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29/06/2017 | FRANCE | N°16DA01125

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3, 29 juin 2017, 16DA01125


Vu la procédure suivante : Procédure antérieure : Le préfet du Pas-de-Calais a déféré au tribunal administratif de Lille l'arrêté du 9 septembre 2015 par lequel le maire de la commune d'Heuringhem a refusé de délivrer un permis de construire modificatif à l'EARL Bridault Chevalier pour la construction d'une porcherie au lieu-dit " Cantraine ". Par un jugement n° 1508665 du 19 avril 2016, le tribunal administratif a annulé cet arrêté et enjoint au maire d'Heuringhem de délivrer à l'EARL Bridault Chevalier le permis de construire modificatif sollicité dans l

e délai de quinze jours à compter de la notification du jugement, ...

Vu la procédure suivante : Procédure antérieure : Le préfet du Pas-de-Calais a déféré au tribunal administratif de Lille l'arrêté du 9 septembre 2015 par lequel le maire de la commune d'Heuringhem a refusé de délivrer un permis de construire modificatif à l'EARL Bridault Chevalier pour la construction d'une porcherie au lieu-dit " Cantraine ". Par un jugement n° 1508665 du 19 avril 2016, le tribunal administratif a annulé cet arrêté et enjoint au maire d'Heuringhem de délivrer à l'EARL Bridault Chevalier le permis de construire modificatif sollicité dans le délai de quinze jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 500 euros par jour de retard. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 20 juin 2016, et un mémoire, enregistré le 7 septembre 2016, la commune d'Heuringhem, représentée par Me E...A..., demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille ; 2°) de rejeter le déféré du préfet du Pas-de-Calais ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. ...................................................................................................... Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code rural et de la pêche maritime ; - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Christian Bernier, président-assesseur, - les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public, - et les observations de Me E...A..., représentant la commune d'Heuringhem, et de Me D...B..., représentant l'EARL Bridault Chevalier. 1. Considérant que, par un jugement n° 1204149 du 2 juin 2015, le tribunal administratif de Lille, à la demande de M. C...et autres, a annulé partiellement le permis tacite né le 8 septembre 2011 par lequel le maire de la commune d'Heuringhem avait autorisé l'EARL Bridault Chevalier à construire une porcherie en tant qu'il méconnaissait les articles L. 111-4 et R. 111-2 du code de l'urbanisme et l'article A3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune et a invité le pétitionnaire à régulariser sa demande par un permis de construire modificatif en application de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme ; que l'EARL Bridault Chevalier a ainsi déposé le 24 juin 2015 une demande de permis de construire modificatif tenant à la régularisation de son permis de construire initial ; que, cependant, le maire d'Heuringhem, par un arrêté du 9 septembre 2015, a refusé de délivrer ce permis modificatif ; que, par une ordonnance n° 1508646 du 19 novembre 2015, sur saisine du préfet du Pas-de-Calais effectuée en application de l'article L. 554-1 du code de justice administrative, le juge des référés a suspendu l'exécution de cet arrêté et a enjoint au maire d'Heuringhem de statuer sur la demande de permis de construire modificatif de l'EARL Bridault Chevalier dans un délai d'un mois à compter de la notification l'ordonnance ; qu'en réponse à cette injonction de réexamen, le maire de la commune a réitéré son refus par une décision du 19 décembre 2015 qui, sur saisine du préfet du Pas-de-Calais, a été à son tour suspendue par une ordonnance n° 1601079 du 17 mars 2016, par laquelle le magistrat a de nouveau enjoint au maire de la commune de statuer sur la demande de permis de construire modificatif présentée par l'EARL Bridault Chevalier ; que le maire d'Heuringhem a alors accordé le permis de construire modificatif sollicité par l'EARL Bridault Chevalier par un arrêté du 15 avril 2016 non contesté ; que, par un jugement n° 1508665 du 19 avril 2016, le tribunal administratif de Lille, sur déféré préfectoral, a annulé le refus du 9 septembre 2015 que le maire d'Heuringhem avait opposé à la demande de permis de construire modificatif sollicitée par l'EARL Bridault Chevalier sur le fondement de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme et a enjoint au maire de délivrer ce permis ; que, par un jugement n° 1601049 du 15 novembre 