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19/09/2023 | FRANCE | N°22BX01470

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 19 septembre 2023, 22BX01470


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le Grand Port Maritime de La Réunion a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler la délibération du 2 octobre 2018 par laquelle le conseil municipal du Port a approuvé la révision du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune, ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1900330 du 28 février 2022, le tribunal administratif de La Réunion a annulé la délibération du 2 octobre 2018 en tant qu'elle approuve la création d'un secteur " Upplaisanc

e et pêche " (Uppp) au sein de la zone Up et un article Up2 du règlement du PLU aut...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le Grand Port Maritime de La Réunion a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler la délibération du 2 octobre 2018 par laquelle le conseil municipal du Port a approuvé la révision du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune, ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1900330 du 28 février 2022, le tribunal administratif de La Réunion a annulé la délibération du 2 octobre 2018 en tant qu'elle approuve la création d'un secteur " Upplaisance et pêche " (Uppp) au sein de la zone Up et un article Up2 du règlement du PLU autorisant, dans le secteur Uppp, les constructions à vocation d'activités économiques et touristiques à condition qu'elles contribuent au fonctionnement et au développement du port de plaisance et de la pêche, et a rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés les 27 mai 2022, 27 mars et 19 mai 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la commune du Port, représentée par Me Nguyen, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 février 2022 du tribunal administratif de La Réunion ;

2°) de rejeter la demande du Grand Port Maritime de la Réunion ;

3°) de mettre à la charge du Grand Port Maritime de la Réunion la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Sur la régularité du jugement attaqué :

- le jugement est entaché d'insuffisance de motivation en ce qui concerne le motif d'annulation retenu ;

Sur le motif d'annulation partielle retenu par les premiers juges :

- le jugement est entaché d'une contradiction de motifs dès lors que les premiers juges ont estimé que la modification du PLU approuvée le 19 décembre 2019 a eu pour effet de régulariser le vice retenu sans toutefois la prendre en compte ;

- le tribunal a retenu à tort que la création du secteur Uppp serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation au motif que l'article Up 2 du règlement de la zone Up du PLU comportait des prescriptions incompatibles avec l'affectation au service public portuaire de certains terrains compris dans ledit secteur ; le tribunal ne peut justifier de l'illégalité retenue par la seule référence aux prescriptions figurant dans le règlement ;

- la création d'un secteur Uppp n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation, elle s'inscrit au contraire dans les orientations générales fixées par le projet d'aménagement et de développement durables (PADD) et est justifiée par le rapport de présentation ;

- il en est de même de l'article Up 2 qui ne comporte, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, aucune prescription incompatible avec l'affectation au service public portuaire de certains terrains compris dans ledit secteur ;

- par délibération du 17 décembre 2019, le conseil municipal de la commune du Port a approuvé la modification de son PLU qui réduit l'emprise du secteur Uppp et a confirmé la possibilité de procéder, en secteur Uppp, à de la réparation navale ;

Sur les autres moyens soulevés par le Grand Port Maritime de la Réunion à l'encontre de la délibération du 2 octobre 2018 :

- le bilan de la concertation, approuvé par délibération du 5 décembre 2017, n'est pas insincère ;

- le diagnostic territorial du rapport de présentation n'est pas insuffisant ;

- le rapport de présentation justifie suffisamment de la cohérence des orientations d'aménagement et de programmation (OAP) avec les orientations et objectifs du PADD ;

- le projet d'aménagement de la zone correspondant à l'OAP " Zone arrière portuaire " n'est pas incompatible avec le projet de zone arrière portuaire (ZAP), projet d'intérêt général (PIG) ;

- le classement en zone N et Uem du quartier du Port est n'est pas incompatible avec le schéma de cohérence territoriale (SCOT), qui fait écran vis-à-vis du schéma d'aménagement régional (SAR) ; ce classement n'est pas non plus entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; il préexistait en outre à la révision en litige.

