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07/03/2007 | FRANCE | N°05DA00714

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3 (bis), 07 mars 2007, 05DA00714


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 14 juin 2005, régularisée le 16 juin 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Guillaume X, demeurant ..., par Me Lausin ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0402463 du 23 mars 2005 par lequel le Tribunal administratif a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du

19 février 2004 par lequel le préfet du Nord a prononcé à son encontre l'interdiction pendant six mois d'exercer des fonctions d'encadrement auprès des mineurs, d'autre part, à

lui verser la somme de 20 000 euros, majorée des intérêts au taux légal à compt...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 14 juin 2005, régularisée le 16 juin 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Guillaume X, demeurant ..., par Me Lausin ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0402463 du 23 mars 2005 par lequel le Tribunal administratif a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du

19 février 2004 par lequel le préfet du Nord a prononcé à son encontre l'interdiction pendant six mois d'exercer des fonctions d'encadrement auprès des mineurs, d'autre part, à lui verser la somme de 20 000 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter de la date de cet arrêté, en réparation du préjudice qu'il a subi ;

2°) d'annuler ledit arrêté, de condamner l'État à lui verser la somme de 20 000 euros au titre de dommages et intérêts, ainsi que les intérêts au taux légal à compter de la date de l'arrêté litigieux, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la décision litigieuse est insuffisamment motivée au sens des dispositions de l'article 3 de la loi n° 79-587 du 11 janvier 1979 ; qu'elle repose sur un procès-verbal d'enquête administrative entaché de faits matériellement inexacts ; que la commission de sauvegarde du conseil départemental de l'éducation populaire et de la jeunesse n'a pas été saisie de ce document ; que son avis n'est pas motivé ; que, sur la légalité interne, la décision attaquée repose sur des griefs matériellement inexacts ; que les faits allégués ne sont pas établis ; qu'à les supposer établis, leur caractère fautif n'est pas démontré ; que le comportement des autorités municipales de Steenwerck est exonératoire des manquements allégués ; qu'à les supposer établis, la sanction n'est pas proportionnée ; qu'étant dans l'impossibilité de travailler depuis la saisine de la direction régionale et départementale de la jeunesse, il a subi un préjudice évalué à 20 000 euros ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu l'ordonnance du 27 janvier 2006 fixant la clôture de l'instruction au 7 mars 2006 ;

Vu le mémoire en défense, télécopié le 6 mars 2006, confirmé par courrier enregistré le

8 mars 2006, présenté par le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative, qui conclut au rejet de cette requête ; à cette fin, il oppose une fin de non-recevoir tirée du défaut de motivation de cette requête ; en outre, il fait valoir que la décision attaquée est suffisamment motivée ; que la commission de sauvegarde a reçu communication du procès-verbal d'enquête ; que ce procès-verbal repose sur des faits matériellement exacts ; que les témoignages ont été recueillis conformément à la procédure administrative prévue à l'article 1er de l'arrêté du

3 mai 2002 ; que le caractère fautif des faits est établi ; que la sanction est proportionnée à la gravité ; qu'à supposer infondée la décision attaquée, le requérant ne démontre pas le caractère certain du préjudice, ni son lien avec la décision attaquée ; que le montant du préjudice n'est pas non plus justifié ;

Vu l'ordonnance du 23 mars 2006 portant réouverture de l'instruction ;

Vu la décision du 29 juin 2006 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai accordant l'aide juridictionnelle totale à M. X ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 28 août 2006, présenté pour M. X, qui reprend les conclusions de sa requête par les mêmes moyens ;

Vu le nouveau mémoire en défense, enregistré le 12 février 2007, présenté par le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 janvier 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu l'arrêté du 3 mai 2002 relatif à la commission sauvegarde conseil départemental de l'éducation populaire et de la jeunesse ;

Vu l'arrêté du 10 janvier 2003 relatif à la déclaration prévue à l'article 2 du décret

n° 2002-883 du 3 mai 2002 relatif à la protection des mineurs à l'occasion des vacances scolaires, des congés professionnels et des loisirs ;

Vu l'arrêté du 20 juin 2003 fixant les modalités d'encadrement et les conditions d'organisation et de pratique de certaines activités physiques dans les centres de vacances et les centres de loisirs sans hébergement ;

Vu le code de l'action sociale et des familles ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 février 2007 à laquelle siégeaient M. Jean-Claude Stortz, président de chambre, M. Alain Dupouy, président-assesseur et M. Jean-Eric Soyez, premier conseiller :