2016, sur déféré préfectoral, le tribunal administratif de Lille a annulé le refus du 19 décembre 2015 que le maire d'Heuringhem avait une nouvelle fois opposé à la demande de permis de construire modificatif sollicitée par l'EARL Bridault Chevalier et a enjoint au maire de délivrer ce permis ; 2. Considérant que, dans la présente instance, la commune d'Heurighem relève appel du jugement n° 1508665 du 19 avril 2016 par lequel, sur déféré du préfet du Pas-de Calais, le tribunal administratif a annulé l'arrêté du 9 septembre 2015 par lequel le maire d'Heurighem avait refusé de délivrer une première fois le permis de construire modificatif ; Sur le non-lieu : 3. Considérant, d'une part, que le juge des référés, saisi sur le fondement de l'article L. 521-1 précité, ne peut, sans excéder son office, ordonner une mesure qui aurait des effets en tous points identiques à ceux qui résulteraient de l'exécution par l'autorité administrative d'un jugement annulant la décision administrative contestée ; 4. Considérant, d'autre part, que si, eu égard à leur caractère provisoire, les décisions du juge des référés n'ont pas, au principal, l'autorité de la chose jugée, elles sont néanmoins, conformément au principe rappelé à l'article L. 11 du code de justice administrative, exécutoires et, en vertu de l'autorité qui s'attache aux décisions de justice, obligatoires ; qu'il en résulte que lorsque le juge des référés a prononcé la suspension d'une décision administrative et qu'il n'a pas été mis fin à cette suspension - soit, par l'aboutissement d'une voie de recours, soit dans les conditions prévues à l'article L. 521-4 du code de justice administrative, soit par l'intervention d'une décision au fond - l'administration ne saurait légalement reprendre une même décision sans qu'il ait été remédié au vice que le juge des référés avait pris en considération pour prononcer la suspension ; que, lorsque le juge des référés a suspendu une décision de refus, il incombe à l'administration, sur injonction du juge des référés ou lorsqu'elle est saisie par le demandeur en ce sens, de procéder au réexamen de la demande ayant donné lieu à ce refus ; que lorsque le juge des référés a retenu comme propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de ce refus un moyen dirigé contre les motifs de cette décision, l'autorité administrative ne saurait, eu égard à la force obligatoire de l'ordonnance de suspension, et sauf circonstances nouvelles, rejeter de nouveau la demande en se fondant sur les motifs en cause ; 5. Considérant, enfin, qu'une décision intervenue pour l'exécution de l'ordonnance par laquelle le juge des référés d'un tribunal administratif a suspendu l'exécution d'un acte administratif revêt, par sa nature même, un caractère provisoire jusqu'à ce qu'il soit statué sur le recours en annulation présenté parallèlement à la demande en référé ; qu'il en est notamment ainsi lorsque l'administration décide, à l'issue du réexamen faisant suite à la décision de suspension d'un refus prise par le juge des référés, de faire droit à la demande ; qu'eu égard à son caractère provisoire, une telle décision peut être remise en cause par l'autorité administrative ; qu'en matière de permis de construire, l'autorisation délivrée à la suite du réexamen ordonné en conséquence d'une mesure de suspension prise sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative et pour l'exécution de l'ordonnance du juge des référés qui revêt un caractère provisoire peut être retiré à la suite du jugement rendu au principal sur le recours pour excès de pouvoir formé contre la décision initiale de refus sous réserve que les motifs de ce jugement ne fassent pas par eux-mêmes obstacle à ce que l'administration reprenne une décision de refus ; 6. Considérant qu'il ressort des visas dont il est assorti que le permis de construire modificatif finalement délivré le 13 juillet 2016 par le maire d'Heuringhem n'a été accordé que pour faire droit à l'injonction contenue en dernier lieu dans l'ordonnance n° 1601079 du 17 mars 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Lille ; que si, ainsi qu'il a été rappelé au point 1, par des jugements ultérieurs du 19 avril 2016 et du 15 novembre 2016, le tribunal administratif a annulé les refus des 9 septembre 2015 et 19 décembre 2015 du maire d'Heuringhem et a enjoint la délivrance des permis de construire modificatifs, ces deux jugements font l'un et l'autre l'objet d'un appel, le premier dans le cadre de la présente requête, le second par une requête n° 17DA00100 jugée ce même jour par la cour administrative d'appel de Douai ; que, dans ces conditions, l'arrêté du 13 juillet 2016 est motivé exclusivement par la