La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/09/2023 | FRANCE | N°21BX03452

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 26 septembre 2023, 21BX03452


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes distinctes, Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler les décisions des 25 janvier et 25 février 2019 par lesquelles, respectivement, le directeur de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) et le président du centre intercommunal d'action sociale (CIAS) d'Aire-sur-l'Adour ont rejeté ses recours gracieux tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service des pathologies dont elle est atteinte et qui ont nécessité des ar

rêts de travail à compter du 30 septembre 2015.

Par un jugement n° 19007...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes distinctes, Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler les décisions des 25 janvier et 25 février 2019 par lesquelles, respectivement, le directeur de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) et le président du centre intercommunal d'action sociale (CIAS) d'Aire-sur-l'Adour ont rejeté ses recours gracieux tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service des pathologies dont elle est atteinte et qui ont nécessité des arrêts de travail à compter du 30 septembre 2015.

Par un jugement n° 1900764-1900767 du 15 juin 2021, le tribunal administratif de Pau a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 août 2021 et un mémoire enregistré le 30 août 2023, Mme A..., représentée par Me Diversay, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 15 juin 2021 ;

2°) d'annuler les décisions des 25 janvier et 25 février 2019 par lesquelles, respectivement, le directeur général de la CNRACL et le président du CIAS d'Aire-sur-l'Adour ont rejeté ses recours gracieux tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service des pathologies dont elle est atteinte et qui ont entraîné des arrêts de travail à compter du 30 septembre 2015 ;

3°) d'enjoindre au CIAS d'Aire-sur-l'Adour de procéder à la convocation d'une nouvelle commission de réforme aux fins de statuer sur l'imputabilité au service des pathologies dont elle est atteinte et de son aptitude médicale à exercer ses fonctions, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge conjointe du CIAS d'Aire-sur-l'Adour et de la CNRACL la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les pathologies dont elle est atteinte sont imputables au service ; elle ne souffrait d'aucune pathologie antérieure ;

- le tribunal s'est fondé à tort sur un avis du comité médical plutôt que sur l'avis de la commission de réforme ;

- la commission de réforme du 27 avril 2018 était irrégulièrement composée et ne s'est pas prononcée au vu d'un rapport du médecin de prévention en méconnaissance des articles 3 et 15 de l'arrêté du 4 août 2004 ainsi que des articles 18 et 26 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986.

Par un mémoire enregistré le 3 octobre 2022, la Caisse des dépôts et consignations conclut au rejet de la requête.

Elle soutient qu'en application du 7° de l'article R.811-1 du code de justice administrative, la cour n'est pas compétente pour statuer sur la légalité du décompte accompagnant son brevet de pension et que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par des mémoires enregistrés les 26 et 28 octobre 2022, le CIAS, représenté par Me Loubère, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme A... au titre des frais exposés pour l'instance.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

- l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction

publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ;

- le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ;

- le code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- et les conclusions de Mme Le Bris, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... a été engagée comme aide à domicile en contrat à durée déterminée par le centre intercommunal d'action sociale (CIAS) d'Aire-sur-l'Adour (Landes) du 10 août 2006 au 30 septembre 2007. Elle a ensuite été nommée agent social de seconde classe stagiaire à temps non complet à compter du 1er octobre 2007 puis titularisée un an plus tard. Le 1er avril 2015, elle a été affectée au sein de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Olivier Darblade à Aire-sur-l'Adour. Elle a été placée en congé de maladie ordinaire du 30 septembre 2015 au 29 septembre 2016 puis en disponibilité à compter du 30 septembre 2016. Par un arrêté du 27 septembre 2018, le président du CIAS l'a placée en retraite pour invalidité non imputable au service à compter du 1er juillet 2018. Par une décision du 25 février 2019, cette même autorité a rejeté le recours gracieux présenté par Mme A... concernant l'imputabilité au service de cette invalidité. Par ailleurs, par une décision du 25 janvier 2019, le directeur de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) a également rejeté le recours présenté par Mme A... à l'encontre du décompte accompagnant son brevet de pension en tant qu'il mentionnait que son invalidité n'était pas imputable au service. Mme A... relève appel du jugement du 15 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions des 25 janvier et 25 février 2019.

