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13/09/2018 | FRANCE | N°15DA00618

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3 (bis), 13 septembre 2018, 15DA00618


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...F...ont demandé au tribunal administratif de Lille de condamner la commune de Goeulzin à leur verser une indemnité de 373 990 euros, assortie des intérêts de droit à compter de la réception de leur demande indemnitaire préalable, en réparation du préjudice subi du fait de la délivrance d'un permis de construire illégal.

Par un jugement n° 1206734 du 12 février 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requê

te et des mémoires, dont un mémoire récapitulatif, enregistrés les 14 avril 2015, 30 mars 2016, 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...F...ont demandé au tribunal administratif de Lille de condamner la commune de Goeulzin à leur verser une indemnité de 373 990 euros, assortie des intérêts de droit à compter de la réception de leur demande indemnitaire préalable, en réparation du préjudice subi du fait de la délivrance d'un permis de construire illégal.

Par un jugement n° 1206734 du 12 février 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, dont un mémoire récapitulatif, enregistrés les 14 avril 2015, 30 mars 2016, 23 septembre 2017 et 6 juillet 2018, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, M. et MmeF..., représentés par Me D...C..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de surseoir à statuer jusqu'à ce que la cour d'appel de Douai ait définitivement statué sur le litige les opposant à M. et MmeG... ;

3°) de condamner la commune de Goeulzin à leur verser une indemnité de 373 990 euros, assortie des intérêts ;

4°) de mettre à la charge de cette commune la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Xavier Fabre, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Amélie Fort-Besnard, rapporteur public,

- les observations de Me D...C..., représentant M. et MmeF..., et celles de Me B...J..., substituant Me H...I..., représentant la commune de Goeulzin.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme F...ont signé, le 29 septembre 2006, un compromis de vente portant sur une parcelle de terrain à bâtir avec étang et pâture, sur les parcelles section A nos 139 et 140 au lieudit " le château " pour une contenance totale de 1 hectare 78 ares et 80 centiares sur le territoire de la commune de Goeulzin dans le département du Nord moyennant le prix principal de 403 990 euros. Ce compromis de vente a été conclu sous réserve de plusieurs conditions suspensives, notamment la délivrance d'un permis de construire pour une maison à usage d'habitation ou à usage mixte d'habitation et professionnel. Les époux F...ont déposé, le 29 mars 2008, une nouvelle demande de permis de construire pour la construction d'une maison individuelle et/ou ses annexes. Par un arrêté du 4 mai 2008, le maire de la commune de Goeulzin a fait droit à cette demande, assortie de différentes prescriptions, notamment en matière d'architecture et de sécurité incendie. En dépit de la réalisation de la clause suspensive, les époux F...ont refusé de signer l'acte authentique de vente. M. et Mme F...ont déposé, le 10 juillet 2012, une nouvelle demande de permis de construire une maison d'habitation d'une surface de plancher créée de 360 m² mais, par un arrêté du 6 août 2012, le maire de la commune de Goeulzin a rejeté cette demande. M. et Mme F...relèvent appel du jugement du 12 février 2015 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande de condamnation de la commune de Goeulzin à les indemniser des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait de ces arrêtés.

Sur les conclusions indemnitaires :

En ce qui concerne l'arrêté du 6 août 2012 du maire de la commune de Goeuzlin portant refus de permis de construire :

2. En première instance, M. et Mme F...se sont bornés à invoquer la faute qu'aurait commise le maire de la commune en leur délivrant, le 4 mai 2008, le permis de construire sollicité. En appel, les intéressés fondent également leur demande indemnitaire sur une seconde faute, résultant de l'illégalité alléguée de l'arrêté du 6 août 2012 du maire de la commune de Goeulzin portant cette fois sur le refus de délivrance du permis de construire sollicité. Même si ces conclusions tendent à la réparation du même préjudice et reposent sur la même cause juridique, elles procèdent d'un fait générateur distinct qui n'avait pas été invoqué en première instance. Elles sont donc nouvelles en appel et, par suite, irrecevables.

