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25/04/2017 | FRANCE | N°16DA01832

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (quinquies), 25 avril 2017, 16DA01832


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen l'annulation de la décision implicite par laquelle la préfète de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour présentée le 22 avril 2016, de la décision du 6 juin 2016 de la préfète de Seine-Maritime l'obligeant à quitter le territoire, fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement et lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pendant un délai de trois ans et de l'arrêté du 10 août 2016 de la préfèt

e de Seine-Maritime ordonnant son placement en rétention administrative.

Par un ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen l'annulation de la décision implicite par laquelle la préfète de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour présentée le 22 avril 2016, de la décision du 6 juin 2016 de la préfète de Seine-Maritime l'obligeant à quitter le territoire, fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement et lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pendant un délai de trois ans et de l'arrêté du 10 août 2016 de la préfète de Seine-Maritime ordonnant son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1602729 du 15 août 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 octobre 2016, M.D..., représenté par Me C...A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 15 août 2016 du tribunal administratif de Lille ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle la préfète de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour présentée le 22 avril 2016, la décision du 6 juin 2016 de la préfète de la Seine-Maritime l'obligeant à quitter le territoire, fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement et lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pendant un délai de trois ans et l'arrêté du 10 août 2016 de la préfète de Seine-Maritime ordonnant son placement en rétention administrative ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire valable un an et portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, d'enjoindre à la préfète de procéder au réexamen de sa situation, et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- la décision l'obligeant à quitter le territoire national est dépourvue de base légale dès lors qu'aucun titre de séjour ne lui a été refusé ;

- dans l'hypothèse où une décision implicite de refus de délivrance d'un titre serait révélée par l'arrêté du 6 juin 2016, cette décision est illégale pour incompétence de l'auteur de l'acte, vice de procédure, absence de motivation, défaut d'examen particulier, méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire national est entachée d'un vice de procédure à défaut pour le préfet d'avoir saisi le médecin de l'agence régionale de santé pour qu'il se prononce sur son état de santé et sa capacité à voyager ;

- cette décision méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision lui refusant un délai de départ volontaire est illégale du fait de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire national ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire national sans délai ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision l'interdisant de retour en France pendant trois ans est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire national ;

- elle méconnaît les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 janvier 2017, la préfète de la Seine-Maritime conclut au rejet de la requête.

Elle soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.

M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 septembre 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Rodolphe Féral, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.D..., ressortissant géorgien, a déclaré être entré en France en juin 2013 pour y demander l'asile ; que le 6 juin 2016, la préfète de la Seine-Maritime a pris à son encontre un arrêté l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et interdisant le retour du requérant sur le territoire pour une durée de trois ans ; que M. D... relève appel du jugement du 15 août 2016 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la décision implicite de refus de titre de séjour :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. D...a présenté une demande d'admission au bénéfice de l'asile enregistrée par l'office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 23 septembre 2013 ; que l'arrêté de la préfète de la Seine-Maritime du 6 juin 2016 indique que sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'OFPRA du 23 juin 2015, notifiée le 24 juillet 2015 et qu'aucun recours contre cette décision n'a été présenté devant la cour nationale du droit d'asile (CNDA) par l'intéressé et qu'ainsi, il ne peut se prévaloir de la qualité de réfugié et obtenir un titre de séjour en cette qualité ; qu'en outre, M. D... n'établit pas avoir saisi la préfète de la Seine-Maritime d'une quelconque autre demande de délivrance d'un titre de séjour ; que, dans ces conditions, et nonobstant le fait que la préfète de la Seine Maritime a indiqué dans les motifs de son arrêté du 6 juin 2016 que l'intéressé n'entre dans aucun cas d'attribution d'un titre de séjour en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, aucune décision implicite de refus de séjour n'a été prise à son encontre ; que par suite, les conclusions à fin d'annulation dirigées contre une décision par laquelle la préfète de la Seine-Maritime aurait, implicitement, rejeté une demande de titre de séjour présentée le 22 avril 2016 sont dirigées contre une décision inexistante et doivent en conséquence être rejetées comme irrecevables ainsi que l'a relevé à bon droit le premier juge ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire national :

3. Considérant, en premier lieu, que selon l'article L. 731-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la CNDA statue sur les recours formés contre les décisions de l'OFPRA, le recours devant être exercé dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision de l'office, à peine d'irrecevabilité ; qu'en vertu de l'article L. 742-7 du même code, l'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre Ier du livre V ;

