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09/03/2017 | FRANCE | N°16DA01307

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3, 09 mars 2017, 16DA01307


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 23 février 2016 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1601076 du 23 juin 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté la demande de MmeC....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enreg

istrée le 19 juillet 2016, MmeC..., représentée par la SCP Beuvin et Rondel, demande à la cour :...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 23 février 2016 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1601076 du 23 juin 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté la demande de MmeC....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 juillet 2016, MmeC..., représentée par la SCP Beuvin et Rondel, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté préfectoral du 23 février 2016 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime, à titre principal, de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation sous les mêmes conditions ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté préfectoral est entaché d'un défaut de motivation ;

- la préfète a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le refus de titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la préfète a commis une erreur manifeste d'appréciation de son pouvoir de régularisation, notamment au regard de son état de santé ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- le défaut de saisine du médecin de l'agence régionale de santé entache d'illégalité l'obligation de quitter le territoire français ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation sur sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le délai de départ volontaire est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 décembre 2016, la préfète de la Seine-Maritime conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Mme C...a été admise à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 août 2016 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Douai.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Christian Bernier, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que l'arrêté attaqué comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté ;

Sur la décision refusant le titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) " ;

3. Considérant que MmeC..., ressortissante ukrainienne née le 4 août 1941, est seule et sans enfant à charge ; qu'elle réside chez sa fille, ressortissante française établie en France en 1997, depuis moins de deux ans ; que la requérante ne démontre pas être dépourvue de liens personnels et familiaux en Ukraine où elle a vécu jusque l'âge de soixante et onze ans ; que, son fils demeure aux Etats-Unis en qualité de résident permanent et qu'elle-même a été autorisée à résider dans ce pays sous couvert d'une carte de résident permanent valable du 14 novembre 2012 au 2 janvier 2023 ; que, compte tenu de la durée et des conditions de son séjour en France, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis par la décision attaquée ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code du séjour et de l'entrée des étrangers et du droit d'asile doit, dès lors, être écarté ; que celui tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit également être écarté ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ;

5. Considérant que, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme C...a uniquement sollicité la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, faute d'une demande dans ce sens, la préfète de la Seine-Maritime, qui ne disposait que d'éléments généraux, imprécis, sur l'état de santé de la requérante, n'était pas tenue de se prononcer sur la délivrance d'une titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que le refus de titre de séjour est entaché d'illégalité ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 7 que Mme C...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour pour soutenir que l'obligation de quitter le territoire français serait privée de base légale ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) " ;

10. Considérant que le certificat médical établi dix-huit mois plus tôt, produit à l'appui de la demande de titre de séjour, indiquait seulement que l'état de santé de l'intéressée " nécessite un bilan cardiologique, respiratoire et rhumatologique avec des examens qui sont prévus actuellement jusqu'au 17 septembre 2014 inclus " ; que compte tenu de son ancienneté et de sa formulation générale, la préfète n'était pas tenue de saisir le médecin de l'agence régionale de santé avant de prendre une mesure faisant obligation à Mme C...de quitter le territoire ;

11. Considérant que ni le certificat médical, mentionné au point 10, produit par Mme C... devant la préfète à l'appui de sa demande, ni le second certificat médical du cardiologue de Mme C..., produit devant la juridiction postérieurement à la décision attaquée et insuffisamment circonstancié s'agissant de pathologies liées au grand âge, ne suffisent à établir que l'état de santé de l'intéressée nécessitait une prise en charge dont le défaut pourrait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sans qu'il existe des traitements ou qu'il n'existerait pas un traitement approprié à son état dans un des pays où elle serait admissible ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

12. Considérant que, pour les motifs mentionnés au point 3, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la préfète de la Seine-Maritime aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'elle aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée ;

13. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de la décision attaquée, qui ne fixe pas le pays à destination duquel l'intéressée serait renvoyée ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire est entachée d'illégalité ;

Sur la décision accordant un délai de départ volontaire de trente jours :

15. Considérant qu'aux termes du II de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...) Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...) " ;

16. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme C...aurait fait état auprès de l'administration de circonstances particulières de nature à justifier qu'un délai de départ volontaire supérieur à trente jours lui soit octroyé ; qu'en outre, il ne ressort pas davantage des écritures de première instance et d'appel que la situation de MmeC..., eu égard notamment à sa situation médicale à la date de l'arrêté attaqué, nécessitait l'octroi d'un tel délai ; que, par suite, la décision fixant le délai de départ n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

17. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le délai de départ volontaire est entachée d'illégalité ;

18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de la préfète de la Seine-Maritime du 23 février 2016 ; que, dès lors, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise pour information à la préfète de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience publique du 23 février 2017 à laquelle siégeaient :

- M. Christian Bernier, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Muriel Milard, premier conseiller,

- M. Xavier Fabre, premier conseiller.

Lu en audience publique le 9 mars 2017.

L'assesseur le plus ancien,

Signé : M. B...Le président de la formation de jugement,

Président-rapporteur,

Signé : C. BERNIER

Le greffier,

Signé : C. SIRE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Le greffier en chef,

Par délégation,

Le greffier,

Christine Sire

N°16DA01307 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA01307
Date de la décision : 09/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Bernier
Rapporteur ?: M. Christian Bernier
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : SCP BEUVIN et RONDEL

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-03-09;16da01307 ?
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