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06/05/2014 | FRANCE | N°13DA01362

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3 (bis), 06 mai 2014, 13DA01362


Vu la requête, enregistrée le 30 août 2013, et le mémoire complémentaire, enregistré le 26 septembre 2013, présentés par le préfet de l'Oise qui demande à la cour ;

1°) d'annuler le jugement n° 1303978 du 1er juillet 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille, à la demande de M. F...A..., a annulé l'arrêté du 25 juin 2013 l'obligeant à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant le pays de destination pour son éloignement et ordonnant son placement en rétention ;

2°) de rejeter la

demande de M.A... ;

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Vu la requête, enregistrée le 30 août 2013, et le mémoire complémentaire, enregistré le 26 septembre 2013, présentés par le préfet de l'Oise qui demande à la cour ;

1°) d'annuler le jugement n° 1303978 du 1er juillet 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille, à la demande de M. F...A..., a annulé l'arrêté du 25 juin 2013 l'obligeant à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant le pays de destination pour son éloignement et ordonnant son placement en rétention ;

2°) de rejeter la demande de M.A... ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement dispensant le rapporteur public, sur sa proposition, d'exposer à l'audience ses conclusions ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Perrine Hamon, premier conseiller ;

1. Considérant que M.A..., ressortissant indien, déclare être entré irrégulièrement en France dans le courant de l'année 2004 ; qu'à la suite de son interpellation le 25 juin 2013, le préfet de l'Oise, par arrêtés du 25 juin 2013, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a ordonné son placement en rétention et fixé l'Inde comme pays de destination pour son éloignement ; que le préfet de l'Oise relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille, saisi par M.A..., a annulé ces décisions ;

2. Considérant que, dans l'hypothèse où il a été porté atteinte dans une situation donnée au droit d'être entendu reconnu aux étrangers par le droit de l'Union, il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de 1'Union européenne (10 septembre 2013, aff. n° C-383/13) qu'il appartient au juge national chargé de l'appréciation de la légalité de la décision affectée de ce vice d'apprécier dans chaque cas d'espèce si cette violation a effectivement privé celui qui l'invoque de la possibilité de mieux faire valoir sa défense dans une mesure telle que la procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent ;

3. Considérant que, après son interpellation, M. A...a été entendu par les services de police aux frontières ; que si, à cette occasion, il a communiqué divers renseignements concernant les motifs et conditions de son retour sur le territoire français en situation irrégulière après une première mesure d'éloignement prise à son encontre en 2007, a déclaré n'avoir accompli aucune démarche de régularisation de sa situation, être hébergé à titre gratuit à une adresse indéterminée, ne détenir aucun document d'identité et ne pas vouloir regagner son pays d'origine, il ne ressort pas du procès-verbal de cette audition, ni d'aucune autre pièce du dossier, qu'il aurait été, avant l'intervention de la mesure d'éloignement, informé de ce que le préfet de l'Oise était susceptible de prendre une telle décision à son encontre ; qu'ainsi, son droit à être entendu préalablement à cette mesure n'a pas été respecté ; que, toutefois et contrairement à ce qu'il allègue, il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu notamment des éléments qu'il a fait valoir pendant cette audition, que la violation de ce droit l'a effectivement privé de la possibilité de mieux faire valoir sa défense, dans une mesure telle que la décision d'éloignement n'aurait pas été prise si ce droit avait été respecté ; que, par suite, le préfet de l'Oise est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler la décision contestée, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a estimé que la procédure suivie avait porté atteinte au principe fondamental du droit d'être entendu, tel qu'énoncé au 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...devant le tribunal administratif de Lille ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

5. Considérant que, par un arrêté du 7 juin 2013 publié le 13 juin 2013 au recueil des actes administratifs de la préfecture, M. B...C..., sous-préfet, secrétaire général de la préfecture, a reçu délégation de M. D...E..., préfet de l'Oise, pour signer en son nom tous arrêtés, correspondances, décisions, requêtes et circulaires relevant des attributions de l'Etat dans le département, à l'exception de certains actes parmi lesquels ne figurent pas les décisions faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement et celles ordonnant le placement en rétention administrative ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté manque en fait ;

6. Considérant que la décision, qui mentionne les considérations de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde, est suffisamment motivée ;

7. Considérant que l'intéressé n'a jamais présenté de demande d'asile ni fait état, lors de son interpellation, de son intention de présenter une telle demande et n'a jamais évoqué de craintes en cas de retour dans son pays ; qu'il ne peut, dès lors et en tout état de cause, utilement invoquer la violation des dispositions de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

8. Considérant que la décision portant obligation de quitter le territoire n'emporte pas par elle-même reconduite dans un pays déterminé ; que, par suite, M. A...ne peut utilement se prévaloir de ce que le préfet se serait fondé sur des faits erronés en ce qui concerne les dangers encourus en cas de retour dans son pays ;

9. Considérant que M. A...ne peut établir la durée de sa présence en France, où il s'est maintenu en situation irrégulière ; que son épouse et ses deux enfants résident en Inde ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, la décision contestée ne porte pas au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle ne méconnaît donc pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes raisons, la décision attaquée n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français prononcée à son encontre par le préfet de l'Oise ;

Sur le pays de destination :

11. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 5 que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté ;

12. Considérant que la décision, qui mentionne les considérations de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde, est suffisamment motivée ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 10 que M. A...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

14. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu des éléments, mentionnés au point 3, dont M. A...a fait état pendant son audition, la violation de son droit d'être entendu, tel que consacré au 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'aurait effectivement privé de la possibilité de mieux faire valoir sa défense, dans une mesure telle que la décision en litige n'aurait pas été prise si ce droit avait été respecté ;

15. Considérant que, par ses seules déclarations relatives à des menaces de la part des autorités policières de son pays qui ne sont pas corroborées par des pièces probantes, M.A..., qui n'a, au demeurant, jamais déposé de demande d'asile lors de ses séjours en France et au Portugal, n'apporte pas les éléments permettant de tenir pour établi que la décision fixant le pays de destination méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ou les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la décision ordonnant le placement en rétention administrative :

16. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 10 que M. A...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

17. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 5 que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté ;

18. Considérant que la décision comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, par suite, elle est suffisamment motivée ;

19. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu des éléments, mentionnés au point 3, dont M. A...a fait état pendant son audition, la violation de son droit d'être entendu, tel que consacré au 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'aurait effectivement privé de la possibilité de mieux faire valoir sa défense dans une mesure telle que la décision n'aurait pas été prise si ce droit avait été respecté ;

20. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la demande de M. A...doit être rejetée ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement attaqué est annulé.

Article 2 : La demande de M. A...est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. F...A....

Copie sera adressée pour information au préfet de l'Oise.

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N°13DA01362


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 13DA01362
Date de la décision : 06/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: Mme Perrine Hamon
Rapporteur public ?: M. Delesalle

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2014-05-06;13da01362 ?
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