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07/07/2016 | FRANCE | N°16DA00541

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3 (ter), 07 juillet 2016, 16DA00541


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...E...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 12 mars 2014 par laquelle le ministre de la défense a prononcé, à titre disciplinaire, la résiliation de son contrat d'engagement.

Par un jugement nos 1307469-1403414 du 19 janvier 2016, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 mars 2016, M.E..., représenté par Me C...A..., demande à la cour :

1°)

d'annuler le jugement du 19 janvier 2016 du tribunal administratif de Lille ;

2°) d'annuler pour ex...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...E...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 12 mars 2014 par laquelle le ministre de la défense a prononcé, à titre disciplinaire, la résiliation de son contrat d'engagement.

Par un jugement nos 1307469-1403414 du 19 janvier 2016, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 mars 2016, M.E..., représenté par Me C...A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 19 janvier 2016 du tribunal administratif de Lille ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 12 mars 2014 par laquelle le ministre de la défense a prononcé, à titre disciplinaire, la résiliation de son contrat d'engagement ;

3°) d'enjoindre au ministre de la défense de le réintégrer dans ses fonctions à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la qualification de la faute est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la sanction est entachée d'une disproportion manifeste au regard de la faute reprochée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- les conclusions de Mme Maryse Pestka, rapporteur public.

1. Considérant que M. E...relève appel du jugement du 19 janvier 2016 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 12 mars 2014 par laquelle le ministre de la défense a prononcé, à titre disciplinaire, la résiliation de son contrat d'engagement ;

2. Considérant que la décision attaquée vise les textes dont elle fait application, mentionne précisément les faits reprochés à l'intéressé et indique que ces faits qui constituent " une faute de comportement particulièrement grave " méritent d'être sanctionnés ; que, dans ces conditions, la décision contestée, qui permet à M. E...de connaître les motifs qui fondent la sanction, est suffisamment motivée ;

3. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 4111-1 du code de la défense : " L'état militaire exige en toute circonstance (...) discipline, disponibilité, loyalisme et neutralité. Les devoirs qu'il comporte et les sujétions qu'il implique méritent le respect des citoyens et la considération de la Nation " ; qu'aux termes de l'article L. 4121-1 du même code : " Les militaires jouissent de tous les droits et libertés reconnus aux citoyens. Toutefois, l'exercice de certains d'entre eux est soit interdit, soit restreint dans les conditions fixées au présent livre " ; qu'aux termes de l'article L. 4121-2 de ce code : " Les opinions ou croyances, notamment philosophiques, religieuses ou politiques, sont libres. / Elles ne peuvent cependant être exprimées qu'en dehors du service et avec la réserve exigée par l'état militaire " ; que, d'autre part, aux termes de l'article L. 4137-2 du code de la défense : " Les sanctions disciplinaires applicables aux militaires sont réparties en trois groupes : / (...) / 3° Les sanctions du troisième groupe sont : / a) Le retrait d'emploi, défini par les dispositions de l'article L. 4138-15 ; / b) La radiation des cadres ou la résiliation du contrat " ;

4. Considérant qu'il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, M. E..., qui a été recruté par l'armée de terre le 1er février 2005, puis nommé sergent à compter du 1er juin 2009 et servait sous contrat à la date des faits au 41ème régiment de transmissions, à Douai, s'est rendu le 20 septembre 2013 au théâtre de la Main d'Or à Paris, en civil, en vue d'y assister à un spectacle dans lequel se produisait M. F...M'B... M'B... ; qu'au cours de la représentation, afin de manifester leur adhésion aux propos et critiques formulés par l'artiste à l'encontre de l'autorité militaire, M. E...et deux autres militaires sont montés sur scène en uniforme et ont posé à ses côtés, en vue d'être photographiés et filmés par les spectateurs en effectuant le geste dit de la " quenelle " ;

6. Considérant que des photographies et vidéos de cette initiative ont été publiées sur différents sites internet et ont circulé sur les réseaux sociaux ; que M. E...a déclaré avoir agi en réaction à la position prise par l'autorité hiérarchique, qui a poursuivi et sanctionné disciplinairement deux militaires du 13ème bataillon de chasseurs alpins, qui ont effectué le geste dit de la " quenelle ", en étant photographiés, pendant qu'ils étaient en faction devant une synagogue ; que, si M. E...fait valoir qu'il n'a pas assuré personnellement la diffusion d'images de son geste sur internet et dans les réseaux sociaux, il ne pouvait cependant en ignorer la connotation antisémite, ainsi que la position de l'armée sur des comportements de cette nature, et a entendu se prévaloir publiquement de son état pour participer à la contestation des choix opérés par l'autorité militaire ; qu'il a, ce faisant, manqué à l'obligation de réserve qui lui incombait à l'égard de l'institution à laquelle il appartenait ; que pour ce seul motif, l'autorité militaire a pu estimer que les faits qui lui étaient reprochés étaient constitutifs d'une faute de nature à justifier une sanction disciplinaire ;

7. Considérant que compte tenu de ce qui a été dit au point précédent et alors même que la manière de servir de M. E...aurait avant cela donné pleine satisfaction, l'autorité investie du pouvoir disciplinaire n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, et au regard du pouvoir d'appréciation dont elle disposait, pris une sanction disproportionnée en infligeant à M. E...la sanction du troisième groupe de résiliation de son contrat d'engagement ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. E...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...E...et au ministre de la défense.

Copie en sera transmise, pour information, au colonel commandant le 41ème régiment de transmissions.

Délibéré après l'audience publique du 23 juin 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- M. Olivier Nizet, président-assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 7 juillet 2016.

L'assesseur le plus ancien,

Signé : O. NIZETLe président de chambre,

président rapporteur,

Signé : P.-L. ALBERTINILe greffier,

Signé : I. GENOT

La République mande et ordonne au ministre de la défense en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Isabelle Genot

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N°16DA00541

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3 (ter)
Numéro d'arrêt : 16DA00541
Date de la décision : 07/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

08-01-01-05 Armées et défense. Personnels militaires et civils de la défense. Questions communes à l'ensemble des personnels militaires. Discipline.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Paul Louis Albertini
Rapporteur public ?: Mme Pestka
Avocat(s) : YON

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-07-07;16da00541 ?
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