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12/04/2011 | FRANCE | N°10DA01683

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (bis), 12 avril 2011, 10DA01683


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 30 décembre 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et confirmée par la production de l'original le 3 janvier 2011, présentée pour Mme Mahjouba A née B, demeurant ..., par Me Clément, avocat ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002757 du 22 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 18 janvier 2010 du préfet du Nord lui refusant le séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le

pays à destination duquel elle devrait être reconduite, d'autre part, à ce...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 30 décembre 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et confirmée par la production de l'original le 3 janvier 2011, présentée pour Mme Mahjouba A née B, demeurant ..., par Me Clément, avocat ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002757 du 22 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 18 janvier 2010 du préfet du Nord lui refusant le séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel elle devrait être reconduite, d'autre part, à ce que le tribunal enjoigne au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire vie privée et familiale dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à défaut, d'examiner à nouveau sa demande tendant à la délivrance d'un titre de séjour, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et, enfin, à la condamnation de l'Etat à verser à son conseil la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

2°) d'annuler l'arrêté, en date du 18 janvier 2010, du préfet du Nord ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale dans le délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, et ce, sous astreinte de 20 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre au préfet du Nord, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir et de lui délivrer, durant cet examen, une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 20 euros par jour de retard ;

5°) de condamner l'Etat à verser à son avocat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifiés ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Daniel Mortelecq, président de chambre, les conclusions de M. Patrick Minne, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que Mme A, ressortissante marocaine née en 1940, est entrée en France le 8 février 2005, munie de son passeport revêtu d'un visa Schengen de type C , pour rejoindre deux de ses filles ; qu'elle a demandé, le 4 avril 2005, la délivrance d'une carte de séjour temporaire en qualité d'étranger malade ; que, par un arrêté en date du 12 décembre 2005, le préfet du Nord a rejeté sa demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français ; qu'elle a présenté de nouveau, le 7 mars 2008, une demande tendant à la délivrance d'une carte de séjour temporaire au titre de la vie privée et familiale ; que, par un arrêté en date du 18 janvier 2010, le préfet du Nord a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle devrait être reconduite ; que Mme A relève appel du jugement, en date du 22 septembre 2010, par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Nord ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

Sur la légalité externe :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public : (...) Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent (...) ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ; que l'arrêté du 18 janvier 2010 pris par le préfet du Nord, qui vise notamment les articles L. 511-1 I, L. 511-4 et L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui relate les conditions d'entrée en France de Mme A et le précédent refus de séjour dont elle a fait l'objet, qui mentionne la présence en France de son frère et de deux de ses filles titulaires d'une carte de séjour temporaire, qui fait état des conditions d'hébergement et de ressources de Mme A en France, qui précise que celle-ci a vécu habituellement au Maroc jusqu'à l'âge de 65 ans et qu'elle n'est pas isolée dans son pays d'origine où résident ses deux autres filles, comporte l'ensemble des considérations de fait et de droit sur lesquelles il se fonde ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision portant refus de séjour du préfet serait insuffisamment motivée ;

Sur la légalité interne :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que Mme A, ressortissante marocaine, est entrée en France le 8 février 2005, à l'âge de 65 ans, afin de rejoindre deux de ses filles résidant en France et titulaires d'une carte de séjour provisoire ; qu'elle fait valoir qu'elle n'est plus en mesure de demeurer seule et a besoin de l'assistance de tiers pour l'accomplissement de toutes les tâches de la vie quotidienne, en raison de son âge ; qu'elle soutient s'être retrouvée complètement démunie dans son pays d'origine, suite au décès de son conjoint, et que deux de ses quatre filles résidant au Maroc sont dans l'incapacité de l'héberger ou de la prendre en charge financièrement ; qu'à l'inverse, ses deux filles présentes en France sont à même de s'occuper d'elle et de l'héberger à titre gracieux ; que le centre de sa vie privée et familiale est désormais en France ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier que Mme A a vécu, de façon continue et la plupart du temps sans son mari, dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de 65 ans ; qu'elle n'est pas isolée dans son pays d'origine où résident deux de ses quatre filles ; que, si elle soutient que celles-ci ne peuvent s'occuper d'elle, elle n'apporte pas d'éléments probants confirmant ses simples allégations ; que rien ne s'oppose à ce que ses filles résidant en France continuent de l'aider financièrement en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par ailleurs, il ne résulte pas des pièces du dossier qu'elle ne serait plus en mesure de percevoir la pension de réversion de son mari décédé, en cas de retour dans son pays d'origine ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision contestée n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : I - L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour (...) peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français (...). L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation ; que, par suite, Mme A ne peut utilement soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire serait insuffisamment motivée ;

Considérant, ainsi qu'il a été précédemment dit, que la décision du préfet du Nord refusant de l'admettre au séjour n'est pas entachée d'illégalité ; que, dès lors, la décision portant obligation de quitter le territoire français, prise en application des dispositions de l'article L. 511-1 précité, n'est pas dépourvue de base légale ;

Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux retenus en ce qui concerne le refus de séjour, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

Considérant que le rejet des conclusions à fin d'annulation entraîne, par voie de conséquence, celui des conclusions à fin d'injonction assorties d'astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ; qu'aux termes de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 : Les auxiliaires de justice rémunérés selon un tarif peuvent renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre contre la partie condamnée aux dépens et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle le recouvrement des émoluments auxquels ils peuvent prétendre. / En toute matière, l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale peut demander au juge de condamner la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à lui payer une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide (...) ;

Considérant qu'en vertu des dispositions précitées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par Mme A en faveur de son avocat doivent, dès lors, être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Mahjouba A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Copie sera transmise au préfet du Nord.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 10DA01683
Date de la décision : 12/04/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Mortelecq
Rapporteur ?: M. Daniel Mortelecq
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : CLEMENT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2011-04-12;10da01683 ?
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