Par des mémoires enregistrés les 28 février et 27 avril 2023, le Grand Port Maritime de la Réunion, représenté par Me Gilliocq et Me Arroudj, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) par la voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement du 28 février 2022 du tribunal administratif de La Réunion en tant qu'il a écarté le moyen d'illégalité tiré de l'incompatibilité du PLU avec le SCOT et le SAR en ce qui concerne le classement en zone N du quartier du Port est et à l'annulation partielle de la délibération du 2 octobre 2018 en tant qu'elle opère ce classement ;

3°) à ce qu'il soit mis à la charge de l'appelante la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le classement en zone N du port est est incompatible avec le SCOT et le SAR et entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 28 avril 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 19 mai 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code des transports ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de M. Gueguein, rapporteur public,

- les observations de Me Gault-Ozimek pour le Grand Port Maritime de la Réunion

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 28 mars 2013, le conseil municipal de la commune du Port a prescrit la révision de son plan local d'urbanisme. Par délibération du 2 octobre 2018, le conseil municipal a approuvé cette révision. La commune du Port relève appel du jugement du 28 février 2022 par lequel le tribunal administratif de La Réunion a annulé la délibération du 2 octobre 2018 en tant qu'elle approuve la création d'un secteur " Upplaisance et pêche " (Uppp) au sein de la zone Up et qu'elle autorise, dans ce secteur, les constructions à vocation d'activités économiques et touristiques à condition qu'elles contribuent au fonctionnement et au développement du port de plaisance et de la pêche, et a rejeté le surplus de la demande d'annulation présentée par le Grand Port Maritime de La Réunion (GPMDLR). Le GPMDLR, par la voie de l'appel incident, demande l'annulation du même jugement en tant qu'il a écarté le moyen d'illégalité tiré de l'incompatibilité du PLU avec le schéma de cohérence territoriale (SCOT) et le schéma d'aménagement régional (SAR) en ce qui concerne le classement en zone N du quartier du port est et l'annulation partielle de la délibération du 2 octobre 2018 en tant qu'elle opère ce classement.

Sur l'appel principal :

En ce qui concerne le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. Il ressort notamment des points 2, 3 et 4 du jugement attaqué que les premiers juges, ont expliqué, après avoir cité les dispositions législatives et les principes jurisprudentiels dont ils ont fait application, les raisons pour lesquelles ils ont considéré que la délibération contestée, qui crée un secteur Uppp au sein de la zone Up du PLU " destiné à garantir le développement du port de plaisance et de la pêche, en y autorisant les activités de services, l'hébergement hôtelier et touristiques, les cinémas, etc... " alors que le règlement interdit, dans son article Up2, les activités industrielles de maintenance et de réparation navale déjà exercées dans ce secteur par le GPMDLR, était entachée d'erreur manifeste d'appréciation sur ce point. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement ne comporte aucun motif de nature à motiver l'erreur manifeste d'appréciation retenue doit être écarté.

En ce qui concerne le motif d'annulation retenu par les premiers juges :

4. En premier lieu, comme indiqué au point précédent, il ressort du jugement attaqué que les premiers juges ont considéré que dès lors que le règlement de la zone Up du PLU en litige interdisait, en secteur Uppp, nouvellement créé, les activités industrielles de maintenance et de réparation navale déjà exercées par le GPMDLR dans ce secteur, la création d'un tel secteur " destiné à garantir le développement du port de plaisance et de la pêche, en y autorisant les activités de services, l'hébergement hôtelier et touristiques, les cinémas, etc... " était entaché d'erreur manifeste d'appréciation. Ils ont indiqué dans le point 4 du jugement attaqué, que la circonstance, dont se prévalait la commune, que le règlement de la zone Up du PLU avait été modifié par délibération du 17 décembre 2019 et qu'il n'interdisait désormais plus dans le secteur Uppp, sous réserve de satisfaire à certaines conditions, les activités précitées, n'empêchait pas de retenir que la création du secteur Uppp était, dans sa rédaction résultant de la délibération attaquée, entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Ce faisant, ils n'ont, contrairement à ce que soutient le GPMDLR, pas entaché leur jugement d'une contradiction de motifs mais examiné, à juste titre, la légalité de la délibération du 2 octobre 2018 à la date à laquelle elle a été prise.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. ". Aux termes de l'article L. 151-9 de ce code : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées. ". Aux termes de l'article L. 151-16 du même code : " Le règlement peut identifier et délimiter les quartiers, îlots et voies dans lesquels est préservée ou développée la diversité commerciale, notamment à travers les commerces de détail et de proximité, et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer cet objectif. Il peut également délimiter, dans les zones urbaines ou à urbaniser, des secteurs dans lesquels la préservation ou le développement d'infrastructures et d'équipements logistiques est nécessaire et définir, le cas échéant, la nature de ces équipements ainsi que les prescriptions permettant d'assurer cet objectif. ".

