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18/12/2012 | FRANCE | N°11DA01829

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 18 décembre 2012, 11DA01829


Vu, I, sous le n° 11DA01829, la requête enregistrée par télécopie le 5 décembre 2011 et confirmée par la production de l'original le 6 décembre 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la SAS EUROVIA HAUTE-NORMANDIE, dont le siège social est situé rue de la Plaine à Gonfreville l'Orcher (76700), par Me Lanfry, avocat ; la société requérante demande à la cour :

1°) d'annuler les articles 2, 3 et 4 du jugement n° 0800203 du 4 octobre 2011 par lequel le tribunal administratif de Rouen l'a condamnée, d'une part, à verser au syndicat mixt

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Vu, I, sous le n° 11DA01829, la requête enregistrée par télécopie le 5 décembre 2011 et confirmée par la production de l'original le 6 décembre 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la SAS EUROVIA HAUTE-NORMANDIE, dont le siège social est situé rue de la Plaine à Gonfreville l'Orcher (76700), par Me Lanfry, avocat ; la société requérante demande à la cour :

1°) d'annuler les articles 2, 3 et 4 du jugement n° 0800203 du 4 octobre 2011 par lequel le tribunal administratif de Rouen l'a condamnée, d'une part, à verser au syndicat mixte pour l'étude et le traitement des ordures ménagères (SETOM) de l'Eure, solidairement avec la communauté d'agglomération d'Evreux et la SARL Sonoter TP, la somme de 8 256 euros, d'autre part, à supporter solidairement avec la communauté d'agglomération d'Evreux, la société Eure TP et la SARL Sonoter TP, les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 39 301,24 euros, et, enfin, à verser au SETOM de l'Eure, solidairement avec la communauté d'agglomération d'Evreux, la société Eure TP et la SARL Sonoter TP, une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée en première instance par le SETOM de l'Eure ;

3°) de condamner le SETOM de l'Eure à lui payer la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu, II, sous le n° 11DA01845, la requête enregistrée les 7 et 9 décembre 2011 et le 27 janvier 2012, au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION D'EVREUX, représentée par son président en exercice, dont le siège social est situé 12 boulevard Adélaïde et Jules Janin à Evreux (27000), par Me Mahiu, avocat ; la communauté d'agglomération demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800203 du 4 octobre 2011 par lequel le tribunal administratif de Rouen, à la demande du syndicat mixte pour l'étude et le traitement des ordures ménagères (SETOM) de l'Eure, l'a condamnée, d'une part, à verser au SETOM de l'Eure, solidairement avec la société Eure TP, la somme de 34 951,17 euros, et solidairement avec la SARL Sonoter TP et la SAS Eurovia Haute-Normandie, la somme de 8 256 euros, d'autre part, à supporter, solidairement avec la société Eure TP, la SARL Sonoter TP et la SAS Eurovia Haute-Normandie, les frais d'expertise exposés devant le tribunal, taxés et liquidés à la somme de 39 301,24 euros, et, enfin, à verser au SETOM de l'Eure, solidairement avec la société Eure TP, la SARL Sonoter TP et la SAS Eurovia Haute-Normandie, une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande du SETOM de l'Eure ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Lavail, président-assesseur,

- les conclusions de M. Vladan Marjanovic, rapporteur public,

- et les observations de Me Lanfry, avocat, pour la SAS EUROVIA HAUTE-NORMANDIE, de Me Mahiu, avocat, pour le GRAND EVREUX AGGLOMERATION et de Me Matrand, avocate, pour la SARL Sonoter TP ;

