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24/05/2017 | FRANCE | N°15DA00999-15DA01197

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre - formation à 3 (bis), 24 mai 2017, 15DA00999-15DA01197


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...I..., Mme M...B...épouseI..., M. L...I...et Mme J... I...épouse G...ont demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 30 octobre 2012 par lequel le préfet de l'Oise a autorisé M. D...H..., en tant qu'associé exploitant, à participer à la mise en valeur de 117 hectares 06 ares et 14 centiares de terres situées dans le département de l'Oise et de l'Aisne.

Par un jugement n° 1203537 du 7 mai 2015, le tribunal administratif d'Amiens a annulé cet arrêté du 30 octobre 2012

, a mis à la charge de l'Etat une somme globale de 1 000 euros à verser aux consorts...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...I..., Mme M...B...épouseI..., M. L...I...et Mme J... I...épouse G...ont demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 30 octobre 2012 par lequel le préfet de l'Oise a autorisé M. D...H..., en tant qu'associé exploitant, à participer à la mise en valeur de 117 hectares 06 ares et 14 centiares de terres situées dans le département de l'Oise et de l'Aisne.

Par un jugement n° 1203537 du 7 mai 2015, le tribunal administratif d'Amiens a annulé cet arrêté du 30 octobre 2012, a mis à la charge de l'Etat une somme globale de 1 000 euros à verser aux consorts I...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté les conclusions présentées par les époux H...et l'Earl H...sur le fondement de ces mêmes dispositions.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête et un mémoire enregistrés les 18 juin 2015 et 10 novembre 2015 sous le numéro 15DA00999, M. D...H..., Mme F...H...et l'EARLH..., représentés par la SCP C. Pinchon-S. Cacheux demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 7 mai 2015 du tribunal administratif d'Amiens ;

2°) de rejeter la demande de M. et Mme I...devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge des consorts I...une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le préfet était seul compétent pour instruire la demande ;

- le préfet de l'Aisne, qui a saisi pour avis la commission d'orientation de l'agriculture et de la forêt, a été régulièrement consulté ;

- l'omission du nom de deux communes sur lesquelles se situent les terres en litige est une erreur purement matérielle ;

- il n'y avait aucune demande concurrente, l'EARL des quatres Pâture n'ayant formulé aucune demande d'autorisation mais une simple déclaration préalable d'exploiter ;

- les priorités du schéma départemental des structures agricoles ne pouvaient s'appliquer, en l'absence de demande concurrente ;

- en tout état de cause, les consorts I...n'établissent pas en quoi M. A...aurait été prioritaire ;

- le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif n'est pas fondé ;

- le préfet pouvait se fonder sur l'orientation du schéma directeur des structures agricoles favorisant les opérations permettant de maintenir ou développer l'emploi ;

- le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en accordant l'autorisation.

Par un mémoire, enregistré le 4 septembre 2015, Mme M...B...épouseI..., M. L...I...et Mme J...I...épouseG..., représentés par la SCP Croissant, de Limerville, Orts et Legru concluent au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est suffisamment motivé ;

- le préfet de l'Oise n'a pas consulté le préfet de l'Aisne ; l'avis de la commission départementale de l'Aisne ne pouvait à lui seul être pris en compte ;

- la demande aurait dû être instruite par le préfet de l'Aisne ;

- le préfet n'a pas examiné l'ensemble des parcelles dès lors qu'il n'a pas pris en compte celles situées à Proix et Mont d'Origny ;

- il existait une demande concurrente, le bail des terres en litige ayant été résilié pour une reprise en faveur de M. A...G..., associé au sein de l'EARL des 4 pâtures ; l'EARL avait obtenu la confirmation dès le 20 juillet 2012 de la possibilité d'exploiter les terres au titre du régime déclaratif ;

- eu égard à la distance de plus de 70 kilomètres et à l'existence d'un cheptel vif nécessitant un investissement humain, le préfet devait refuser la demande d'autorisation ; M. H... ne pourra pas avoir une exploitation effective et permanente des terres aussi éloignées ;

- l'argument tiré de ce que la distance n'est pas un obstacle puisque l'EARL H...exploite déjà des terres dans l'Oise n'est pas fondé dès lors qu'il n'est pas tenu compte du fait que M. H...est déjà exploitant individuel d'une surface de 105 hectares et que il sera amené à exploiter plus de 220 hectares ;

- il est impossible pour M. H...de se consacrer à l'exploitation de 222 hectares avec des parcelles distantes de 70 kilomètres et comprenant d'un coté un atelier laitier et de l'autre un autre de viande ;

- le préfet n'a pas analysé la situation de M. A...G..., ni précisé en quoi l'absence d'octroi de l'autorisation à M. H...aurait entrainé la suppression de l'activité d'un salarié.

