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22/07/2003 | FRANCE | N°99DA01745

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3eme chambre, 22 juillet 2003, 99DA01745


Vu l'ordonnance du 30 août 1999 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nancy a, en application du décret n° 99-435 du 28 mai 1999 portant création d'une cour administrative d'appel à Douai et modifiant les articles R. 5, R. 7 et R. 8 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, alors applicables, transmis à la cour administrative d'appel de Douai la requête présentée pour M. Pierre X, demeurant ..., par Me Mourette, avocat de la société d'avocats Fidal ;

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés

les 30 juillet et 20 août 1999 au greffe de la cour administrative d...

Vu l'ordonnance du 30 août 1999 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nancy a, en application du décret n° 99-435 du 28 mai 1999 portant création d'une cour administrative d'appel à Douai et modifiant les articles R. 5, R. 7 et R. 8 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, alors applicables, transmis à la cour administrative d'appel de Douai la requête présentée pour M. Pierre X, demeurant ..., par Me Mourette, avocat de la société d'avocats Fidal ;

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 30 juillet et 20 août 1999 au greffe de la cour administrative d'appel de Nancy, par lesquels M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 963596 du 17 juin 1999 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande en décharge du complément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre de l'année 1992 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

Code C+ Classement CNIJ : 19-04-02-03-02

Il soutient que le jugement n'a ni répondu aux conclusions de sa demande, ni motivé sa décision ; que le fondement du redressement par application de l'article 39 duodecies, alinéa 6 du code général des impôts est contestable ; qu'en effet, la méthode que prévoit cette disposition est indispensable lorsque les titres cédés ne sont pas individualisés et institue une présomption permettant de déterminer les titres cédés et par voie de conséquence leur prix d'acquisition ; qu'en l'espèce, les titres cédés sont parfaitement déterminés de même que le prix d'acquisition des titres cédés ; que le prix d'acquisition étant identique au prix de cession, aucune plus-value n'a été réalisée lors de la cession ; qu'il pouvait bénéficier du mode de calcul en fonction du prix de revient pondéré prévu par l'instruction du 15 mars 1975, 4B-5-75, doctrine administrative 4-B-3121 n° 24 à 26, 15 juin 1991 qui s'applique parfaitement aux cessions de titres de société civile professionnelle ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 janvier 2000, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre conclut au rejet de la requête ; il soutient que si l'acte de cession mentionne que les parts cédées appartenaient à M. X par suite de l'acquisition de Y aux termes d'un acte du 5 octobre 1989, cette déclaration émanant de l'une des parties à l'acte, effectuée expressément pour la perception des droits d'enregistrement ne peut avoir pour conséquence de fixer le prix à retenir pour le calcul des plus-values professionnelles taxables à l'impôt sur le revenu ; que dès lors que les parts de la société civile professionnelle n'étaient pas matérialisées par des titres numérotés, il n'est pas possible d'individualiser les parts qui ont fait l'objet de la cession du 25 juin 1992 ; que les règles prévues aux articles 93 quater et 39 duodecies du code général des impôts sont donc applicables sans restriction ; que les dispositions invoquées de la doctrine administrative, dérogatoires au droit commun, ne concernent que les entreprises relevant des bénéfices industriels ou commerciaux ou de l'impôt sur les sociétés ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 6 mars 2000, présenté pour M. X qui, par les mêmes moyens, maintient les conclusions de la requête ; il demande, à titre subsidiaire, que la Cour prononce la décharge partielle de l'imposition contestée à concurrence de 51 021 francs ; il soutient que l'origine des parts de la société civile professionnelle est intégralement exposée, identifiée et retracée dans chacun des actes authentiques intervenus depuis la constitution de la société ; qu'il ressort de la documentation Francis Lefebvre (BIC VII 20250) que les parts de sociétés de personnes ne pouvaient pas être considérées comme des éléments du portefeuille et n'étaient donc pas concernées par la réglementation particulière aux valeurs composant le portefeuille ; que la règle prévue par l'article 39 duodecies alinéa 6 n'est pas applicable en l'espèce ; que si le raisonnement de l'administration s'applique, la doctrine administrative, instruction du 12 mai 1995, 4B-3-95, et documentation de base série 4 FE division B, admet qu'il soit dérogé à la méthode de l'article 39 duodecies alinéa 6, en particulier en ce qui concerne les titres de participation ; que la doctrine invoquée est opposable car elle commente la réglementation du portefeuille-titres ; que les parts de société civile professionnelle d'un office notarial ne sont pas, par nature, des titres susceptibles de mobilité ;

