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14/12/2012 | FRANCE | N°12DA01097

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 14 décembre 2012, 12DA01097


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 21 juillet 2012 et confirmée par la production de l'original le 24 juillet 2012, présentée pour M. Ghiula A, domicilié, ..., par Me N. Clément, avocat ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200886 du 23 mai 2012 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral en date du 28 septembre 2011 lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant la Roumanie comme pays de destination d

e cette mesure d'éloignement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 21 juillet 2012 et confirmée par la production de l'original le 24 juillet 2012, présentée pour M. Ghiula A, domicilié, ..., par Me N. Clément, avocat ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200886 du 23 mai 2012 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral en date du 28 septembre 2011 lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant la Roumanie comme pays de destination de cette mesure d'éloignement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les deux décisions contenues dans cet arrêté ;

3°) d'enjoindre à l'administration de procéder à un nouvel examen de sa situation, dans un délai de 15 jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des Etats membres, modifiant le règlement (CEE) n° 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE et 93/96/CEE ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 pris pour son application ;

Vu la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Xavier Larue, premier conseiller ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision attaquée :

1. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 6 de la directive du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 : " Les citoyens de l'Union ont le droit de séjourner sur le territoire d'un autre Etat membre pour une période allant jusqu'à trois mois, sans autres conditions ou formalités que l'exigence d'être en possession d'une carte d'identité ou d'un passeport en cours de validité " ; que l'article 35 de cette même directive dispose que : " Les Etats membres peuvent adopter les mesures nécessaires pour refuser, annuler ou retirer tout droit conféré par la présente directive en cas d'abus de droit ou de fraude, tels que les mariages de complaisance. Toute mesure de cette nature est proportionnée et soumise aux garanties procédurales prévues aux articles 30 et 31 " ;

2. Considérant que, sans méconnaître les objectifs de cette directive, le législateur a, par l'article 39 de la loi du 16 juin 2011, applicable à la date de la décision attaquée et codifié ensuite à l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, prévu que : " L'autorité administrative compétente peut, par décision motivée, obliger un ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, ou un membre de sa famille à quitter le territoire français lorsqu'elle constate : / (...) / 2° Ou que son séjour est constitutif d'un abus de droit. Constitue un abus de droit le fait de renouveler des séjours de moins de trois mois dans le but de se maintenir sur le territoire alors que les conditions requises pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ne sont pas remplies. Constitue également un abus de droit le séjour en France dans le but essentiel de bénéficier du système d'assistance sociale. (...) " ;

3. Considérant que, pour prononcer à l'encontre de M. A, de nationalité roumaine, une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, le préfet du Nord a relevé que l'intéressé a effectué de fréquents allers et retours entre la France et la Roumanie ; qu'il ressort toutefois des procès-verbaux d'audition de l'intéressé que ce dernier n'a jamais reconnu avoir fait de tels allers-retours ; que le préfet du Nord n'apporte aucun élément de nature à justifier de ces allers-retours ; que si l'autorité administrative souligne également, dans sa décision, que M. A n'exerce pas d'activité professionnelle et n'apporte pas la preuve qu'il dispose de revenus propres, ces autres circonstances ne sont pas davantage, en l'espèce, de nature à établir que le séjour contesté de l'appelant en France est motivé par le souhait de bénéficier du système d'assistance sociale national ; que, dans ces conditions, le préfet du Nord, en prenant l'arrêté attaqué, a fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens d'annulation de sa requête, M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande et que l'arrêté préfectoral du 28 septembre 2011 attaqué doit être annulé ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

5. Considérant que l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée (...) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas " ; que, dès lors, M. A est fondé à solliciter qu'il soit enjoint au préfet du Nord de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer, sans délai, une autorisation provisoire de séjour, sans pour autant qu'il y ait lieu au prononcé d'une astreinte ;

Sur les conclusions à fin d'octroi à son conseil d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens :

6. Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; qu'il y a donc lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à Me Clément une somme de 1 000 euros au titre de ces dispositions pour la première instance et l'appel, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 23 mai 2012 du tribunal administratif de Lille et l'arrêté du 28 septembre 2011 du préfet du Nord concernant M. A sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Nord de procéder à un nouvel examen de la situation de M. A et de le munir, dans cette attente, d'une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : L'Etat versera à Me Clément une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que celui-ci renonce au bénéfice de la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. A est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Ghiula A, au ministre de l'intérieur, à Me Norbert Clément et au préfet du Nord.

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N°12DA01097


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12DA01097
Date de la décision : 14/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Xavier Larue
Rapporteur public ?: M. Moreau
Avocat(s) : CLEMENT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2012-12-14;12da01097 ?
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