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28/10/2008 | FRANCE | N°08DA00358

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 28 octobre 2008, 08DA00358


Vu la requête, enregistrée le 27 février 2008 par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et régularisée le 7 mars 2008 par la production de l'original, présentée pour

Mme Rabija X, demeurant ..., par Me Berthe ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0706209 du 6 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 août 2007 du préfet du Nord refusant le renouvellement d'un récépissé constatant le dépôt d'une demande de statut de réfugié et valant

autorisation provisoire de séjour, prononçant à son encontre une obligation de quitt...

Vu la requête, enregistrée le 27 février 2008 par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et régularisée le 7 mars 2008 par la production de l'original, présentée pour

Mme Rabija X, demeurant ..., par Me Berthe ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0706209 du 6 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 août 2007 du préfet du Nord refusant le renouvellement d'un récépissé constatant le dépôt d'une demande de statut de réfugié et valant autorisation provisoire de séjour, prononçant à son encontre une obligation de quitter le territoire français, et à ce qu'il soit enjoint audit préfet de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 155 euros par jour de retard ;

2°) d'annuler ledit arrêté du préfet du Nord ;

3°) d'enjoindre audit préfet de réexaminer sa situation et de lui renouveler son autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 155 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat à verser à son avocat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que celui-ci renonce à la part contributive de l'Etat relative à l'aide juridictionnelle ;

Elle soutient que le préfet a commis une erreur de droit dès lors qu'il n'a pas procédé de nouveau à un réexamen complet de sa situation et s'est borné a rejeter sa demande de titre de séjour au vu du rejet de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides alors qu'elle souhaitait demander un titre de séjour fondé sur son état de santé ; que l'arrêté est illégal dès lors que la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du

1er août 2007, qui sert de fondement à la décision du préfet, est elle-même illégale ; qu'en effet, le délai de huit jours exigé par l'article R. 723-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour déposer une demande de réexamen n'était expiré que parce que le directeur de l'office a refusé de statuer sur sa demande au motif qu'elle était incomplète ; que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a l'obligation de statuer sur une demande d'asile même si le dossier est incomplet ; que la décision de refus de séjour est contraire à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que

Mme X vit en France depuis mars 2006 avec son fils, qu'elle est veuve, ignore où se trouvent ses deux filles et a trouvé en France le soutien de membres de la communauté des gens du voyage ; que cette décision comporte pour sa situation personnelle des conséquences d'une extrême gravité car elle est soignée en France pour différentes pathologies et fera l'objet de discriminations en cas de retour dans son pays d'origine du fait de ses origines ethniques ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu la décision du 28 janvier 2008 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai accordant à Mme X le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 avril 2008, présenté par le préfet du Nord, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que le signataire de l'arrêté attaqué bénéficie d'une délégation de signature régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture du Nord et que la décision n'est donc pas entachée d'incompétence ; que le moyen selon lequel l'arrêté serait entaché d'une erreur de fait n'est pas fondé ; qu'il n'a pas commis d'erreur de droit en délivrant une autorisation provisoire de séjour sur le fondement de l'article R. 723-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que Mme X était déboutée du droit d'asile ; qu'il a, notamment lors de l'entretien avec Mme X, examiné la situation complète de la requérante au regard de son droit au séjour ; qu'il n'appartient pas à l'autorité préfectorale de connaître de la décision du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides qui dépend du ministre des affaires étrangères ; que la demande de réexamen n'a pas été adressée dans le délai requis à l'office ; que Mme X n'a pas demandé de titre de séjour sur le fondement de son état de santé ; qu'il n'était pas tenu de solliciter l'avis du médecin inspecteur de la santé publique ; que la décision de refus de séjour n'est pas contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que la requérante, qui a vécu pendant 51 ans au Monténégro, et qui n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales dans ce pays où vivent ses deux filles, ne vit en France que depuis mars 2006 ; que la décision litigieuse n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que la requérante n'a pas demandé à bénéficier du statut d'apatride ; que l'arrêté n'est pas contraire à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret

n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 octobre 2008 à laquelle siégeaient M. Antoine Mendras, président de chambre, Mme Marianne Terrasse, président-assesseur et

Mme Elisabeth Rolin, premier conseiller :