que, s'il s'agit de titres de participation, la doctrine, documentation de base série FE, division B, 31 qui concerne l'ensemble des plus-values professionnelles des entreprises relevant des articles 39 duodecies à 39 quindecies du code général des impôts, autorise le calcul des plus-values professionnelles de cessions de titres en fonction du prix de revient moyen pondéré en matière de titres de placement et a fortiori en matière de titres de participation ; que l'application de cette méthode est demandée à titre subsidiaire ;

Vu le nouveau mémoire en défense, enregistré le 23 juin 2000, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui, par les mêmes moyens, persiste dans ses précédentes conclusions ; il fait valoir en outre qu'à supposer que la présomption posée par l'alinéa 6 de l'article 39 duodecies du code général des impôts ne soit pas irréfragable, le requérant ne démontre pas que la cession aurait porté sur les derniers titres acquis, dégageant ainsi un gain nul ; que l'argumentation développée à titre subsidiaire repose sur la doctrine qui traite de la fiscalité des entreprises inapplicable en l'espèce ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 30 janvier 2003, présenté pour M. X qui reprend les conclusions de la requête, par les mêmes moyens ; il soutient que la preuve que la cession des titres peut porter par priorité non pas sur les titres acquis à la date la plus ancienne mais sur des titres acquis à une date ultérieure est apportée par les stipulations de l'acte de cession du 25 juin 1992 ; que l'administration ne justifie pas le fait que la documentation de base série 4 FE, division B, 31 ne puisse s'appliquer à la cession de parts de société civile professionnelle ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 mars 2003, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui, par les mêmes moyens, persiste dans ses conclusions ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 99-435 du 28 mai 1999 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juillet 2003 où siégeaient Mme de Segonzac, président de chambre, Mme Brin, président-assesseur et M. Rebière, premier conseiller :

- le rapport de Mme Brin, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Evrard, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il résulte des motifs du jugement attaqué que, pour statuer sur les conclusions en décharge de la demande de M. X, le tribunal a fait application des dispositions du 6 de l'article 39 duodecies du code général des impôts ; que ce faisant, il a implicitement mais nécessairement répondu au moyen invoqué relatif à l'application ou la non application desdites dispositions au litige qui lui était soumis ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué ne serait pas suffisamment motivé ;

