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06/05/2014 | FRANCE | N°13DA00347

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 06 mai 2014, 13DA00347


Vu le recours, enregistré 8 mars 2013, présenté par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ;

Le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002185 du 27 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé, à la demande de l'association pour la protection, la promotion des paysages des cantons d'Oulchy-le-Château et Villers-Cotterêts, la décision du 24 février 2010 du préfet de l'Aisne créant une zone de développement éolien pour le secteur 2

sur une partie du territoire des communes de Parcy-et-Tigny et Vierzy ;

2°) de r...

Vu le recours, enregistré 8 mars 2013, présenté par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ;

Le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002185 du 27 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé, à la demande de l'association pour la protection, la promotion des paysages des cantons d'Oulchy-le-Château et Villers-Cotterêts, la décision du 24 février 2010 du préfet de l'Aisne créant une zone de développement éolien pour le secteur 2 sur une partie du territoire des communes de Parcy-et-Tigny et Vierzy ;

2°) de rejeter la demande de première instance ;

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Charte de l'environnement ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bertrand Baillard, premier conseiller,

- les conclusions de M. Hubert Delesalle, rapporteur public,

- et les observations de Me Irène Vendryes, avocat de l'A3PES ;

1. Considérant que, par un arrêté du 24 février 2010, le préfet de l'Aisne a créé une zone de développement de l'éolien, désignée secteur 2, sur le territoire des communes de Parcy-et-Tigny et de Vierzy ; que, le 1er juin 2010, la même autorité a rejeté le recours gracieux présenté notamment par l'association pour la protection, la promotion des paysages des cantons d'Oulchy-le-Château et Villers-Cotterêts (APPOV), aux droits de laquelle est venue l'association pour la promotion et la préservation des paysages et de l'environnement du Soissonnais (A3PES) ; que le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie relève appel du jugement du 27 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé, à la demande de l'association, ces deux décisions ;

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 110-1 du code de l'environnement, dans sa version applicable aux décisions en litige : " I. - Les espaces, ressources et milieux naturels, les sites et paysages, la qualité de l'air, les espèces animales et végétales, la diversité et les équilibres biologiques auxquels ils participent font partie du patrimoine commun de la nation. / II. - Leur protection, leur mise en valeur, leur restauration, leur remise en état et leur gestion sont d'intérêt général et concourent à l'objectif de développement durable qui vise à satisfaire les besoins de développement et la santé des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Elles s'inspirent, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, des principes suivants : / (...) / 4° Le principe de participation, selon lequel chacun a accès aux informations relatives à l'environnement, y compris celles relatives aux substances et activités dangereuses, et le public est associé au processus d'élaboration des projets ayant une incidence importante sur l'environnement ou l'aménagement du territoire " ; que, d'autre part, aux termes de l'article 10-1 de la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, alors applicable : " Les zones de développement de l'éolien sont définies par le préfet du département en fonction de leur potentiel éolien, des possibilités de raccordement aux réseaux électriques et de la protection des paysages, des monuments historiques et des sites remarquables et protégés. Elles sont proposées par la ou les communes dont tout ou partie du territoire est compris dans le périmètre proposé ou par un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, sous réserve de l'accord de la ou des communes membres dont tout ou partie du territoire est compris dans le périmètre proposé. / La proposition de zones de développement de l'éolien en précise le périmètre et définit la puissance installée minimale et maximale des installations produisant de l'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent pouvant bénéficier, dans ce périmètre, des dispositions de l'article 10. Elle est accompagnée d'éléments facilitant l'appréciation de l'intérêt du projet au regard du potentiel éolien, des possibilités de raccordement aux réseaux électriques et de la protection des paysages, des monuments historiques et des sites remarquables et protégés. / La décision du préfet du département intervient sur la base de la proposition dans un délai maximal de six mois à compter de la réception de celle-ci, après avis de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites et des communes limitrophes à celles dont tout ou partie du territoire est compris dans la zone de développement de l'éolien. Ces avis sont réputés favorables faute de réponse dans un délai de trois mois suivant la transmission de la demande par le préfet. Le préfet veille à la cohérence départementale des zones de développement de l'éolien et au regroupement des installations afin de protéger les paysages. / Les zones de développement de l'éolien créées ou modifiées postérieurement à la publication du schéma régional éolien doivent être situées au sein des parties du territoire régional favorables au développement de l'énergie éolienne définies par ledit schéma. Le schéma régional éolien prend en compte les zones de développement de l'éolien créées antérieurement à son élaboration. A défaut de publication du schéma au 30 juin 2012, le préfet de région élabore le projet de schéma et l'arrête avant le 30 septembre 2012, selon des modalités déterminées par décret en Conseil d'Etat " ;

