardi 16 mai 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... C..., né le 14 septembre 2001, de nationalité malienne, indique être entré en France le 21 avril 2017. Le 10 septembre 2019, il a sollicité son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 13 septembre 2021, la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. C... relève appel du jugement du 14 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des mentions de l'arrêté litigieux que la préfète de la Gironde a procédé à la vérification de l'état civil de M. C... pour instruire et examiner sa situation au regard des dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, contrairement à ce que soutient l'appelant, la préfète ne s'est pas contentée de fonder son refus de délivrance d'un titre de séjour sur la circonstance que le requérant ne justifiait pas valablement de son identité mais a également procédé à un examen du droit au séjour de l'intéressé au regard, en particulier, des dispositions de l'article L 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. A la suite de cet examen, elle a conclu que sa situation ne répondait pas à des critères qui justifieraient que lui soit remise, à titre exceptionnel, une carte de séjour temporaire sur ce fondement.

3. Par suite, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que le tribunal aurait procédé d'office à une substitution de motif en examinant son droit au séjour au regard de ces dernières dispositions.

Sur la légalité de l'arrêté en litige :

4. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutient l'appelant, la préfète de la Gironde n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle.

5. En second lieu, M. C... fait valoir qu'il n'a pas été informé, avant l'édiction de l'arrêté litigieux, des irrégularités entachant, selon les services de la préfecture, l'authenticité des documents d'état civil qu'il a produits à l'appui de sa demande de titre de séjour. Toutefois, aucune disposition législative ou réglementaire, et en particulier pas celles des articles R.431-10 et R.811-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'impose à l'autorité préfectorale, en cas de doute sur l'authenticité des documents produits, de solliciter la production de documents complémentaires.

6. Au demeurant, d'une part, M. C... a été informé, par une lettre datée du 5 novembre 2020, de la retenue provisoire de ses documents d'état civil aux fins de vérification de leur authenticité en application de l'article 47 du code civil et de l'article L. 111-6, alors en vigueur, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il lui était alors loisible de produire de nouveaux documents justifiant de son état civil. D'autre part et ainsi qu'il a été dit précédemment, la préfète a considéré que l'appelant ne remplissait pas les autres conditions permettant la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et aurait donc pris la même décision si elle s'était fondée sur cette seule circonstance.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel, l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance ou du tiers digne de confiance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle peut, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil ou du tiers digne de confiance sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. "

8. M. C... fait valoir qu'il est entré en France alors qu'il était âgé de 15 ans et qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance du département de la Gironde à compter du 27 septembre 2017, qu'il suivait, à la date de l'arrêté litigieux, une formation de " canalisateur " en alternance dans le cadre d'un contrat d'apprentissage et que son employeur ainsi que les préposés de celui-ci se sont montrés satisfaits de son insertion et de son épanouissement professionnel. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, notamment d'un rapport établi par le département de la Gironde en date du 8 août 2019 relatif à la situation de M. C... ainsi que de son relevé de note du second trimestre de l'année scolaire 2018/2019, que ce dernier a éprouvé des difficultés à s'intégrer à partir de décembre 2018 et qu'il a ensuite limité les contacts avec l'équipe éducative. En outre, à la suite d'une réorientation scolaire, il s'est " désinvesti de l'école " à compter du second trimestre de l'année scolaire 2018/2019 et a multiplié les absences au point que ses professeurs n'ont pas pu procéder à son évaluation. Si M. C... fait valoir qu'il a été victime de violences au sein d'une structure d'hébergement au mois de janvier 2018, il ne produit aucun élément permettant de considérer que cette circonstance malheureuse serait à l'origine de l'abandon, de fait, de sa scolarité plus d'un an plus tard. Enfin, il n'établit ni même n'allègue qu'il n'entretiendrait plus de relations suivies avec sa mère et sa fratrie demeurées dans son pays d'origine mais fait seulement valoir que celles-ci résident dans une région confrontée à une violence croissante.

9. Dans ces conditions, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la préfète aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant de lui délivrer, à titre exceptionnel, un titre de séjour sur le fondement des dispositions citées au point 7 de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

10. En quatrième lieu, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales prévoient que : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

11. Il ressort des pièces du dossier que M. C... est célibataire et sans charge de famille sur le territoire et n'y fait état d'aucune attache particulièrement stable, intense et durable mais se borne à faire valoir qu'il a appris le français, qu'il s'est impliqué dans son apprentissage et qu'il pratique le football en compétition. Dans ces conditions, l'appelant, qui n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident sa mère et sa fratrie, n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté litigieux a porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ni, par voie de conséquence, que cet arrêté aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. En outre et pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8, il n'est pas davantage fondé à soutenir que cet arrêté serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

12. En cinquième et dernier lieu, il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour prive de base légale la décision lui faisant obligation de quitter le territoire. Par suite, il n'est pas davantage fondé à invoquer, par voie d'exception et à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi, l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de la préfète de la Gironde du 13 septembre 2021. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 16 mai 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Karine Butéri, présidente,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller,

Mme Agnès Bourjol, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 juin 2023.

Le rapporteur,

Manuel B...

La présidente,

Karine Butéri Le greffier,

Anthony Fernandez

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°22BX03039 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX03039
Date de la décision : 06/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BUTERI
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS
Avocat(s) : HUGON

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-06-06;22bx03039 ?
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