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23/02/2012 | FRANCE | N°10DA01251

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 23 février 2012, 10DA01251


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 30 septembre 2010 par télécopie et régularisée par la production de l'original le 4 octobre 2010, et le mémoire complémentaire, enregistré le 8 décembre 2010 par télécopie et régularisé par la production de l'original le 10 décembre 2010, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE, dont le siège est place du jeu de Paume, BP 979 à Péronne cédex (80201), par Me Le Prado, avocat ; le CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800517 en date d

u 15 juillet 2010 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a :

- condam...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 30 septembre 2010 par télécopie et régularisée par la production de l'original le 4 octobre 2010, et le mémoire complémentaire, enregistré le 8 décembre 2010 par télécopie et régularisé par la production de l'original le 10 décembre 2010, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE, dont le siège est place du jeu de Paume, BP 979 à Péronne cédex (80201), par Me Le Prado, avocat ; le CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800517 en date du 15 juillet 2010 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a :

- condamné le CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE à verser en réparation une somme globale de 4 354,08 euros à Mme Eliane A, Mme Magali C épouse B et M. Pierre-Jean C et, respectivement, une somme de 15 000 euros à Mme Eliane A, une somme de 5 259 euros à M. Pierre-Jean C et une somme de 5 000 euros à Mme Magali C épouse B ;

- condamné le CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE à verser à la caisse du régime social des indépendants de Picardie une somme de 3 719,69 euros en remboursement de ses débours, outre l'indemnité forfaitaire de gestion d'un montant de 966 euros prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;

- mis les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 600 euros, à la charge du CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE ;

- rejeté les conclusions du CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter les conclusions des consorts C et celles de la caisse du régime social des indépendants de Picardie ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Antoine Durup de Baleine, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Corinne Baes Honoré, rapporteur public ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par Mme A et les consorts C ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant, d'une part, que, contrairement à ce que soutient le CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE, le jugement du 15 juillet 2010 est suffisamment motivé ;

Considérant, d'autre part, que si le CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE soutient qu'à tort les premiers juges ont admis la recevabilité des conclusions de Mme A et autres en l'absence de demande préalable ainsi que de celles de la caisse du régime social des indépendants de Picardie dans la mesure où cette dernière n'était pas représentée par une personne ayant qualité pour agir en son nom, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le jugement attaqué ;

Sur la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1142-2 du code de la santé publique : I. Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute / (...) ;

Considérant que le 6 avril 2007, M. Bertrand C a présenté une crise convulsive et s'est rendu aux urgences du CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE à 8 heures 50 ; qu'après la réalisation d'examens ainsi que d'un scanner cérébral au centre hospitalier de Saint-Quentin, M. C, de retour au service des urgences du CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE, a, le même jour vers 19 heures, été admis dans le service de médecine ; que le diagnostic le lendemain matin d'un syndrome malin des neuroleptiques a conduit au transfert de l'intéressé au centre hospitalier de Saint-Quentin, où il a été pris en charge par le service des urgences avant d'être admis en service de réanimation médico-chirurgicale où il est décédé le 9 avril 2007 à 5 heures 25 ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que le 6 avril 2007 vers 18 heures, une dose de 100 mg de Tercian, qui est un médicament neuroleptique, a été administrée à M. C par le service des urgences du CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE ; qu'après son admission le même jour à 19 heures dans le service de médecine, la température de ce patient a été mesurée à 38° C ; que vers 21 heures, ont été administrées à M. C, alors en état d'agitation avec fureur clastique, par voie intra-musculaire trois ampoules d'un autre neuroleptique ; que le 7 avril 2007 vers 1 heure, alors que la température centrale mesurée de M. C s'élevait à 39,2° C et que persistait un état d'agitation important, lui a été administré le même traitement sédatif par trois nouvelles ampoules de ce neuroleptique ; qu'ainsi qu'il ressort de la lettre de transfert de M. C au centre hospitalier de Saint-Quentin, alors que la température centrale du patient avait été mesurée à 39,3° C, le 7 avril 2007 vers 6 heures, a été administré à nouveau le même traitement neuroleptique ; qu'enfin le même jour vers 8 heures, alors que la température mesurée était de 40,1° C, a été administrée une dose de 100 mg de Tercian ; qu'ainsi, si l'administration de neuroleptiques le 6 avril 2007 vers 18 heures ainsi que vers 21 heures était appropriée à l'état de M. C, la poursuite de ce traitement, alors que le patient présentait une situation d'hyperthermie croissante, laquelle devait impérativement conduire à suspendre le traitement par neuroleptiques, a constitué une faute médicale de nature à engager la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte clairement du rapport d'expertise du 12 novembre 2007, que, même si la survenance d'un syndrome malin des neuroleptiques constitue une complication connue de cette classe médicamenteuse et, à ce titre, un aléa thérapeutique , ce syndrome constaté le 7 avril 2007 a constitué la cause directe du décès de M. C et trouvait lui-même son origine directe dans la faute ci-dessus caractérisée du CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE ; qu'à supposer même que la survenance d'un tel syndrome et son caractère explosif ont pu être favorisés par une sensibilisation antérieure du patient aux neuroleptiques, notamment à la suite de l'administration de tels médicaments en janvier 2006 lors d'une hospitalisation de M. C au centre hospitalier universitaire d'Amiens, il ne résulte pas de l'instruction que l'état de ce patient, tel qu'il pouvait être constaté le 6 avril 2007 au soir ou même le lendemain vers 1 heure, aurait pu conduire à son décès ; que, dès lors, le CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE ne saurait valablement soutenir que la faute commise dans la prise en charge de M. C lui aurait seulement fait perdre une chance d'éviter une telle issue ;

Sur la réparation des préjudices subis par Mme A, Mme C épouse B et M. C :

Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que les premiers juges se seraient livrés à une évaluation excessive des chefs de préjudices qu'ils ont condamné le CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE à réparer ;

Sur les droits de la caisse du régime social des indépendants de Picardie :

Considérant que c'est par une exacte application des dispositions du neuvième alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale que les premiers juges ont mis à la charge du CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE l'indemnité forfaitaire qu'elles prévoient, au taux de 966 euros prévu par l'arrêté du 1er décembre 2009 susvisé ;

Considérant que la caisse du régime social des indépendants a justifié avoir pris en charge pour un montant de 3 719,69 euros les dépenses de santé de M. C en lien direct avec la faute imputable au CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE, dépenses correspondant à la prise en charge au centre hospitalier de Saint-Quentin du syndrome malin des neuroleptiques qui a entraîné son décès ; que c'est donc à bon droit que, par application de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, les premiers juges ont condamné le CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE à rembourser cette somme à cette caisse d'assurance maladie, sans que ce dernier soit fondé à soutenir que cette somme devrait être diminuée de frais que la caisse aurait, compte tenu de l'état de santé de M. C avant le 6 avril 2007, nécessairement exposés en l'absence de son décès ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens l'a condamné à réparer les conséquences dommageables du décès de M. Bertrand C ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE le versement à Mme A, à Mme C et à M. C de la somme globale de 1 500 euros qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE est rejetée.

Article 2 : Le CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE versera à Mme A, Mme C et M. C, ensemble, la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au CENTRE HOSPITALIER DE PERONNE, à Mme Eliane A, à Mme Magali C épouse B, à M. Pierre-Jean C et à la caisse du régime social des indépendants de Picardie.

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