Sur la compétence de la cour :

2. Aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative : " Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif ou qui y a été régulièrement appelée, alors même qu'elle n'aurait produit aucune défense, peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance. Toutefois, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : (...) 7° Sur les litiges en matière de pensions de retraite des agents publics... "

3. Il résulte de ces dispositions que les conclusions de la requête dirigées contre la décision du 25 janvier 2019 par laquelle le directeur de la CNRACL a rejeté le recours présenté par Mme A... à l'encontre du décompte accompagnant son brevet de pension en tant qu'il mentionnait que son invalidité n'était pas imputable au service ne relèvent pas de la compétence d'appel de la cour mais d'un recours en cassation devant le Conseil d'Etat. Par suite, il y a lieu de renvoyer lesdites conclusions devant le Conseil d'Etat.

Sur l'avis de la commission de réforme du 27 avril 2018 :

4. En premier lieu, l'article 18 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des conseils médicaux, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires alors en vigueur prévoit que : " Le médecin chargé de la prévention attaché au service auquel appartient le fonctionnaire dont le cas est soumis au comité médical ou à la commission de réforme est informé de la réunion et de son objet. Il peut obtenir, s'il le demande, communication du dossier de l'intéressé. Il peut présenter des observations écrites ou assister à titre consultatif à la réunion ; il remet obligatoirement un rapport écrit dans les cas prévus aux articles 26, 32, 34 et 43 ci-dessous. " En application de l'article 15 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière : " Le secrétariat de la commission informe le médecin du service de médecine professionnelle et préventive, pour la fonction publique territoriale, le médecin du travail, pour la fonction publique hospitalière, compétent à l'égard du service auquel appartient le fonctionnaire dont le cas est soumis à la commission. Lorsque la commission statue sur le cas d'un sapeur-pompier professionnel, son secrétariat informe le médecin de sapeurs-pompiers désigné par le préfet sur proposition du directeur départemental des services d'incendie et de secours. Ces médecins peuvent obtenir, s'ils le demandent, communication du dossier de l'intéressé. Ils peuvent présenter des observations écrites ou assister à titre consultatif à la réunion de la commission. Ils remettent obligatoirement un rapport écrit dans les cas prévus au premier alinéa des articles 21 et 23 ci-dessous. "

5. Il ressort des pièces du dossier, en particulier de la lettre que le CIAS d'Aire-sur-l'Adour a adressé à Mme A... le 23 janvier 2018 ainsi que de l'avis émis par la commission de réforme du 27 avril 2018 que cette commission n'a pas été saisie d'une demande de Mme A... correspondant à l'un des cas prévus aux articles 26, 32, 34 et 43 du décret du 14 mars 1986 ou à l'un des cas prévus au premier alinéa des articles 21 et 23 de l'arrêté du 4 août 2004 mais d'une demande d'avis du CIAS concernant sa mise à la retraite d'office pour invalidité. Par suite, Mme A... ne peut pas utilement se prévaloir de ce que le médecin de prévention n'a pas remis un rapport à la commission de réforme avant qu'elle ne rende son avis, alors, au demeurant, que cette commission était en possession du rapport établi par le médecin de prévention le 26 avril 2017, lequel concluait déjà, à cette date, à son inaptitude définitive.

6. En deuxième lieu, il résulte des articles 3 et 16 de l'arrêté susvisé du 4 août 2004 que, dans les cas où il est manifeste, au vu des éléments dont dispose la commission de réforme, que la présence d'un médecin spécialiste de la pathologie invoquée par un agent est nécessaire pour éclairer l'examen de son cas, l'absence d'un tel spécialiste doit être regardée comme privant l'intéressé d'une garantie et comme entachant la procédure devant la commission d'une irrégularité justifiant l'annulation de la décision attaquée.

7. En l'occurrence, il ressort des pièces du dossier que la commission de réforme s'est prononcée au vu du rapport d'un médecin rhumatologue agréé, qui a conclu que les pathologies dont elle était atteinte présentaient un caractère purement dégénératif et étaient dès lors sans lien avec le service. En outre l'appelante ne produit aucun élément médical permettant de remettre en cause ce diagnostic ou de considérer que sa situation médicale présenterait une complexité particulière. Dans ces conditions, il n'apparait pas manifeste que la présence d'un médecin spécialiste des pathologies dont elle est atteinte était nécessaire pour éclairer l'examen de son cas. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des articles 3 et 16 de l'arrêté du 4 août 2004 doit être écarté.

