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22/09/2009 | FRANCE | N°09DA00332

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 22 septembre 2009, 09DA00332


Vu la requête, enregistrée le 27 février 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Cheichna A, élisant domicile chez son avocat, Me Virginie Stienne-Duwez, 4 rue Roland à Lille (59000), par Me Stienne-Duwez ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0804861 du 4 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 30 mai 2008 du préfet du Nord refusant de lui délivrer un titre de séjour, prononçant à son encontre une obligation de quitter le territoire fra

nçais et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler ledit arrêté du...

Vu la requête, enregistrée le 27 février 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Cheichna A, élisant domicile chez son avocat, Me Virginie Stienne-Duwez, 4 rue Roland à Lille (59000), par Me Stienne-Duwez ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0804861 du 4 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 30 mai 2008 du préfet du Nord refusant de lui délivrer un titre de séjour, prononçant à son encontre une obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler ledit arrêté du préfet du Nord ;

3°) d'enjoindre audit préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa demande et ce, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de 15 jours suivant la notification de la décision à venir ;

Il soutient qu'à partir de 2005, il a été contraint de travailler et que l'échec dans ses études est la conséquence d'une situation financière et familiale difficile ; qu'il a dû assumer sa future paternité et exercer une activité professionnelle pour subvenir aux besoins de sa famille et préparer la naissance de son enfant ; que le refus de titre attaqué a des conséquences d'une gravité excessive sur sa situation personnelle dès lors qu'il est entré en France depuis près de 9 ans, à l'âge de 21 ans, qu'il y a construit un parcours professionnel, a bénéficié de plusieurs embauches, a été autorisé à travailler par la direction du travail et déclare ses revenus auprès de l'administration fiscale ; qu'il y a construit sa vie familiale et vit depuis 2002 avec Mlle B avec laquelle il a eu un enfant né le 3 juillet 2008 et est parfaitement bien intégré en France ; que la décision de refus de titre viole, en conséquence, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'illégalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour implique la nullité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; que cette décision est elle-même entachée d'erreur manifeste d'appréciation et viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français implique celle de la décision fixant le pays de destination ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu la décision du 2 février 2009 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai rejetant la demande d'aide juridictionnelle de M. A ;

Vu l'ordonnance du président de la Cour administrative en date du 19 mars 2009 annulant la décision du bureau d'aide juridictionnelle du 2 février 2009 et rejetant la demande d'aide juridictionnelle de M. A ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 20 avril 2009, présenté par le préfet du Nord, qui conclut au non-lieu à statuer ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 août 2009, présenté par le préfet du Nord ; il conclut que la requête est devenue sans objet ; il soutient que le requérant a été muni d'un récépissé de demande de carte de séjour temporaire valable jusqu'au 22 juin 2009 renouvelé jusqu'au 18 septembre 2009 et qu'une carte de séjour temporaire mention vie privée et familiale valable du 12 mars 2009 au 11 mars 2010 est en cours de fabrication ;

Vu le mémoire, enregistré le 31 août 2009, présenté par le préfet du Nord ; il conclut qu'il n'y a plus lieu de statuer ; il soutient que la carte de séjour a été établie et sera remise à M. A dès que ce dernier aura subi la visite médicale à laquelle il est soumis et qu'il aura réglé la taxe correspondante ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-malien sur la circulation et le séjour des personnes du 26 septembre 1994 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Michel Durand, président-assesseur, les conclusions de M. Patrick Minne, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que M. A, ressortissant malien, entré en France le 24 août 1999, s'est vu délivrer un titre de séjour en qualité d'étudiant renouvelé jusqu'au 2 décembre 2007 ; que, par arrêté en date du 30 mai 2008, le préfet du Nord a rejeté la dernière demande de renouvellement et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français avec fixation du pays de destination ; que M. A relève appel du jugement en date du 4 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation dudit arrêté ;

Sur le non-lieu à statuer :

Considérant que, postérieurement à l'introduction de la requête, le préfet du Nord a délivré à M. A un récépissé de demande de carte de séjour valable jusqu'au 22 juin 2009 ; qu'il suit de là que la décision portant obligation de quitter le territoire français et celle fixant le pays de renvoi prises par ledit préfet dans l'arrêté litigieux doivent être regardées comme retirées ; que, dans ces conditions, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de M. A tendant à l'annulation desdites décisions ; qu'en revanche, la délivrance du récépissé précité n'a pas, à elle seule, eu pour effet de retirer le refus de délivrance de titre de séjour en qualité d'étudiant opposé à l'intéressé ; que les conclusions à fin de non-lieu à statuer relatives au refus de délivrance de titre de séjour, présentées par le préfet, doivent donc être rejetées ;

