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31/12/2014 | FRANCE | N°13DA00059

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 31 décembre 2014, 13DA00059


Vu la requête, enregistrée le 16 janvier 2013, présentée par le préfet de la Seine-Maritime ; le préfet de la Seine-Maritime demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1203440-1202786 du 3 décembre 2012 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a, d'une part, annulé l'arrêté du 4 juillet 2012 en ce qu'il obligeait M. B...A...à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixait le pays à destination duquel il pourra être reconduit et lui interdisait le retour sur le territoire français pendant une dur

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Vu la requête, enregistrée le 16 janvier 2013, présentée par le préfet de la Seine-Maritime ; le préfet de la Seine-Maritime demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1203440-1202786 du 3 décembre 2012 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a, d'une part, annulé l'arrêté du 4 juillet 2012 en ce qu'il obligeait M. B...A...à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixait le pays à destination duquel il pourra être reconduit et lui interdisait le retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans, et d'autre part, annulé l'arrêté du 29 novembre 2012 ordonnant le placement en rétention administrative de M. A... ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Rouen ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur ;

1. Considérant que le préfet de la Seine-Maritime relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a annulé, d'une part, l'arrêté du 4 juillet 2012 en ce qu'il obligeait M.A..., ressortissant togolais né le 31 décembre 1976, à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixait le pays à destination duquel il pourra être reconduit et lui interdisait le retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans, et, d'autre part, l'arrêté du 29 novembre 2012 ordonnant le placement en rétention administrative de l'intéressé ;

Sur la recevabilité de la requête :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été notifié au préfet le 19 décembre 2012 ; que l'appel, enregistré au greffe de la cour le 16 janvier 2013, a dès lors été régulièrement formé dans le délai de recours contentieux ;

3. Considérant qu'aux termes du I de l'article R. 811-10-1 du code de justice administrative : " (...) le préfet présente devant la cour administrative d'appel les mémoires et observations produits au nom de l'Etat lorsque le litige est né de l'activité des services de la préfecture dans les matières suivantes : 1° Entrée et séjour des étrangers en France (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 412-1 du même code : " La requête doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée, sauf impossibilité justifiée, de la décision attaquée ou, dans le cas mentionné à l'article R. 421-2, de la pièce justifiant de la date de dépôt de la réclamation. / Cette décision ou cette pièce doit être accompagnée de copies dans les conditions fixées à l'article R. 411-3 " ;

4. Considérant que, par un arrêté du 31 mai 2012, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture, le préfet de la Seine-Maritime a donné délégation à M. Thierry Hegay, secrétaire général de la préfecture, pour signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, documents, correspondances, contrats et conventions relevant des attributions de l'Etat dans le département à l'exception de certains actes dont ne font pas partie les requêtes introduites devant la cour administrative d'appel ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la requête doit être écarté ;

5. Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles R. 412-1 et R. 811-13 du code de justice administrative, les requêtes d'appel doivent, à peine d'irrecevabilité, être accompagnées d'une copie du jugement attaqué ; qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Seine Maritime a produit, à l'appui de la requête qu'il a introduite le 16 janvier 2013, la copie du jugement attaqué ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la requête d'appel serait irrecevable comme n'étant pas accompagnée d'une copie du jugement attaqué doit être écarté ;

6. Considérant que si M. A..., entré en France le 10 juin 2010 pour solliciter le statut de réfugié, se prévalait devant le tribunal de sa relation amoureuse avec une ressortissante française avec laquelle il envisageait de se marier ainsi que de son implication dans le monde associatif, il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé, qui se borne à produire une attestation établie pour les besoins de la cause postérieurement à l'arrêté attaqué, ne justifie ni de la réalité ni même de la stabilité du lien marital dont il fait état depuis le mois de janvier 2011 ; qu'il n'établit pas davantage être dépourvu de toute attache familiale au Togo où résident son enfant mineur ainsi que la mère de ce dernier et où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de 33 ans ; qu'il ne peut davantage se prévaloir d'une longue durée de séjour sur le territoire national à la date de l'arrêté du 4 juillet 2012 ; que dans ces conditions, le préfet de la Seine-Maritime est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a retenu le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise le représentant de l'Etat pour annuler les arrêtés du 4 juillet 2012 et du 29 novembre 2012 ;

