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20/10/2016 | FRANCE | N°16DA00638

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3 (bis), 20 octobre 2016, 16DA00638


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 23 octobre 2015 du préfet de l'Eure refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite en cas d'exécution d'office.

Par un jugement n° 1503745 du 1er mars 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

:

Par une requête, enregistrée le 30 mars 2016, MmeB..., représentée par Me C... A..., d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 23 octobre 2015 du préfet de l'Eure refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite en cas d'exécution d'office.

Par un jugement n° 1503745 du 1er mars 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 mars 2016, MmeB..., représentée par Me C... A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 1er mars 2016 du tribunal administratif de Rouen ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 23 octobre 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Eure de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée ou familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision faisant obligation de quitter le territoire méconnaît les dispositions du 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juillet 2016, le préfet de l'Eure conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens présentés par Mme B...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Olivier Nizet, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ;

2. Considérant qu'il résulte des termes mêmes de ces dispositions que le législateur, pour le cas où la carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " est demandée par un étranger au motif qu'il est parent d'un enfant français, a subordonné la délivrance de plein droit de ce titre à la condition, notamment, que l'enfant réside en France. Ce faisant, le législateur n'a pas requis la simple présence de l'enfant sur le territoire français, mais a exigé que l'enfant réside en France, c'est-à-dire qu'il y demeure effectivement de façon stable et durable ;

3. Considérant qu'il appartient dès lors, pour l'application de ces dispositions, à l'autorité administrative d'apprécier dans chaque cas sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, au vu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et des justifications produites, où se situe la résidence de l'enfant, entendue comme le lieu où il demeure effectivement de façon stable et durable à la date à laquelle le titre est demandé ;

4. Considérant que MmeB..., ressortissante du Congo, est entrée en France le 22 juillet 2014 sous couvert d'un visa de type C multi-entrée d'une durée de 90 jours ; que sa fille, de nationalité française, née le 14 juin 2006 au Congo, l'a rejointe cinq mois plus tard, le 22 décembre 2014 ; qu'il n'est pas contesté par le préfet qu'elle vit au quotidien avec sa fille ; qu'elle perçoit par ailleurs une aide financière de la part du père de son enfant ; qu'elle doit, dès lors, être regardée comme contribuant à l'entretien et à l'éducation de sa fille depuis sa naissance, alors même qu'elle ne disposerait que de ressources modestes ; qu'elle justifie aussi, par un certificat du directeur d'école daté du 11 mars 2016, que sa fille fréquente assidûment l'école depuis le 5 janvier 2015 en classe de CE2 puis de CM1 ; qu'elle réside ainsi en France depuis dix mois ; qu'en admettant même que sa fille ait pu, par le passé, se rendre au Gabon entre 2013 et 2014, pays dans lequel son père aurait travaillé, il ne ressort pas des pièces du dossier que celle-ci ait quitté le territoire français depuis son arrivée en décembre 2014 ; que, dans ces conditions, le préfet de l'Eure a commis une erreur d'appréciation en refusant de délivrer à Mme B...un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français et en l'obligeant à quitter le territoire français à destination du Congo ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que Mme B...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Considérant qu'eu égard au motif de l'annulation prononcée au point 4, il y a lieu, sous réserve d'un changement dans la situation de droit ou de fait de MmeB..., d'enjoindre au préfet de l'Eure de délivrer à l'intéressée une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par Mme B...et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 1er mars 2016 du tribunal administratif de Rouen et l'arrêté du 23 octobre 2015 du préfet de l'Eure sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Eure de délivrer à Mme B...un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme B...une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...B..., au ministre de l'intérieur et au préfet de l'Eure.

Délibéré après l'audience publique du 6 octobre 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- M. Olivier Nizet, président-assesseur,

- M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller.

Lu en audience publique le 20 octobre 2016.

Le rapporteur,

Signé : O. NIZET

Le président de chambre,

Signé : P.-L. ALBERTINI

Le greffier,

Signé : I. GENOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Isabelle Genot

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N°16DA00638

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 16DA00638
Date de la décision : 20/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Olivier Nizet
Rapporteur public ?: M. Habchi
Avocat(s) : OLAKA

Origine de la décision
Date de l'import : 28/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-10-20;16da00638 ?
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