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17/01/2013 | FRANCE | N°11DA01541

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 17 janvier 2013, 11DA01541


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 25 septembre 2011 et confirmée par la production de l'original le 27 septembre 2011, et le mémoire complémentaire, enregistré le 18 novembre 2011, présentés pour la COMMUNE DE SAINTE-AUSTREBERTHE, représentée par Mme Françoise Obin, agissant en sa qualité de première adjointe, par Me J.-C. Broutin, avocat ;

La COMMUNE DE SAINTE-AUSTREBERTHE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0803848-0803850-0803851 du 21 juillet 2011 par lequel le tribunal administratif

de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de trois arrêtés du 1er...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 25 septembre 2011 et confirmée par la production de l'original le 27 septembre 2011, et le mémoire complémentaire, enregistré le 18 novembre 2011, présentés pour la COMMUNE DE SAINTE-AUSTREBERTHE, représentée par Mme Françoise Obin, agissant en sa qualité de première adjointe, par Me J.-C. Broutin, avocat ;

La COMMUNE DE SAINTE-AUSTREBERTHE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0803848-0803850-0803851 du 21 juillet 2011 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de trois arrêtés du 1er avril 2008 par lesquels le préfet du Pas-de-Calais a accordé à la société Innovent les permis de construire n° PC 62 743 03 00006, n° PC 62 743 03 00004 et n° PC 62 743 03 00005 en vue de la réalisation de quatre aérogénérateurs (éolienne n° 5, éolienne n° 2 et éoliennes nos 3 et 4) sur les parcelles cadastrées section ZA n° 6, section ZB n° 34 et section ZD n° 2, situées sur le territoire communal ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les trois arrêtés du 1er avril 2008 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée par courrier électronique le 4 janvier 2013 et régularisée par la production de l'original le 7 janvier 2013, présentée pour la société Innovent ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité ;

Vu le décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977 pris pour l'application de l'article 2 de la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature ;

Vu le décret n° 2007-18 du 5 janvier 2007 pris pour l'application de l'ordonnance n° 2005-1527 du 8 décembre 2005 relative au permis de construire et aux autorisations d'urbanisme, et notamment son article 26 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marie-Odile Le Roux, président-assesseur,

- les conclusions de M. David Moreau, rapporteur public,

- et les observations de Me J.-C. Broutin, avocat de la COMMUNE DE SAINTE-AUSTREBERTHE et de Me D. Deharbe, avocat de la société Innovent ;

1. Considérant que la COMMUNE DE SAINTE-AUSTREBERTHE relève appel du jugement du 21 juillet 2011 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de trois arrêtés du 1er avril 2008 par lesquels le préfet du Pas-de-Calais a accordé à la société Innovent trois permis de construire en vue de la réalisation de quatre aérogénérateurs (éolienne n° 5, éolienne n° 2 et éoliennes nos 3 et 4) sur les parcelles cadastrées section ZA n° 6, section ZB n° 34 et section ZD n° 2, situées sur le territoire communal ; que, par ailleurs, par une requête distincte, la commune de Le Quesnoy-en-Artois relève appel du jugement du même jour par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation d'un arrêté du 1er avril 2008 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a accordé à la société Innovent un autre permis de construire en vue de la réalisation d'un aérogénérateur (éolienne n° 6) sur une parcelle cadastrée section ZB n° 6 située sur le territoire communal ;

Sur les fins de non-recevoir opposées à la requête d'appel par la société Innovent :

2. Considérant qu'il ressort des mentions figurant sur l'accusé de réception de la lettre de notification du jugement du tribunal administratif de Lille que cette décision a été notifiée à la COMMUNE DE SAINTE-AUSTREBERTHE le 27 juillet 2011 ; que son appel, enregistré au greffe de la cour le 25 septembre 2011, par voie de télécopie, dans le délai d'appel, et régularisé le 27 septembre 2011, n'est, par suite, pas tardif ;