7. Considérant qu'il y a lieu pour la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...devant le tribunal administratif et la cour ;

Sur l'obligation de quitter le territoire :

8. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui doivent être lues à la lumière de celles de l'article 6 paragraphe 6 et de l'article 12, paragraphe 1, de la directive susvisée du 16 décembre 2008, que la motivation d'une mesure d'obligation de quitter le territoire se confond avec celle du refus de séjour lorsqu'elle en découle et n'implique pas, par conséquent, de mention spécifique, dès lors que ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été visées, pour respecter ces dispositions qui ne sont pas incompatibles avec les exigences de l'article 12, paragraphe 1, de la directive du 16 décembre 2008 ;

9. Considérant que la motivation de l'obligation de quitter le territoire se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement ; que la décision de refus de titre de séjour du 4 juillet 2012 comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et mentionne les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permettent d'assortir le refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ; que, dès lors, la décision faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français est suffisamment motivée au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979 ;

10. Considérant que M. A...a présenté une demande de titre de séjour sur le fondement de l'asile ; qu'il a donc été mis à même de faire valoir, avant l'intervention de l'arrêté qui lui a refusé l'admission au séjour et l'a également obligé à quitter le territoire français, tous éléments d'information ou arguments de nature à influer sur le contenu de ces mesures ; que, par suite, la garantie consistant dans le droit à être entendu préalablement à la mesure d'éloignement, telle qu'elle est notamment consacrée par le droit de l'Union, n'a pas été méconnue ; qu'il ne ressort pas en outre des termes de l'arrêté attaqué que le préfet se soit abstenu de procéder à un examen particulier de la situation personnelle de M. A...avant de prononcer une obligation de quitter le territoire français à son encontre ;

11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre (...) : 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi (...) " ; que toutefois, les certificats médicaux figurant au dossier ne sont pas de nature, eu égard à leur teneur et à leur caractère peu circonstancié, à établir que l'état de santé de M. A...présente une gravité telle que son maintien sur le territoire est indispensable, ni qu'il ne pourrait bénéficier de soins appropriés dans son pays d'origine ; que, par suite, le préfet de la Seine-Maritime, qui n'était pas tenu dans ces conditions de recueillir l'avis du médecin de l'agence régionale de santé avant de prendre une mesure d'éloignement, n'a pas méconnu les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 6 que la décision attaquée n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M.A... ;

Sur le pays de destination :

13. Considérant qu'en rappelant à M. A...qu'il n'établissait pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays, le représentant de l'Etat a suffisamment motivé sa décision en fait ; que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision fixant le pays de destination ne peut qu'être écarté ;

14. Considérant que si M. A...fait valoir qu'il encourrait des risques personnels en cas de retour au Togo, cette allégation n'est assortie d'aucune précision de nature à en établir la pertinence ; que, par suite, l'intéressé, dont la demande d'asile a été au demeurant rejetée par la Cour nationale du droit d'asile le 10 mai 2012, n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Seine-Maritime, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il se serait cru lié par la décision rendue par la juridiction administrative spécialisée, aurait méconnu tant les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :

15. Considérant que, par un arrêté du 31 mai 2012, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Seine-Maritime, le préfet a donné délégation à M. Thierry Hegay, secrétaire général de la préfecture, à l'effet de signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, documents, correspondances, contrats et conventions relevant des attributions de l'Etat dans le département, sous réserve de certaines exceptions parmi lesquelles ne figurent pas les décisions concernant les ressortissants étrangers ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée doit être écarté ;

16. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " III. L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. (...) / L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français " ; qu'il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères que ces dispositions énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux ; que la décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse, à sa seule lecture, en connaître les motifs ;

