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13/05/2004 | FRANCE | N°02DA00929

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation a 3, 13 mai 2004, 02DA00929


Vu la requête, enregistrée le 14 novembre 2002 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée par M. X... X, demeurant ... ;

M. X demande à la Cour d'annuler le chapitre 6922 du budget primitif pour 1999 de la région Picardie intitulé coopération décentralisée , en tant qu'il ouvre des crédits relatifs à la mise en oeuvre d'un accord passé entre la région Picardie et le département du Zou au Bénin ;

Il soutient que l'article 3, alinéa 2, de la Constitution fait obstacle à ce que la région, simple collectivité territoriale dépourvue des attr

ibuts de la souveraineté, contracte avec une collectivité territoriale étrangère...

Vu la requête, enregistrée le 14 novembre 2002 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée par M. X... X, demeurant ... ;

M. X demande à la Cour d'annuler le chapitre 6922 du budget primitif pour 1999 de la région Picardie intitulé coopération décentralisée , en tant qu'il ouvre des crédits relatifs à la mise en oeuvre d'un accord passé entre la région Picardie et le département du Zou au Bénin ;

Il soutient que l'article 3, alinéa 2, de la Constitution fait obstacle à ce que la région, simple collectivité territoriale dépourvue des attributs de la souveraineté, contracte avec une collectivité territoriale étrangère et dépense l'argent des contribuables régionaux...dans l'intérêt de celle-ci ; que les compétences du conseil régional sont définies par l'article

L. 4221-1 du code général des collectivités territoriales ; que la finalité de ce texte est le développement du territoire propre de la région et l'intérêt de sa seule population ; que les conventions autorisées par l'article L. 4221-1 ne peuvent être que des contrats synallagmatiques, toute exposition des frais des contribuables devant apporter en retour un avantage positif pour la partie contractante ; que les accords ne peuvent être conclus que dans la limite des compétences de la collectivité territoriale concernée ; que le 3ème alinéa de l'article L. 4221-1 n'autorise des actions complémentaires de celles de l'Etat qu'au profit de collectivités territoriales ou d'établissements publics situés dans la région ; que le département du Zou n'est pas situé dans la région ; qu'ainsi la délibération attaquée ne présente pas un intérêt régional ;

Code C+ Classement CNIJ : 135-04-02

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en réponse, enregistré le 7 février 2003, présenté par la région Picardie concluant au rejet de la requête ; elle soutient que l'article L. 1112-1 du code général des collectivités territoriales autorise la région à passer contrat avec des collectivités territoriales étrangères ; que la région a signé le 20 novembre 1995 un protocole avec le département du Zou au Bénin pour une durée de quatre ans, visant à mettre en oeuvre un programme de développement local ; que le chapitre 6922 du budget de la région relatif à la coopération décentralisée a pour objet de prévoir les financements nécessaires au respect de cet engagement ; que cette politique fait l'objet d'un cofinancement par l'Etat ; que la région n'a pas abandonné son objet légal ; que cette action s'inscrit dans le cadre de la compétence en matière de développement économique local que la région tient de l'article L. 1112-1 du code général des collectivités territoriales ; qu'en favorisant cette coopération, la région Picardie contribue à la formation du développement économique picard en valorisant le savoir-faire de nombreux partenaires locaux ; que la convention en cause n'a fait l'objet d'aucune observation au préfet dans le cadre du contrôle de légalité ; que la mise en oeuvre par la région d'une politique de coopération décentralisée, qui s'inscrit dans le cadre de l'article 72 de la Constitution, n'entrave pas la souveraineté de l'Etat en méconnaissance de l'article 3 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution ;

Vu la loi n° 92-125 du 6 février 1992 relative à l'administration territoriale de la République ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 avril 2004 où siégeaient

M. Merloz, président de chambre, Mme Merlin-Desmartis, président-assesseur et M. Quinette, premier conseiller :

- le rapport de Mme Merlin-Desmartis, président-assesseur,

- les observations de M. Y, directeur des affaires juridiques, pour le conseil régional de Picardie,