3. Considérant que la requête d'appel, qui ne se borne pas à reproduire intégralement et exclusivement le texte des mémoires de première instance mais énonce de manière précise les critiques adressées au jugement attaqué, répond aux exigences de motivation des requêtes d'appel prévues par l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2122-26 du code général des collectivités territoriales : " Dans le cas où les intérêts du maire se trouvent en opposition avec ceux de la commune, le conseil municipal désigne un autre de ses membres pour représenter la commune, soit en justice, soit dans les contrats " ;

5. Considérant que Mme Françoise Obin, première adjointe a été, en application des dispositions précitées de l'article L. 2122-26 du code général des collectivités territoriales, habilitée par une délibération du conseil municipal de la COMMUNE DE SAINTE-AUSTREBERTHE en date du 3 septembre 2011 à représenter la commune en justice au motif que le maire était personnellement intéressé en tant que propriétaire d'un des terrains d'assiette du projet litigieux ; que, par suite, Mme Obin avait qualité pour représenter la COMMUNE DE SAINTE-AUSTREBERTHE devant la cour ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les fins de non-recevoir opposées par la société Innovent doivent être écartées ;

Sur les fins de non-recevoir opposées à la demande de première instance par la société Innovent :

7. Considérant que, contrairement à ce que soutient la société Innovent, la demande de première instance comporte l'exposé des moyens, conformément aux exigences de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;

8. Considérant que, dans l'hypothèse où des conclusions communes sont présentées par des demandeurs différents dans une même demande, il suffit que l'un des demandeurs soit recevable à agir devant la juridiction pour qu'il puisse, au vu d'un moyen soulevé par celui-ci, être fait droit à ces conclusions ; qu'en revanche, les conclusions propres à chaque demandeur ne sauraient être accueillies sans que leur recevabilité ait été admise ;

9. Considérant que la demande de première instance a été introduite par la COMMUNE DE SAINTE-AUSTREBERTHE, une association de défense et par des habitants de la commune ; que les aérogénérateurs autorisés par les permis de construire litigieux doivent être réalisés sur le territoire de la COMMUNE DE SAINTE-AUSTREBERTHE ; que, dès lors, celle-ci justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour poursuivre l'annulation des arrêtés contestés ; que la demande collective étant ainsi signée par au moins un demandeur ayant un intérêt lui donnant qualité pour agir contre l'ensemble des arrêtés litigieux, la société Innovent n'est pas fondée à se prévaloir du défaut d'intérêt à agir de l'ensemble des demandeurs de première instance ;

10. Considérant que les fins de non-recevoir opposées par la société Innovent à la demande de première instance présentée par la COMMUNE DE SAINTE-AUSTREBERTHE et autres doivent être écartées ;

Sur la légalité des permis de construire :

En ce qui concerne l'avis du maire de la COMMUNE DE SAINTE-AUSTREBERTHE :

11. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 421-15 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable, en vertu du 4 de l'article 26 du décret n° 2007-18 du 18 janvier 2007 pris pour l'application de l'ordonnance n° 2005-1527 du 8 décembre 2005 relative au permis de construire et aux autorisations d'urbanisme, à la date à laquelle les demandes de permis de construire litigieux ont été déposées : " Le service chargé de l'instruction de la demande procède, au nom de l'autorité compétente pour statuer, à cette instruction et recueille auprès des personnes publiques, services ou commissions intéressés par le projet, les accords, avis ou décisions prévus par les lois ou règlements en vigueur (...) " ; qu'aux termes des premier et quatrième alinéas de l'article L. 421-2-1 du code de l'urbanisme, dans sa version alors applicable à l'espèce en vertu des mêmes dispositions : " Dans les communes où un plan local d'urbanisme a été approuvé, le permis de construire est délivré par le maire au nom de la commune. / (...) / Sont toutefois délivrés ou établis, au nom de l'Etat, par le maire ou le représentant de l'Etat dans le département après avis du maire ou du président de l'établissement public compétent, les autorisations ou actes relatifs à l'utilisation et à l'occupation du sol concernant : / (...) / b) Les ouvrages de production, de transport, de distribution et de stockage d'énergie, (...) ; un décret en Conseil d'Etat détermine la nature et l'importance de ces ouvrages ;/ (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 490-3 du même code dans sa rédaction alors applicable : " Les décisions relatives aux autorisations d'occupation ou d'utilisation du sol et le certificat de conformité concernant l'édification d'ouvrages de production, de transport, de distribution et de stockage d'énergie ainsi que les travaux effectués sur ces ouvrages sont prises, sous réserve des dispositions de l'article R. 490-4 : / 1° Par le préfet, au nom de l'Etat, lorsque cette énergie n'est pas destinée, principalement, à une utilisation directe par le demandeur de l'autorisation ou de l'acte sollicité ; / (...) " ;

12. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que, d'une part, un permis de construire n'est délivré suivant une procédure régulière que si les différents services ou autorités compétents ont été mis à même de se prononcer sur le projet et que, d'autre part, le préfet doit recueillir l'avis du maire avant de se prononcer sur une demande d'autorisation de construire portant sur l'implantation d'éoliennes dont la production n'est pas destinée principalement à une utilisation directe par le demandeur de l'autorisation ;

13. Considérant qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que l'avis du maire de la COMMUNE DE SAINTE-AUSTREBERTHE aurait été recueilli par le préfet du Pas-de-Calais ; que la délibération du conseil municipal de cette commune du 9 septembre 2002 donnant son accord pour l'implantation d'éoliennes sur son territoire ne se prononce pas sur le projet d'aérogénérateurs litigieux déposé par la société Innovent en 2003 ; que, par suite, la COMMUNE DE SAINTE-AUSTREBERTHE est fondée à soutenir que les arrêtés litigieux ont été pris à l'issue d'une procédure irrégulière au motif que l'avis du maire de la commune n'a pas été recueilli ; que, dans les circonstances de l'espèce, cette irrégularité a privé la COMMUNE DE SAINTE-AUSTREBERTHE d'une garantie dès lors que son maire n'a pas pu se prononcer sur le projet litigieux ;

En ce qui concerne l'étude d'impact :

14. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme applicable à la date du dépôt de la demande des permis de construire en application des dispositions de l'article 26 du décret du 5 janvier 2007 précitées : " A. Le dossier joint à la demande de permis de construire comporte : / (...) / 8° L'étude d'impact, lorsqu'elle est exigée ; / (...) " ; qu'aux termes de l'article 2 du décret du 12 octobre 1977 pris pour l'application de l'article 2 de la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature alors en vigueur et désormais codifié à l'article R. 122-3 du code de l'environnement : " Le contenu de l'étude d'impact doit être en relation avec l'importance des travaux et aménagements projetés et avec leurs incidences prévisibles sur l'environnement. L'étude d'impact présente successivement : / 1° Une analyse de l'état initial du site et de son environnement, portant notamment sur les richesses naturelles et les espaces naturels agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs, affectés par les aménagements ou ouvrages ; / 2° Une analyse des effets directs et indirects, temporaires et permanents du projet sur l'environnement, et en particulier sur la faune et la flore, les sites et paysages, le sol, l'eau, l'air, le climat, les milieux naturels et les équilibres biologiques, sur la protection des biens et du patrimoine culturel et, le cas échéant, sur la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses) ou sur l'hygiène, la santé, la sécurité et la salubrité publique ; / 3° Les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue des préoccupations d'environnement, parmi les partis envisagés qui font l'objet d'une description, le projet présenté a été retenu ; / 4° Les mesures envisagées par le maître de l'ouvrage ou le pétitionnaire pour supprimer, réduire et, si possible, compenser les conséquences dommageables du projet sur l'environnement et la santé ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes ; / (...) " ;

15. Considérant que les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative ;

16. Considérant que, d'une part, l'étude d'impact ne fait pas apparaître un bois de quatre hectares situé à deux cents mètres du projet litigieux et ne fournit aucun renseignement concernant sa faune ; qu'il n'est pas établi par les autres pièces du dossier qu'il n'abriterait pas d'espèces animales susceptibles d'être affectées par la présence des aérogénérateurs ; que si, il est vrai, ce bois est séparé de la zone d'implantation des aérogénérateurs par les routes départementales 928 et 124, ces voies ne constituent pas des obstacles infranchissables ; que l'étude d'impact ne présente pas ainsi une analyse complète de l'état initial du site et de son environnement ;