- le rapport de M. Jean-Eric Soyez, premier conseiller ;

- les observations de Me Lausin, pour M. X ;

- et les conclusions de M. Pierre Le Garzic, commissaire du gouvernement ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : « La juridiction est saisie par requête. La requête indique les noms et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours » ;

Considérant qu'au soutien de sa requête, M. X ne se borne pas à reprendre les moyens présentés à l'appui de sa demande de première instance ; que, dès lors, la fin de non-recevoir opposée par le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative, tirée du défaut de motivation de la requête au sens des dispositions précitées de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, doit être rejetée ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du préfet du Nord du

19 février 2004 :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : « Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. À cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police » ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : « La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision » ; et qu'aux termes de l'article

L. 227-10 du code de l'action sociale et des familles, alors en vigueur : « Après avis d'une commission comprenant des représentants de l'État et des mouvements de jeunesse et d'éducation populaire agréés, le représentant de l'État dans le département peut prononcer à l'encontre de toute personne dont le maintien en activité présenterait des risques pour la santé et la sécurité physique ou morale des mineurs (...) l'interdiction temporaire (...) d'exercer quelque fonction que ce soit auprès de ces mineurs ou d'exploiter des locaux les accueillant » ;

Considérant qu'en application des dispositions précitées du code de l'action sociale et des familles, le préfet du Nord a, par arrêté du 19 février 2004, prononcé à l'encontre de

M. X, pour une durée de six mois l'interdiction mentionnée ci-dessus ; que cet arrêté ne donne aucune précision ni sur les obligations auxquelles aurait manqué M. X dans l'exercice de ses fonctions de directeur du centre de loisirs de la commune de Steenwerck, au mois de juillet 2003, ni sur les manquements retenus contre lui ; qu'en se bornant à relever que l'enquête administrative « souligne que M. X a fait preuve de négligence », et que « le mémoire en défense présenté et l'audition de l'intéressé (...) par la commission de sauvegarde ont montré qu'(il) ne semblait pas avoir pris conscience de toutes les responsabilités liées à la fonction de direction des centres de vacances et de loisirs », la décision attaquée est intervenue en méconnaissance de l'exigence de motivation prévue par les dispositions susrappelées de la loi du 11 juillet 1979 ; qu'elle est donc irrégulière ;

Sur les conclusions indemnitaires :

Considérant qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est pas contesté, d'une part, que lorsqu'il dirigeait le centre de loisirs de Steenwerck se déroulant du 30 juin 2003 au

25 juillet 2003, M. X a recruté quatre animateurs sans les recevoir en entretien ni vérifier le bulletin n° 3 de leur casier judiciaire, en méconnaissance de l'article 3 de l'arrêté du 10 janvier 2003 susvisé ; d'autre part, qu'à l'occasion d'un déplacement en Allemagne, le requérant a laissé ces animateurs surveiller seuls la baignade des mineurs, méconnaissant ainsi les règles de sécurité de l'arrêté du 20 juin 2003 susvisé, qui requièrent la présence dans l'eau d'un animateur au moins pour huit mineurs de plus de six ans ; qu'enfin, il est constant qu'il n'était ni présent ni joignable la nuit lors du minicamp de Loobergue ; que, compte tenu de ces seuls faits dont la matérialité est établie, le préfet du Nord a pu légalement estimer que le maintien de M. X dans ses fonctions de directeur de centre de loisirs présentait des risques pour la sécurité physique des mineurs ; qu'ainsi, la mesure d'interdiction temporaire de six mois était justifiée ; que, dès lors, la demande d'indemnité de M. X n'est pas fondée et doit, en conséquence, être rejetée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté les conclusions de sa demande aux fins d'annulation de la décision attaquée et, à obtenir, dans cette mesure, l'annulation du jugement et de l'arrêté attaqués ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la somme que demande

M. X au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens, soit mise à la charge de l' Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'arrêté du préfet du Nord du 19 février 2004 est annulé.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

Article 3 : Le jugement n° 0402463 du Tribunal administratif de Lille du 23 mars 2005 est annulé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Guillaume X et au ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative.

Copie sera transmise au Préfet du Nord et à la commune de Steenwerck.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 05DA00714
Date de la décision : 07/03/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Stortz
Rapporteur ?: M. Jean-Eric Soyez
Rapporteur public ?: M. Le Garzic
Avocat(s) : SCP VANDAMME

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-03-07;05da00714 ?
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