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09/11/2017 | FRANCE | N°15DA01431

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre - formation à 3, 09 novembre 2017, 15DA01431


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Anger Nettoyage a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la décision du 14 juin 2013 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a déclaré Mme A...inapte à son emploi de chef d'équipe au sein de la société Anger Nettoyage.

Par un jugement n° 1302270 du 25 juin 2015, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 août 2015, la soci

été Anger Nettoyage, représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Anger Nettoyage a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la décision du 14 juin 2013 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a déclaré Mme A...inapte à son emploi de chef d'équipe au sein de la société Anger Nettoyage.

Par un jugement n° 1302270 du 25 juin 2015, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 août 2015, la société Anger Nettoyage, représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 25 juin 2015 du tribunal administratif de Rouen ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 14 juin 2013 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Valérie Petit, président-assesseur,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

1. Considérant que MmeA..., chef d'équipe au sein de la société Anger Nettoyage, a fait l'objet d'un arrêt de travail à compter de décembre 2010 ; que, par un avis du 5 décembre 2012, le médecin du travail a émis, à l'occasion de la reprise du travail, un " avis d'inaptitude pour danger immédiat en une seule visite " ; que, par une décision du 23 mars 2013, l'inspecteur du travail a annulé cet avis du 5 décembre 2012 et a déclaré Mme A..." inapte à tout poste dans l'entreprise compte tenu d'une situation de danger immédiat " ; que, saisi par la société d'un recours hiérarchique, le ministre en charge du travail, par une décision du 14 juin 2013, a retiré la décision de l'inspecteur du travail comme insuffisamment motivée et a déclaré Mme A... inapte à son poste de chef d'équipe au sein de la société Anger Nettoyage mais apte à occuper un tel poste dans une autre entreprise ; que, par un jugement du 25 juin 2015, le tribunal administratif de Rouen a rejeté la demande de la société Anger Nettoyage tendant à l'annulation de cette décision du ministre ; que la société relève appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005 relatif à la nomination des membres du gouvernement : " A compter du jour suivant la publication au Journal officiel de la République française de l'acte les nommant dans leurs fonctions ou à compter du jour où cet acte prend effet, si ce jour est postérieur, peuvent signer, au nom du ministre ou du secrétaire d'Etat et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité : 1° Les secrétaires généraux des ministères, les directeurs d'administration centrale, les chefs des services à compétence nationale mentionnés au premier alinéa de l'article 2 du décret du 9 mai 1997 susvisé et les chefs des services que le décret d'organisation du ministère rattache directement au ministre ou au secrétaire d'Etat " ;

3. Considérant que la décision en litige a été signée par M.C..., nommé directeur général du travail par décret publié au Journal officiel le 26 août 2006 ; que ce dernier, en sa qualité de directeur d'administration centrale, disposait, en vertu de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement, d'une délégation permanente de signature du ministre chargé du travail pour signer l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous son autorité ; que l'absence de visa de cette délégation de signature et de la mention " par délégation " est sans incidence sur la légalité de la décision contestée ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte attaqué doit être écarté ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 4624-1 du code du travail : " Le médecin du travail est habilité à proposer des mesures individuelles telles que mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à l'âge, à la résistance physique ou à l'état de santé physique et mentale des travailleurs. / L'employeur est tenu de prendre en considération ces propositions et, en cas de refus, de faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite. / En cas de difficulté ou de désaccord, l'employeur ou le salarié peut exercer un recours devant l'inspecteur du travail. Ce dernier prend sa décision après avis du médecin inspecteur du travail " ; qu'aux termes des dispositions de l'article R. 4624-31 du même code : " Le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude médicale du salarié à son poste de travail que s'il a réalisé : / 1° Une étude de ce poste ; / 2° Une étude des conditions de travail dans l'entreprise ; / 3° Deux examens médicaux de l'intéressé espacés de deux semaines, accompagnés, le cas échéant, des examens complémentaires. Lorsque le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour sa santé ou sa sécurité ou celles des tiers ou lorsqu'un examen de préreprise a eu lieu dans un délai de trente jours au plus, l'avis d'inaptitude médicale peut être délivré en un seul examen. " ;

5. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 4624-1 du code du travail qu'en cas de difficulté ou de désaccord sur les propositions formulées par le médecin du travail concernant l'aptitude d'un salarié à occuper son poste de travail, il appartient à l'inspecteur du travail, saisi par l'une des parties, de se prononcer définitivement sur cette aptitude et que son appréciation, qu'elle soit confirmative ou infirmative de l'avis du médecin du travail, doit être regardée comme portée dès la date à laquelle cet avis a été émis ; que le médecin du travail doit indiquer, dans les conclusions écrites qu'il rédige à l'issue des visites médicales de reprise, les considérations de fait de nature à éclairer l'employeur sur son obligation de proposer au salarié un emploi approprié à ses capacités et notamment les éléments objectifs portant sur ces capacités qui le conduisent à recommander certaines tâches en vue d'un éventuel reclassement dans l'entreprise ou, au contraire, à exprimer des contre-indications ; qu'une telle obligation, qui ne contraint pas le médecin à faire état des considérations médicales qui justifient sa position, peut être mise en oeuvre dans le respect du secret médical ; qu'elle s'impose également à l'inspecteur du travail lorsque celui-ci, en cas de difficulté ou de désaccord, est amené à décider de l'aptitude professionnelle du salarié ;

6. Considérant que la décision ministérielle en litige, après avoir visé le code du travail, relève que l'environnement de travail de Mme A...se caractérise par une situation de tension persistante et gravement anormale avec son employeur, laquelle entraine chez la salariée une dégradation de son état de santé et qu'un retour dans l'entreprise serait préjudiciable à sa santé ; qu'elle précise ainsi les considérations pour lesquelles l'inaptitude de la salariée à occuper son poste de chef d'équipe au sein de l'entreprise a été retenue ; que le ministre énonce également que la salariée serait en revanche apte à exercer des fonctions de chef d'équipe au sein d'une autre entreprise ; qu'eu égard à ces motifs, le ministre du travail n'avait ni à envisager les aménagements susceptibles d'être apportés au poste, ni à se prononcer sur l'éventuel reclassement de la salariée au sein même de l'entreprise ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision doit être écarté ; que la requérante ne peut, en outre, utilement invoquer les dispositions de la circulaire du 24 mai 2014 relative à la motivation des conclusions écrites du médecin du travail sur l'aptitude médicale du salarié et des décisions de l'inspecteur du travail prises en application de l'article L. 241-10-1 du code du travail, qui sont dépourvues de caractère réglementaire ;

7. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 5, l'appréciation de l'autorité administrative, qu'elle soit confirmative ou infirmative de l'avis du médecin du travail, se substitue à cet avis et seule la décision rendue par l'inspecteur du travail, ou le cas échéant, en cas de recours hiérarchique, par le ministre du travail, est susceptible de faire l'objet d'un recours devant le juge de l'excès de pouvoir ; que les moyens contestant la régularité de la procédure au terme de laquelle le médecin du travail avait donné son avis sont donc sans incidence sur la légalité de la décision rendue par l'autorité administrative ; que le moyen tiré de ce que le ministre n'aurait pas dû déclarer la salariée inapte en raison de l'irrégularité de la procédure suivie par le médecin du travail, lequel n'a procédé qu'à une seule visite, doit ainsi être écarté comme inopérant ; qu'est également sans incidence sur la légalité de la décision le défaut de mention, dans la décision contestée, de la situation de " danger immédiat ", qui permet au médecin du travail de ne procéder qu'à une seule visite ;

8. Considérant que, contrairement à ce que soutient la société, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'autorité administrative se serait fondée sur les seules déclarations de la salariée, alors qu'après l'avis rendu le 13 février 2013 par le médecin inspecteur régional du travail, une enquête a été menée le 1er mars 2013 en présence de la salariée et du conseil de la société ; que si la société fait valoir que les rapports avec sa salariée ne présentaient pas un caractère conflictuel, elle n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause le constat effectué par le ministre ; que, si elle fait valoir que Mme A...n'était pas médicalement inapte et que celle-ci souhaitait en réalité se consacrer avec son mari à une activité de restauration, elle n'apporte elle-même aucun élément circonstancié à l'appui de cette allégation ; qu'ainsi, la décision du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social n'est ni entachée d'une erreur de fait ni d'une erreur manifeste d'appréciation ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Anger Nettoyage n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Anger Nettoyage est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Anger Nettoyage, au ministre du travail et à Mme B...A....

Copie en sera adressée, pour information, au directeur régional des entreprises, de la concurrence, du travail et de l'emploi de Normandie.

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N°15DA01431

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA01431
Date de la décision : 09/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-01-01-02 Travail et emploi. Institutions du travail. Administration du travail. Inspection du travail.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: Mme Valérie Petit
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : MOUHOU

Origine de la décision
Date de l'import : 21/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-11-09;15da01431 ?
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