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17/02/2015 | FRANCE | N°13DA01591

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (quater), 17 février 2015, 13DA01591


Vu la requête, enregistrée le 19 septembre 2013, présentée pour la SCI des Ardents, dont le siège est 4 rue Neuve des Ardents à Arras (62000), par Me B...A... ; la SCI des Ardents demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101529 du 4 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'ordonnance en date du 10 mars 2011 par laquelle le président du tribunal administratif de Lille a taxé et liquidé les frais et honoraires d'expertise à la somme de 4 304,52 euros ;

2°) d'annuler cette ordonnance ; r>
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Vu la requête, enregistrée le 19 septembre 2013, présentée pour la SCI des Ardents, dont le siège est 4 rue Neuve des Ardents à Arras (62000), par Me B...A... ; la SCI des Ardents demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101529 du 4 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'ordonnance en date du 10 mars 2011 par laquelle le président du tribunal administratif de Lille a taxé et liquidé les frais et honoraires d'expertise à la somme de 4 304,52 euros ;

2°) d'annuler cette ordonnance ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Laurent Domingo, premier conseiller,

- les conclusions de M. Vladan Marjanovic, rapporteur public ;

Sur la régularité du jugement :

1. Considérant qu'à l'appui de sa demande, la SCI des Ardents soutenait notamment que l'expert ne pouvait prétendre au paiement de vacations correspondant à ses temps de déplacement ; que le tribunal ne s'est pas prononcé sur ce moyen, qui n'était pas inopérant ; que par suite, son jugement doit être annulé ;

2. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la SCI des Ardents devant le tribunal administratif d'Amiens ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'ordonnance du 10 mars 2011 :

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 621-11 du code de justice administrative, les honoraires des experts sont liquidés et taxés par le président du tribunal administratif qui tient compte " des difficultés des opérations, de l'importance, de l'utilité et de la nature du travail fourni par l'expert ou le sapiteur " et arrête " sur justificatifs le montant des frais et débours qui seront remboursés à l'expert " ; qu'aux termes de l'article R. 621-13 du même code : " Lorsque l'expertise a été ordonnée sur le fondement du titre III du livre V, le président du tribunal (...), après consultation, le cas échéant, du magistrat délégué, (...) en fixe les frais et honoraires par une ordonnance prise conformément aux dispositions des articles R. 621-11 et R. 761-4. Cette ordonnance désigne la ou les parties qui assumeront la charge de ces frais et honoraires. (...) Dans le cas où les frais d'expertise mentionnés à l'alinéa précédent sont compris dans les dépens d'une instance principale, la formation de jugement statuant sur cette instance peut décider que la charge définitive de ces frais incombe à une partie autre que celle qui a été désignée par l'ordonnance mentionnée à l'alinéa précédent ou par le jugement rendu sur un recours dirigé contre cette ordonnance " ; qu'aux termes de l'article R. 761-4 : " La liquidation des dépens, y compris celle des frais et honoraires d'expertise définis à l'article R. 621-11, est faite par ordonnance du président de la juridiction, après consultation du président de la formation de jugement ou, en cas de référé ou de constat, du magistrat délégué (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 761-5 : " Les parties, l'Etat lorsque les frais d'expertise sont avancés au titre de l'aide juridictionnelle ainsi que, le cas échéant, l'expert, peuvent contester l'ordonnance mentionnée à l'article R. 761-4 devant la juridiction à laquelle appartient l'auteur de l'ordonnance (...) " ;

4. Considérant que l'ordonnance par laquelle le président du tribunal liquide et taxe les frais et honoraires d'expertise revêt un caractère administratif et non juridictionnel ; que le recours dont elle peut faire l'objet en application des dispositions précitées de l'article R. 761-5 du code de justice administrative est un recours de plein contentieux par lequel le juge détermine les droits à rémunération de l'expert ainsi que les parties devant supporter la charge de cette rémunération ; que, par suite, la SCI des Ardents ne peut utilement invoquer, pour contester le montant et la mise à sa charge des frais et honoraires de l'expertise arrêtés par l'ordonnance attaquée, la circonstance que l'expert n'a pas joint le détail de l'état de ses vacations, frais et débours à son rapport d'expertise ;

5. Considérant que les dispositions de l'article R. 621-12 du code de justice administrative, en vertu desquelles le président de la juridiction, après consultation du président de la formation de jugement, peut, soit au début de l'expertise, si la durée ou l'importance des opérations paraît le comporter, soit au cours de l'expertise ou après le dépôt du rapport et jusqu'à l'intervention du jugement sur le fond, accorder aux experts et aux sapiteurs, sur leur demande, une allocation provisionnelle à valoir sur le montant de leurs honoraires et débours, ne sont pas applicables aux ordonnances prises sur le fondement de l'article R. 621-13 du même code et par lesquelles le président du tribunal fixe, comme en l'espèce, les frais et honoraires de l'expertise ordonnée sur le fondement du titre III du livre V ; que, par suite, la SCI des Ardents ne peut utilement se prévaloir de ces dispositions ;

