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24/09/2013 | FRANCE | N°12DA00315

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 24 septembre 2013, 12DA00315


Vu, I, sous le n° 12DA00315, la requête enregistrée le 23 février 2012, présentée pour la société Seafrance, représentée par Me C...B..., ès qualité de liquidateur, dont le siège est 1 avenue de Flandre à Paris (75019), la société Axa Corporate Solutions, dont le siège est 4 rue Jules Lefebvre à Paris cedex 9 (75426), la compagnie Nantaise d'assurances maritimes et terrestres, dont le siège est 46 bis rue des Hauts Pavés, BP 80205 à Nantes cedex 1 (44002), la société Generali France, dont le siège est 7 boulevard Haussmann à Paris cedex 9 (75309), la société Groupama

(GAN), dont le siège est 25 quai Lamande au Havre (76600), la société All...

Vu, I, sous le n° 12DA00315, la requête enregistrée le 23 février 2012, présentée pour la société Seafrance, représentée par Me C...B..., ès qualité de liquidateur, dont le siège est 1 avenue de Flandre à Paris (75019), la société Axa Corporate Solutions, dont le siège est 4 rue Jules Lefebvre à Paris cedex 9 (75426), la compagnie Nantaise d'assurances maritimes et terrestres, dont le siège est 46 bis rue des Hauts Pavés, BP 80205 à Nantes cedex 1 (44002), la société Generali France, dont le siège est 7 boulevard Haussmann à Paris cedex 9 (75309), la société Groupama (GAN), dont le siège est 25 quai Lamande au Havre (76600), la société Allianz (AGF), dont le siège est Case courrier 01 à Paris La Défense (92076), les Mutuelles du Mans assurances, dont le siège est 10 boulevard Alexandre Oyon au Mans cedex 9 (72030), la société Le Continent, dont le siège est 7 boulevard Haussmann à Paris cedex 9 (75309), la société Axa Winterthur venant aux droits de Winterthur, dont le siège est Tour Winterthur à Paris La Défense (92085), la société Commercial Union, dont le siège est 125 rue du Président Wilson à Levallois-Perret (92593), la société Hiscox Paris, dont le siège est 19 rue Louis Legrand à Paris (75002), par Me Jean-Serge Rohart ; la société Seafrance et autres demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601525 du 16 décembre 2011 du tribunal administratif de Lille en ce qu'il a seulement condamné l'Etat et la chambre de commerce et d'industrie territoriale de la Côte d'Opale à leur verser 50 % des préjudices qu'ils ont subis ;

2°) de condamner l'Etat et la chambre de commerce et d'industrie territoriale de la Côte d'Opale à payer :

- à la société Seafrance la somme de 57 931 euros en remboursement de la franchise d'assurance restée à sa charge, majorée des intérêts à compter du 13 mars 2006, avec capitalisation des intérêts à compter du 13 mars 2007 ;

- aux compagnies Axa Corporate Solutions et autres la somme de 1 466 560 euros au titre de l'indemnité d'assurance qu'elles ont réglée à la société Seafrance sur la base de la valeur agréée du navire, à la suite de la déclaration en perte totale du " SeaFrance Monet ", majorée des intérêts à compter du 13 mars 2006, avec capitalisation des intérêts à compter du 13 mars 2007 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la chambre de commerce et d'industrie territoriale de la Côte d'Opale la somme de 10 000 euros, d'une part, au profit de la société Seafrance et, d'autre part, des compagnies Axa Corporate Solutions et autres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu, II, sous le n° 12DA01908, la requête enregistrée le 24 décembre 2012, présentée pour la société Seafrance, représentée par Me C...B..., ès qualité de liquidateur, dont le siège est 1 avenue de Flandre à Paris (75019), par Me Jean-Serge Rohart ; la société Seafrance demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601525 du 16 octobre 2012 en ce que le tribunal administratif de Lille a rejeté le surplus de sa demande tendant à ce que l'Etat et la chambre de commerce et d'industrie territoriale de la Côte d'Opale soient condamnés à lui verser la somme de 5 399 500 euros au titre des pertes d'exploitation engendrées par l'immobilisation du navire à la suite de l'accident litigieux et la somme de 57 931 euros au titre de la franchise d'assurance ;

2°) de condamner l'Etat et la chambre de commerce et d'industrie territoriale de la Côte d'Opale à lui verser la somme de 1 132 413 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 8 août 2000, avec capitalisation des intérêts à compter du 9 août 2001, au titre de son préjudice d'exploitation ;

3°) de condamner l'Etat et la chambre de commerce et d'industrie territoriale de la Côte d'Opale à supporter les dépens, y compris les frais de l'expertise de M. A...taxés et liquidés à la somme de 19 701,48 euros ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat et de la chambre de commerce et d'industrie territoriale de la Côte d'Opale la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le décret n° 2010-1012 du 30 août 2010 portant création de la chambre de commerce et d'industrie territoriale de la Côte d'Opale ;