nécessité de se conformer aux ordonnances du juge des référés ; que les ordonnances rendues par le juge des référés ne présentent, en vertu des principes rappelés aux points précédents, qu'un caractère provisoire ; que l'arrêté du 13 juillet 2016 pourrait en particulier être retiré par le maire d'Heuringhem si la cour faisait droit à la requête de la commune ; que si cet arrêté répond également aux injonctions des jugements du tribunal contestés au fond, aucun, en tout état de cause, ne présente de caractère définitif ; que, dans ces conditions, le préfet du Pas-de-Calais et l'EARL Bridault Chevalier ne sont pas fondés à soutenir que le présent recours est dépourvu d'objet du fait de l'intervention de l'arrêté municipal du 13 juillet 2016, et ce, alors même qu'il n'a pas été contesté ; 7. Considérant qu'enfin, la circonstance que, par un arrêt n° 15DA01256, de ce jour, la cour a, d'une part, annulé le jugement n° 1204149 du 5 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Lille avait prononcé une annulation partielle de l'autorisation tacite accordée à l'EARL Bridault Chevalier et l'avait invitée à régulariser son permis de construire initial par un permis de construire modificatif, et a, d'autre part, rejeté comme irrecevable la requête collective formée par quatorze requérants individuels contre l'autorisation tacite, ne prive pas davantage d'objet les déférés préfectoraux formés contre les refus de permis de construire modificatif ; Sur la régularité du jugement : 8. Considérant que le procès-verbal de reconnaissance de limites produit par le préfet du Pas-de-Calais à l'appui de son mémoire introductif d'instance du 21 octobre 2015 et par l'EARL Bridault Chevalier à l'appui de son mémoire enregistré le 11 janvier 2016, faisait état de ce que le chemin d'exploitation cadastré section ZK1 appartenait à l'association foncière de remembrement des communes de Ecques, Clarques et Inghem ; que ces mémoires ont été communiqués à la commune d'Heuringhem ; qu'ils ont été complétés par la production du plan cadastral joint au mémoire du préfet du 22 mars 2016, également communiqué à la commune ; que le procès-verbal de remembrement et l'extrait cadastral joints au mémoire récapitulatif de l'EARL Bridault Chevalier enregistré le 23 mars 2016, qui n'ont pas été communiquées à la commune, présentaient en l'espèce un caractère superfétatoire ; que, dès lors, la commune n'est pas fondée à soutenir que, pour retenir au point 8 du jugement, que le chemin cadastré parcelle ZK1 était qualifié de chemin d'exploitation et appartenait à l'association foncière de remembrement des communes de Ecques, Clarques et Inghem, les premiers juges se seraient fondés sur des éléments qui n'auraient pas été soumis au contradictoire ; 9. Considérant que le tribunal a visé, au titre de la substitution de motif demandée par la commune, le moyen tiré de ce qu'il existerait des doutes quant à l'existence et à la régularité du titre autorisant l'EARL Bridault Chevalier à réaliser des travaux sur la voie d'accès ; qu'il y a répondu au point 7 de son jugement, en écartant cette circonstance comme inopérante dès lors que le motif opposé ne pouvait légalement justifier le refus de délivrer le permis de construire sollicité ; qu'il n'a donc pas omis de statuer sur ce moyen ; 10. Considérant que le tribunal a répondu, au point 8 de son jugement, au moyen tiré de ce que l'EARL Bridault Chevalier ne disposerait pas d'un titre l'habilitant à utiliser la desserte du terrain d'accès au projet en retenant que, comme propriétaire riverain de ce chemin d'exploitation, elle disposait, en application l'article L. 162-1 du code rural et de la pêche maritime, du droit d'usage sur ce chemin ; qu'il n'a donc pas omis de statuer sur ce moyen ; 11. Considérant que si la commune fait valoir que le jugement attaqué contredit certaines des énonciations du jugement n° 1204149 du 2 juin 2015 par lequel le tribunal s'était prononcé sur la légalité du permis de construire implicite initialement délivré à l'EARL Bridault Chevalier, une éventuelle contradiction sur ce point n'affecterait pas la régularité du jugement mais seulement, le cas échéant, son bien-fondé ; 12. Considérant que les rapports de géomètres, les constats d'huissier et les documents photographiques permettaient au tribunal de se faire une opinion sur la réalité des travaux effectués pour viabiliser le chemin d'accès ; que le tribunal s'est ainsi estimé en mesure au vu des éléments produits d'apprécier la portée du moyen opposé par la commune sans avoir à procéder à une mesure d'instruction supplémentaire ; qu'il n'a donc pas, en tout état de cause, méconnu son office en s'abstenant d'organiser