Sur le bien fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

Considérant qu'aux termes de l'article 93 du code général des impôts : I.- Le bénéfice (des professions non commerciales) à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession...il tient compte des gains ou des pertes provenant soit de la réalisation des éléments d'actif affectés à l'exercice de la profession... ; qu'aux termes de l'article 151 nonies du même code : I.- Lorsqu'un contribuable exerce son activité professionnelle dans le cadre d'une société dont les bénéfices sont en application des articles 8 et 8 ter, soumis en son nom à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices agricoles réels, des bénéfices industriels ou commerciaux ou des bénéfices non commerciaux, ses droits ou parts dans la société sont considérés notamment pour l'application des articles 38, 72 et 93, comme des éléments d'actif affectés à l'exercice de la profession... ; qu'aux termes de l'article 93 quater du même code : I.- Les plus-values réalisées sur des immobilisations sont soumises au régime des articles 39 duodecies à 39 quindecies ; et qu'enfin aux termes de l'article 39 duodecies : - 1- Par dérogation aux dispositions de l'article 38, les plus-values provenant de la cession d'éléments de l'actif immobilisé sont soumises à des régimes distincts suivant qu'elles sont réalisées à court ou à long terme.- 2- Le régime des plus-values à court terme est applicable : a) aux plus-values provenant de la cession d'éléments acquis ou créés depuis moins de deux ans... - 3- Le régime des plus-values à long terme est applicable aux plus-values autres que celles définies au 2. - 4 - Le régime des moins-values à court terme s'applique : a) aux moins-values subies lors de la cession de biens non amortissables détenus depuis moins de deux ans... - 5- Le régime des moins-values à long terme s'applique aux moins-values autres que celles définies au 4. - 6- Pour l'application du présent article, les cessions de titres compris dans le portefeuille sont réputées porter par priorité sur les titres de même nature acquis ou souscrits à la date la plus ancienne... ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que celles de l'article 39 duodecies s'appliquent à une personne soumise à l'impôt à raison des bénéfices qu'elle tire de son activité professionnelle dans le cas où elle cède les parts qu'elle détient dans une société relevant de l'article 8 ter qu'elle a affectées à l'exercice de sa profession ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Pierre X, notaire, a acquis par acte du 19 juillet 1983, 260 parts sociales de la société civile professionnelle titulaire d'un office notarial pour un prix de 1 600 000 francs, soit un prix unitaire de 6 153,85 francs ; que par acte du 5 octobre 1989 M. X a racheté 260 autres parts sociales pour un prix de 2 150 000 francs soit un prix unitaire de 8 269,23 francs ; que par un acte du 15 février 1991, M. X a cédé à son frère Vincent X 26 parts sociales prises dans les 520 qu'il possédait, puis par l'acte du 25 juin 1992 il lui en a cédé 234 à prendre sur les 494 qu'il possède dans la société civile professionnelle pour un prix de 1 935 000 francs, soit un prix unitaire de 8 269,23 francs ; qu'ainsi le capital social de 520 parts de ladite société se trouve réparti pour moitié entre MM. Pierre et Vincent X, notaires ; qu'il ressort du dernier acte de cession en date du 25 juin 1992 que les parts sociales détenues par M. Pierre X ne sont représentées par aucun titre et ne sont pas numérotées ; que s'il est mentionné dans le même acte, à la rubrique déclarations pour l'enregistrement que : pour la perception des droits d'enregistrement, M. Pierre X rappelle que les parts sociales par lui cédées lui appartiennent par suite de l'acquisition qu'il en a faite... aux termes de l'acte du 5 octobre 1989 , ces seules stipulations ne sauraient faire obstacle à la présomption d'imputation instituée par les dispositions précitées du 6 de l'article 39 duodecies du code général des impôts pour la détermination de la plus-value professionnelle dégagée lors de l'opération de cession ; que, dans ces conditions, les 234 parts sociales cédées à M. Vincent X par l'acte du 25 juin 1992 n'étant pas individualisables, c'est à bon droit que l'administration a pu regarder que la cession partielle de parts à laquelle il a été procédé portait par priorité sur les parts acquises à la date la plus ancienne, soit le 19 juillet 1983 et déterminer la plus-value à long terme réalisée compte tenu du prix d'acquisition unitaire de 6 153,05 francs ;

Sur le bénéfice de l'interprétation de la loi fiscale donnée par l'administration :

Considérant que M. X soutient que la règle premier entré, premier sorti instituée par le 6 de l'article 39 duodecies précité du code général des impôts ne devrait pas lui être appliquée et demande, à titre subsidiaire, que le calcul des résultats de la cession en cause soit celui des résultats de la cession des titres de participation qui se fait en fonction du prix de revient moyen pondéré ; qu'il se prévaut à cette fin du point 39 de l'instruction du 12 mai 1995 (B0I 4 B-3-95, 8 juin 1995) ; que, toutefois, cette instruction concerne les plus ou moins-values réalisées par les entreprises passibles de l'impôt sur les sociétés ; que s'il invoque aussi la documentation de base 4 B 3121, points 24, 25 et 26, la doctrine qui y est contenue porte sur la fiscalité des entreprises relevant des bénéfices industriels et commerciaux ou de l'impôt sur les sociétés ; que, par suite, le requérant qui relève de l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux en sa qualité d'associé d'une société civile professionnelle, ne peut utilement se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80-A du livre des procédures fiscales de la doctrine qu'il invoque ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. Pierre X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Pierre X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie sera adressée au directeur du contrôle fiscal Est.

Délibéré à l'issue de l'audience publique du 2 juillet 2003 dans la même composition que celle visée ci-dessus.

Prononcé en audience publique le 22 juillet 2003.

Le rapporteur

Signé : D. Brin

Le président de chambre

Signé : M. de Segonzac

Le greffier

Signé : P. Lequien

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le Greffier

Philippe Lequien

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N°99DA01745


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3eme chambre
Numéro d'arrêt : 99DA01745
Date de la décision : 22/07/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme de Segonzac
Rapporteur ?: Mme Brin
Rapporteur public ?: M. Evrard
Avocat(s) : CABINET FIDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2003-07-22;99da01745 ?
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