Vu l'arrêté interministériel du 26 décembre 1975 des ministres de l'équipement, de l'industrie et de la recherche, du commerce et de l'artisanat portant approbation du nouveau cahier des charges de la concession d'outillage public de la chambre de commerce et d'industrie de Calais au port de cette ville ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- les conclusions de M. Vladan Marjanovic, rapporteur public,

- et les observations de Me Jean-Serge Rohart, avocat de la société Seafrance, représentée par Me C...B..., liquidateur, et autres et de Me Patrick Evrard, avocat de la chambre de commerce et d'industrie territoriale de la Côte d'Opale ;

1. Considérant que la société Seafrance et autres demandent, notamment, l'annulation, d'une part, du jugement n° 0601525 du 16 décembre 2011 du tribunal administratif de Lille en ce qu'il a seulement condamné l'Etat et la chambre de commerce et d'industrie territoriale de la Côte d'Opale à leur verser 50 % des préjudices qu'ils ont subis et, d'autre part, du jugement n° 0601525 du 16 octobre 2012 en ce que le même tribunal a rejeté le surplus de la demande de la société Seafrance tendant à ce que l'Etat et la chambre de commerce et d'industrie territoriale de la Côte d'Opale soient condamnés à lui verser la somme de 5 399 500 euros au titre des pertes d'exploitation et la somme de 57 931 euros au titre de la franchise d'assurance à la suite des graves avaries entraînant l'immobilisation et l'arrêt définitif du navire transbordeur " Monet " qui a heurté accidentellement, le 29 mars 2000, le musoir du poste n° 5 du port de Calais ; que la chambre de commerce et d'industrie territoriale de la Côte d'Opale et l'Etat forment appels incidents s'agissant des responsabilités retenues à leur encontre ;

2. Considérant que les requêtes susvisées n° 12DA00315 et n° 12DA01908, présentées pour la société Seafrance et autres présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des conclusions dirigées contre l'Etat et sur la fin de non-recevoir opposée par la chambre de commerce et d'industrie territoriale de la Côte d'Opale :

Sur la responsabilité fondée sur le défaut d'entretien de l'ouvrage public :

3. Considérant que le 29 mars 2000, vers cinq heures du matin, le navire transbordeur " Monet " appartenant à la société Seafrance et assurant la liaison transmanche entre le port de Calais et le port de Douvres a, par vent de force 6 à 7 Beaufort soufflant en rafales, heurté le musoir du poste n° 5 du port de Calais en engainant dans la zone d'accostage ; que le navire a subi du fait de ce heurt de graves avaries entraînant son immobilisation et son arrêt définitif ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des différents rapports d'expertise, que le musoir du poste n° 5, ouvrage en béton, paré de palplanches métalliques rigides, n'était pas conçu pour recevoir des navires mais était destiné à protéger le quai ; que, par suite, la circonstance que le musoir aurait une forme arrondie, et non pas une verticalité convenable, engendrée par un coulage trop rapide du béton n'a pu constituer un défaut d'entretien normal de l'ouvrage public ; que, toutefois, le dommage dont a été victime le navire transbordeur " Monet " résulte de ce qu'il appartenait au commandant d'imprimer à son bâtiment une trajectoire qui n'implique pas l'utilisation du musoir à des fins pour lesquelles il n'a pas été conçu ni entretenu ; que la puissance des moteurs du navire n'était pas suffisante pour obvier le déport de trajectoire dû au vent fort ; que, de plus, la ceinture de protection du navire dans sa partie centrale présentait une faiblesse constructive ; que l'excroissance rigide du tuyau de dalotage traversant les deux parois d'étanchéité du transbordeur, en heurtant une palplanche du musoir, a créé, par son enfoncement, la voie d'eau importante ; que, dans ces conditions, l'état du navire et le choix du commandant de ne pas recourir à un remorqueur constituent les causes de l'avarie subie par le navire transbordeur " Monet " ;

Sur la responsabilité au titre de la défaillance de la capitainerie du port dans sa mission de sécurité des mouvements portuaires :

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le commandant du navire n'a pas suffisamment arrondi sa trajectoire par le nord de l'avant-port pour contrer et anticiper l'effet de dérive due au vent qui, bien que fort, ne présentait pas un caractère exceptionnel ; que le navire présentait un angle insuffisamment ouvert par rapport à l'axe du poste n° 5 ; qu'ainsi, le dommage causé au navire transbordeur est uniquement imputable au commandant du navire, la capitainerie du port n'ayant commis aucune faute en n'ayant pas interdit ou limité l'accès à certains postes ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'Etat et la chambre de commerce et d'industrie territoriale de la Côte d'Opale sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille les a condamnés à verser des indemnités au titre de l'accident subi par le navire transbordeur le " Monet " ;