une visite des lieux ; Sur les motifs d'annulation retenus par le tribunal administratif : 13. Considérant que, pour refuser le permis de construire modificatif sollicité le 24 juin 2012 par l'EARL Bridault Chevalier, le maire d'Heuringhem, dans l'arrêté en litige, a considéré, d'une part, que le chemin d'accès à la porcherie ne présentait pas les caractéristiques exigées par l'article A3 du plan local d'urbanisme et par l'article R.111-2 du code de l'urbanisme, et, d'autre part, que les recommandations du service départemental d'incendie et de secours n'ayant pas été intégralement suivies, le projet présentait un risque pour la sécurité publique ; que, dans le cadre de l'instance ouverte devant le tribunal administratif, la commune a demandé aux premiers juges que soient substitués, à titre subsidiaire, à ces motifs de refus, trois autres motifs, le premier tiré de l'absence de titre conférant à l'EARL Bridault Chevalier un droit à l'usage de la voie d'accès au terrain, le second tiré des doutes quant à l'existence et à la régularité du titre autorisant le pétitionnaire à réaliser des travaux sur la voie d'accès, et le troisième tiré de la méconnaissance de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme ; que, pour prononcer par son jugement du 19 avril 2016, l'annulation du refus de délivrance du permis de construire modificatif le tribunal administratif de Lille a censuré chacun de ces motifs ; qu'en application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, il appartient à la cour de se prononcer sur ces motifs d'annulation qui sont contestés devant elle ; Sur le motif tiré de l'insuffisance des conditions de desserte : En ce qui concerne les conditions posées par l'article A3 du plan local d'urbanisme : 14. Considérant qu'aux termes de l'article A3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune : " Un terrain n'est considéré comme constructible que s'il a un accès d'au moins 4 mètres à une voie publique ou privée. Les accès doivent présenter les caractéristiques permettant de satisfaire aux exigences de la sécurité, de la desserte contre l'incendie et de la protection civile et aux besoins des constructions et installations envisagées " ; 15. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort du document intitulé " attestation de bornage " établi le 16 juin 2015 par le géomètre-expert qui a réalisé le procès-verbal de reconnaissance de limites du 30 août 2013 que le chemin desservant les parcelles de l'EARL Bridault Chevalier, selon les archives du premier remembrement datant de 1981, a été borné à une largeur de 6 mètres ; qu'un constat d'huissier, réalisé le 20 juin 2015 à la demande du pétitionnaire, qui fait foi jusqu'à preuve du contraire, constate que la partie carrossable du chemin était à cette date comprise entre 4,40 mètres et 5,20 mètres ; que le rapport établi le 6 juillet 2015 par le directeur départemental des services d'incendie et de secours pour la direction départementale des territoires et de la mer dans le cadre de l'instruction du permis de construire modificatif confirme que la porcherie est desservie par une voie de 4 mètres de large, conforme au règlement ; qu'aucune de ces données n'est infirmée par les documents photographiques produits par les parties ; que si la commune d'Heuringhem conteste le constat d'huissier du 20 juillet 2015, elle ne produit aucun élément dont il ressortirait qu'à la date de la décision attaquée, la largeur du chemin d'accès était inférieure à 4 mètres ; qu'en particulier, le constat d'huissier établi le 22 mars 2016 à la demande de la commune ne comporte aucune mesure de la largeur du chemin ; qu'il ne résulte pas des énonciations de ce constat que l'huissier mandaté par la commune aurait été empêché par les propriétaires de s'avancer à pied sur cette voie de circulation privée et d'en mesurer la largeur ; que la commune d'Heuringhem n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a considéré que la voie d'accès au terrain d'assiette du projet respectait la condition de largeur posée par l'article A3 du plan local d'urbanisme ; 16. Considérant, en second lieu, qu'il ressort d'un premier procès-verbal de constat établi par un huissier de justice le 17 septembre 2013 que le chemin d'accès à la porcherie était à cette date constitué de ternaire recouvert d'une couche de terre, en bon état et parfaitement carrossable ; qu'un second constat d'huissier, réalisé le 20 juin 2015 confirme que le chemin est parfaitement carrossable ; que si le constat d'huissier réalisé le 22 mars 2016, à la demande de la commune, relève que le chemin est empierré et non recouvert d'un enrobé, qu'il existe un défaut de planéité de