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17/10/2017 | FRANCE | N°17DA00952

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre - formation à 3, 17 octobre 2017, 17DA00952


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 26 décembre 2016 de la préfète de l'Essonne lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai et fixant le pays de destination de l'éloignement.

Par un jugement n° 1610364 du 25 avril 2017 le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 mai 2017, M. A...D..., représenté par Me C...B..., dem

ande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 25 avril 2017 du tribunal administratif de Lille ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 26 décembre 2016 de la préfète de l'Essonne lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai et fixant le pays de destination de l'éloignement.

Par un jugement n° 1610364 du 25 avril 2017 le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 mai 2017, M. A...D..., représenté par Me C...B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 25 avril 2017 du tribunal administratif de Lille ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 26 décembre 2016 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de l'Essonne de lui délivrer un titre provisoire de séjour, sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé le délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, et de procéder à un nouvel examen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.D..., ressortissant algérien né le 22 décembre 1985, a déclaré être entré en France en 2013 ; qu'il relève appel du jugement du 25 avril 2017 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 décembre 2016 par lequel la préfète de l'Essonne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination de l'éloignement ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ; et qu'aux termes des dispositions de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. " ;

3. Considérant que la décision en litige vise les dispositions sur lesquelles elle est fondée, notamment les articles L. 211-1, L. 511-1-I, L. 511-1-II et L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment ses articles 3 et 8 ; qu'elle précise que M. D... a été interpellé le 26 décembre 2016 pour vol à l'étalage et placé en garde à vue le jour même, qu'il est entré et s'est maintenu sur le territoire français sans être titulaire d'un titre de séjour et qu'il n'allègue pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays ; l'arrêté énonce également qu'il est célibataire et sans charge de famille ; qu'ainsi, la décision attaquée, qui n'avait pas à faire état de tous les éléments caractérisant la situation personnelle de M. D..., vise les textes dont il est fait application, et énonce les éléments de faits et de droits sur lesquels elle est fondée ; que dès lors, l'arrêté est suffisamment motivé et n'est pas entaché d'un défaut d'examen sérieux de la situation personnelle de l'intéressé ;

4. Considérant que M. D...invoque le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu ; que, lorsqu'il oblige un étranger à quitter le territoire français sur le fondement des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet doit appliquer les principes généraux du droit de l'Union européenne, dont celui du droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle défavorable ne soit prise à son encontre, tel qu'il est énoncé notamment au 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du procès-verbal des déclarations de M.D..., que celui-ci a été invité, au cours de son audition par un officier de police judiciaire, le 26 décembre 2016, à faire valoir ses observations au sujet d'une éventuelle reconduite à la frontière ; qu'en particulier, M. D...s'est exprimé au sujet de sa situation familiale, de ses conditions d'entrée en France ainsi que de ses moyens d'existence ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé disposait d'informations tenant à sa situation qu'il a été empêché de porter à la connaissance de l'administration avant que ne soit prise à son encontre la mesure qu'il conteste et qui, si elles avaient pu être communiquées à temps, auraient été de nature à faire obstacle à l'édiction de cette décision ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce qu'en l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet aurait porté atteinte au principe général du droit de l'Union européenne, garanti notamment par les stipulations de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, selon lequel toute personne a le droit d'être entendue préalablement à l'adoption d'une mesure individuelle l'affectant défavorablement, doit être écarté ;

6. Considérant qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier, ni de la motivation de la décision en litige, que la préfète de l'Essonne n'aurait pas procédé à un examen sérieux et personnalisé de la situation de l'appelant avant de prendre la décision contestée ; que dès lors, M. D...n'est pas fondé à invoquer le moyen tiré du défaut d'examen sérieux de la situation ;

7. Considérant que si M. D...soutient que la mesure d'obligation de quitter le territoire français a eu pour effet immédiat de faire obstacle à son mariage, l'arrêté attaqué, qui n'a ni pour objet ni pour effet de faire obstacle au mariage de l'intéressé, ne peut être regardé comme portant atteinte à sa liberté de marier ;

8. Considérant qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

9. Considérant que M. D...fait valoir avoir transféré le centre de ses intérêts privés et familiaux en France, où résident un de ses oncles et son frère et où il s'est marié, postérieurement à l'arrêté contesté, le 28 janvier 2017, avec une femme de nationalité française ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que, s'il affirme avoir un oncle paternel et un frère en France, l'intéressé n'établit ni même n'allègue être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine qu'il n'a quitté, selon ses déclarations, en mai 2013, à l'âge de vingt-huit ans ; qu'à la date de l'arrêté en litige, il vivait en concubinage depuis moins d'un an et ne pouvait justifier de l'intensité et de la stabilité de liens d'ordre social ou professionnel constitués en France, où il a été interpellé pour des faits de vol à l'étalage ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, eu égard notamment à la durée et aux conditions du séjour de M. D...sur le territoire français, la décision contestée lui faisant obligation de quitter le territoire français n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but poursuivi ; que par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ; que, pour les mêmes motifs, la préfète de l'Essonne n'a pas davantage commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M.D... ;

Sur la décision refusant un délai de départ volontaire :

10. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification pour rejoindre le pays dont il possède la nationalité (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / 1° Si le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; / 2° Si l'étranger s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, de son récépissé de demande de carte de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était ou manifestement infondée ou frauduleuse ; / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; / b) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; / c) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, de son récépissé de demande de carte de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ; / d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; / e) Si l'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ; / f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 (...) " ;

11. Considérant que l'arrêté en litige, qui vise l'article L. 511-1-II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, précise que M. D...a été interpellé pour vol à l'étalage, qu'il s'est maintenu sur le territoire français sans être titulaire d'un titre de séjour et que sa présence sur ce même territoire constitue une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société ; qu'ainsi, l'arrêté comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation manque en fait et doit être écarté ;

12. Considérant que, comme l'ont précisément relevé les premiers juges au point 19 du jugement attaqué, le préfet s'est fondé sur la circonstance que l'intéressé avait fait l'objet d'un signalement pour des faits de troubles de l'ordre public, et plus particulièrement pour des faits de vol à l'étalage, de sorte qu'il entrait dans le champ des dispositions du 1° du II de l'article L. 511-1 susvisé ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 511-1-II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à Me C...B....

Copie en sera transmise pour information à la préfète de l'Essonne.

N°17DA00952 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17DA00952
Date de la décision : 17/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Paul Louis Albertini
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : LANCIEN

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-10-17;17da00952 ?
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