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01/12/2015 | FRANCE | N°13DA01455

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (bis), 01 décembre 2015, 13DA01455


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Religieux Frères a demandé au tribunal administratif d'Amiens la décharge de la cotisation supplémentaire de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2008.

Par un jugement n° 1001464 du 30 mai 2013, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 26 août 2013 et le 4 janvier 2015, la SARL Religieux Frères, représent

e par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 30 mai 2013 du tribunal administratif ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Religieux Frères a demandé au tribunal administratif d'Amiens la décharge de la cotisation supplémentaire de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2008.

Par un jugement n° 1001464 du 30 mai 2013, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 26 août 2013 et le 4 janvier 2015, la SARL Religieux Frères, représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 30 mai 2013 du tribunal administratif d'Amiens ;

2°) de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2008 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué n'a pas répondu au moyen tiré de l'absence d'application de coefficients d'abattement à la valeur locative des immobilisations industrielles ;

- le document qui lui a été adressé pour l'informer des rectifications envisagées n'était pas accompagné des annexes mentionnées dans cette lettre ;

- l'administration aurait dû, en vertu des dispositions des articles 1494 et 1498 du code général des impôts, appliquer la méthode d'évaluation par comparaison pour déterminer la valeur locative des locaux utilisés comme surface de vente des engins agricoles ;

- elle a méconnu les dispositions de l'article 1499 du code général des impôts en ne lui appliquant pas les abattements prévus aux articles 310 J bis à 310 L de l'annexe II au code général des impôts ;

- elle aurait dû bénéficier des exonérations prévues pour les immeubles situés dans une zone rurale enclavée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 mars 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la procédure d'imposition n'est entachée d'aucune irrégularité ;

- les dispositions de l'article 1498 du code général des impôts relatives à la méthode d'évaluation par comparaison excluent expressément les établissements industriels visés à l'article 1499 du même code dont fait partie la société Religieux Frères ;

- une évaluation distincte pour chaque fraction de propriété destinée à une utilisation autonome ne pouvait être opérée, la société n'apportant aucun élément justificatif quant à l'affectation des différents locaux composant son ensemble industriel ;

- le moyen présenté par la société requérante tiré de ce qu'elle n'a bénéficié d'aucune exonération n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

- les abattements prévus par les dispositions des articles 310 J bis et 310 L de l'annexe II au code général des impôts ont été appliqués.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Milard, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Guyau, rapporteur public.

1. Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité portant sur les années 2005 à 2008 de la SARL Religieux Frères, qui a pour activité la conception et la fabrication de machines agricoles, l'administration a relevé des erreurs et omissions dans la valeur locative des éléments immobilisés passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties compris dans la base imposable à la taxe professionnelle ; qu'elle a alors mis à la charge de cette société une cotisation supplémentaire de taxe professionnelle au titre de l'année 2008 ; que la SARL Religieux Frères relève appel du jugement du 30 mai 2013 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande en décharge ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'à l'appui de sa demande, la société Religieux Frères soutenait que l'administration n'avait pas fait application, à la valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière déterminée en application de l'article 1499 du code général des impôts, des coefficients d'abattement prévus à cet article ; que le tribunal ne s'est pas prononcé sur ce moyen, qui n'était pas inopérant ; que, par suite, le jugement du tribunal administratif d'Amiens doit être annulé en tant qu'il a omis de statuer sur ce moyen ;

3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la SARL Religieux Frères devant le tribunal administratif d'Amiens ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

4. Considérant qu'il est constant que la société Religieux Frères a reçu une lettre datée du 26 février 2008 par laquelle le service l'informait des rectifications qu'il envisageait d'apporter à la base imposable à son nom à la taxe professionnelle des années 2005 à 2008 ; que la société requérante ne saurait utilement soutenir que ce document n'était pas accompagné des annexes qui y étaient mentionnées alors qu'elle ne justifie pas avoir accompli toutes diligences auprès de l'administration fiscale pour en obtenir communication ; que, par suite, la société requérante, à laquelle la lettre du 26 février 2008 apportait au demeurant suffisamment de précisions pour pouvoir utilement présenter des observations, n'est pas fondée à soutenir que la procédure d'imposition aurait été irrégulièrement suivie ;