6. D'une part, il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme, qui ne sont pas liés par les modalités existantes d'utilisation du sol, de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

7. D'autre part, l'appartenance de terrains au domaine public ne constitue pas en soi un obstacle à ce qu'ils fassent l'objet de prévisions et de prescriptions édictées par un plan local d'urbanisme. Toutefois un tel plan ne peut sans erreur manifeste d'appréciation soumettre des terrains inclus dans le domaine public à des prescriptions incompatibles avec l'affectation qui leur est effectivement donnée pour l'exécution notamment du service public portuaire.

8. Il ressort des pièces du dossier que la commune du Port s'est notamment assignée, dans le cadre de la révision de son PLU, un objectif, qu'elle a repris dans les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durables (PADD), de diversification du port ouest aux fins de permettre son évolution vers la " constitution d'un front de mer urbain à dominante tourisme-loisirs ". Le rapport de présentation, qui justifie le choix opéré, détaille les caractéristiques de la zone Up, zone "industrialo-portuaire ", et indique qu'elle couvre environ 160 ha correspondant à la concession portuaire du GPMLR, qu'elle est scindée en deux parties, la première, d'une superficie de 140 ha couvrant le port est et environ la moitié du port ouest, dans laquelle sont confirmées et autorisées toutes les activités industrialo-portuaires et logistiques et la seconde, dénommée " Upplaisance ", d'une superficie de 19 ha couvrant l'autre moitié du port ouest accueillant notamment la base nautique des Mascareignes et le port de plaisance du port ouest, dans laquelle, " par contraste avec la zone Up, sont autorisées les activités de services, d'hébergement hôtelier et les équipements de loisirs en lien avec le développement du port de plaisance ". Le règlement du PLU définit la zone Up comme couvrant les zones portuaires de la commune du Port dans laquelle seules les construction industrielles, artisanales, entrepôts et bureaux liées à l'activité portuaire sont admises et le secteur Uppp " plaisance et pêche " comme un secteur destiné, au sein de cette zone Up, " à garantir le développement du port de plaisance et de la pêche, en y autorisant les activités de services, l'hébergement hôtelier et touristique, les cinémas, etc ... ". L'article Up 1 du règlement de la zone Up autorise les commerces et activités de services ainsi que les activités des secteurs secondaire ou tertiaire (industrie, entrepôt, bureau), les équipements d'intérêt collectif et services publics, ainsi que les habitations à vocation de logement dans le respect des conditions fixées à l'article Up 2 du même règlement qui autorise les activités portuaires, industrielles, artisanales, de bureaux, de stockage et logistique " à l'exception du secteur Uppp " plaisance et pêche ", dans lequel seuls sont autorisés le maintien ou la remise aux normes de ces activités dans les emprises bâties avec possibilité d'extension mesurée.

9. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que ce zonage, qui s'il concerne 19 ha des 160 ha de la concession portuaire du GPMLR, concerne en réalité environ la moitié du port ouest, s'applique au site du slipway, seule infrastructure de la Réunion permettant la mise à sec de navires de taille importante, et au site du magasin 90 et des bassins portuaires attenants dans lesquels s'exercent exclusivement des activités industrielles de maintenance et de réparation navale, activité que le GPMDLR entend développer et pérenniser, tel que cela ressort de son projet stratégique pour la période 2019-2023. Si ce document est postérieur à la délibération attaquée, il ressort des pièces du dossier que le GPMDLR n'a pas manqué de signaler à la commune, lors des avis qu'il a transmis au cours de la procédure d'élaboration du PLU en litige, ses intentions de maintien et développement de ses activités de rénovation et réparations navales effectuées sur ces sites et l'affectation effectivement donnée à ces derniers dans le cadre de l'exécution du service public portuaire. Il ressort d'ailleurs des pièces du dossier que le commissaire enquêteur a émis un avis favorable au projet litigieux sous réserve que le parti d'urbanisme dans les zones du périmètre portuaire privilégiant les activités culturelles et de loisirs soient revus conformément aux observations du GPMDLR. Dans ces conditions, le GPMDLR, est fondé à soutenir que la création du secteur Uppp " plaisance et pêche ", dont les prescriptions, dans leur rédaction issue de la délibération attaquée, sont incompatibles avec l'affectation des sites concernés par ce zonage au service public portuaire, et aux missions du GPM telles que définies par l'article L. 5312-2 du code des transports, est entachée d'erreur manifeste d'appréciation. Contrairement à ce que soutient la commune, l'article Up2 dans sa version issue de la modification n°1 du PLU approuvé par délibération du 17 décembre 2019, qui ajoute seulement, en ce qui concerne les travaux autorisés en secteur Uppp, aux activités économiques et touristiques, la construction navale, en assortissant cette possibilité d'une restriction tenant à la commodité du voisinage, difficile à respecter, ne sont pas de nature à régulariser le vice retenu.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la commune du Port n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de la Réunion a annulé la délibération du 2 octobre 2018 en tant qu'elle approuve la création d'un secteur " Upplaisance et pêche " (Uppp) au sein de la zone Up et un article Up2 du règlement du PLU autorisant, dans le secteur Uppp, les constructions à vocation d'activités économiques et touristiques à condition qu'elles contribuent au fonctionnement et au développement du port de plaisance et de la pêche.

Sur l'appel incident :

11. Par la voie de l'appel incident, le GPMDLR demande l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a écarté le moyen d'illégalité tiré de l'incompatibilité du PLU avec le schéma de cohérence territoriale (SCOT) et le schéma d'aménagement régional (SAR) en ce qui concerne le classement en zone N du quartier du port est et demande, en conséquence, l'annulation partielle de la délibération du 2 octobre 2018 en tant qu'elle opère ce classement.

12. Aux termes de l'article L. 131-4 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable au litige : " Les plans locaux d'urbanisme et les documents en tenant lieu ainsi que les cartes communales sont compatibles avec : 1° Les schémas de cohérence territoriale prévus à l'article L. 141-1 ;; (...) ". Aux termes de l'article L. 131-1 du même code : " Les schémas de cohérence territoriale sont compatibles avec : (...) 4° Les schémas d'aménagement régional de la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, Mayotte et La Réunion prévus à l'article L. 4433-7 du code général des collectivités territoriales ; (...) ". Aux termes de l'article L. 131-7 du même code : " En l'absence de schéma de cohérence territoriale, les plans locaux d'urbanisme, les documents en tenant lieu et les cartes communales sont compatibles, s'il y a lieu, avec les documents énumérés aux 1° à 10° de l'article L. 131-1 et prennent en compte les documents énumérés à l'article L. 131-2. (...) ".

13. Les plans locaux d'urbanisme sont soumis à une simple obligation de compatibilité avec ces orientations et objectifs. Si ces derniers peuvent être en partie exprimés sous forme quantitative, il appartient aux auteurs des plans locaux d'urbanisme, qui déterminent les partis d'aménagement à retenir en prenant en compte la situation existante et les perspectives d'avenir, d'assurer, ainsi qu'il a été dit, non leur conformité aux énonciations des schémas de cohérence territoriale, mais leur compatibilité avec les orientations générales et les objectifs qu'ils définissent. Pour apprécier la compatibilité d'un plan local d'urbanisme avec un schéma de cohérence territoriale, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle de l'ensemble du territoire couvert en prenant en compte l'ensemble des prescriptions du document supérieur, si le plan ne contrarie pas les objectifs qu'impose le schéma, compte tenu des orientations adoptées et de leur degré de précision, sans rechercher l'adéquation du plan à chaque disposition ou objectif particulier.