17. Considérant qu'en l'espèce, après avoir relevé la durée de la présence de M. A...en France, ainsi que la nature et l'ancienneté de ses liens avec la France, le préfet a également pris en compte tant le comportement passé de l'intéressé sur le territoire français que le fait que sa présence en France ne constituait pas une menace pour l'ordre public ; qu'il a enfin énoncé les dispositions du cinquième et du septième alinéa du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le préfet de la Seine-Maritime, qui a examiné l'ensemble des critères prévus par les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a suffisamment motivé sa décision en fait et en droit ;

18. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'entrée en France de M. A...est récente, qu'il ne démontre pas l'existence d'attache ancienne et stable sur le territoire national et n'est pas dépourvu lui-même de toute attache familiale au Togo ; qu'enfin les dispositions du dernier alinéa du III de l'article L. 511-1 du code précité donnent à l'intéressé la faculté de solliciter l'abrogation de plein droit de cette mesure de police administrative dès son retour dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, alors même qu'il n'a pas fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement et ne peut être regardé comme présentant une menace à l'ordre public, la décision du préfet de la Seine-Maritime lui interdisant le retour en France pendant deux ans ne méconnaît pas les dispositions du III de l'article L. 511-1 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'est pas entachée d'erreur dans l'appréciation de la situation personnelle de M.A... ;

Sur la rétention administrative :

19. Considérant que l'arrêté du 29 novembre 2012 prononçant le placement en rétention de M. A...comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde ; que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cet arrêté doit dès lors être écarté ; qu'il en est de même, pour les motifs énoncés précédemment, de celui tiré de l'illégalité, par voie d'exception, de l'obligation de quitter le territoire français ;

20. Considérant qu'en vertu du paragraphe 1 de l'article 13 de la directive du 16 décembre 2008 : " le ressortissant concerné d'un pays tiers dispose d'une voie de recours effective pour attaquer les décisions liées au retour (...) devant une autorité judiciaire ou administrative compétente ou une instance compétente composée de membres impartiaux et jouissant de garanties d'indépendance " ; que selon les termes du paragraphe 2 de l'article 15 de la même directive : " (...) Si la rétention a été ordonnée par des autorités administratives, les États membres : / a) soit prévoient qu'un contrôle juridictionnel accéléré de la légalité de la rétention doit avoir lieu le plus rapidement possible à compter du début de la rétention, / b) soit accordent au ressortissant concerné d'un pays tiers le droit d'engager une procédure par laquelle la légalité de la rétention fait l'objet d'un contrôle juridictionnel accéléré qui doit avoir lieu le plus rapidement possible à compter du lancement de la procédure en question. Dans ce cas, les États membres informent immédiatement le ressortissant concerné d'un pays tiers de la possibilité d'engager cette procédure. / Le ressortissant concerné d'un pays tiers est immédiatement remis en liberté si la rétention n'est pas légale (...) " ;

21. Considérant que les dispositions des articles L. 512-1 et suivants et L. 551-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, prévoient, d'une part, que l'étranger placé en rétention administrative peut contester cette décision, dans un délai de quarante-huit heures, devant le président du tribunal administratif, qui statue dans un délai de soixante-douze heures, y compris le cas échéant à l'appui d'une demande tendant à l'annulation de la mesure d'éloignement concernée pour laquelle le recours a un effet suspensif, et d'autre part, que cette mesure privative de liberté ne peut être prolongée au-delà de cinq jours que sur décision du juge des libertés et de la détention, qui statue dans un délai de vingt-quatre heures à compter de sa saisine ; qu'en organisant ce contentieux, le législateur a eu pour but de garantir l'examen prioritaire de la légalité de ces mesures et, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, de permettre un traitement plus efficace des procédures d'éloignement des étrangers en situation irrégulière ; que la circonstance que les dispositions du 6° de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile autorise l'administration à prononcer la rétention d'un ressortissant étranger ayant fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prononcée depuis moins d'un an et pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré n'est pas contraire à l'objectif de garantir une voie de recours effectif ni à celui de célérité du contrôle juridictionnel exigés par les dispositions précitées des articles 13 et 15 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008, dès lors que ces procédures garantissent, dès la notification de la mesure de rétention, un droit au recours effectif devant le juge administratif qui statue rapidement sur la légalité de cette mesure mais aussi, le cas échéant, de la décision d'éloignement puis une intervention du juge judiciaire dans des délais eux-mêmes très brefs ; que dans ces conditions, M. A...n'est pas fondé à soutenir que lesdites dispositions auraient été incorrectement transposées en droit interne ;