Sur le bien-fondé de l'imposition contestée :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 1467 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au présent litige : " La taxe professionnelle a pour base : / 1° Dans le cas des contribuables autres que ceux visés au 2° : / a. la valeur locative, telle qu'elle est définie aux articles 1469, 1518 A et 1518 B, des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de celles qui ont été détruites ou cédées au cours de la même période ; " ; qu'aux termes de l'article 1469 du même code : " La valeur locative est déterminée comme suit : / 1° Pour les biens passibles d'une taxe foncière, elle est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe. (...) " ; que les règles suivant lesquelles est déterminée la valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties sont différemment définies, à l'article 1496 du code général des impôts pour ce qui est des " locaux affectés à l'habitation ou servant à l'exercice d'une profession autre qu'agricole, commerciale, artisanale ou industrielle ", à l'article 1498 en ce qui concerne " tous les biens autres que les locaux d'habitation ou à usage professionnel visés à l'article 1496-I et que les établissements industriels visés à l'article 1499 " et à l'article 1499 s'agissant des " immobilisations industrielles " ; que revêtent un caractère industriel, au sens de cet article, les établissements dont l'activité nécessite d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en oeuvre, fût-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant ; qu'il résulte de l'instruction et n'est au demeurant pas sérieusement contesté, qu'eu égard tant à l'activité de fabrication de machines agricoles exercée par la société requérante qu'à l'importance des moyens techniques mis en oeuvre, la valeur locative des locaux situés 7 bis rue Montcornet à Vigneux Hocquet et destinés à cette activité de production doit être évaluée selon les principes définis par les dispositions précitées de l'article 1499 du code général des impôts applicables aux établissements à caractère industriel ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 1494 de ce code : " La valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties, de la taxe d'habitation ou d'une taxe annexe établie sur les mêmes bases est déterminée, conformément aux règles définies par les articles 1495 à 1508, pour chaque propriété ou fraction de propriété normalement destinée à une utilisation distincte. " ; qu'aux termes de l'article 1495 du même code : " Chaque propriété ou fraction de propriété est appréciée d'après sa consistance, son affectation, sa situation et son état, à la date de l'évaluation " ; que l'article 324 A de l'annexe III au même code précise que : " Pour l'application de l'article 1494 du code général des impôts on entend : (...) / 2° Par fraction de propriété normalement destinée à une utilisation distincte lorsqu'ils sont situés dans un immeuble collectif ou un ensemble immobilier : / a. Le local normalement destiné à raison de son agencement à être utilisé par un même occupant ; / b. L'établissement industriel dont les éléments concourent à une même exploitation. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que les parties d'un ensemble immobilier constituent des " fractions de propriété normalement destinées à une utilisation distincte " au sens de l'article 1494 du code général des impôts lorsqu'elles sont susceptibles de faire l'objet chacune d'une utilisation distincte par un même occupant ;

7. Considérant que la société Religieux Frères établit, par les pièces qu'elle produit pour la première fois en appel, que les locaux dont elle est propriétaire au 10 rue Montcornet à Vigneux Hocquet sont affectés à une activité de vente, de stockage et de bureau d'étude ; qu'elle produit également un plan cadastral faisant apparaître que ces bâtiments ne font pas partie du même groupement topographique ; qu'il résulte de ces éléments que si les bâtiments situés au 7 bis de la rue Montcornet sont des locaux industriels devant être évalués selon la méthode comptable, conformément à l'article 1499 du code général des impôts, ainsi qu'il a été dit au point 5, les locaux situés au 10 de la même rue sont des locaux commerciaux correspondant à des fractions de propriété normalement destinées à une utilisation distincte par un même occupant et auraient dû être évalués par comparaison avec un local-type selon les modalités définies par les dispositions du 2° de l'article 1498 du code général des impôts ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Religieux Frères est fondée à soutenir que la valeur locative des biens passibles de taxe foncière qu'elle utilise au 10 rue Montcornet à Vigneux Hocquet doit être déterminée en application des dispositions de l'article 1498 du code général des impôts ; que l'état du dossier ne permet toutefois pas à la cour de déterminer ni la valeur locative des biens devant être évalués selon la méthode comparative, ni la valeur locative devant être retenue pour les locaux qui doivent toujours être évalués selon la méthode comptable compte tenu de ce qui été dit aux points 5 et 7 ; qu'il y a lieu d'ordonner avant dire droit un supplément d'instruction contradictoire sur ce point ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 30 mai 2013 du tribunal administratif d'Amiens est annulé.

Article 2 : Il sera, avant de statuer sur la demande présentée par la société Religieux Frères, procédé par le ministre des finances et des comptes publics, au supplément d'instruction dont l'objet est défini dans les motifs de la présente décision.

Article 3 : Il est accordé au ministre des finances et des comptes publics un délai de deux mois à compter de la présente décision pour faire parvenir à la cour administrative d'appel les résultats du supplément d'instruction ordonné par l'article 2.

Article 4 : Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent jugement, sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Religieux Frères et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience publique du 17 novembre 2015 à laquelle siégeaient :

- M. Michel Hoffmann, président de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- Mme Muriel Milard, premier conseiller.

Lu en audience publique le 1er décembre 2015.

Le rapporteur,

Signé : M. MILARDLe président de chambre,

Signé : M. A...

Le greffier,

Signé : M.T. LEVEQUE

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Marie-Thérèse Lévèque

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N°13DA01455


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 13DA01455
Date de la décision : 01/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-01-01 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances. Questions communes. Révision des bases d'imposition.


Composition du Tribunal
Président : M. Nowak
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Guyau
Avocat(s) : WEDRYCHOWSKI ETIENNE, LAURENT ET SEBASTIEN

Origine de la décision
Date de l'import : 10/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-12-01;13da01455 ?
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