Par des observations, enregistrées le 20 avril 2017, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt s'en rapporte à ses écritures présentées sous le n° 15DA01197.

II. Par un recours, enregistré le 17 juillet 2015 sous le n° 15DA01197, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 7 mai 2015 du tribunal administratif d'Amiens ;

2°) de rejeter la demande de M. et Mme I...devant le tribunal administratif.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- le préfet n'a pas commis d'erreur d'appréciation au regard des dispositions du 7° de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime ;

- le préfet de l'Oise était compétent pour instruire la demande de M.H... ;

- le préfet de l'Aisne a été consulté ;

- le préfet a examiné l'ensemble des parcelles pour lesquelles M. H...a demandé l'autorisation en litige ; le défaut de mention dans l'arrêté des communes de Proix et Mont d'Origny révèle une simple erreur de plume ;

- il n'existait aucune demande concurrente, M. G...ou l'EARL Pâture dont il fait partie n'ont sollicité aucune autorisation d'exploiter ;

- l'ordre des priorités n'était dès lors pas applicable ;

- M. H...souhaite effectivement exploiter les parcelles litigieuses en tant qu'associé exploitant.

Par un mémoire en défense enregistré le 8 septembre 2015, Mme M...B...épouseI..., M. L...I...et Mme J...I...épouseG..., représentés par la SCP Croissant, de Limerville, Orts et Legru, concluent au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est suffisamment motivé ;

- le préfet de l'Oise n'a pas consulté le préfet de l'Aisne ; l'avis de la commission départementale de l'Aisne ne pouvait à lui seul être pris en compte ;

- la demande aurait dû être instruite par le préfet de l'Aisne ;

- le préfet n'a pas examiné l'ensemble des parcelles dès lors qu'il n'a pas pris en compte celles situées à Proix et Mont d'Origny ;

- il existait une demande concurrente, le bail des terres en litige ayant été résilié pour une reprise en faveur de M. A...G..., associé au sein de l'EARL des 4 pâtures ; l'EARL avait obtenu la confirmation dès le 20 juillet 2012 de la possibilité d'exploiter les terres au titre du régime déclaratif ;

- eu égard à la distance de plus de 70 kilomètres et à l'existence d'un cheptel vif nécessitant un investissement humain, le préfet devait refuser la demande d'autorisation ; M. H... ne poura pas avoir une exploitation effective et permanente des terres aussi éloignées ;

- l'argument tiré de ce que la distance n'est pas un obstacle puisque l'EARL H...exploite déjà des terres dans l'Oise n'est pas fondé dès lors qu'il n'est pas tenu compte du fait que M. H...est déjà exploitant individuel d'une surface de 105 hectares et que il sera amené à exploiter plus de 220 hectares ;

- il est impossible pour M. H...de se consacrer à l'exploitation de 222 hectares avec des parcelles distantes de 70 kilomètres et comprenant d'un coté un atelier laitier et de l'autre un autre de viande

- le préfet n'a pas analysé la situation de M. A...G..., ni précisé en quoi l'absence d'octroi de l'autorisation à M. H...aurait entrainé la suppression de l'activité d'un salarié.

Par des observations, enregistrées le 22 septembre 2015 et 10 novembre 2015, M. D...H..., Mme F...H...et l'EARLH..., représentés par la SCP C. Pinchon-S. Cacheux concluent aux mêmes fins que le recours et à la mise à la charge des consorts I...la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Olivier Nizet, président-assesseur,

- les conclusions de M. Hadi Habchi, rapporteur public,

- et les observations de Me C...K..., représentant M. et Mme H...et l'EARLH....

1. Considérant que M. D...H...a sollicité du préfet de l'Oise une autorisation afin de participer en tant qu'associé exploitant, au sein de l'EARL H...à la mise en valeur de 117 hectares 06 ares et 14 centiares de terres situées dans le département de l'Oise et de l'Aisne, dont 59 hectares 54 ares 68 situées sur les communes de Macquigny, Mont d'Origny et Proix, dans l'Aisne, appartenant aux consorts I...; que, par un arrêté du 30 octobre 2012, le préfet de l'Oise a accordé cette autorisation ; que, par un jugement du 7 mai 2015, le tribunal administratif d'Amiens, à la demande des consortsI..., a annulé cet arrêté d'autorisation en tant qu'il porte sur les terres d'une superficie de 59 hectares 54 ares 68 centiares leur appartenant ; que le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, d'une part, M. et Mme H...et de l'EARLH..., d'autre part, relèvent appel de ce jugement ; qu'il y a lieu de joindre leurs recours pour statuer par un seul arrêt ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que pour justifier que le préfet a commis une erreur d'appréciation en accordant à M. H...l'autorisation qu'il sollicitait, le tribunal administratif a retenu que la distance séparant l'exploitation agricole de M. H...des terres en litige, était de nature à nuire à la mise en valeur rationnelle de l'ensemble cultural alors même que M. H...disposait de bâtiments et de matériel à proximité des terres, objet de l'autorisation d'exploiter ; que le jugement est ainsi suffisamment motivé ;

