La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/01/2018 | FRANCE | N°17DA00696

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3 (bis), 18 janvier 2018, 17DA00696


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...F...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 18 janvier 2017 par lequel le préfet du Pas-de-Calais l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination, lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée d'un an et l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1700580 du 27 janvier 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.


Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 avril 2017, M. C...F..., r...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...F...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 18 janvier 2017 par lequel le préfet du Pas-de-Calais l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination, lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée d'un an et l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1700580 du 27 janvier 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 avril 2017, M. C...F..., représenté par Me A...D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Pas-de-Calais de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " et de procéder à son effacement du fichier d'information Schengen dans un délai de quinze jours et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

---------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Olivier Yeznikian, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

Sur le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte :

1. Considérant qu'il ressort de l'arrêté du 22 décembre 2015, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du Pas-de-Calais le même jour, que le préfet du Pas-de-Calais a donné délégation à M. E...B..., chef de la section éloignement du bureau de l'immigration et de l'intégration, afin de signer les décisions contestées ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte attaqué manque en fait et doit être écarté ;

Sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.F..., ressortissant tunisien, né le 10 janvier 1983, déclare être entré en France irrégulièrement en 2011 ; qu'en 2016, il a déposé à la mairie de Saint-Omer un dossier en vue de la célébration de son mariage avec une ressortissante française ; que, le 29 décembre 2016, le procureur de la République a décidé de surseoir à la célébration du mariage ; que M. F...a été convoqué le 18 janvier 2017 par les services de police afin d'y être entendu dans le cadre de l'enquête diligentée par le ministère public ; que, si le préfet a été informé du projet de mariage et de la date à laquelle expirerait le sursis à la célébration du mariage décidé par le ministère public, l'irrégularité du séjour de M. F...était déjà connue par l'autorité administrative en raison d'une première décision préfectorale d'éloignement à laquelle il n'avait pas déféré en 2012 ; que le préfet a vérifié, comme il le devait, que la mesure en cause ne portait pas une atteinte disproportionnée à la vie familiale de celui-ci ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, le détournement de pouvoir allégué, tiré de ce que l'administration aurait eu pour motif déterminant de faire obstacle à ce mariage et non de tirer les conséquences de l'irrégularité du séjour, n'est pas établi ;

3. Considérant que la décision en litige comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et qui permettent à M. F...de les discuter et au juge de les contrôler ; qu'elle vise les textes dont il est fait application et fait notamment état de la nationalité de M.F..., de la date et des conditions de son entrée sur le territoire national ; qu'elle précise également sa relation récente avec une ressortissante française et son projet de mariage ; que, dès lors, l'arrêté en litige est suffisamment motivé et n'est pas entaché d'un défaut d'examen particulier de la situation personnelle de M.F... ;

4. Considérant que M. F...fait état de sa présence en France depuis mars 2011 ; qu'il se prévaut de son concubinage depuis octobre 2016 avec une ressortissante française, rencontrée en 2015, et avec laquelle il souhaite se marier ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que cette relation était récente à la date de l'arrêté en litige ; qu'aucun enfant n'est né de cette relation ; que le requérant ne justifie pas de perspectives sérieuses d'insertion professionnelle à court terme ; qu'il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales en Tunisie où résident ses parents et où lui-même a vécu jusqu'à l'âge de vingt-huit ans ; qu'ainsi, compte tenu de la durée et des conditions du séjour de l'intéressé en France, le préfet du Pas-de-Calais n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision a été prise ; qu'il n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes raisons, il n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de celle-ci sur la situation personnelle du requérant ;

Sur la décision lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire :

5. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français doit être écarté ;

6. Considérant que, si M. F...soutient qu'il présentait des garanties de représentation suffisantes dès lors qu'il disposait d'une adresse fixe en France et était engagé dans un projet de mariage à la date de l'arrêté, il ressort toutefois des termes de l'arrêté attaqué que, pour justifier son refus de faire bénéficier l'intéressé d'un délai de départ volontaire, le préfet du Pas-de-Calais s'est également fondé sur la circonstance que l'intéressé s'était soustrait à une précédente mesure d'éloignement et n'avait pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; que, par suite, et en tout état de cause, le préfet pouvait, par ces seuls motifs, décider de priver le requérant d'un délai de départ volontaire ; que, par suite, l'arrêté en litige n'est pas entaché d'un défaut d'examen particulier de la situation personnelle de M.F... ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

7. Considérant que la motivation de la décision fixant le pays de destination se confond avec celle de l'arrêté préfectoral dont elle est un des éléments ; qu'ainsi qu'il a été dit, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'autorité préfectorale n'aurait pas procédé à un examen de la situation de l'intéressé avant de prendre cette mesure ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points précédents que le moyen tiré, par la voie d'exception, de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté ;

Sur la décision lui interdisant le retour sur le territoire français :

9. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français doit être écarté ;

10. Considérant qu'aux termes des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour (...). La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. " ;

11. Considérant qu'il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux ; que la décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs ; que si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère ;

12. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet du Pas-de-Calais, pour prononcer la mesure litigieuse, s'est fondé sur la circonstance que M. F... n'a pas déféré à une première décision préfectorale l'obligeant à quitter le territoire français ; qu'en outre, l'intéressé, qui s'est maintenu de manière irrégulière sur le territoire français, ne justifie pas de l'existence de liens familiaux intenses en France, ni d'autres liens stables ; que la seule situation de concubinage dont il se prévaut avec une ressortissante française, au regard de ses conditions et de sa durée, n'est pas de nature à établir la stabilité et l'ancienneté de son intégration en France ; que, dès lors, et alors même que la présence de M. F... ne constitue pas une menace à l'ordre public, l'interdiction de retour prononcée à son encontre pour une durée d'un an ne repose pas sur un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle, ne présente pas, dans les circonstances de l'espèce, un caractère excessif, ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle;

Sur la décision l'assignant à résidence :

13. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français doit être écarté ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. F...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. F...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...F...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise pour information au préfet du Pas-de-Calais.

N°17DA00696 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 17DA00696
Date de la décision : 18/01/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Olivier Yeznikian
Rapporteur public ?: Mme Fort-Besnard
Avocat(s) : THIEFFRY

Origine de la décision
Date de l'import : 30/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-01-18;17da00696 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award