part et d'autre du chemin avec des bandes enherbées en bordure de champs et en partie centrale du chemin, il confirme que les travaux d'empierrage destinés à conforter la voie d'accès, qui n'avaient pas été réalisés à la date de la délivrance du permis de construire initial, le 8 septembre 2011, avaient été effectués à la date de la délivrance du permis de construire modificatif ; qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que, compte tenu de la structure du chemin, de son empierrement, de la configuration des lieux et du type de véhicules devant l'emprunter ainsi que de la fréquence des passages sur un chemin privé non ouvert à la circulation publique, cette voie serait inadaptée à la desserte de l'élevage porcin ; que, par suite, la commune d'Heuringhem n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a censuré le motif de refus fondé sur les prescriptions de l'article A3 du plan local d'urbanisme ; En ce qui concerne les exigences de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : 17. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, alors applicable : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations " ; 18. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 15 à 16 que le chemin de desserte a une largeur minimale de 4 mètres et suffit au passage de camions qui desserviront l'élevage porcin ; qu'en outre, il ressort du rapport du directeur départemental des services d'incendie et de secours du 6 juillet 2015 que la voie est accessible aux véhicules de secours, avec la possibilité de faire demi-tour sans qu'il soit fait état de problèmes particuliers pour le croisement des engins ; que la configuration plane des lieux et la bonne visibilité limitent en outre les risques d'accident ; que, par suite, la commune d'Heuringhem n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a censuré le motif de refus fondé sur les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ; En ce qui concerne les considérations liés à l'association foncière de remembrement sur les conditions de desserte : 19. Considérant que les considérations liées à l'association foncière de remembrement de Clarques, Ecques et Inghem, propriétaire du chemin d'exploitation servant d'accès à la porcherie et les engagements que l'EARL Bridault Chevalier, qui est un des propriétaires riverains du chemin, a pris pour financer des travaux sur ce chemin et les litiges de droit privé qui pourraient en résulter, sont sans influence sur les conditions de desserte du bâtiment qu'il appartient seulement au maire d'apprécier au regard de la finalité de l'autorisation de construire ; Sur le motif tiré du risque d'incendie : En ce qui concerne le balisage au sol : 20. Considérant qu'aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / (...) / f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement " ; qu'aux termes de l'article R. 431-9 du même code : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu (...) " ; 21. Considérant que le service départemental d'incendie et de secours, au point 3.7 de son avis favorable du 6 juillet 2015, postérieur au dépôt de la demande de permis de construire modificatif, a préconisé à l'EARL Bridault Chevalier d'interdire le stationnement de véhicules au débouché des sorties de secours et de mettre en place un balisage au sol ; 22. Considérant que les dispositions citées au point 20 du code de l'urbanisme n'imposent pas que le balisage au sol des places de stationnement soit matérialisé sur le plan de masse des constructions ni que cette question soit traitée dans la notice architecturale ; que la commune d'Heuringhem n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a censuré ce motif tiré de l'absence de matérialisation de l'emplacement des places de stationnement dans le dossier de demande ; En ce qui concerne le dispositif de désenfumage : 23. Considérant que le service départemental d'incendie et de secours, au point 3.3 de son avis du 6 juillet 2015, a préconisé un désenfumage du bâtiment de stockage cohérent avec la nature de l'activité et précisé que les toitures seront pourvues d'exutoires de fumées à raison de 2 % de la surface au sol ; 24. Considérant qu'il ressort du plan de masse que le bâtiment de stockage est ouvert sur ses façades est et ouest et que cette situation prive les exutoires de fumées de nécessité ; que les précisions que comporte l'avis favorable du service départemental et de secours ont pour objet de rappeler les prescriptions générales applicables à ce type de bâtiment en matière de désenfumage et non d'appeler le pétitionnaire à modifier ses plans ; que le maire d'Heuringhem ne pouvait dès lors refuser, pour ce motif, de délivrer le