1. Considérant que, dans le cadre de travaux de terrassement et de réseaux en vue de l'aménagement de la ZAC " Le Long Buisson ", débutés en 2003, dont le maître d'ouvrage était la COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION D'EVREUX, et les maîtres d'oeuvre les sociétés Eure TP, Ambroise Lucas, devenue la SARL Sonoter TP et la SAS EUROVIA HAUTE-NORMANDIE, un câble de 20 000 volts d'alimentation et de production exploité par la SA EDF a été endommagé, le 8 décembre 2003 et les 3 et 4 février 2004 ; que le syndicat mixte pour l'étude et le traitement des ordures ménagères (SETOM) de l'Eure a alors supporté des coupures d'alimentation en électricité de son site ; que, par ordonnance du 20 septembre 2004, une expertise judiciaire a été ordonnée ; que l'expert, auquel se sont joints deux sapiteurs, a déposé son rapport, en l'état, le 5 juillet 2006 ; que, par jugement en date du 4 octobre 2011, le tribunal administratif de Rouen a condamné, d'une part, la COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION D'EVREUX à verser au SETOM de l'Eure, solidairement avec la société Eure TP, la somme de 34 951,17 euros, d'autre part, la SAS EUROVIA à verser au SETOM de l'Eure, solidairement avec la COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION D'EVREUX et la SARL Sonoter TP, la somme de 8 256 euros ; que le tribunal a également condamné, la SAS EUROVIA HAUTE-NORMANDIE à supporter solidairement avec la COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION D'EVREUX, la société Eure TP et la SARL Sonoter TP, les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 39 301,24 euros ; que la SAS EUROVIA HAUTE-NORMANDIE et le GRAND EVREUX AGGLOMERATION forment appel, par requêtes respectivement enregistrées sous les nos 11DA01829 et 11DA01845, de ce jugement ;

Sur la jonction :

2. Considérant que les requêtes n° 11DA01829 et n° 11DA01845 présentées respectivement par la SAS EUROVIA HAUTE-NORMANDIE et le GRAND EVREUX AGGLOMERATION sont dirigées contre le même jugement du tribunal administratif de Rouen statuant au fond sur le préjudice ; qu'elles présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il soit statué par un seul arrêt ;

Sur la responsabilité :

3. Considérant que, même sans faute, l'administration et ses entrepreneurs sont responsables des dommages causés aux tiers par l'exécution de travaux publics, à moins que ces dommages ne soient imputables à une faute de la victime ou un cas de force majeure ;

4. Considérant, d'une part, qu'il n'est pas contesté que le câble d'alimentation électrique en cause, qui alimente le site du SETOM de l'Eure, a été sectionné le 8 décembre 2003 à l'occasion des travaux de réseaux réalisés pour le compte de GRAND EVREUX AGGLOMERATION par la société Eure TP ; que, d'autre part, il résulte de l'instruction, notamment des rapports d'incident du SETOM de l'Eure figurant en annexe du rapport d'expertise, et il n'est pas sérieusement contesté, que le câble a également été endommagé le 3 février 2004 par la SARL Sonoter TP ; que cette dernière dégradation, qui n'a pas provoqué sur le moment de coupure électrique, a nécessité l'intervention de la SA EDF le 4 février 2004, entraînant une nouvelle coupure d'électricité pour le SETOM de l'Eure ; qu'à l'issue de la réparation, le 4 février 2004, en fin d'après-midi, la SA EDF n'a pas été en mesure de rétablir le courant, le câble ayant été à nouveau endommagé ; qu'il résulte de ce qui précède que, contrairement à ce que soutiennent la SAS EUROVIA HAUTE-NORMANDIE et la SARL Sonoter TP, ces deux derniers incidents sont indissociables ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, si dans ses conclusions, l'expert affirme ne pas avoir pu déterminer avec précision quelle société était à l'origine de la dégradation du câble le 4 février 2004, la SAS EUROVIA HAUTE-NORMANDIE, qui effectuait des travaux de terrassement sur le chantier, a reconnu son implication dans ce sinistre ;

6. Considérant, enfin, qu'à supposer même que les dégradations du câble électrique eussent pu être évitées si des plans précis du réseau avaient été fournis par la SA EDF et si le câble avait été équipé d'une gaine de protection, ces circonstances, qui seraient imputables à un tiers, ne sont pas de nature à exonérer la responsabilité encourue par le maître d'ouvrage et les maîtres d'oeuvre ; que le GRAND EVREUX AGGLOMERATION, la SAS EUROVIA HAUTE-NORMANDIE ainsi que la SARL Sonoter TP peuvent seulement, si elles s'y croient fondées, exercer devant les juridictions compétentes tel recours que de droit contre le ou les tiers responsables des faits qu'elles invoquent ;

7. Considérant que, par suite, c'est à bon droit, et sans s'être exclusivement fondé sur le rapport d'expertise, que le tribunal administratif de Rouen a estimé que le SETOM de l'Eure, tiers par rapport auxdits travaux, était fondé à rechercher la responsabilité de GRAND EVREUX AGGLOMERATION, de la SAS EUROVIA HAUTE-NORMANDIE ainsi que des entreprises Eure TP et Sonoter TP, à raison des conséquences dommageables ayant résulté pour lui des accidents sus décrits ;

Sur le préjudice :