17. Considérant que, d'autre part, si l'étude d'impact comporte une étude acoustique, elle se limite à une seule mesure au droit des habitations situées à quelques centaines de mètres des éoliennes ; que si ces habitations sont certes les plus proches du projet litigieux, elles se trouvent également à proximité immédiate de la route départementale 928 dont la circulation relativement dense tend à réduire le phénomène d'émergence sonore lors du fonctionnement d'aérogénérateurs ; qu'il ne ressort ni de l'étude d'impact ni des autres pièces du dossier que l'étude acoustique ainsi conduite suffirait à rendre compte du niveau d'émergence sonore provoquée par le fonctionnement de ces machines vis-à-vis des autres habitations situées quelque peu en retrait des autres maisons et de la route, à environ 670 mètres, et dans un environnement plus calme ;

18. Considérant qu'enfin, l'étude d'impact recense sous forme d'un tableau vingt-et-un monuments historiques et retient un impact visuel faible du projet avec l'église de Saint-Leu à Huby-Saint-Leu et nul avec les autres monuments ; que ces constatations sont démenties en partie par les photomontages produits par la COMMUNE DE SAINTE-AUSTREBERTHE qui établissent une covisibilité importante du parc éolien avec l'église de Saint-Leu à Huby-Saint-Leu et le centre de ville de la commune d'Hesdin, riche de monuments historiques, notamment son église et son beffroi, situation aggravée par la position en surplomb des aérogénérateurs situés près de la vallée de la Canche ; que si ces photomontages sont eux-mêmes critiqués par la société Innovent qui estime qu'ils reposent sur des exagérations, il ressort de photomontages produits devant le juge administratif par cette société que le phénomène de covisibilité est en grande partie avéré et dans des proportions plus importantes que ne le laissaient penser les indications figurant dans l'étude d'impact ; que l'ensemble des pièces produites tend ainsi à démontrer que l'étude d'impact, sur la base de laquelle les consultations ont été menées et les décisions prises, ne rend pas compte de manière fiable des phénomènes de perception visuelle liés aux aérogénérateurs et à leur positionnement, au regard de la présence massive de monuments historiques de qualité dans le secteur, notamment à Hesdin et Huby-Saint-Leu ;

19. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE SAINTE-AUSTREBERTHE est fondée à soutenir que les documents de l'étude d'impact sont insuffisants au regard des dispositions de l'article 2 du décret du 12 octobre 1977 précitées ; que ces insuffisances et omissions relatives à l'aire d'étude, aux nuisances sonores et à la covisibilité avec les monuments historiques qui n'ont pas été corrigées, ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population et ont été de nature à exercer une influence sur les arrêtés de l'autorité administrative ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme :

20. Considérant qu'aux termes de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales " ;

21. Considérant que le projet de parc éolien est situé sur le territoire des sept vallées et un plateau d'une altitude moyenne de 115 mètres proche de la vallée de la Canche ; que si le schéma régional pour l'éolien de 2003, en vigueur au moment du dépôt du dossier, indiquait que le site d'implantation était en zone de " sensibilité paysagère modérée ", une étude de 2007 proposait de classer le site en zone défavorable à l'éolien et le schéma territorial éolien des sept vallées adopté en janvier 2008 sur la base d'une étude de 2006, a classé le site en zone de " sensibilité majeure au titre du paysage naturel patrimonial et identitaire " ; que, par un avis du 9 juin 2006, le service départemental de l'architecture et du patrimoine s'est prononcé défavorablement sur le projet litigieux " en raison du risque qu'il avait de porter atteinte au caractère unique et à l'ambiance résultant de ces paysages et monuments qui existent à proximité et qu'il ne pouvait qu'appauvrir des paysages subtils et fragiles " ; que, le 4 août 2008, l'architecte des Bâtiments de France a indiqué, confirmant son avis émis en juin 2006, que " toutes les vues extérieures vers le beffroi, l'église d'Hesdin et celle d'Huby-Saint-Leu seront perturbées par la présence de ces éoliennes, que la lecture paysagère de cette vallée humide à la confluence de la Canche et de la Ternoise, qui est actuellement recentrée sur les deux monuments de la ville d'Hesdin, sera réorientée vers les éoliennes situées au sommet du Mont du Quesnoy, le mouvement des pâles attirant inévitablement le regard " ; qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des photographies produites présentant le site d'implantation dans son ensemble que le Mont du Quesnoy, la vallée de la Canche et le secteur d'Hesdin offrent des paysages sauvegardés caractéristiques de cette partie du département ; que les aérogénérateurs, compte tenu de leur taille, de leur lieu d'implantation et de leur position en hauteur, seront particulièrement visibles et affecteront sensiblement ce paysage remarquable ;