permis de construire rectificatif ; En ce qui concerne la réserve d'eau et le puisard : 25. Considérant que le service départemental d'incendie et de secours, au point 3.2 de son avis du 6 juillet 2015 a relevé que la défense extérieure contre l'incendie, assurée par une réserve de 180 m3, avec puisard et plate-forme d'aspiration, implantée à plus de 30 mètres des bâtiments, était conforme à la circulaire du 10 décembre 1951 ; qu'il a simplement spécifié que ce dispositif devrait faire l'objet d'une réception par le service après sa réalisation ; 26. Considérant qu'il ressort du plan de masse que la citerne sera alimentée par les eaux pluviales ; que la plateforme sur laquelle les véhicules de secours seraient amenés à stationner pour puiser l'eau est située à plus de 30 mètres du risque à défendre ; qu'au demeurant, ainsi qu'il a été dit au point précédent, le service départemental d'incendie et de secours avait lui-même estimé en accordant son avis favorable, que les dispositions prévues étaient conformes aux exigences de sécurité ; que, dès lors, la commune d'Heuringhem n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a censuré les motifs de refus de délivrer le permis de construire, tirés de l'absence de précision sur le mode d'alimentation de la citerne et l'absence de respect de la distance de 30 mètres ; 27. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 20 à 26 que le maire, à qui il était au demeurant loisible d'assortir son autorisation de prescriptions spéciales ainsi que le permettent les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a censuré les motifs de refus liés au risque pour la sécurité publique ; Sur l'absence de titre donnant droit à l'usage de la voie d'accès au terrain : 28. Considérant qu'aux termes de l'article L. 162-1 du code rural et de la pêche maritime : " Les chemins et sentiers d'exploitation sont ceux qui servent exclusivement à la communication entre divers fonds, ou à leur exploitation. Ils sont, en l'absence de titre, présumés appartenir aux propriétaires riverains, chacun en droit soi, mais l'usage en est commun à tous les intéressés. (...) " ; 29. Considérant que le permis, qui est délivré sous réserve des droits des tiers, a pour seul objet d'assurer la conformité des travaux qu'il autorise avec la réglementation d'urbanisme ; que, dès lors, si l'administration et le juge administratif doivent s'assurer de l'existence d'une desserte suffisante de la parcelle par une voie ouverte à la circulation publique et, le cas échéant, de l'existence d'un titre créant une servitude de passage donnant accès à cette voie, il ne leur appartient de vérifier ni la validité de cette servitude, ni l'existence d'un titre permettant l'utilisation de la voie qu'elle dessert, si elle est privée, dès lors que celle-ci est ouverte à la circulation publique ; 30. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'EARL Bridault Chevalier est propriétaire des parcelles ZD 34, 35 et 36 qui constituent l'emprise de la nouvelle porcherie ; que si ces parcelles ne disposent pas d'un accès direct à la voie publique, cet accès est assuré par un chemin de terre, qualifié par erreur de " chemin rural " sur le plan de masse, qui est en réalité une voie dont il ressort des documents cadastraux, non sérieusement contestés par la commune, qu'elle appartient à l'association foncière de remembrement des communes de Ecques, Clarques et Inghem ; que cette voie est une voie privée qui n'est pas ouverte à la circulation publique de véhicules ; qu'elle est destinée exclusivement à l'exploitation des divers fonds qui lui sont attenants, parmi lesquels se trouve celui de l'exploitation de l'EARL Bridault Chevalier située à l'extrémité du cul-de-sac ; qu'elle présente de ce fait le caractère d'un chemin d'exploitation au sens de l'article L. 162-1 du code rural et de la pêche maritime sans qu'y fasse obstacle la circonstance qu'elle relie les exploitations qui le bordent à la route départementale 195 ; 31. Considérant que l'EARL Bridault Chevalier, dès lors qu'elle est propriétaire riveraine de la voie qui dessert son fonds, dispose en vertu des dispositions précitées de l'article L. 162-1 du code rural et de la pêche maritime, d'un droit d'usage sur ce chemin d'exploitation sans qu'il soit besoin pour elle de justifier d'une autorisation de l'association foncière de remembrement des communes de Ecques, Clarques et Inghem, en l'espèce superfétatoire ; 32. Considérant que la commune d'Heuringhem fait valoir que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a contredit les énonciations du jugement n° 1204149 du 2 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Lille avait indiqué