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18/05/2004 | FRANCE | N°00DA00183

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation a 3, 18 mai 2004, 00DA00183


Vu la requête, enregistrée le 8 février 2000 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société anonyme X Transports, dont le siège social est situé Z.A. Les Portes du Nord, B.P. 69 à Libercourt (62820), représentée par Me Soinne, liquidateur, par Me Brigitte de Foucher, avocat, membre de la S.C.P. J.C. Mériaux-B. de Foucher ; la société X Transports demande à la Cour :

1') d'annuler le jugement n° 97-510 du 2 décembre 1999 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire à la

taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie dans les rôles de la...

Vu la requête, enregistrée le 8 février 2000 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société anonyme X Transports, dont le siège social est situé Z.A. Les Portes du Nord, B.P. 69 à Libercourt (62820), représentée par Me Soinne, liquidateur, par Me Brigitte de Foucher, avocat, membre de la S.C.P. J.C. Mériaux-B. de Foucher ; la société X Transports demande à la Cour :

1') d'annuler le jugement n° 97-510 du 2 décembre 1999 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire à la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie dans les rôles de la commune de Marcq-en-Baroeul au titre de l'année 1992, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

Elle soutient que le redressement conduit à ce que les biens en cause sont taxés une fois chez le locataire, une seconde chez le propriétaire ; qu'il a été fait une application extensive des termes de l'article 1467-1° a du code général des impôts en étendant la notion de disposition par rapport à une simple situation de dépendance économique ; que les véhicules sont loués pour plus de six mois moyennant un loyer à ses affrétés, qui doivent être considérés comme les utilisateurs de ce matériel pour leur propre exploitation et, par suite, les redevables de la taxe professionnelle ; que l'article précité n'opère aucune distinction quant au mode de détention du bien ; que l'administration n'a pas intégré dans la base de taxe professionnelle de la société les véhicules détenus par les prestataires ou acquis par voie de crédit-bail ; que la doctrine

Code C+ Classement CNIJ : 19-03-04-04

administrative 6 E 2211 n° 5 indique que la question de savoir si une immobilisation est à la disposition du contribuable ne soulève aucune difficulté lorsque cette immobilisation appartient au redevable, lui est concédée ou est utilisée par lui en vertu d'un crédit-bail mobilier ; que ce principe est transposable aux redevables affrétés qui ont valablement déclaré dans leurs bases les véhicules loués auprès de la société X ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 décembre 2000, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que la circonstance que les prestataires aient été initialement assujettis à la taxe professionnelle pour les matériels pris à bail auprès de la société X reste étrangère au présent débat ; que l'examen du contrat d'affrètement type passé entre ladite société et ses prestataires de transports a montré une situation d'étroite dépendance de ces derniers fondant l'administration à considérer que les véhicules loués en 1990 étaient demeurés à la disposition du donneur d'ordre, redevable par suite de la taxe professionnelle due pour l'année 1992 ; que la mise en exergue d'un lien de subordination procède de l'arrêt de la cour d'appel de Douai du 1er octobre 1996 ; que la citation faite par la requérante de la doctrine administrative n° 6 E 2211 est incomplète ; qu'au regard de l'article 1469-3°, deuxième alinéa du code général des impôts les prestataires n'avaient pas même la simple disposition des matériels loués auprès de la société ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 31 janvier 2001, présenté pour la société anonyme X Transports qui, par les mêmes moyens, reprend les conclusions de la requête ; elle demande en outre à la Cour le remboursement des frais exposés non compris dans les dépens s'élevant à 8 000 francs ; elle soutient, en outre, que le tribunal administratif de Lille, par un jugement définitif du 18 mai 2000, a retenu qu'en ce qui concerne le même contrat d'affrètement les affrétés agissaient de manière indépendante, sans lien de subordination vis à vis de la société ; qu'il n'est donc pas établi que ces prestataires de transport n'avaient pas la disposition des matériels loués auprès de la société X ; que ces prestataires n'utilisent pas les véhicules loués de manière partagée avec d'autres transporteurs ; que les pénalités doivent être abandonnées sur le double fondement des dispositions de l'article 1740 octies du code général des impôts et de l'absence de procédure contradictoire en matière de taxe professionnelle ;

Vu le nouveau mémoire en défense, enregistré le 9 juillet 2001, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui faisant état de la décision de dégrèvement des intérêts de retard pour un montant de 33 559 francs conclut au rejet du surplus des conclusions de la requête par les mêmes moyens que précédemment ; il soutient en outre que le jugement du tribunal administratif de Lille du 18 mai 2000 a statué en matière de taxe sur la valeur ajoutée ; que les dispositions législatives régissant l'assiette de la taxe professionnelle diffèrent de celles régissant les opérations passibles de la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'en l'espèce, les affrétés ne peuvent être considérés comme ayant la disposition des matériels loués ; qu'il résulte d'un ensemble de faits que les biens en litige étaient effectivement placés sous le contrôle de la société X ; que l'administration ne succombe pas à l'instance ;

Vu le nouveau mémoire en réplique, enregistré le 29 avril 2004, présenté pour la société X Transports, qui, par les mêmes moyens, reprend les conclusions de la requête ; elle demande que les frais exposés non compris dans les dépens soient remboursés pour la somme de 1 650 euros ; elle soutient, en outre, que la notion d'indépendance économique des sous traitants vis-à-vis de la société est identique en matière de taxe sur la valeur ajoutée et en matière de taxe professionnelle ; que le fait pour le sous-traitant de verser à la société un loyer pour la location des véhicules en fait l'utilisateur du matériel ; qu'il convient de se référer aux dispositions des articles 1467-1 et 1469-3 alinéa 2 du code général des impôts ; qu'il s'en déduit que les biens donnés en location pour plus de six mois sont imposés au nom du locataire ; que l'article 59 de la loi de finances rectificative pour 2003 confirme ce principe ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 mai 2004 où siégeaient M. Gipoulon, président de chambre, Mme Brin, président-assesseur et M. Soyez, premier conseiller :