Sur la légalité de l'arrêté du 30 octobre 2012 :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 331-1 du code rural et de la pêche maritime dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté attaqué : " L'autorité administrative se prononce sur la demande d'autorisation en se conformant aux orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département dans lequel se situe le fonds faisant l'objet de la demande. Elle doit notamment : (...) / 3° Prendre en compte les biens corporels ou incorporels attachés au fonds dont disposent déjà le ou les demandeurs ainsi que ceux attachés aux biens objets de la demande en appréciant les conséquences économiques de la reprise envisagée ; 4° Prendre en compte la situation personnelle du ou des demandeurs, notamment en ce qui concerne l'âge et la situation familiale ou professionnelle et, le cas échéant, celle du preneur en place ; / (...) 7° Prendre en compte la structure parcellaire des exploitations concernées, soit par rapport au siège de l'exploitation, soit pour éviter que des mutations en jouissance ne remettent en cause des aménagements réalisés à l'aide de fonds publics (...) " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les terres, objet du présent litige, que M. H...souhaite mettre en valeur en tant qu'associé exploitant, au sein de l'EARLH..., gérée par sa mère, Mme F...H..., sont situées dans le département de l'Aisne, réparties sur les territoires des communes de Mont d'Origny, de Macquigny et de Proix ; que le siège social de cette exploitation se situe à 72 kilomètres de celui de l'exploitation individuelle située dans l'Oise que possède M.H..., qui est constituée d'une surface de 105 hectares 40 ares, de terres exploitées en polyculture élevage et d'un atelier laitier dont le quota laitier est fixé à 180 000 litres ; que l'EARL H...comprend également un atelier viande, composée d'une trentaine de vaches allaitantes ; que la distance entre les deux exploitations, alors que chacune d'elle, comporte des animaux nécessitant une présence humaine indispensable, est de nature à nuire à la mise en valeur rationnelle de l'ensemble cultural en cause et ce, en dépit de la présence d'un salarié agricole sur chacune d'elle, de leur autonomie respective en termes de bâtiment et de matériels ; que si les requérants se prévalent de la circonstance que l'EARL H...exploite sans difficulté déjà des terres éloignées dans l'Oise pour une superficie de 18 hectares 28 ares 95 centiares, cette circonstance ne permet pas d'établir que l'ajout supplémentaire des terres et de l'atelier laitier exploités à titre individuel par le requérant d'une surface de 105 hectares, permettra une exploitation rationnelle de l'ensemble agricole ainsi constitué et en dépit même de la présence de salariés agricoles, à les supposer affectés à l'atelier de production de lait ; que, dans ces conditions, le ministre d l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt et M. et Mme H...ainsi que l'EARLH... ne sont pas fondés à soutenir que le préfet de l'Oise n'a pas commis une erreur d'appréciation en accordant l'autorisation en litige ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, M. et Mme H...et l'EARL H...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le tribunal administratif d'Amiens a annulé l'arrêté du 30 octobre 2012 du préfet de l'Oise ; que, par voie de conséquence, les conclusions présentées par M. et Mme H...ainsi que l'EARL H...dans les deux instances doivent être rejetées ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat au titre des deux instances une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours n° 15DA01197 du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt et la requête n° 15DA00999 de M. et Mme H...ainsi que l'EARL H...sont rejetés.

Article 2 : L'Etat versera aux consorts I...une somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. et Mme H...et l'EARL H...dans l'instance n° 15DA01197 sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'agriculture et de l'alimentation, à M. D...H..., Mme F...H..., à l'EARLH..., Mme M...B...épouseI..., M. L...I...et Mme J...I...épouseG....

Délibéré après l'audience publique du 11 mai 2017 à laquelle siégeaient :

- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- M. Olivier Nizet, président-assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 24 mai 2017.

Le rapporteur,

Signé : O. NIZET Le président de chambre,

Signé : P-L. ALBERTINI Le greffier,

Signé : I. GENOT

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de l'alimentation en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Isabelle Genot

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Nos15DA00999-15DA01197

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 15DA00999-15DA01197
Date de la décision : 24/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-03 Agriculture et forêts. Exploitations agricoles.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Olivier Nizet
Rapporteur public ?: M. Habchi
Avocat(s) : SCP C.PINCHON et S.CACHEUX

Origine de la décision
Date de l'import : 20/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-05-24;15da00999.15da01197 ?
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