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10/11/2016 | FRANCE | N°15DA00290

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3, 10 novembre 2016, 15DA00290


Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : MeD..., en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Magris, a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 20 février 2012 par lequel le préfet du Nord l'a mis en demeure, dans un délai de trois mois, de se conformer aux prescriptions prévues au point 3 de l'article 31 de l'arrêté préfectoral d'autorisation du 14 juin 2001 et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n°

1201790 du 29 janvier 2015, le tribunal administratif de Lille a ...

Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : MeD..., en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Magris, a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 20 février 2012 par lequel le préfet du Nord l'a mis en demeure, dans un délai de trois mois, de se conformer aux prescriptions prévues au point 3 de l'article 31 de l'arrêté préfectoral d'autorisation du 14 juin 2001 et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1201790 du 29 janvier 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 19 février 2015, Me C...D..., en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Magris, représenté par la SCP Sellier, Michel, Lequint, Hauger, Trognon-Lernon, dont l'instance a été reprise par Me A...B...à la suite du remplacement effectué par une ordonnance du tribunal de commerce du 20 juillet 2016 consécutif au décès de MeD..., demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la mise en demeure repose sur des dispositions d'un arrêté d'autorisation devenu caduc ; - à la date de la visite d'inspection du service des installations classées, la prescription quinquennale, issue de l'article 2224 du code civil, était acquise ; - un nouvel exploitant s'est substitué à elle sur le même site ; - le préfet n'a pas pris en compte les difficultés d'exécution de la mise en demeure. Par un mémoire en défense, enregistré le 15 septembre 2016, la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'environnement ; - le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Xavier Fabre, premier conseiller, - et les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public. 1. Considérant que par un arrêté du 14 juin 2001, le préfet du Nord a accordé à la société anonyme Magris l'autorisation de poursuivre l'exploitation d'une unité de fabrication de dalles en mosaïque de marbre sur la commune de Roubaix ; que, le 25 janvier 2012, l'inspection des installations classées a effectué sur les lieux une visite de contrôle au cours de laquelle elle a constaté que le site n'était plus occupé par la société Magris mais par une autre entreprise, la société Arbeca, exerçant une activité différente, à savoir la pose et l'entretien de fermetures, portes et portail, la métallerie et la serrurerie ; que le service des installations classées a alors établi un rapport de visite, en date du 30 janvier 2012, proposant au préfet de la mettre en demeure de respecter le point 3 de l'article 31 de l'arrêté préfectoral d'autorisation d'exploiter ; que MeD..., devenu liquidateur de la société par un jugement du 30 novembre 2014 du tribunal de commerce de Roubaix-Tourcoing, a également été destinataire, en copie, de ce rapport ; que, par un arrêté du 20 février 2012, le préfet du Nord a mis en demeure la société Magris, représentée par son liquidateur, de respecter, pour le site qu'elle exploitait à cette adresse, dans un délai de trois mois, l'article 31 de l'arrêté préfectoral d'autorisation du 14 juin 2001 qui prévoit notamment la remise en état du site, la confection d'un dossier comprenant le plan à jour des terrains d'emprise de l'installation, ainsi qu'un mémoire sur les mesures prises ou prévues pour la remise en état du site ; que MeD..., auquel a succédé Me A...B..., à la suite de son décès, a relèvé appel du jugement du 29 janvier 2015 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté ses conclusions dirigées contre cet arrêté préfectoral ; Sur la prescription : 2. Considérant que les pouvoirs de police spéciale conférés par la loi à l'autorité administrative peuvent, par leur objet et leur nature mêmes, être exercés par celle-ci à toute époque et vis-à-vis de tout détenteur d'un bien qui a été le siège de l'exploitation d'une installation classée, dès lors que s'y manifestent des dangers ou inconvénients de la nature de ceux auxquels la législation des installations classées a pour objet de parer ; que, toutefois, les principes dont s'inspire l'article 2262 du code civil font obstacle à ce que le préfet impose à l'exploitant, à son ayant droit ou à la personne qui s'est substituée à lui la charge financière des mesures à prendre au titre de la remise en état d'un site lorsque plus de trente ans se sont écoulés depuis la date à laquelle la cessation d'activité a été portée à la connaissance de l'administration, sauf dans le cas où les dangers ou inconvénients présentés par le site auraient été dissimulés ; 3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la cessation d'activité de la société Magris n'a pas été portée à la connaissance de l'administration par la société ou par son liquidateur, l'administration n'en ayant eu connaissance qu'à l'occasion d'une visite de contrôle réalisée par le service des installations classées le 25 janvier 2012 ; que le délai de prescription n'a donc couru qu'à compter de cette date et elle n'était donc, en tout état de cause, pas acquise lorsque le préfet a pris son arrêté le 20 février 2012 ; qu'ainsi, l'appelant ne pouvant utilement se prévaloir des dispositions de l'article 2224 du code civil dans leur rédaction désormais applicable, le moyen tiré de ce que le délai de prescription de cinq ans prévu par cet article était expiré ne peut qu'être écarté ; Sur le fondement légal de l'obligation de remise en état : 4. Considérant qu'aux termes de l'article 24 du décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 pris pour l'application de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement, alors en vigueur, dont une version modifiée a été ultérieurement codifiée aux articles R. 512-38 puis R. 512-74 du code de l'environnement : " L'arrêté d'autorisation cesse de produire effet lorsque l'installation classée n'a pas été mise en service dans le délai de trois ans ou n'a pas été exploitée durant deux années consécutives, sauf le cas de force majeure " ; qu'aux