- le rapport de Mme Marianne Terrasse, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Patrick Minne, commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme X est entrée clandestinement en France au cours du mois de mars 2006 dans le but d'obtenir le statut de réfugié ; qu'après le rejet de sa demande le 7 juillet 2006 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le préfet du Nord a, par un premier arrêté du 30 janvier 2007, refusé de renouveler le récépissé de sa demande d'asile et a prononcé à son encontre une obligation de quitter le territoire français ; qu'après avoir annulé cet arrêté par son jugement du 29 mai 2007 au motif que le préfet n'établissait pas que la décision de refus de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides avait été régulièrement notifiée à la requérante, le Tribunal administratif de Lille a enjoint au préfet du Nord de réexaminer la situation de Mme X ; qu'après lui avoir délivré, le 3 juillet 2007, conformément à cette injonction, une autorisation provisoire de séjour en vue d'effectuer des démarches auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le préfet a, par un second arrêté du 14 août 2007, refusé son admission au séjour au motif que la nouvelle demande d'asile n'avait pas été déposée dans le délai de huit jours prescrit par l'article R. 723-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le Monténégro comme pays de destination ; que Mme X relève appel du jugement du 6 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce dernier arrêté ;

Considérant, en premier lieu, qu'eu égard au motif sur lequel s'est fondé le Tribunal administratif de Lille pour annuler, par son jugement du 29 mai 2007, le premier arrêté du préfet du Nord, en date du 30 janvier 2007, refusant à la requérante le titre de séjour qu'elle avait demandé en qualité de réfugiée, la seule mesure qu'impliquait nécessairement l'annulation de cette décision était de replacer l'intéressée dans sa situation antérieure, en lui délivrant une nouvelle autorisation provisoire de séjour et en réexaminant sa situation au regard de sa demande initiale qui était uniquement fondée sur sa qualité de réfugiée ; que le préfet n'était pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si elle pouvait prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui était loisible à titre gracieux, de régulariser sa situation, dans le cadre du pouvoir d'appréciation dont il dispose ; que si Mme X soutient qu'elle devait être admise au séjour en raison de son état de santé, elle n'établit pas avoir porté cet élément à la connaissance du préfet, ni avoir présenté de demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi, en édictant l'arrêté litigieux après le rejet par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le 1er août 2007, de sa demande de réexamen de la qualité de réfugiée, le préfet n'a entaché sa décision d'aucune erreur de droit, ni n'a commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision sur la situation personnelle de l'intéressée ;

Considérant, en second lieu, qu'à l'appui de ses conclusions en annulation de la décision de refus de séjour, Mme X invoque, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision en date du 1er août 2007 par laquelle l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande de réexamen de sa situation de demandeur d'asile ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 723-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « (...) Lorsque, à la suite d'une décision de rejet devenue définitive, la personne intéressée entend soumettre à l'office des éléments nouveaux, sa demande de réexamen doit être précédée d'une nouvelle demande d'admission au séjour et être présentée selon la procédure prévue à l'article R. 723-1. Le délai prévu au premier alinéa de cet article est alors limité à huit jours. Dans un délai de 96 heures suivant l'enregistrement de la demande, le directeur général de l'office décide, au vu des éléments produits, s'il y a lieu de procéder à un nouvel examen de la situation de l'intéressé. Le silence gardé par le directeur général au terme de ce délai vaut rejet de la demande » ; qu'aux termes de l'article R. 723-1 du même code : « A compter de la remise de l'autorisation provisoire de séjour prévue à l'article L. 742-1, l'étranger demandeur d'asile dispose d'un délai de vingt et un jours pour présenter sa demande d'asile complète à l'office (...) » ;

Considérant qu'il résulte des dispositions législatives précitées que l'étranger qui souhaite que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides réexamine sa situation de demandeur d'asile, doit transmettre une demande complète dans les huit jours suivant la remise de l'autorisation provisoire de séjour ; qu'en l'espèce, le dossier complet, accompagné de la photocopie de l'autorisation provisoire de séjour, n'est parvenu à l'office que le 30 juillet 2007 alors que

Mme X s'était vu remettre le 3 juillet 2007 une autorisation provisoire de séjour ; qu'ainsi, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 1er août 2007 était illégale, ni que le directeur de l'office avait l'obligation d'instruire sa demande alors que son dossier n'était pas complet ;

Considérant, enfin, qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation qui ne comportent aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée par Mme X devant le Tribunal administratif de Lille ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que, par suite, ses conclusions à fin d'injonction assorties d'astreinte et tendant à la condamnation de l'Etat à verser à son avocat une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Rabija X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie sera transmise au préfet du Nord.

N°08DA00358 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08DA00358
Date de la décision : 28/10/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Mendras
Rapporteur ?: Mme Marianne (AC) Terrasse
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : BERTHE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-10-28;08da00358 ?
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