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des conclusions du rapport d'expertise qui ne sont pas sérieusement remises en cause, que le montant des dommages causés au SETOM de l'Eure du fait de la coupure électrique du 8 décembre 2003 a été estimé à la somme de 49 931 euros ; que, si l'absence de pièce de rechange du groupe électrogène du SETOM de l'Eure a prolongé la coupure d'alimentation en électricité pendant 109 heures, au lieu de 6 heures 30 au départ, cette circonstance, qui constitue un risque pris par le SETOM de l'Eure qu'il ne pouvait ignorer, est seulement de nature à exonérer partiellement le maître d'ouvrage et les maîtres d'oeuvre de leur responsabilité, qui demeure engagée pour la totalité du dommage ; que le tribunal a fait une juste appréciation des faits de l'espèce en considérant que la prise d'un tel risque devait être considérée comme ayant concouru à la survenance du dommage dans la proportion de 30 % ; que, s'agissant de la coupure électrique des 3 et 4 février 2004, le montant des dommages causés au SETOM de l'Eure a été estimé par l'expert à la somme de 8 256 euros ; que, contrairement à ce que soutiennent les défendeurs, le défaut de pièce de rechange du groupe électrogène n'a pas eu d'incidence dans la survenance de ce dommage ; que, par suite, c'est à bon droit que le tribunal a condamné, d'une part, solidairement le GRAND EVREUX AGGLOMERATION et la société Eure TP à verser au SETOM de l'Eure une somme de 34 951,17 euros correspondant à 70 % des conséquences dommageables du sinistre survenu le 8 décembre 2003 et, d'autre part, solidairement LE GRAND EVREUX AGGOMERATION, la SARL Sonoter TP et la SAS EUROVIA HAUTE-NORMANDIE à verser au SETOM de l'Eure une somme de 8 256 euros correspondant à la totalité des conséquences dommageables du sinistre survenu les 3 et 4 février 2004 ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le GRAND EVREUX AGGLOMERATION et la SAS EUROVIA HAUTE-NORMANDIE ainsi que, par la voie de l'appel incident, la SARL Sonoter TP, ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen les a condamnés à réparer les conséquences dommageables des sinistres intervenus les 8 décembre 2003 et 3 et 4 février 2004 ;

Sur les frais d'expertise :

10. Considérant qu'il y a lieu de laisser solidairement à la charge de GRAND EVREUX AGGLOMERATION, de la société Eure TP, de la SARL Sonoter TP et de la SAS EUROVIA HAUTE-NORMANDIE, les frais de l'expertise, ordonnée par le président du tribunal administratif de Rouen, taxés et liquidés, par ordonnance en date du 21 juillet 2006, à la somme de 39 301,24 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

12. Considérant qu'en vertu des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par le GRAND EVREUX AGGLOMERATION et la SAS EUROVIA HAUTE-NORMANDIE doivent, dès lors, être rejetées ;

13. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions susmentionnées du SETOM de l'Eure, de la SARL Sonoter TP et de la SA EDF ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête n° 11DA01829 de la SAS EUROVIA HAUTE-NORMANDIE est rejetée.

Article 2 : La requête n° 11DA01845 de GRAND EVREUX AGGLOMERATION est rejetée.

Article 3 : Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 39 301,24 euros, sont mis solidairement à la charge de GRAND EVREUX AGGLOMERATION, de la société Eure TP, de la SARL Sonoter TP et de la SAS EUROVIA HAUTE-NORMANDIE.

Article 4 : Les conclusions de la SARL Sonoter TP et de la SA EDF sont rejetées.

Article 5 : Les conclusions du SETOM de l'Eure tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS EUROVIA HAUTE-NORMANDIE, à GRAND EVREUX AGGLOMERATION, au syndicat mixte pour l'étude et le traitement des ordures ménagères (SETOM) de l'Eure, à la SARL Sonoter TP, à la société Eure TP et à la SA électricité de France (EDF).

Copie sera adressée au préfet de l'Eure.

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Nos11DA01829,11DA01845


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11DA01829
Date de la décision : 18/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-04-01-05 Responsabilité de la puissance publique. Réparation. Préjudice. Caractère spécial et anormal du préjudice.


Composition du Tribunal
Président : M. Mortelecq
Rapporteur ?: M. Marc (AC) Lavail
Rapporteur public ?: M. Marjanovic
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS LANFRY et BARRABE ; SOCIETE D'AVOCATS LANFRY et BARRABE ; SCP DE BEZENAC ET ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2012-12-18;11da01829 ?
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