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12/05/2016 | FRANCE | N°15DA01669

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 12 mai 2016, 15DA01669


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...A...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 27 mars 2015 du préfet de l'Oise rejetant sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français, fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et l'informant qu'il pourrait faire l'objet d'une interdiction de retour sur le territoire français dans le cas où il ne défèrerait pas à cette mesure d'éloignement dans le délai presc

rit.

Par un jugement n° 1501474 du 18 septembre 2015, le tribunal administrat...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...A...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 27 mars 2015 du préfet de l'Oise rejetant sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français, fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et l'informant qu'il pourrait faire l'objet d'une interdiction de retour sur le territoire français dans le cas où il ne défèrerait pas à cette mesure d'éloignement dans le délai prescrit.

Par un jugement n° 1501474 du 18 septembre 2015, le tribunal administratif d'Amiens a annulé l'arrêté du 27 mars 2015 du préfet de l'Oise.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 20 octobre 2015 et le 12 janvier 2016, le préfet de l'Oise demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 18 septembre 2015 du tribunal administratif d'Amiens ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif d'Amiens ;

Il soutient que la décision refusant à M. A...la délivrance d'un titre de séjour ne méconnaît pas les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les autres moyens soulevés par M. A...ne sont pas davantage fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 décembre 2015, M. A...représenté par Me B...demande à la cour :

1°) de rejeter la requête du préfet de l'Oise ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Oise, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, de procéder à un nouvel examen de sa demande de titre de séjour et lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pour le temps nécessaire à ce nouvel examen ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que sa situation relève des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il soutient en outre que :

- la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour est entachée d'une erreur de fait ;

- elle est entachée d'une erreur de droit, le préfet ayant méconnu l'étendue de sa compétence en s'estimant lié par l'avis rendu par le médecin de l'agence régionale de santé ;

- elle méconnaît son droit au respect de sa vie privé et familiale tel qu'il ressort des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste du préfet dans l'appréciation des ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- l'illégalité de la décision de refus de séjour a pour conséquence l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur de droit, le préfet ayant méconnu l'étendue de sa compétence en s'estimant lié par le refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste du préfet dans l'appréciation des ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français a pour conséquence l'illégalité de la décision lui octroyant un délai de départ volontaire de trente jours ;

- la décision fixant le délai de départ volontaire est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation par le préfet des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;

- l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire a pour conséquence l'illégalité de la décision fixant le pays de destination ;

- l'illégalité des décisions lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire a pour conséquence l'illégalité de la décision lui faisant interdiction de retour sur le territoire français ;

- la décision lui faisant interdiction de retour sur le territoire français est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît son droit au respect de sa vie privé et familiale tel qu'il ressort des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- et les observations de Me D...C..., représentant M.A....

1. Considérant que le préfet de l'Oise relève appel du jugement du 18 septembre 2015 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé son arrêté du 27 mars 2015 refusant la délivrance d'un titre de séjour à M.A..., ressortissant pakistanais, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (....) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. (...) " ;

3. Considérant que le 16 mars 2012, M. A...a bénéficié en France d'une intervention chirurgicale à coeur ouvert nécessitant un suivi et un traitement post-opératoire régulier ; que par un avis du 20 février 2015 le médecin de l'agence régionale de santé de Picardie a estimé que si l'état de santé de l'intéressé nécessitait une prise en charge dont le défaut pourrait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité pour sa santé, mais que le traitement et le suivi appropriés à sa pathologie étaient disponibles dans le pays dont il est originaire et qu'il serait en mesure de supporter le voyage vers ce pays ; que pour contester la décision prise par le préfet au vu de cet avis, M. A...se prévaut d'une attestation d'un cardiologue pakistanais faisant valoir que le suivi dont il doit bénéficier n'est pas disponible au Pakistan ; que le préfet produit une correspondance entretenue avec le conseiller santé auprès du directeur général de la direction générale des étrangers en France, dont il ressort que huit établissements de santé au Pakistan sont en mesure de pratiquer la pose d'implants tels que ceux dont M. A...est porteur, lesquels établissements sont également en mesure d'en assurer le suivi indispensable ; que dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la décision refusant à M. A...la délivrance d'un titre de séjour ne méconnaît pas les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que c'est, par suite, à tort que le tribunal administratif d'Amiens a, pour ce motif, annulé cette décision ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...devant le tribunal administratif de Lille et devant elle ;