22. Considérant qu'aux termes de l'article 5, paragraphe 4 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d'introduire un recours devant un tribunal, afin qu'il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale " ; qu'il ressort des dispositions du paragraphe III de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a organisé une procédure spéciale permettant au juge administratif de statuer rapidement sur la légalité des mesures relatives à l'éloignement des étrangers, hors la décision refusant le séjour, lorsque ces derniers sont placés en rétention ou assignés à résidence, ainsi que sur la légalité des décisions de placement en rétention ou d'assignation à résidence elles-mêmes ; que le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné à cette fin statue alors au plus tard soixante-douze heures à compter de sa saisine ; qu'en vertu de l'article L. 512-3 du même code, lorsque le tribunal administratif est saisi d'une demande d'annulation d'une obligation de quitter le territoire français, cette mesure ne peut être exécutée d'office avant que le tribunal n'ait statué ; que les stipulations de l'articles 5, paragraphe 4 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui garantissent le droit d'une personne privée de liberté de former un recours devant un tribunal qui statue rapidement sur la légalité de la détention, n'ont ni pour objet ni pour effet de conduire à reconnaître un caractère suspensif aux recours susceptibles d'être exercés contre les mesures de placement en rétention administrative prises pour assurer l'exécution des décisions, distinctes, qui ont ordonné l'éloignement des étrangers placés en rétention ; que, dès lors, la décision attaquée n'a pas méconnu les stipulations invoquées ;

23. Considérant que les litiges relatifs à l'éloignement et à la mise en rétention des ressortissants étrangers n'entrent pas dans le champ d'application de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que M. A...ne saurait utilement s'en prévaloir ; que M.A..., qui a bénéficié de l'ensemble des garanties prévues par les dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas fondé à invoquer, par la procédure suivie à son égard, une méconnaissance de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

24. Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : / 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé ; (...) " ;

25. Considérant, d'une part, que M. A...se trouvait dans le cas prévu par les dispositions du 6° de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettant au préfet de la Seine-Maritime de le placer en rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ; que, d'autre part, il ressort des pièces du dossier que M. A... était dépourvu de document d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il n'a pas démontré disposer d'une adresse stable lors de son interpellation et qu'il a indiqué ne pas vouloir retourner dans son pays d'origine ; qu'il ne justifiait ainsi d'aucune garantie de représentation effective propre à prévenir tout risque de fuite, pour l'application des dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le préfet a pu, sans entacher son arrêté d'une erreur d'appréciation, ordonner le placement en rétention administrative de M.A... ;

26. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Seine-Maritime est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a annulé, d'une part, l'arrêté du 4 juillet 2012 en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français, fixe le pays à destination duquel M. A... pourra être reconduit et lui interdit l'entrée sur le territoire français pour une durée de deux ans, d'autre part, celui du 29 novembre 2012 plaçant l'intéressé en rétention administrative ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions présentées en appel par M. A..., tendant à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement nos 1203440-1202786 du 3 décembre 2012 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a, d'une part, prononcé l'annulation de l'arrêté du 4 juillet 2012 du préfet de la Seine-Maritime en tant que ce dernier obligeait M. A...à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine et l'interdisait de retourner sur le territoire pendant une durée de deux ans, d'autre part, prononcé celle de l'arrêté du 29 novembre 2012 du même préfet plaçant l'intéressé en rétention administrative est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Rouen et ses conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B...A....

Copie sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.

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N°13DA00059


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13DA00059
Date de la décision : 31/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. Hoffmann
Rapporteur ?: M. Marc (AC) Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Marjanovic
Avocat(s) : SELARL ANTOINE MARY et CAROLINE INQUIMBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2014-12-31;13da00059 ?
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