Sur la recevabilité de la requête de première instance :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 775-2 du code de justice administrative : Le délai de recours est d'un mois à compter de la notification de la décision attaquée. Il n'est pas prorogé par l'exercice d'un recours administratif préalable ; qu'aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'étranger qui fait l'objet (...) d'un refus de délivrance ou de renouvellement de titre de séjour (...) assorti d'une obligation de quitter le territoire français mentionnant le pays de destination peut, dans le délai d'un mois suivant la notification, demander l'annulation de ces décisions au tribunal administratif. Il peut demander le bénéfice de l'aide juridictionnelle au plus tard lors de l'introduction de sa requête en annulation ; qu'aux termes de l'article 39 du décret du 19 décembre 1991 : Lorsqu'une demande d'aide juridictionnelle en vue de se pourvoir en matière civile devant la Cour de cassation est adressée au bureau d'aide juridictionnelle établi près cette juridiction avant l'expiration du délai imparti pour le dépôt du pourvoi ou des mémoires, ce délai est interrompu. Un nouveau délai court à compter du jour de la réception par l'intéressé de la notification de la décision du bureau d'aide juridictionnelle (...). Les délais de recours sont interrompus dans les mêmes conditions lorsque l'aide juridictionnelle est sollicitée à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat ou une juridiction administrative statuant à charge de recours devant le Conseil d'Etat ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué en date du 30 mai 2008 a été notifié à M. A, avec indication des voies et délais de recours, le 4 juin 2008 ; que le délai de recours contentieux expirait le lundi 7 juillet 2008 ; que, toutefois, par demande en date du 7 juillet 2008, M. A a saisi le bureau d'aide juridictionnelle d'une demande visant à bénéficier de l'aide juridictionnelle ; qu'en application des dispositions précitées de l'article 39 du décret du 19 décembre 1991 portant application de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, cette demande a eu pour effet d'interrompre le délai d'un mois imparti pour déposer sa requête contre l'arrêté attaqué ; que la décision du bureau d'aide juridictionnelle, produite pour la première fois en appel, est datée du 11 septembre 2008 ; qu'un nouveau délai de recours d'un mois a commencé à courir à compter de la date de la notification de la décision du bureau d'aide juridictionnelle ; que le délai de recours contentieux n'était donc pas expiré le 21 juillet 2008, date d'enregistrement au greffe du Tribunal de la demande de M. A, qui, par suite, n'était pas tardive ; que le jugement attaqué par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté comme irrecevable la demande de M. A tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 mai 2008 est, par suite, entaché d'irrégularité et doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de M. A ;

Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour :

Considérant que M. A ne peut utilement invoquer les dispositions du décret du 30 juin 1946 réglementant les conditions d'entrée et de séjour en France des étrangers qui a été explicitement abrogé par le décret du 14 novembre 2006 relatif à la partie réglementaire du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'eu égard à son argumentation, M. A doit toutefois être regardé comme invoquant les dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant que l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : I - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention étudiant (...) ; que ces dispositions permettent à l'administration d'apprécier, sous le contrôle du juge, la réalité et le sérieux des études poursuivies par l'étranger qui demande la délivrance ou le renouvellement d'un titre portant la mention étudiant ;

Considérant que M. A est arrivé en France en 1999 pour y poursuivre des études ; qu'il a obtenu un diplôme d'études universitaires générales mention économie et gestion au titre de l'année universitaire 2001-2002 et une licence d'économétrie au titre de l'année universitaire 2003-2004 ; que, depuis la rentrée universitaire 2004-2005, il est inscrit en première année de Master mention économie appliquée à l'Université des sciences et technologie de Lille et en première année de Master EGA finance intermédiée à l'Université d'Artois à Arras ; qu'il a été ajourné à toutes les sessions d'examen et ne justifie d'aucune progression depuis 2004 ; que la circonstance qu'il doive exercer une activité professionnelle pour financer ses études n'est pas en elle-même de nature à justifier l'absence de progression dans ses études ; qu'il ne saurait expliquer ses échecs successifs par la nécessité d'assumer sa future paternité, la naissance de son enfant en juillet 2008 ne pouvant expliquer l'absence de passage au niveau supérieur depuis l'année universitaire 2004-2005 ; que, dans ces conditions, en refusant à M. A le renouvellement d'un titre de séjour en qualité d'étudiant au motif qu'il ne justifiait pas d'une progression effective dans ses études, le préfet n'a pas commis d'erreur d'appréciation ;

Considérant que le moyen tiré d'une atteinte au droit à la vie familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant pour contester le refus de renouveler un titre de séjour en qualité d'étudiant, qui résulte seulement d'une appréciation de la réalité et du sérieux des études poursuivies ;

Considérant, enfin, que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Lille ne peut qu'être rejetée ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter les conclusions à fin d'injonction assorties d'astreinte ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, ni sur celles tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination.

Article 2 : Le jugement n° 0804861 du Tribunal administratif de Lille en date du 4 novembre 2008 est annulé.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande de M. A est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Cheichna A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie sera adressée au préfet du Nord.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09DA00332
Date de la décision : 22/09/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Kimmerlin
Rapporteur ?: M. Antoine Mendras
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : STIENNE-DUWEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2009-09-22;09da00332 ?
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