qu'à la date de la décision attaquée, la largeur du chemin était de 3 mètres et que le dossier de demande de permis de construire ne comportait pas l'autorisation de l'association foncière de remembrement ; que ce jugement d'annulation partielle pour excès de pouvoir avait l'autorité absolue de la chose jugée dans la mesure de cette annulation ; que cette annulation avait été prononcée sur le fondement de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme et permettait ainsi la délivrance d'un permis de construire modificatif en vue de régulariser les conditions d'accès du bâtiment ; que ce jugement ne faisait donc pas obstacle à ce que de nouvelles considérations de fait soient prises en compte à l'occasion de l'examen de la demande de permis de construire modificatif et à ce que le juge, saisi du refus prononcé, en tienne compte ; qu'en outre, ce jugement du 20 juin 2015 a été annulé par un arrêt de ce jour de la cour ; que, par suite, le moyen tiré de " la contradiction de motifs " doit être écarté ; Sur la régularité du titre autorisant l'EARL Bridault Chevalier à réaliser des travaux sur le chemin d'exploitation : 33. Considérant que les contestations auxquelles a pu donner lieu l'approbation par le bureau de l'association foncière de remembrement des communes de Ecques, Clarques et Inghem de la convention du 26 avril 2013 par laquelle l'EARL Bridault Chevalier s'engage à prendre en charge les frais de viabilisation et d'entretien du chemin d'exploitation qui dessert son fonds ne peuvent légalement fonder le refus de permis de construire modificatif litigieux, lequel est délivré sous réserve des droits des tiers ; Sur la méconnaissance de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme : 34. Considérant qu'aux termes du troisième alinéa de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme : " (...) Lorsque le terrain n'est pas directement desservi par une voie ouverte à la circulation publique, le plan de masse indique l'emplacement et les caractéristiques de la servitude de passage permettant d'y accéder " ; 35. Considérant que si sur le plan de masse joint à la demande de permis modificatif, le chemin d'exploitation qui dessert le fonds de l'EARL Bridault Chevalier est improprement qualifié de " chemin rural ", ce plan fait néanmoins apparaître les caractéristiques de la voie ; que la notice jointe précise que le pétitionnaire dispose d'un accès sur ce chemin de remembrement appartenant à l'association foncière de remembrement des communes de Ecques, Clarques et Inghem, large de 6 mètres qui a fait l'objet de renforcement ; que le procès-verbal de reconnaissance des limites joint à la demande comporte l'ensemble des données pertinentes relatives à l'accès ; que l'inexactitude de la mention figurant sur le plan de masse a donc été insusceptible d'induire en erreur le maire d'Heuringhem ; qu'elle n'était pas davantage de nature à fausser l'appréciation du maire sur la consistance du projet, qui, dès lors qu'il est desservi par un chemin d'exploitation, n'est pas enclavé ; 36. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune d'Heuringhem n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté du 9 septembre 2015 par lequel le maire a refusé de délivrer à l'EARL Bridault Chevalier un permis de construire modificatif ; Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 37. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, la somme que la commune d'Heuringhem sollicite à ce titre ; qu'il y a lieu de mettre à la charge de la commune d'Heuringhem, qui succombe dans la présente instance, la somme de 2 000 euros à verser à l'EARL Bridault Chevalier sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; DECIDE : Article 1er : La requête de la commune d'Heuringhem est rejetée. Article 2 : La commune d'Heuringhem versera à l'EARL Bridault Chevalier la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Heuringhem, à l'EARL Bridault Chevalier, au ministre de l'intérieur et au ministre de la cohésion des territoires. Copie en sera communiquée pour information au préfet du Pas-de-Calais. N°16DA01125 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA01125
Date de la décision : 29/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Procédure d'attribution - Instruction de la demande.

Urbanisme et aménagement du territoire - Règles de procédure contentieuse spéciales.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Christian Bernier
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : LORTHIOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 22/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-06-29;16da01125 ?
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