3. Considérant qu'en vertu de l'article 10 de la même loi, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté préfectoral en litige, le bénéfice de l'obligation d'achat définie par ces dispositions est réservé aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent qui sont implantées dans le périmètre d'une zone de développement de l'éolien définie selon les modalités fixées à l'article 10-1 ;

4. Considérant que les dispositions du 4° du II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement précitées se bornent à énoncer des principes dont la portée a vocation à être définie dans le cadre d'autres lois ; qu'elles n'impliquent, par elles-mêmes, aucune obligation de procéder à l'association du public au processus d'élaboration des projets ayant une incidence importante sur l'environnement ; qu'en l'absence de disposition législative ayant organisé les modalités d'une telle participation, la méconnaissance du principe de participation du public, énoncé au 4° du II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement, ne saurait être utilement invoquée au soutien d'une demande tendant à l'annulation d'un arrêté définissant une zone de développement de l'éolien ; qu'au surplus, la décision préfectorale définissant, en application des dispositions de l'article 10-1 de la loi du 10 février 2000, une zone de développement de l'éolien se borne à délimiter un périmètre privilégié par les autorités publiques pour l'implantation des éoliennes sans autoriser la réalisation de travaux relatifs à une telle implantation ; qu'une telle décision préfectorale ne constitue pas, par suite, en tout état de cause, un " projet " ayant une incidence importante sur l'environnement, au sens des dispositions du 4° du II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement ; que, dès lors, le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens s'est fondé sur la méconnaissance du principe de participation du public tel qu'il a été posé par l'article L. 110-1 du code de l'environnement pour annuler les décisions en litige ;

5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par l'A3PES devant la juridiction administrative ;

6. Considérant qu'il ne ressort d'aucune disposition applicable en l'espèce que la " war graves commission " aurait dû être consultée préalablement à l'adoption de l'arrêté du 24 février 2010 ; que, par suite, le moyen tiré de ce vice de procédure est inopérant ;

7. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 7 de la Charte de l'environnement que le droit " de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement " ne s'impose que dans les conditions et limites définies par les dispositions législatives adoptées pour les mettre en oeuvre ; qu'un arrêté préfectoral autorisant la création d'une zone de développement de l'éolien est pris en application de l'article 10-1 de la loi du 10 avril 2000 ; que ces dispositions, alors en vigueur, rappelées au point 2, ne participent pas à la mise en oeuvre de l'article 7 de la Charte ; que, par suite et en tout état de cause, l'association ne peut utilement se prévaloir de la violation de cet article, à valeur constitutionnelle, par l'arrêté du 24 février 2010 du préfet de l'Aisne ;

8. Considérant que l'A3PES ne peut davantage utilement se prévaloir des termes de la circulaire interministérielle du 19 juin 2006, qui n'a pas valeur réglementaire ;