14. Le territoire de la commune du Port est couvert par le schéma de cohérence territoriale (SCOT) de l'ouest de la Réunion approuvé par le conseil communautaire le 21 décembre 2016. Il ressort du document d'orientation et d'objectifs de ce SCOT que l'aménagement de la zone arrière portuaire du port est a été identifiée, dans le cadre des orientations générales définies en matière de politiques publiques d'aménagement, et plus spécifiquement des grands projets d'équipements et de services, en orientation O12, dès lors qu'existait un projet d'intérêt général, validé par arrêté préfectoral en 2014, résultant " de la volonté de mobiliser tout le potentiel de la zone arrière portuaire pour améliorer la fonctionnalité du port et ses services mais aussi pour augmenter la capacité d'accueil des entreprises dans le périmètre de l'activité portuaire ". Il ressort en outre du rapport de présentation et du projet d'aménagement et de développement durables du même document qu'un des objectifs fixés réside dans le renforcement et la diversification de l'économie productive en passant notamment par la confirmation et le développement des activités portuaires. Toutefois, le classement en zone naturelle des parcelles situées à l'entrée du port est, que le GPMDLR conteste, n'est pas incompatible avec ces orientations dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que ce secteur n'est pas inclus dans le périmètre du PIG et que, comme le soutient à juste titre la commune, ce classement n'obère pas tout réaménagement de l'entrée du port est mais uniquement le projet spécifique porté par le GPMDLR. En outre, ce classement est justifié par le PADD et le rapport de présentation du PLU en litige dans lesquels il est spécifié qu'un espace " tampon " ou de " respiration " faisant obstacle à la réalisation d'aménagements directement sur la bordure littorale est souhaité. Cette volonté est traduite dans une OAP " Fil vert " de nature à préserver cette " trame verte " s'étendant tout le long du littoral depuis la pointe des Gallets. Mais encore, le GPMDLR n'est pas fondé à soutenir que ce classement serait incompatible avec l'affectation des parcelles pour l'exécution du service public portuaire alors que ces dernières sont déjà classées en zone N. Enfin, le GPMDLR ne peut utilement soulever l'incompatibilité du PLU avec le schéma d'aménagement régional (SAR) de La Réunion dès lors que ce document n'est, conformément aux dispositions précitées de l'article L. 131-7 du code de l'urbanisme, opposable au PLU qu'en l'absence de SCOT. Dans ces conditions, les moyens tirés de ce que le classement en zone naturelle de ces parcelles serait incompatible avec le SCOT et le SAR et serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

15. Il résulte de tout ce qui précède que le GPMDLR n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de La Réunion a écarté le moyen d'illégalité tiré de l'incompatibilité du PLU avec le SCOT et le SAR en ce qui concerne le classement en zone N du quartier du Port est. Par suite, ses conclusions à fin d'annulation de la délibération du 2 octobre 2018 en tant qu'elle opère ce classement, qui d'ailleurs sont irrecevables car soulevant un litige distinct, doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

16. Dans les circonstances de l'espèce il n'y a lieu de mettre à la charge d'aucune des parties une quelconque somme au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune du Port est rejetée.

Article 2 : L'appel incident du Grand Port Maritime de La Réunion et ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune du Port et au Grand Port Maritime de La Réunion.

Délibéré après l'audience du 29 août 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

M. Sébastien Ellie, premier conseiller,

Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 septembre 2023.

La rapporteure,

Héloïse A...

La présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Marion Azam-Marche

La République mande et ordonne au préfet de La Réunion en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N°22BX01470


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX01470
Date de la décision : 19/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Héloïse PRUCHE-MAURIN
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : SELARL SOLER-COUTEAUX / LLORENS

Origine de la décision
Date de l'import : 24/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-09-19;22bx01470 ?
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