8. En troisième et dernier lieu, si l'appelante fait valoir que le médecin agréé l'a examinée le 2 novembre 2017 à la demande du comité médical en vu d'apprécier son inaptitude définitive à toutes fonctions puis qu'il a remis son rapport à la commission de réforme le 31 janvier 2018 sans l'examiner à nouveau, elle n'établit ni même ne soutient que l'évolution de son état de santé ou que les examens médicaux qu'elle aurait subis postérieurement au 2 novembre 2017 seraient de nature à établir l'imputabilité au service de cette pathologie ni, par voie de conséquence, que le rapport du médecin agréé n'était plus d'actualité lors de la réunion de la commission de réforme du 27 avril 2018.

9. Il résulte de ce qui précède que l'appelante n'est pas fondée à soutenir que la décision litigieuse du 25 février 2019 a été prise au vu d'un avis irrégulier de la commission de réforme.

Sur l'imputabilité au service de l'invalidité de Mme A... :

10. Aux termes de l'article L. 31 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " La réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service, le taux d'invalidité qu'elles entraînent, l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions sont appréciés par une commission de réforme selon des modalités qui sont fixées par un décret en Conseil d'Etat. ".

11. Il ressort du certificat médical établi à sa demande par son médecin généraliste le 4 décembre 2018 que Mme A... souffre d'une gonarthrose fémoro-tibiale bilatérale ainsi que de rachialgies lombaires invalidantes. Ce certificat précise qu'au vu des examens pratiqués ces pathologies présentent un caractère " fortement dégénératif " et qu'elle souffrait déjà de ces pathologies antérieurement à son entrée dans le service en 2006, même si elles se sont depuis " majorées ". En outre, il ressort également des rapports établis par un médecin agréé les 2 novembre 2017 et 31 janvier 2018 que ces pathologies sont purement dégénératives et associées à une obésité morbide. Au vu de ces éléments, en se bornant à faire valoir que son état de santé s'est régulièrement aggravé depuis son entrée en service et à se prévaloir de l'attestation établie par son nouveau médecin généraliste le 21 mai 2019, lequel indique seulement, sans remettre en cause le diagnostic établi, qu'eu égard aux seuls examens paracliniques qu'il a pratiqué le même jour et à l'activité professionnelle de l'intéressée, il lui paraît " très probable " que les lésions douloureuses dont elle souffre soient imputables au service, l'appelante n'est fondée à soutenir ni qu'elle ne présentait aucun état antérieur ni que les pathologies dont elle souffre n'auraient pas évolué pour leur propre compte mais auraient au contraire été causées par les gestes répétitifs liés à son travail d'aide à la personne exécutés depuis 2006. Enfin, si elle entend également se prévaloir, dans ses dernières écritures, du tableau n° 79 des maladies professionnelles figurant à l'annexe II à l'article R. 461-3l du code de la sécurité sociale, qui retient l'imputabilité aux " travaux comportant des efforts ou des ports de charges exécutés habituellement en position agenouillée ou accroupie " des " lésions chroniques à caractère dégénératif du ménisque isolées ou associées à des lésions du cartilage articulaire ", il ne ressort aucunement des pièces du dossier que l'appelante souffrirait de cette dernière pathologie dont elle n'a jamais fait état ni, a fortiori, sollicité qu'elle soit reconnue imputable au service.

12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont considéré que les pathologies invalidantes dont elle souffre n'étaient pas imputables au service et ont, par suite, rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 25 février 2019 par laquelle le président du CIAS d'Aire-sur-l'Adour a rejeté son recours gracieux tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de ces mêmes pathologies. Par suite, ces conclusions ainsi les conclusions de la requête à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à l'encontre du CIAS doivent être rejetées.

13. Enfin, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions du CIAS d'Aire-sur-l'Adour tendant à l'application des mêmes dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Les conclusions de Mme A... dirigées contre la décision du directeur de la CNRACL du 25 janvier 2019 sont renvoyées devant le Conseil d'Etat statuant au contentieux.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... est rejeté.

Article 3 : Les conclusions du CIAS d'Aire-sur-l'Adour tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A..., au centre intercommunal d'action sociale d'Aire-sur-l'Adour et à la caisse des dépôts et consignations.

Délibéré après l'audience du 5 septembre 2023 à laquelle siégeaient :

M. Laurent Pouget, président,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 26 septembre 2023.

Le rapporteur,

Manuel B...

Le président,

Laurent PougetLa greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°21BX03452 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX03452
Date de la décision : 26/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. POUGET
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS
Avocat(s) : CABINET LOUBERE OLIVIER ET SAINT LAURENT CHRISTOPHE

Origine de la décision
Date de l'import : 01/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-09-26;21bx03452 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award