termes de l'article L. 512-6-1 de ce code : " Lorsque l'installation soumise à autorisation est mise à l'arrêt définitif, son exploitant place son site dans un état tel qu'il ne puisse porter atteinte aux intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et qu'il permette un usage futur du site déterminé conjointement avec le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme et, s'il ne s'agit pas de l'exploitant, le propriétaire du terrain sur lequel est sise l'installation. A défaut d'accord entre les personnes mentionnées au premier alinéa, lorsque l'installation est mise à l'arrêt définitif, son exploitant place son site dans un état tel qu'il ne puisse porter atteinte aux intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et qu'il permette un usage futur du site comparable à celui de la dernière période d'exploitation de l'installation mise à l'arrêt (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 512-39-5 du même code : " Pour les installations ayant cessé leur activité avant le 1er octobre 2005, le préfet peut imposer à tout moment à l'exploitant, par arrêté pris dans les formes prévues à l'article R. 512-31, les prescriptions nécessaires à la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1, en prenant en compte un usage du site comparable à celui de la dernière période d'exploitation de l'installation " ; 5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'installation classée, autorisée par arrêté préfectoral du 14 juin 2001, doit être regardée comme ayant cessé d'être exploitée par la société Magris, au plus tard à compter du 30 novembre 2004, date du jugement du tribunal de commerce de Roubaix-Tourcoing, prononçant la liquidation judiciaire de la société Magris ; que la mise en liquidation judiciaire de la société ne présentant pas, par sa nature même, le caractère de la force majeure, l'arrêté du 14 juin 2001, en tant qu'il valait autorisation d'exploiter est devenu caduc deux ans plus tard, le 30 novembre 2006 ; que si la remise en état du site était prévue par l'article 31.3 de cet arrêté préfectoral, il trouve principalement, à la date du présent arrêt, son fondement légal dans les dispositions des articles L. 512-6-1 et R. 512-39-5 du code de l'environnement précitées ; qu'ainsi la circonstance que le préfet a fait reposer sa mise en demeure sur l'article 31 de l'arrêté préfectoral du 14 juin 2001 n'est pas, en tout état de cause, de nature à l'entacher d'illégalité ; que, compte tenu des dispositions de l'article R. 512-39-5 du code de l'environnement, l'installation ayant cessé son activité avant le 1er octobre 2005, le préfet du Nord peut ainsi imposer à l'exploitant les prescriptions nécessaires à la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1, en prenant en compte un usage du site comparable à celui de la dernière période d'exploitation de l'installation ; Sur le débiteur de l'obligation de remise en état : 6. Considérant que l'obligation de remettre en état le site de l'installation pèse sur l'exploitant, à moins qu'il n'ait cédé son installation et que le cessionnaire se soit régulièrement substitué à lui en qualité d'exploitant ; que l'appelant ne peut valablement faire état de l'exploitation actuelle du site par la société Arbeca, qui exerce une activité différente de celle de la société Magris, pour s'exonérer de ses obligations au titre de la législation sur les installations classées, alors qu'en outre, aucun transfert d'activité n'a, en tout état de cause, été déclaré à l'administration ; que le liquidateur n'est ainsi pas fondé à soutenir que la société Arbeca se serait substituée à la société Magris en qualité d'exploitant ; que la circonstance que cette autre entreprise exerce son activité sur le même site que celui précédemment occupé par la société Magris est sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué dès lors, en particulier, qu'il n'est pas démontré que cette installation ne demeurait pas susceptible de présenter les dangers ou inconvénients énumérés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement ; Sur les difficultés d'exécution de l'obligation de remise en état : 7. Considérant Me D...fait valoir que les difficultés d'exécution, notamment financières, de l'arrêté de mise en demeure attaqué n'ont pas été suffisamment prises en compte par l'administration ; que, toutefois, ces circonstances sont sans effet sur l'obligation de remise en état en elle-même ; qu'en outre et ainsi qu'il a été dit au point 5, les mesures de remise en état du site correspondent désormais aux prescriptions qui sont nécessaires à la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, en prenant en compte un usage du site comparable à celui de la dernière période d'exploitation de l'installation ; qu'en tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction que cette obligation soit rendue impossible ;

8. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Me A...B...qui a désormais succédé à Me C...D..., n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; DÉCIDE : Article 1er : La requête de Me C...D..., liquidateur de la société Magris est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me A...B..., liquidateur de la société Magris, succédant à Me C...D..., et à la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat. Copie en sera adressée pour information au préfet du Nord. Délibéré après l'audience publique du 14 octobre 2016 à laquelle siégeaient : - M. Olivier Yeznikian, président de chambre, - M. Christian Bernier, président-assesseur, - M. Xavier Fabre, premier conseiller. Lu en audience publique le 10 novembre 2016. Le rapporteur,Signé : X. FABRELe premier vice-président de la cour,Président de chambre,Signé : O. YEZNIKIANLe greffier,Signé : C. SIRE

La République mande et ordonne à la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme,Le greffier en chef,Par délégation,Le greffier,Christine Sire N°15DA00290 6


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA00290
Date de la décision : 10/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

44-02-02-005-04 Nature et environnement. Installations classées pour la protection de l'environnement. Régime juridique. Actes affectant le régime juridique des installations. Mise à l'arrêt.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Xavier Fabre
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : CABINET LEGALIS

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-11-10;15da00290 ?
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