22. Considérant qu'en outre, quatre-vingt-dix-huit éoliennes sont implantées dans un rayon de dix-sept kilomètres et vingt-huit ont été autorisées, notamment à moins de dix kilomètres, à l'ouest et au nord du projet litigieux ; que si la direction départementale de l'équipement avait en 2006 émis un avis favorable au projet, c'était sous la réserve que ce projet n'entre pas en concurrence avec ceux envisagés à proximité ; qu'il ressort des pièces du dossier que d'autres projets ont été autorisés dans le même secteur et que le projet en litige autorisé par le préfet du Pas-de-Calais contribuera à une saturation du paysage ;

23. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 18, les photomontages produits, en cours d'instance d'appel, attestent d'une forte visibilité du parc éolien projeté avec le centre ville de Hesdin qui présente un caractère historique et avec l'église de Saint-Leu à Huby-Saint-Leu qui est classée ; que ce constat est partagé par l'architecte des Bâtiments de France ; que, compte tenu de leur implantation en surplomb, de leurs grandes dimensions et du phénomène de covisibilité, les éoliennes envisagées sont de nature à altérer la perception de ces monuments ;

24. Considérant que, par suite, le préfet du Pas-de-Calais, en délivrant les permis de construire litigieux, a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme ;

25. Considérant que, pour l'application des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun des autres moyens repris devant la cour n'est, en l'état de l'instruction, fondé et de nature à entraîner l'annulation des permis de construire contestés ;

26. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE SAINTE-AUSTREBERTHE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 21 juillet 2011, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de trois arrêtés du 1er avril 2008 par lesquels le préfet du Pas-de-Calais a accordé à la société Innovent les permis de construire en vue de la réalisation de quatre aérogénérateurs (éolienne n° 5, éolienne n° 2 et éoliennes nos 3 et 4) sur les parcelles cadastrées section ZA n° 6, section ZB n° 34 et section ZD n° 2, situées sur le territoire de cette commune ; que, par voie de conséquence, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros à la COMMUNE DE SAINTE-AUSTREBERTHE au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que les conclusions de la société Innovent présentées sur le même fondement doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 21 juillet 2011 du tribunal administratif de Lille en tant qu'il rejette les conclusions tendant à l'annulation des arrêtés du 1er avril 2008 par lesquels le préfet du Pas-de-Calais a accordé à la société Innovent trois permis de construire et en tant qu'il rejette les conclusions présentées par la COMMUNE DE SAINTE-AUSTREBERTHE sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, est annulé.

Article 2 : Les arrêtés du 1er avril 2008 par lesquels le préfet du Pas-de-Calais a accordé à la société Innovent les trois permis de construire attaqués sont annulés.

Article 3 : L'Etat versera à la COMMUNE DE SAINTE-AUSTREBERTHE une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par la société Innovent sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE SAINTE-AUSTREBERTHE, à la société Innovent et au ministre de l'égalité des territoires et du logement.

Copie sera transmise pour information au préfet du Pas-de-Calais et, en application des dispositions de l'article R. 751-11 du code de justice administrative, au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Boulogne-sur-Mer.

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N°11DA01541 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11DA01541
Date de la décision : 17/01/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

29 Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: Mme Marie-Odile Le Roux
Rapporteur public ?: M. Moreau
Avocat(s) : BROUTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2013-01-17;11da01541 ?
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