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07/11/2023 | FRANCE | N°23BX01377

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 07 novembre 2023, 23BX01377


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2022 par lequel la préfète des Landes lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n°2202869 du 15 février 2023, la présidente du tribunal administratif de Pau a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 mai 2023, M. A..., représenté par Me Jouteau, demande à la

cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 15 février 2023 ;

2°) d'an...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2022 par lequel la préfète des Landes lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n°2202869 du 15 février 2023, la présidente du tribunal administratif de Pau a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 mai 2023, M. A..., représenté par Me Jouteau, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 15 février 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2022 par lequel la préfète des Landes lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre au préfet des Landes de lui délivrer un titre de séjour ou, subsidiairement, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me Jouteau en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté litigieux a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de renvoi a méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 avril 2023.

Par un mémoire enregistré le 21 septembre 2023, la préfète des Landes conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés ;

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., de nationalité turque, né le 5 juillet 1992, est entré irrégulièrement en France, selon ses déclarations, le 18 février 2017. Le 4 mai 2017, il a fait l'objet d'une première mesure d'éloignement assortie d'une interdiction de retour d'une durée de deux ans ayant fait l'objet d'un recours rejeté par un jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 9 mai 2017 devenu définitif. Il est néanmoins demeuré en France et, le 13 juin 2017, il a sollicité l'asile. Sa demande a été clôturée pour incomplétude le 14 juillet 2020. Sa demande tendant au réexamen de cette demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides le 29 octobre 2021 puis par la Cour nationale du droit d'asile le 28 juillet 2022. Par un arrêté du 8 décembre 2022 pris sur le fondement des dispositions de l'article L. 542-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la préfète des Landes lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A... relève appel du jugement du 15 février 2023 par lequel la présidente du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

3. M. A... fait valoir qu'il réside en France depuis avril 2017, qu'il vit en concubinage avec une compatriote qui était enceinte à la date de l'arrêté en litige et qu'il est titulaire d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel en qualité de carreleur. Il ajoute qu'il est hébergé chez son frère, titulaire d'une carte de résident. Toutefois le requérant ne justifie pas de l'existence d'une vie commune avec sa compagne à la date de l'arrêté en litige et, s'il fait valoir que celle-ci a désormais demandé l'asile, il ne produit aucun élément permettant de considérer qu'elle serait exposée à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour en Turquie. En outre, il ressort des pièces du dossier qu'il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire après avoir fait l'objet d'une mesure d'éloignement assortie d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans, qu'il n'a ensuite été admis à séjourner en France que dans le cadre de l'examen de sa demande d'asile et n'a jamais sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur un autre fondement. Ainsi, s'il est employé depuis le 1er octobre 2021 par son frère, il ne justifie pas détenir une autorisation de travail. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté du 22 décembre 2022 aurait porté une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale tel qu'il est protégé par les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ou qu'il serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

4. En second lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme: " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines et traitements inhumains et dégradants. ".

5. M. A... soutient qu'il milite au sein du parti d'opposition pro-kurde HDP depuis sa jeunesse, qu'il a été arrêté à trois reprises et frappé par la police turque puis qu'il a fui pour ne pas effectuer son service militaire en Turquie. Toutefois, il ne produit, à l'appui de ces allégations, que des documents à caractère général relatifs à la situation de la population kurde, aux exemptions au service militaire ainsi qu'aux peines encourues par les déserteurs, un mandat d'arrêt délivré à son encontre le 23 novembre 2021 pour des faits datant de l'année 2016 et une copie d'écran non nominative d'une application téléphonique relative au service militaire portant la mention en turc " vous êtes recherché en tant que déserteur réfractaire depuis le 1er novembre 2011. Vous devez effectuer les formalités d'appel ", qui ne permettent aucunement de considérer que l'appelant, dont la demande d'asile a, par ailleurs, été rejetée, serait actuellement et personnellement exposé à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays d'origine.

6. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la présidente du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 décembre 2022. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète des Landes.

Délibéré après l'audience du 17 octobre 2023 à laquelle siégeaient :

M. Luc Derepas, président de la cour,

M. Laurent Pouget, président de chambre,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 novembre 2023.

.

Le rapporteur,

Manuel C...

Le président,

Luc DerepasLa greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°23BX01377 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX01377
Date de la décision : 07/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. DEREPAS
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS
Avocat(s) : JOUTEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-11-07;23bx01377 ?
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