4. Considérant qu'en application de la réglementation postale, doit être regardé comme suffisant à constituer la preuve d'une notification régulière, le pli recommandé retourné à l'administration auquel est rattaché un volet " avis de réception " sur lequel a été apposée par voie de duplication, la date de vaine présentation du courrier, et qui porte, sur l'enveloppe ou sur l'avis de réception, l'indication du motif pour lequel il n'a pu être remis ; que si M. D... soutient que la décision de l'OFPRA du 23 juin 2015 rejetant la demande d'asile ne lui a jamais été notifiée, la préfète de la Seine-Maritime produit la copie d'un avis de réception, portant la date manuscrite de présentation du 8 juillet 2015, ainsi que la copie de l'enveloppe correspondante sur laquelle est apposée une étiquette adhésive portant la mention " pli avisé et non réclamé " ; que les mentions figurant sur cette pièce sont, dans les circonstances de l'espèce, suffisamment claires, précises et concordantes pour établir la régularité de la notification intervenue le 8 juillet 2015, alors que le requérant n'établit pas qu'il aurait informé l'OFPRA d'un éventuel changement d'adresse antérieur à cette date ; qu'en application des dispositions de l'article L. 731-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le requérant disposait en principe d'un délai d'un mois à compter du 8 juillet 2015 pour déposer son recours contentieux contre la décision de l'OFPRA ; qu'aucun recours n'a été présenté dans ce délai devant la CNDA ; que, par suite, le requérant doit être regardé comme ayant fait l'objet d'un refus définitif de reconnaissance de la qualité de réfugié ;

5. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 2, aucune décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, fut-elle implicite, n'a été prononcée à l'encontre de M. D... ; que, par suite, les dispositions du 3° de l'article L. 511-1-I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile visées par la décision du 6 juin 2016 lui faisant obligation de quitter le territoire national, qui autorisent l'autorité administrative à obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, si ce dernier s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, ne pouvaient constituer la base légale de cette mesure d'éloignement ; que, toutefois, cette mesure d'éloignement vise également les dispositions du septième alinéa, soit le 6° de l'article L. 511-1-I susmentionné, en vertu desquelles une obligation de quitter le territoire français peut également être prononcée lorsque la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ; qu'ainsi qu'il a été dit au point précédent, le requérant doit être regardé comme s'étant vu refuser définitivement le statut de réfugié ; que par suite, la préfète de la Seine-Maritime pouvait légalement se fonder sur ces dispositions pour prononcer la mesure d'éloignement attaquée ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (...) en application du présent chapitre : / (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié " ; qu'il résulte de ces dispositions que, même si elle n'a pas été saisie d'une demande de titre de séjour fondée sur les dispositions de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'autorité administrative qui dispose d'éléments d'informations suffisamment précis et circonstanciés établissant qu'un étranger résidant habituellement sur le territoire français est susceptible de bénéficier des dispositions protectrices de l'article L. 511-4-10° du même code, avant de prononcer à son encontre une obligation de quitter le territoire, doit saisir le médecin de l'agence régionale de santé pour avis dans les conditions prévues aux trois premiers alinéas de l'article R. 313-22 dudit code ;

7. Considérant que M. D...soutient qu'en raison des pathologies dont il est atteint, la préfète de la Seine-Maritime aurait dû saisir le médecin de l'agence régionale de santé afin que celui-ci se prononce sur la compatibilité d'une mesure d'éloignement avec son état de santé et, notamment, sur sa capacité à voyager ; que, toutefois, M. D...n'établit pas qu'il aurait informé les services de la préfecture de sa pathologie et de son état de santé ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la préfète de la Seine-Maritime aurait dû saisir le médecin inspecteur de la santé publique préalablement à la mesure d'éloignement ;

8. Considérant si M. D...produit un document reprenant l'ensemble des médicaments qui lui ont été prescrits entre les mois d'août et septembre 2015, ainsi qu'un courrier mentionnant une consultation dans un service d'hépato-gastroentérologie et un compte rendu d'hospitalisation, ces documents ne sont assortis d'aucun avis médical et ne révèlent pas qu'il serait atteint de névroses, ou d'une hépatite C ; que s'il produit un certificat d'un praticien d'une clinique privée indiquant que l'intéressé présente une hépatite chronique post-virale C nécessitant un bilan et une prise en charge, ce certificat rédigé en des termes très généraux n'établit pas que le défaut de prise en charge pourrait avoir pour l'intéressé des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; qu'en outre, si ce praticien indique qu'une prise en charge " ne semble pas possible " dans le pays d'origine, le préfet produit une fiche relative à la Géorgie indiquant que l'offre de soins existe dans ce pays pour l'hépatite C ; que, par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de M. D...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une extrême gravité et qu'aucun traitement approprié ne serait disponible dans son pays d'origine ; qu'aucune interrogation sur sa capacité à voyager à destination de la Géorgie compte tenu de son état de santé ne ressort également de ces pièces ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

