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16/06/2016 | FRANCE | N°15DA02049

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 16 juin 2016, 15DA02049


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 4 août 2015 par lequel le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de revenir sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1502778 du 8 décembre 2015, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
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Par une requête, enregistrée le 23 décembre 2015, M.C..., rep...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 4 août 2015 par lequel le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de revenir sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1502778 du 8 décembre 2015, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 23 décembre 2015, M.C..., représenté par Me B...A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à son avocat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- en l'absence de traitement approprié pour le diabète au Nigeria, le refus de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en lui interdisant de revenir sur le territoire français ;

La requête a été communiquée à la préfète de la Seine-Maritime qui n'a pas produit de mémoire.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 janvier 2016 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Douai qui a désigné Me B...A....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Christian Bernier, président de la formation de jugement, a été entendu au cours de l'audience publique.

Sur le refus de titre de séjour :

1. Considérant qu'aux termes des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé (...) " ;

2. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;

3. Considérant que M.C..., de nationalité nigériane, est suivi depuis le 23 août 2011 pour un diabète sous surveillance clinique ; que le médecin de l'agence régionale de santé de Haute-Normandie a émis le 5 mai 2015 un avis sur lequel le préfet s'est fondé et qui indique que, si l'état de santé du requérant nécessite une prise en charge de longue durée dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il existe dans le pays dont il est originaire un traitement approprié ; que les certificats médicaux produits par le requérant, établis les 14 octobre et 4 novembre 2014 et le 31 août 2015, ne sont pas, compte tenu de leur caractère peu circonstancié, de nature à remettre en cause l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ; qu'il ressort d'ailleurs des pièces du dossier, et notamment des documents produits par le préfet en première instance, que la prise en charge du diabète est assurée au Nigeria; que si M. C... fait valoir qu'il ne dispose pas de ressources financières suffisantes pour accéder effectivement à ces traitements, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision ; que, par suite, en rejetant la demande de titre de séjour présentée par M. C... en qualité d'étranger malade, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas entaché sa décision d'illégalité ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.C..., né le 1er août 1981 à Lagos au Nigeria, déclare être entré en France le 3 juillet 2011 ; que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, ont, par décisions respectives en date du 23 février 2012 et 13 mai 2014, rejeté sa demande d'asile ; que s'il allègue être fiancé et que sa compagne attend un enfant, il ne le justifie pas ; que les pièces du dossier ne permettent pas d'établir la réalité d'une vie familiale en France ; qu'il n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-cinq ans ; que, s'il fait état de son insertion dans la société française, il ne produit aucune pièce permettant à la Cour d'en apprécier la réalité ; que, compte tenu des conditions du séjour et en dépit de la durée de présence de l'intéressé sur le territoire français, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. C...une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision attaquée a été prise ; qu'il n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la décision portant obligation de quitter le territoire n'est pas entachée d'illégalité ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

5. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point précédent que M. C...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français pour soutenir que la décision fixant le pays de destination serait privée de base légale ;

Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :

6. Considérant qu'aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. L'étranger à l'encontre duquel a été prise une interdiction de retour est informé qu'il fait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen, conformément à l'article 96 de la convention signée à Schengen le 19 juin 1990. Les modalités de suppression du signalement de l'étranger en cas d'annulation ou d'abrogation de l'interdiction de retour sont fixées par voie réglementaire. (...) Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger obligé de quitter le territoire français, l'autorité administrative peut prononcer l'interdiction de retour pour une durée maximale de trois ans à compter de sa notification. (...) / L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) " ;

7. Considérant qu'il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger ; qu'elle doit, par ailleurs, faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet ; qu'elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace ; qu'en l'espèce M. C... n'a pas déféré aux précédentes mesures d'éloignement prises à son encontre ; qu'il a été condamné par le tribunal correctionnel de Rouen le 26 janvier 2012 à une amende avec sursis pour délit de faux et usage de faux aux fins d'obtention indue de document administratifs et menaces de mort réitérées ; que ses liens avec la France ne sont pas caractérisés par une particulière intensité ; que par suite, le préfet de la Seine-Maritime, en assortissant son arrêté d'une mesure d'interdiction de retour sur le territoire français n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 août 2015 ; que ses conclusions à fin d'injonction assortie d'astreinte et celles tendant à l'application de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...C..., au ministre de l'intérieur et à Me B...A....

Copie en sera transmise pour information à la préfète de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience publique du 2 juin 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Christian Bernier, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Hadi Habchi, premier conseiller,

- Mme Amélie Fort-Besnard, premier conseiller.

Lu en audience publique le 16 juin 2016.

L'assesseur le plus ancien,

Signé : H. HABCHILe président de la formation de jugement,

Rapporteur,

Signé : C. BERNIER

Le greffier,

Signé : S. DUPUIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Le greffier en chef,

Par délégation,

Le greffier,

Sylviane Dupuis

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N°15DA02049


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA02049
Date de la décision : 16/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-02 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. Légalité interne.


Composition du Tribunal
Président : M. Bernier
Rapporteur ?: M. Christian Bernier
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : PARAISO

Origine de la décision
Date de l'import : 28/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-06-16;15da02049 ?
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