Sur les conclusions tendant à la condamnation de la chambre de commerce et d'industrie territoriale de la Côte d'Opale à verser une indemnité pour dommages intérêts :

7. Considérant que la circonstance que la chambre de commerce et d'industrie territoriale de la Côte d'Opale a soulevé en appel une fin de non-recevoir ne peut constituer, comme l'affirment la société Seafrance et autres, une manoeuvre dolosive ; que, par suite, la société Seafrance et autres ne sont pas fondées, en tout état de cause, à demander la condamnation de la chambre de commerce et d'industrie territoriale de la Côte d'Opale à verser une indemnité pour dommages intérêts, au demeurant non chiffrée ;

Sur les frais d'expertise :

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Seafrance le montant des frais et honoraires de l'expertise effectuée par M.A..., taxés et liquidés à la somme de 19 701,48 euros (TTC) par ordonnance du président du tribunal administratif de Lille en date du 11 septembre 2012, comprenant le montant de l'allocation provisionnelle accordée par ordonnance du 25 juin 2012 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

10. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par les sociétés Seafrance, Axa Corporate Solutions, la compagnie Nantaise d'assurances maritimes et terrestres, les sociétés Generali France, Groupama (GAN), Allianz (AGF), les Mutuelles du Mans assurances, Le Continent, Axa Winterthur venant aux droits de Winterthur, Commercial Union et Hiscox Paris doivent, dès lors, être rejetées ;

11. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des sociétés Seafrance, Axa Corporate Solutions, de la compagnie Nantaise d'assurances maritimes et terrestres, des sociétés Generali France, Groupama (GAN), Allianz (AGF), des Mutuelles du Mans assurances, des sociétés Le Continent, Axa Winterthur venant aux droits de Winterthur, Commercial Union et Hiscox Paris une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la chambre de commerce et d'industrie territoriale de la Côte d'Opale et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les jugements n° 0601525 du 16 décembre 2011 et du 16 octobre 2012 du tribunal administratif de Lille sont annulés.

Article 2 : Les demandes des sociétés Seafrance, Axa Corporate Solutions, de la compagnie Nantaise d'assurances maritimes et terrestres, des sociétés Generali France, Groupama (GAN), Allianz (AGF), des Mutuelles du Mans assurances, des sociétés Le Continent, Axa Winterthur venant aux droits de Winterthur, Commercial Union et Hiscox Paris sont rejetées.

Article 3 : Les frais et honoraires de l'expertise effectuée par M.A..., taxés et liquidés à la somme de 19 701,48 euros (TTC) par ordonnance du président du tribunal administratif de Lille du 11 septembre 2012, comprenant le montant de l'allocation provisionnelle accordée par ordonnance du 25 juin 2012, sont mis à la charge définitive de la société Seafrance, représentée par son liquidateur judiciaire Me C...B....

Article 4 : Les sociétés Seafrance, Axa Corporate Solutions, la compagnie Nantaise d'assurances maritimes et terrestres, les sociétés Generali France, Groupama (GAN), Allianz (AGF), les Mutuelles du Mans assurances, Le Continent, Axa Winterthur venant aux droits de Winterthur, Commercial Union et Hiscox Paris verseront à la chambre de commerce et d'industrie territoriale de la Côte d'Opale une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions des sociétés Seafrance, Axa Corporate Solutions, de la compagnie Nantaise d'assurances maritimes et terrestres, des sociétés Generali France, Groupama (GAN), Allianz (AGF), les Mutuelles du Mans assurances, Le Continent, Axa Winterthur venant aux droits de Winterthur, Commercial Union et Hiscox Paris est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Me C...B..., ès qualité de liquidateur de la société Seafrance, à la société Seafrance, à la société Axa Corporate Solutions, à la compagnie Nantaise d'assurances maritimes et terrestres, à la société Generali France, à la société Groupama (GAN), à la société Allianz (AGF), aux mutuelles du Mans assurances, à la société Le Continent, à la société Axa Winterthur venant aux droits de la société Axa Winterthur, à la société Commercial Union, à la société Hiscox Paris, à la chambre de commerce et d'industrie territoriale de la Côte d'Opale et au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

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Nos12DA00315,12DA01908


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12DA00315
Date de la décision : 24/09/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Travaux publics - Différentes catégories de dommages - Dommages survenus sur les aérodromes - dans les ports - sur les canaux et dans les voies navigables - Ports.

Travaux publics - Différentes catégories de dommages - Dommages causés par l'existence ou le fonctionnement d'ouvrages publics - Conception et aménagement de l'ouvrage.


Composition du Tribunal
Président : M. Mortelecq
Rapporteur ?: M. Marc Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Marjanovic
Avocat(s) : SCP GAUTIER VROOM et ASSOCIÉS ; SCP GAUTIER VROOM et ASSOCIÉS ; SCP VILLENEAU ROHART SIMON et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2013-09-24;12da00315 ?
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