9. Considérant que si la proposition de création de la zone de développement éolien en litige a été présentée par la communauté de communes du canton d'Oulchy-le-Château, il ressort des pièces du dossier et notamment du rapport de présentation du projet à la commission départementale de la nature, des paysages et des sites de l'Aisne établi le 27 février 2009 par la direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement de Picardie, que l'ensemble des conseils municipaux des communes comprises dans le périmètre initial de la zone de développement de l'éolien et dont font partie les communes de Parcy-Tigny et de Vierzy, sur le territoire desquelles le secteur 2 autorisé se situe, ont émis un avis favorable à ce projet ; qu'il ressort également des pièces du dossier que, par un courrier du 15 décembre 2008, la directrice régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement de Picardie a sollicité l'avis des communes limitrophes au projet présenté, dont la commune de Villemontoire ; que, par suite, l'arrêté attaqué n'est pas intervenu au terme d'une procédure irrégulière telle qu'elle a été définie par l'article 10-1 de la loi du 10 avril 2000, alors en vigueur ;

10. Considérant que l'A3PES n'apporte aucun élément probant de nature à remettre en cause les données de l'atlas éolien régional de Picardie établi par l'agence de développement et de maîtrise de l'énergie (ADEME) sur lesquelles s'est fondé le préfet de l'Aisne pour adopter l'arrêté en litige et au terme duquel le potentiel éolien sur la zone concernée est qualifié " d'assez satisfaisant " avec une vitesse moyenne de vent comprise entre 4,7 et 6 mètres par seconde à 40 mètres d'altitude ; que, par suite, le préfet n'a pas commis d'erreur d'appréciation au regard du potentiel éolien existant sur le secteur ;

11. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport de présentation évoqué au point 9, que le secteur 2 se trouve à moins de 8 kilomètres d'un poste de raccordement présentant une capacité compatible avec le projet ; qu'aucun texte n'impose la production d'une étude de faisabilité ou d'une carte faisant apparaître le tracé des lignes électriques existantes ou à créer ; que, par suite, le préfet n'a pas commis d'erreur d'appréciation au regard des possibilités de raccordement aux réseaux électriques existants au niveau du secteur concerné ;

12. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'avis de la commission départementale de la nature des paysages et des sites de l'Aisne du 27 février 2009, que les zones de développement de l'éolien et les parcs éoliens existants ou en projet situés à proximité du territoire concerné ont été pris en considération ; que la direction régionale de l'environnement a estimé que le secteur 2 autorisé était situé sur un territoire présentant de faibles enjeux paysagers et patrimoniaux ; que si une covisibilité avec différents monuments historiques, dont en particulier l'église de Septmonts, n'est pas exclue, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'impact sur ces sites serait significatif ou ferait obstacle à toute implantation d'éoliennes ; que l'A3PES n'assortit pas, en outre, ses allégations relatives à l'atteinte portée à différents sites naturels de pièces probantes ; que, par suite, le préfet n'a pas commis d'erreur d'appréciation au regard de la protection des paysages, des monuments historiques et des sites remarquables et protégés ;

13. Considérant que l'association requérante ne peut utilement se prévaloir du schéma régional éolien de Picardie qui est entré en vigueur le 30 juin 2012, postérieurement aux décisions en litige ;

14. Considérant que l'A3PES n'apporte, en tout état de cause, aucun élément au soutien de son moyen tiré des perturbations générées par la zone de développement de l'éolien en litige sur la vie quotidienne et la sécurité, permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a annulé l'arrêté du 24 février 2010 et la décision du 1er juin 2010 du préfet de l'Aisne ;

16. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que l'A3PES demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 27 décembre 2012 du tribunal administratif d'Amiens est annulé.

Article 2 : La demande présentée par l'association pour la protection, la promotion des paysages des cantons d'Oulchy-le-Château et Villers-Cotterêts devant le tribunal administratif d'Amiens et les conclusions de l'association pour la promotion et la préservation des paysages et de l'environnement du Soissonais présentées en appel au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et l'association pour la promotion et la préservation des paysages et de l'environnement du Soissonais.

Copie sera transmise pour information au préfet de l'Aisne.

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N°13DA00347 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13DA00347
Date de la décision : 06/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - Forme et procédure - Procédure consultative - Consultation obligatoire.

Nature et environnement.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Bertrand Baillard
Rapporteur public ?: M. Delesalle
Avocat(s) : VENDRYES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2014-05-06;13da00347 ?
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