- le rapport de Mme Brin, président-assesseur,

- les observations de Me Mériaux, avocat, pour la société X Transports,

- et les conclusions de M. Paganel, commissaire du gouvernement ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par décision en date du 26 avril 2001 postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux du Nord-Lille a prononcé le dégrèvement de l'intérêt de retard, soit 5 116,03 euros, assortissant la cotisation supplémentaire de taxe professionnelle à laquelle la société anonyme X Transports a été assujettie au titre de l'année 1992 ; que les conclusions de la requête de ladite société relatives à cette imposition sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur le bien-fondé de l'imposition restant en litige :

Considérant qu'aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : La taxe professionnelle a pour base : 1°... a) la valeur locative, telle qu'elle est définie aux articles 1469, 1518 A et 1518 B, des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle... ; qu'aux termes du 3°, deuxième alinéa, de l'article 1469 du même code relatif aux équipements et biens mobiliers dont la durée d'amortissement est inférieure à trente ans, ... lorsqu'ils appartiennent au redevable, lui sont concédés ou font l'objet d'un contrat de crédit-bail mobilier, la valeur locative est égale à 16% du prix de revient. Lorsque ces biens sont pris en location, la valeur locative est égale au montant du loyer au cours de l'exercice sans pouvoir différer de plus de 20% de celle résultant des règles fixées à l'alinéa précédent ; les biens donnés en location sont imposés au nom du propriétaire, lorsque la période de location est inférieure à six mois ; il en est de même si le locataire n'est pas passible de la taxe professionnelle ou n'a pas la disposition exclusive des biens loués ;

Considérant qu'à l'issue de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet la société X Transports, aujourd'hui en liquidation, qui exerçait l'activité de transport routier de marchandises, l'administration a estimé que les personnes auxquelles elle était liée par un contrat d'affrètement exclusif devaient être regardées comme des salariés de ladite société et les véhicules loués par cette dernière à ces personnes comme étant demeurés à sa disposition ; que le service a, par suite, réintégré dans la base d'imposition de la société X Transports établie au titre de l'année 1992 la valeur locative des véhicules qu'elle a loués en 1990 ;

Considérant, en premier lieu, que si l'administration s'appuie sur un arrêt de la cour d'appel de Douai du 1er octobre 1996, rendu en matière pénale, par lequel cette dernière a retenu que certains affrétés de la société X Transports se trouvaient placés dans un rapport de subordination à son égard, cette qualification juridique des faits par le juge pénal n'est pas, pour le juge de l'impôt, revêtue de l'autorité absolue de la chose jugée ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est pas contesté que les véhicules en cause étaient donnés en location aux affrétés de la société X Transports, qui en était propriétaire, moyennant le paiement d'un loyer et pour une durée de plus de six mois ; que, dès lors que selon les stipulations de l'article 1.3° du contrat les affrétés conservaient la maîtrise des opérations de transport, ces derniers doivent être regardés comme ayant eu la disposition exclusive des biens loués ; que, par suite, seules les dispositions précitées du deuxième alinéa du 3 de l'article 1469 du code général des impôts sont applicables en l'espèce ; qu'eu égard à ces circonstances les seuls éléments que fait valoir le ministre selon lesquels les biens étaient effectivement placés sous le contrôle de la société X Transports ne sauraient avoir d'incidence sur la désignation du redevable de la taxe professionnelle ; que, par suite, les affrétés de la société X Transports, seuls, sont les redevables de ladite taxe ; que c'est, dès lors, à tort que l'administration a rapporté la valeur locative des véhicules aux bases de la taxe professionnelle due par la société X Transports ; qu'il suit de là que cette dernière est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande en décharge du supplément de taxe professionnelle auquel elle demeure assujettie pour un montant de 124 320 francs au titre de l'année 1992 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative de condamner l'Etat à payer à la société X Transports la somme qu'elle demande et justifie à hauteur de 817,35 euros au titre des frais exposés par elle dans le cadre de l'instance d'appel et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : A concurrence de la somme de 5 116,03 euros, en ce qui concerne la cotisation supplémentaire de taxe professionnelle à laquelle la société anonyme X Transports a été assujettie au titre de l'année 1992, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la société X Transports.

Article 2 : Le jugement n° 97-510 en date du 2 décembre 1999 du tribunal administratif de Lille est annulé.

Article 3 : La société anonyme X Transports est déchargée de la cotisation supplémentaire de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1992.

Article 4 : L'Etat versera à la société anonyme X Transports une somme de 817,35 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme X Transports et au ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.

Délibéré à l'issue de l'audience publique du 4 mai 2004 dans la même composition que celle visée ci-dessus.

Prononcé en audience publique le 18 mai 2004.

Le rapporteur

Signé : D. Brin

Le président de chambre

Signé : J.F. Gipoulon

Le greffier

Signé : G. Vandenberghe

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le Greffier

Guillaume Vandenberghe

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N°00DA00183


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 00DA00183
Date de la décision : 18/05/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Gipoulon
Rapporteur ?: Mme Dominique (ac) Brin
Rapporteur public ?: M. Paganel
Avocat(s) : S.C.P. JC MERIAUX-B. DE FOUCHER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2004-05-18;00da00183 ?
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