- et les conclusions de M. Yeznikian, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 4221-1 du code général des collectivités territoriales : Le conseil régional règle par ses délibérations les affaires de la région. / Il a compétence pour promouvoir le développement économique, social, sanitaire, culturel et scientifique de la région (...). / Il peut engager des actions complémentaires de celles de l'Etat,(...) dans les domaines et conditions fixés par les lois déterminant la répartition des compétences entre l'Etat, les communes, les départements et les régions ; que l'article

L. 1112-1 du même code devenu son article L. 1114-1 relevant du chapitre intitulé : Coopération décentralisée dispose que Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent conclure des conventions avec des collectivités territoriales étrangères et leurs groupements dans les limites de leurs compétences et dans le respect des engagements internationaux de la France ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la région Picardie a, le

20 novembre 1995, signé avec le département du Zou au Bénin un accord visant à mettre en oeuvre, sur une durée de quatre ans, un programme de développement local ; que, par cette convention, la région s'est engagée à assurer le financement du programme en cause dans la limite des crédits votés annuellement par ses instances délibérantes ; que ces crédits sont, dans le cadre du contrat de plan Etat-Région, complétés à parité chaque année par l'Etat, une convention signée le 14 novembre 1996 fixant les obligations financières des deux parties ; qu'est contesté, dans le présent litige, le chapitre 6922 du budget primitif de la région Picardie pour l'année 1999, intitulé : coopération décentralisée , qui fixe les crédits affectés à l'exécution de ce programme ;

Considérant que la région Picardie a pu, sur le fondement de l'article L. 1112-1 précité, conclure une convention avec une collectivité territoriale de l'Etat du Bénin afin de mettre en oeuvre, avec l'aide de la France, un programme de développement local ; qu'il ressort des pièces du dossier que ce projet doit donner l'occasion à un ensemble de partenaires locaux de la région Picardie - structures agricoles, chambres consulaires, associations, structures intercommunales, universités - de s'associer à cette démarche et de mobiliser à cette fin leur savoir-faire en matière de développement local et d'action décentralisée ; que, dans ces conditions, et alors même que ce projet n'aurait pas de répercussions concrètes immédiates sur la région Picardie, la délibération contestée revêt un intérêt régional ; qu'il s'ensuit que le conseil régional était compétent pour la prendre sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 4221-1 et L. 1112-1 du code général des collectivités territoriales ;

Considérant que, comme il a été dit, la délibération attaquée a été prise en application de l'article L. 1112-1 du code général des collectivités territoriales, issu de l'article 131 de la loi susvisée du 6 février 1992, par lequel le législateur a entendu permettre aux collectivités territoriales françaises d'apporter aux collectivités territoriales étrangères, après signature d'une convention soumise au contrôle de légalité, une aide, dans les limites de leurs compétences et dans le respect des engagements internationaux de la France ; qu'ainsi le moyen tiré d'une prétendue violation de l'alinéa 2 de l'article 3 de la Constitution en vertu duquel aucune section du peuple ne peut s'attribuer l'exercice de la souveraineté nationale est en tout état de cause inopérant ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande dirigée contre le chapitre 6922 du budget primitif de la région Picardie pour l'année 1999 ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X... X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. X... X, au conseil régional de Picardie et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

Délibéré à l'issue de l'audience publique du 15 avril 2004 dans la même composition que celle visée ci-dessus.

Prononcé en audience publique le 13 mai 2004.

Le rapporteur

Signé : M. Merlin-Desmartis

Le président de chambre

Signé : G. Y...

Le greffier

Signé : B. Z...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier

B. Z...

2

N°02DA00929


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 02DA00929
Date de la décision : 13/05/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Merloz
Rapporteur ?: Mme Marie Merlin-Desmartis
Rapporteur public ?: M. Yeznikian

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2004-05-13;02da00929 ?
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