La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/10/2015 | FRANCE | N°15DA00182

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3 (bis), 08 octobre 2015, 15DA00182


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 5 mai 2014 du préfet de la Seine-Maritime lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le Maroc, comme pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office.

Par un jugement n° 1402681 du 4 décembre 2014, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par u

ne requête, enregistrée le 4 février 2015, Mme B..., représentée par la Selarl Mary et Inquimb...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 5 mai 2014 du préfet de la Seine-Maritime lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le Maroc, comme pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office.

Par un jugement n° 1402681 du 4 décembre 2014, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 février 2015, Mme B..., représentée par la Selarl Mary et Inquimbert, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 5 mai 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de cent euros par jour de retard ou à défaut, de procéder à l'examen de sa situation et dans cette attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois sous astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

---------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi, fait à Rabat le 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Olivier Nizet, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Sur la régularité du jugement attaqué :

1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les premiers juges ont omis de se prononcer sur le moyen tiré de ce que le préfet s'est mépris sur l'étendue de sa compétence en n'exerçant pas son pouvoir de régularisation ; que ce moyen n'était pas inopérant ; que, par suite, le jugement attaqué doit être annulé ;

2. Considérant que ce motif suffisant à justifier l'annulation du jugement attaqué, il n'est pas besoin d'examiner les autres moyens de régularité présentés par la requérante ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Rouen ;

Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

3. Considérant que la décision contestée comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'est inopérante la circonstance que le préfet n'aurait pas visé la circulaire du 28 novembre 2012 ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 9 de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord (...) " ; que l'article 3 du même accord stipule que : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;

5. Considérant que, portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée ; que, dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, au sens de l'article 9 de cet accord ; que, toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation à un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié ;

6. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet qui a examiné la situation personnelle de la requérante et les éléments relatifs aux conditions de son séjour en France n'aurait pas étudié l'opportunité de régulariser l'intéressée ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeB..., ressortissante marocaine née le 14 octobre 1981, déclare être entrée en France le 28 mai 2008 ; qu'elle fait valoir y vivre depuis six ans, y être venue pour se procurer les médicaments nécessaires à la maladie de son père, maintenant décédé, et exercer une activité professionnelle ; que, toutefois, elle n'établit pas, par ces seules circonstances, que son admission répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels ; que, par suite, le préfet, qui n'a pas commis d'erreur de droit, n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

8. Considérant que Mme B...ne peut utilement se prévaloir des dispositions de la circulaire du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière qui ne contient que des orientations générales destinées à éclairer l'autorité préfectorale dans l'exercice de son pouvoir de régularisation ;

9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...est célibataire et sans enfant en charge ; qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches dans son pays d'origine où vivent sa mère et ses frères et soeurs ; qu'elle ne justifie pas, par les pièces qu'elle produit, de son intégration ; que, compte tenu des conditions et de la durée de son séjour en France rappelées au point 5, le préfet de la Seine-Maritime, qui a pris en compte les éléments de la vie privée et familiale de Mme B...n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressée, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise et n'a par suite pas méconnu, en tout état de cause, les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes raisons, l'autorité préfectorale n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision contestée sur sa situation personnelle ;

Sur la légalité de la décision faisant obligation de quitter le territoire :

10. Considérant que la décision contestée comporte les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision doit être écarté ;

11. Considérant que Mme B...a sollicité son admission au séjour ; qu'elle a donc été mise à même de faire valoir, avant l'intervention de l'arrêté qui lui a refusé l'admission au séjour et l'a également obligée à quitter le territoire français, tous éléments d'information ou arguments de nature à influer sur le contenu de ces mesures ; que, par suite, la garantie consistant dans le droit à être entendu préalablement à la mesure d'éloignement, telle qu'elle est notamment consacrée par le droit de l'Union, n'a pas été méconnue ;

12. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 9, la décision faisant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme B...;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

13. Considérant que, pour les mêmes raisons que celles exposées au point 9, le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu préalablement à une décision faisant grief tel que consacré par le droit de l'Union européenne doit être écarté ;

14. Considérant que, pour les mêmes raisons que celles exposées au point 11, le moyen tiré de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision contestée sur la situation personnelle de Mme B...doit être écarté ;

15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle, que Mme B...n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 5 mai 2014 du préfet de la Seine-Maritime ; que ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 tant en appel qu'en première instance doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 4 décembre 2014 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme B...devant le tribunal administratif est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées en appel par Mme B...au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.

''

''

''

''

1

2

N°15DA00182

1

3

N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 15DA00182
Date de la décision : 08/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Olivier Nizet
Rapporteur public ?: Mme Pestka
Avocat(s) : SELARL ANTOINE MARY et CAROLINE INQUIMBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 23/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-10-08;15da00182 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award