6. Considérant qu'il n'appartient pas au président de juridiction, taxant et liquidant les frais d'une expertise par décision administrative sur le fondement de l'article R. 621-11 du code de justice administrative, ni au juge saisi d'un recours contre cette ordonnance, de se prononcer sur la régularité des opérations de l'expertise ; qu'il leur incombe seulement d'apprécier l'utilité et la nature du travail fourni par l'expert ;

7. Considérant que M.D..., expert désigné, avait pour mission, aux termes de l'ordonnance du 14 avril 2010, de rechercher tous éléments relatifs aux causes et conséquences des désordres affectant l'immeuble situé 6 place de la Vacquerie à Arras ; qu'il lui appartenait en particulier de donner son avis sur la ou les causes de chaque désordre et notamment de dire, ainsi que le soutenait la SCI des Ardents, si les désordres sont en lien avec les travaux de voirie effectués par la commune d'Arras ; qu'il résulte du rapport rendu le 10 mars 2011 que M. D... a mis en évidence l'existence des fissures et a considéré qu'elles trouvaient leur origine dans le décollement de l'enduit, constitué d'un mortier de ciment posé sur le mur construit en pierre de tuffeau, du fait de la pénétration d'eau pluviale et de l'action du gel ; qu'il a conclu que ces désordres n'étaient pas en lien avec les travaux effectués par la commune d'Arras, ni par le passage ou le stationnement de véhicules lourds dans les rues concernées par ces travaux ; que, par suite, la SCI des Ardents n'est pas fondée à soutenir que l'expert n'a pas rempli la mission qui lui était assignée ;

8. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que les frais de secrétariat, d'affranchissement et de reprographie soient, compte tenu des réunions organisées et des diligences accomplies par l'expert, excessifs ;

9. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article R. 621-11 du code de justice administrative que les honoraires comprennent toute démarche faite par l'expert en vue de l'accomplissement de sa mission ; que les déplacements effectués par l'expert pour se rendre à Arras satisfont à cette exigence ; qu'il y a donc lieu d'accorder une rémunération pour le temps correspondant à ces déplacements, laquelle se distingue, par son objet, du remboursement des frais occasionnés par ces déplacements ; que, toutefois, la rémunération de ces déplacements a été effectuée sur la base d'un tarif identique à celui qui a été appliqué aux autres opérations d'expertise, alors que le travail fourni n'est pas de même nature ; que les déplacements effectués par l'expert, correspondant à une durée approximative de 3h30 sur les 7 heures prises en compte au titre des visites et vacations, devront être rémunérés à la moitié du taux horaire appliqué aux autres opérations d'expertise ; que, dans ces conditions, il sera accordé à l'expert une somme globale de 500 euros hors taxes au titre des visites et vacations ;

10. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article R. 621-13 du code de justice administrative, dérogeant sur ce point à l'article R. 761-1 du même code, que la répartition des frais et honoraires de l'expert entre les parties intervient, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu notamment de l'utilité de l'expertise pour ces parties, sans que cette répartition soit déterminée par la seule circonstance que l'une de ces parties l'a demandée ou, à l'inverse, en a contesté le bien-fondé ; qu'en l'espèce, compte tenu de l'utilité de l'expertise pour les parties et du montant des honoraires et frais demandés, il y a lieu de mettre à la charge de la SCI des Ardents la totalité de la somme due à l'expert ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...a droit à une somme de 4 107,18 euros ; qu'il y a lieu de mettre cette somme à la charge de la SCI des Ardents ; que la décision par laquelle la juridiction administrative met les frais d'expertise à la charge d'une partie ayant le caractère d'une condamnation à une indemnité, au sens de l'article 1153-1 du code civil, les intérêts sur le montant des frais et honoraires de l'expert ne courent qu'à compter de la date à laquelle ils ont été fixés par la décision juridictionnelle ; que M. D...a droit aux intérêts de la somme de 4 107,18 euros à compter de la date du présent arrêt ;

Sur les conclusions reconventionnelles de M.D... :

12. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que les conclusions de M. D... tendant à la réparation du préjudice moral que lui aurait causé la citation abusive de la SCI des Ardents soit réparé au titre de la requête d'appel de cette société, qui contenait un moyen qui a entraîné l'annulation du jugement attaqué, ne peuvent en tout état de cause qu'être rejetées ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. D...tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1101529 du 4 juillet 2013 du tribunal administratif d'Amiens est annulé.

Article 2 : La SCI des Ardents versera à M. D...une somme de 4 107,18 euros, avec intérêt au taux légal à compter de la date du présent arrêt, au titre des frais et honoraires d'expertise.

Article 3 : L'ordonnance du président du tribunal administratif de Lille du 10 mars 2011 est modifiée conformément à l'article 2.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la SCI des Ardents, les conclusions reconventionnelles de M. D...et ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI des Ardents, à M. C... D...et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Copie sera adressée au président du tribunal administratif de Lille et à la commune d'Arras.

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13DA01591


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (quater)
Numéro d'arrêt : 13DA01591
Date de la décision : 17/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-04-02-02-02 Procédure. Instruction. Moyens d'investigation. Expertise. Honoraires des experts.


Composition du Tribunal
Président : M. Hoffmann
Rapporteur ?: M. Laurent Domingo
Rapporteur public ?: M. Marjanovic
Avocat(s) : SCP BODEREAU - EHOKE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-02-17;13da01591 ?
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