Sur la décision de refus de titre de séjour :

5. Considérant qu'en dépit d'une erreur de plume concernant la date d'entrée de M. A... sur le territoire français et son âge à cette date, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision contestée du préfet de l'Oise serait entachée d'une erreur de fait ;

6. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Oise aurait méconnu l'étendue de sa compétence en s'estimant lié par l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé de Picardie ;

7. Considérant que M.A..., ressortissant pakistanais entré en France en 2011, est célibataire et sans charge de famille ; que l'intéressé, qui fait valoir bénéficier d'un suivi médical en France ne justifie pas d'une insertion sur le territoire français, ni qu'il serait isolé en cas de retour dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-cinq ans ; que dans ces conditions et compte tenu du caractère récent de son entrée en France, la décision contestée n'a pas porté au droit de M. A...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et ne méconnaît pas ainsi les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le préfet de l'Oise n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur la décision faisant obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire serait illégale en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus d'un titre de séjour ;

9. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Oise, qui a examiné les particularités de la situation de M.A..., aurait méconnu l'étendue de sa compétence en s'estimant tenu de lui faire obligation de quitter le territoire français ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (...) : / (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé ; / (...) " ;

11. Considérant que compte tenu de ce qui a été dit au point 3, la décision contestée ne méconnaît pas les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet n'a pas davantage entaché cette décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M.A... ;

Sur la décision fixant le délai de départ volontaire :

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que la décision lui octroyant un délai de départ volontaire de trente jours serait illégale en conséquence de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

13. Considérant que compte tenu de ce qui a été dit aux points 3 et 11, la décision contestée n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M.A... ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination serait illégale en conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire ;

Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :

15. Considérant que, contrairement à ce que soutient M.A..., l'arrêté préfectoral du 27 mars 2015 ne prescrit pas d'interdiction de retour sur le territoire français mais se borne à l'informer qu'il pourrait faire l'objet d'une telle mesure s'il se maintenait au-delà du délai de départ volontaire qui lui a été imparti ; que cette mention seulement informative, est ainsi dépourvue d'effets de droit et ne saurait être regardé comme ayant un caractère décisoire et susceptible de recours contentieux ; que les conclusions de M. A...contre cette décision doivent être rejetées comme irrecevables ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

17. Considérant que le présent jugement, qui se borne à annuler la mesure portant interdiction de retour sur le territoire français mais rejette les conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus de titre et obligation de quitter le territoire français, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions susvisées ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

18. Considérant que M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; que, toutefois, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros demandée par le conseil de la requérante ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1501474 du 18 septembre 2015 du tribunal administratif d'Amiens est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif d'Amiens est rejetée.

Article 3 : La demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif d'Amiens est rejetée et ses conclusions présentées en appel aux fins d'injonction et au titre de l'article L. 761­1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. E... A... et à MeB....

Copie sera adressée au préfet de l'Oise.

Délibéré après l'audience publique du 28 avril 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- M. Olivier Nizet, président-assesseur,

- M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller.

Lu en audience publique le 12 mai 2016.

L'assesseur le plus ancien,

Signé : O. NIZETLe président de chambre,

président rapporteur,

Signé : P.-L. ALBERTINILe greffier,

Signé : I. GENOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Isabelle Genot

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N°15DA01669

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA01669
Date de la décision : 12/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Paul Louis Albertini
Rapporteur public ?: Mme Pestka
Avocat(s) : SELARL AEQUAE

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-05-12;15da01669 ?
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