9. Considérant, en troisième lieu, que si M.D..., ressortissant géorgien âgé de soixante ans, qui affirme être entré sur le territoire français en juin 2013, fait valoir que fin mars 2016 son épouse et sa fille, alors âgée de 15 ans, sont entrées sur le territoire national et que son épouse a présenté une demande d'asile, il ressort des pièces du dossier qu'il n'en a pas informé la préfète de la Seine-Maritime avant la décision attaquée et que cette demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; qu'ainsi, il n'établit pas que la cellule familiale ne pourrait pas se reconstituer dans son pays d'origine où ils ont toujours vécu ; que s'il se prévaut également de son état de santé, il n'établit pas en quoi ce dernier l'empêcherait de mener une vie familiale normale en Géorgie alors que, ainsi qu'il a été dit au point 8, une offre de soins existe pour l'hépatite C ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, et eu égard notamment tant à la brève durée qu'aux conditions de son séjour en France, M. D... n'est pas fondé à soutenir que la décision de la préfète de la Seine-Maritime aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation sur les conséquences qu'elle comporte sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur la légalité de la décision de refus de délai de départ volontaire

10. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 9 que la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire à M. D...a été prise sur le fondement d'une obligation de quitter le territoire français légale ; que, par suite, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision doit être écarté ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination

11. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui a été dit précédemment que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision portant refus de délai de départ volontaire ne peut qu'être écarté ;

12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; que selon les termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

13. Considérant que M.D..., dont la demande d'asile a été rejetée, se borne à faire état dans ses écritures d'un danger pour lui en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'il n'assortit pas ses allégations d'éléments précis permettant de déterminer s'il est exposé de manière suffisamment personnelle, certaine et actuelle, à des menaces quant à sa vie ou sa liberté ou s'il risque d'être exposé à des traitements prohibés par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que ce moyen ne peut qu'être écarté ; que, par suite, M. D...n'est pas fondé à soutenir que la préfète de la Seine-Maritime aurait méconnu les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité de la décision faisant interdiction de retour sur le territoire français pendant trois ans :

14. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision portant obligation de quitter le territoire français étant légale, le moyen tiré du défaut de base légale de la décision faisant interdiction de retour sur le territoire national ne peut qu'être écarté ;

15. Considérant qu'aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans la rédaction applicable à la décision litigieuse : " L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. / (...) Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger obligé de quitter le territoire français, l'autorité administrative peut prononcer l'interdiction de retour pour une durée maximale de trois ans à compter de sa notification. (...) / L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) " ;

16. Considérant qu'il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux ; qu'il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour, d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger ; qu'elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet ; qu'elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision, une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace ; qu'en revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément ;

17. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la préfète de la Seine-Maritime pour prononcer la mesure litigieuse s'est fondée sur la durée de présence en France du requérant, sur le fait qu'il est sans attache familiale en France, qu'il a volontairement altéré ses empreintes digitales pour qu'elles ne puissent pas être exploitées et qu'il est défavorablement connu des services de police de son pays d'origine et des services de police français pour des faits de recel, de vols et d'infraction à la législation sur les stupéfiants et que son comportement constitue ainsi une menace pour l'ordre public ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. D...n'est entré en France qu'en 2013 ; que si son épouse et sa fille l'ont rejoint en mars 2016, il ressort des pièces du dossier qu'il n'en a pas informé les services de la préfecture avant la décision attaquée et qu'il n'établit pas que la cellule familiale ne pourrait pas se reconstituer dans son pays d'origine ; qu'enfin, sa dernière condamnation pour vol l'a conduit à purger une peine de prison entre mars 2015 et le 27 janvier 2016, soit moins de six mois avant la décision attaquée ; que, dans ces conditions, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas, en prononçant une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans, méconnu les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ;

18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte et celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D..., au ministre de l'intérieur et à Me C...A....

Copie en sera adressée à la préfète de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience publique du 28 mars 2017 à laquelle siégeaient :

- M. Etienne Quencez, président de la Cour,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- M. Rodolphe Féral, premier conseiller.

Lu en audience publique le 25 avril 2017.

Le rapporteur,

Signé : R. FERALLe président de la Cour,

Signé : E. QUENCEZ

Le greffier,

Signé : M.T. LEVEQUE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Le greffier

Marie-Thérèse Lévèque

2

N°16DA01832


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (quinquies)
Numéro d'arrêt : 16DA01832
Date de la décision : 25/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. Règles de procédure contentieuse spéciales.


Composition du Tribunal
Président : M. Quencez
Rapporteur ?: M. Rodolphe Féral
Rapporteur public ?: M. Guyau
Avocat(s) : SELARL MADELINE-LEPRINCE-MAHIEU

Origine de la décision
Date de l'import : 09/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-04-25;16da01832 ?
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