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18/07/2023 | FRANCE | N°23BX00827

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 18 juillet 2023, 23BX00827


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler, d'une part, l'arrêté du 8 mars 2023 par lequel la préfète des Landes lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de revenir sur le territoire français pour une durée d'un an, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 8 mars 2023 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques l'a assigné à résidence pour une durée de 45 jours en vue de son futur éloignement.
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler, d'une part, l'arrêté du 8 mars 2023 par lequel la préfète des Landes lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de revenir sur le territoire français pour une durée d'un an, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 8 mars 2023 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques l'a assigné à résidence pour une durée de 45 jours en vue de son futur éloignement.

Par un jugement n°2300639 du 15 mars 2023, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Pau a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 23 mars 2023 sous le n°2300827 et un mémoire enregistré le 24 juin 2023, M. C..., représenté par Me Sanchez Rodriguez, demande à la cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler ce jugement de la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Pau du 15 mars 2023 ;

3°) d'annuler, d'une part, l'arrêté du 8 mars 2023 par lequel la préfète des Landes lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de revenir sur le territoire pour une durée d'un an, d'autre part, l'arrêté du 8 mars 2023 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques l'a assigné à résidence pour une durée de 45 jours en vue de son futur éloignement ;

4°) d'enjoindre à la préfète des Landes de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans le même délai ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à Me Sanchez Rodriguez en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement a été irrégulièrement rendu dès lors qu'il n'a pas visé sa note en délibéré ;

- l'arrêté lui faisant obligation de quitter le territoire a méconnu les stipulations du 4) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ainsi que celles des articles 3.1 et 9 de la convention internationale sur les droits de l'enfant ;

- l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire prive de base légale les décisions lui refusant un délai de départ volontaire et l'assignant à résidence ;

- la décision fixant le pays de renvoi est insuffisamment motivée.

Par un mémoire enregistré le 22 mai 2023, la préfète des Landes conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 26 juin 2023, le préfet des Pyrénées-Atlantiques conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

II. Par une requête enregistrée le 23 mars 2023 sous le n°23BX00830, M. C..., représenté par Me Sanchez Rodriguez, demande à la cour :

1°) de prononcer à le sursis à exécution de ce jugement du tribunal administratif de Pau du 15 mars 2022.

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 800 euros à verser à Me Sanchez Rodriguez en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il entend s'en remettre aux moyens développés dans sa requête au fond.

Par un mémoire enregistré le 18 mai 2023, la préfète des Landes conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 26 juin 2023, le préfet des Pyrénées-Atlantiques conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions du 11 mai 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes 23BX00827 et 22BX00830 sont dirigées contre un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Par suite, il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un même arrêt.

2. Monsieur B... C..., né le 30 juillet 1993 à Tipaza (Algérie), de nationalité algérienne, relève appel du jugement du 15 mars 2023 par lequel la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Pau a rejeté ses demandes tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 8 mars 2023 par lequel la préfète des Landes lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de revenir sur le territoire pour une durée d'un an, d'autre part, de l'arrêté du 8 mars 2023 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques l'a assigné à résidence pour une durée de 45 jours en vue de son futur éloignement.

Sur l'aide juridictionnelle provisoire :

3. Par une décision 11 mai 2023 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux, M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Dans ces conditions, ses conclusions tendant à son admission provisoire à l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. En premier lieu, aux termes des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : (...) 4. Au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français mineur résident en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins. Lorsque la qualité d'ascendant direct d'un enfant français résulte d'une reconnaissance de l'enfant postérieure à la naissance, le certificat de résidence d'un an n'est délivré au ressortissant algérien que s'il subvient à ses besoins depuis sa naissance ou depuis au moins un an ".

5. Par ailleurs, les article 371-1 et 372 du code civil prévoient que l'autorité parentale appartient aux parents jusqu'à la majorité ou l'émancipation de l'enfant et qu'ils l'exercent en commun. Enfin, en application des articles 78 et suivants du code civil, cette autorité parentale ne peut être retirée même partiellement que par une décision explicite du tribunal judiciaire.

6. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que, le 25 octobre 2022, M. C... a reconnu de façon anticipé son fils, A... C..., né le 17 février 2023 de sa relation avec une ressortissante française. Cet enfant a été provisoirement placé auprès des services départementaux de l'aide sociale à l'enfance à compter du 22 février et ce placement a été prolongé par une ordonnance du juge des enfants du tribunal judiciaire de Bayonne du 7 mars 2023. Toutefois, cette décision ne retire pas, même partiellement, l'autorité parentale aux parents du jeune A.... Dans ces conditions, l'appelant est fondé à soutenir que c'est à tort que la première juge a considéré qu'il ne justifiait pas exercer même partiellement l'autorité parentale sur son enfant français.

7. En second lieu, il ressort des pièces du dossier, en particulier du procès-verbal de police du 8 mars 2023, que M. C... était inconnu des services de police avant son interpellation le 7 mars 2023 et qu'il a été interpellé à l'occasion d'une intervention de police pour des faits présumés de vol avec effraction. Toutefois, cette incrimination n'est corroborée par aucun élément matériel alors que M. C... a indiqué, sans être contredit, qu'il se trouvait sur les lieux afin de poser, à la demande d'un tiers, des serrures sur les portes d'appartements anciennement squattés et inoccupés. Il ressort également de ce procès-verbal qu'il était en possession d'un aérosol de défense d'une contenance de moins de 100 ml contenant du poivre dont la vente est autorisée mais dont le transport doit répondre à un intérêt légitime. En outre, le préfet n'établit ni même ne soutient que M. C... aurait fait l'objet de condamnations ou de poursuites judiciaires à raison de ces faits. Dans ces conditions, M. C... est fondé à soutenir que, contrairement à ce qu'a estimé le préfet, il n'est pas établi que sa présence en France constituerait une menace pour l'ordre public.

8. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement attaqué et les autres moyens de la requête, que M. C... est fondé à soutenir qu'il remplissait les conditions auxquelles les stipulations précitées du 4) de l'article 6 de la convention franco-algérienne subordonnent la délivrance de plein droit d'un certificat de résidence algérien au parent d'un enfant français et qu'il ne pouvait dès lors faire l'objet d'une mesure d'éloignement. Par suite, il est également fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la première juge a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés lui faisant obligation de quitter le territoire et l'assignant à résidence. Il y a lieu, par voie de conséquence, d'annuler ce jugement et ces arrêtés.

9. L'annulation de ces arrêtés implique seulement qu'en application des dispositions de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, il soit enjoint au préfet des Pyrénées-Atlantiques de réexaminer la situation de M. C... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat et au profit de Me Sanchez Rodriguez la somme demandée de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

11 Le présent arrêt, qui statue au fond sur la requête en annulation de M. C... dirigée contre le jugement du 15 mars 2023, rend sans objet ses conclusions aux fins de sursis à exécution de ce jugement.

.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n°23BX00830.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire présentée par M. C....

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Pau n°2300639 du 15 mars 2023 est annulé.

Article 4 : Les arrêtés de la préfète des Landes et du préfet des Pyrénées-Atlantiques du 8 mars 2023 sont annulés.

Article 5 : Il est enjoint au préfet des Pyrénées-Atlantiques de réexaminer la situation de M. C... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 6 : L'Etat versera à Me Sanchez Rodriguez une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer, à la préfète des Landes et au préfet des Pyrénées-Atlantiques.

Délibéré après l'audience du 11 juillet 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller,

Mme Agnès Bourjol, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 juillet 2023.

Le rapporteur,

Manuel D...

La présidente,

Marie-Pierre Beuve Dupuy

Le greffier,

Anthony Fernandez

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°23BX00827, 23BX00830 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX00827
Date de la décision : 18/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BEUVE-DUPUY
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS
Avocat(s) : SANCHEZ-RODRIGUEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-07-18;23bx00827 ?
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