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16/12/2010 | FRANCE | N°10DA01188

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 16 décembre 2010, 10DA01188


Vu le recours, enregistré le 17 septembre 2010 par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et régularisé le 24 septembre 2010 par la production de l'original, présenté pour le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE ET DES LIBERTES ; le ministre demande au président de la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1004190 du 6 septembre 2010 par laquelle le vice-président désigné par le président du Tribunal administratif de Lille, statuant en référé, a rejeté comme irrecevable sa tierce-opposition, tendant à ce que soit déclarée nulle et non aven

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Vu le recours, enregistré le 17 septembre 2010 par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et régularisé le 24 septembre 2010 par la production de l'original, présenté pour le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE ET DES LIBERTES ; le ministre demande au président de la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1004190 du 6 septembre 2010 par laquelle le vice-président désigné par le président du Tribunal administratif de Lille, statuant en référé, a rejeté comme irrecevable sa tierce-opposition, tendant à ce que soit déclarée nulle et non avenue l'ordonnance en date du 29 juin 2010 du juge des référés du même Tribunal prescrivant, en application de l'article R. 531-1 du code de justice administrative, une mesure de constat, visant à constater les conditions dans lesquelles M. A a été détenu dans la cellule FB n°006 de la maison d'arrêt de Dunkerque ;

2°) de faire droit à sa tierce-opposition ;

Le ministre soutient :

- que le premier juge n'a pu, sans entacher son ordonnance d'insuffisance de motivation, estimer que la mesure de constat, prescrite par la précédente ordonnance, en date du 29 juin 2010, du juge des référés faisant l'objet de la tierce-opposition, était sans influence sur les droits de l'Etat, alors même qu'une telle mesure a nécessairement pour but de constituer des preuves matérielles destinées à être utilisées dans le cadre d'une éventuelle action en responsabilité intentée à l'encontre de l'Etat ;

- que, contrairement à ce qu'a retenu à tort le premier juge, il est justifié de ce que l'ordonnance en date du 29 juin 2010, par laquelle le juge des référés du Tribunal administratif de Lille a prescrit une mesure de constat sur les conditions de détention de

M. A à la maison d'arrêt de Dunkerque, préjudicie aux droits de l'Etat, qui, n'ayant pas été mis en cause dans le cadre de la procédure ayant conduit à son prononcé, se trouvait sans qualité pour en relever appel ; que la tierce-opposition formée au nom de l'Etat devait, dès lors, être admise ;

- qu'au fond, la mesure de constat prescrite par le juge des référés du Tribunal administratif de Lille par l'ordonnance du 29 juin 2010 ne présentant pas le caractère utile exigé par l'article R. 531-1 du code de justice administrative, alors que les conditions de détention de M. A étaient parfaitement connues, il ne pouvait qu'être fait droit à la tierce-opposition formée au nom de l'Etat ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 octobre 2010, présenté pour M. Michel A, par la SCP Mougel-Brouwer ; M. A conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 000 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. A soutient que le premier juge a rejeté à bon droit la tierce-opposition formée par le ministre en estimant que l'ordonnance prescrivant la mesure de constat dont l'utilité est discutée, n'avait notamment pas pour objet de mettre à la charge de l'Etat les frais inhérents à cette mesure ; que cette dernière, qui a d'ailleurs été exécutée, était pleinement utile, contrairement à ce que prétend le ministre, qui ne saurait se prévaloir de sa seule bonne foi pour s'opposer à toute mesure d'investigation dans une affaire dans laquelle le risque de dépérissement des preuves est évident ; qu'une telle objection méconnait d'ailleurs le principe de respect de l'égalité des armes devant la justice, tel que protégé par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la description faite par le ministre, des conditions dans lesquelles l'exposant aurait été détenu est contestée, s'agissant, en particulier, des conditions d'aération de la cellule ; que le constat litigieux était, dans ces circonstances, pleinement utile et propre à éclairer les juges du fond qui sont saisis d'un litige actuellement pendant devant le Tribunal administratif de Lille ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 555-1 du code de justice administrative : Sans préjudice des dispositions du titre II du livre V du présent code, le président de la cour administrative d'appel ou le magistrat qu'il désigne à cet effet est compétent pour statuer sur les appels formés devant les cours administratives d'appel contre les décisions rendues par le juge des référés ; qu'aux termes de l'article R. 531-1 du même code : S'il n'est rien demandé de plus que la constatation de faits, le juge des référés peut, sur simple requête qui peut être présentée sans ministère d'avocat et même en l'absence d'une décision administrative préalable, désigner un expert pour constater sans délai les faits qui seraient susceptibles de donner lieu à un litige devant la juridiction. /Avis en est donné immédiatement aux défendeurs éventuels. /Par dérogation aux dispositions des articles R. 832-2 et R. 832-3, le délai pour former tierce opposition est de quinze jours. ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 832-1 du même code : Toute personne peut former tierce opposition à une décision juridictionnelle qui préjudicie à ses droits, dès lors que ni elle ni ceux qu'elle représente n'ont été présents ou régulièrement appelés dans l'instance ayant abouti à cette décision. ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

Considérant que, pour rejeter comme irrecevable, par l'ordonnance attaquée en date du

6 septembre 2010, la tierce-opposition formée par le ministre contre une ordonnance du juge des référés du Tribunal administratif de Lille en date du 29 juin 2010 prescrivant, à la demande de M. A, une mesure de constat, visant à constater les conditions dans lesquelles l'intéressé a été détenu dans la cellule FB n°006 de la maison d'arrêt de Dunkerque, le vice-président désigné par le président du Tribunal administratif de Lille a relevé que la mesure prescrite par l'ordonnance susmentionnée était sans influence sur les droits du GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE ET DES LIBERTES et que, par suite, la tierce-opposition formée par le ministre était irrecevable ; qu'en statuant ainsi, le premier juge a suffisamment motivé son ordonnance, dont le ministre forme présentement appel ; que le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE ET DES LIBERTES n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que celle-ci serait entachée d'irrégularité ;

Sur la recevabilité de la tierce-opposition formée par le ministre devant le premier juge :

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article R. 832-1 du code de justice administrative que la tierce-opposition n'est ouverte qu'à ceux qui se prévalent d'un droit auquel la décision entreprise aurait préjudicié ;

Considérant que l'ordonnance du juge des référés en date du 29 juin 2010, dont le ministre demandait la rétractation par la voie de la tierce-opposition, se bornait, sans faire préjudice au principal, à prescrire, en application des dispositions précitées de l'article R. 531-1 du code de justice administrative, le constat par un expert des conditions dans lesquelles

M. A avait été détenu dans la cellule FB n°006 de la maison d'arrêt de Dunkerque ; que la mesure ainsi prescrite était, par elle-même, sans influence sur les droits du GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE ET DES LIBERTES, alors même qu'elle avait été sollicitée par M. A afin de réunir les éléments de preuve propres à lui permettre d'engager un recours indemnitaire à l'encontre de l'Etat, dans le cadre de l'instruction duquel il appartiendra au ministre, s'il l'estime utile, de formuler des observations en défense ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE ET DES LIBERTES n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président désigné par le président du Tribunal administratif de Lille a refusé d'admettre sa tierce-opposition ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, en application desdites dispositions et dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 500 euros au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;

ORDONNE :

Article 1er: Le recours présenté par le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE ET DES LIBERTES est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à M. A la somme de 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée au GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE ET DES LIBERTES, ainsi qu'à M. Michel A.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Numéro d'arrêt : 10DA01188
Date de la décision : 16/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP MOUGEL - BROUWER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-12-16;10da01188 ?
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