En ce qui concerne l'arrêté du 4 mai 2008 du maire de la commune de Goeuzlin portant délivrance de permis de construire :

S'agissant de la faute :

3. Le plan d'occupation des sols de la commune, alors en vigueur, a été produit en première instance. Pour ce qui est de la zone NA, le règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Goeulzin, alors applicable, indique, au titre du caractère de la zone : " Il s'agit d'une zone naturelle équipée ou non. / Elle est divisée en deux secteurs : / - secteur NAa ayant vocation d'habitat ; / - secteur NAb ayant vocation de loisirs qui peut être urbanisée à l'occasion soit d'une modification du POS soit d'une création d'une ZAC ". Par ailleurs, selon l'article NA1 - Occupations et utilisations du sol admises : " Dans les secteurs NAa : Dans la mesure où le financement de tous les équipements nécessaires est assuré, conformément aux prescriptions du code de l'urbanisme et sous réserve de ne pas compromettre l'aménagement ultérieur de la zone : / Sont admis : / (...) - Les constructions à usage d'habitation et leurs annexes sous forme d'opération d'ensemble / (...) ". Enfin, selon l'article NA2 - Occupations et utilisations du sol interdites : " Tous les types d'occupation ou d'utilisation du sol non mentionnés par l'article NA1 ".

4. Il résulte de l'instruction que les époux F...ont déposé, le 29 mars 2008, une demande de permis de construire une maison individuelle avec garage et piscine, sur un terrain situé en zone NAa du plan d'occupation des sols de la commune de Goeulzin. Le projet en cause, qui ne s'inscrivait pas dans le cadre d'une opération d'ensemble, ne respectait alors pas les dispositions de l'article NA1 précité. Il s'en suit que la commune de Goeulzin a commis une faute en délivrant le permis de construire sollicité.

S'agissant du lien de causalité entre la faute et les préjudices :

5. Il est constant que M. et Mme F...ont obtenu le permis de construire qu'ils avaient sollicité. Par ailleurs, ce permis de construire n'ayant fait l'objet d'aucun recours, la clause suspensive figurant au compromis de vente mentionné au point 1 était donc réalisée, ce qui permettait la signature de l'acte authentique de vente. En outre, par un arrêt du 23 janvier 2012, la cour d'appel judiciaire de Douai n'a pas retenu les moyens que les époux F...faisaient valoir pour contester la validité de ce permis de construire et qui étaient tirés d'un raccordement impossible aux réseaux collectifs et d'un accès du terrain insuffisamment adapté pour la sécurité incendie au regard des caractéristiques exigées par une prescription figurant au permis de construire. En tout état de cause, les intéressés ne reprennent pas ces moyens devant la cour administrative d'appel. Ainsi, en 2008, M. et Mme F...étaient titulaires du permis de construire qu'ils avaient sollicité et qui leur donnait un droit à construire, une fois l'acte authentique de vente signé. Il résulte de l'instruction qu'ils ont cependant refusé de signer cet acte de vente, ayant par ailleurs fait l'acquisition, à cette même période, d'un château à restaurer entièrement sur la commune de Raimbeaucourt, dans le département du Nord. Les époux F...n'ont donc pas entrepris les travaux, objet du permis de construire, dans le délai de deux ans à compter de la notification de cette autorisation, ainsi que le prévoyaient les dispositions de l'article R. 424-17 du code de l'urbanisme dans leur rédaction alors en vigueur. Ils n'ont pas davantage demandé à bénéficier de la prorogation d'une année prévue par l'article R. 424-21 du code de l'urbanisme. Dès lors, la caducité du permis de construire résulte de leur choix de gestion. Par conséquent, le préjudice dont ils réclament réparation ne trouve pas sa cause dans l'illégalité du permis de construire obtenu et qui n'avait pas été remis en cause. Par suite, les époux F...ne sont pas fondés à demander la réparation de la perte de valeur vénale de leur terrain à raison de la faute commise par la commune de Goeulzin en 2008.

6. Il résulte de ce tout qui a été dit, sans qu'il soit besoin, d'une part, de surseoir à statuer dans l'attente d'un nouvel arrêt de la cour d'appel de Douai, saisie cette fois du jugement du tribunal de grande instance de Douai du 7 septembre 2015 prononçant la résolution de la vente et, d'autre part, de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la commune de Goeulzin, que M. et Mme F...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté leurs conclusions indemnitaires dirigées contre la commune de Goeulzin. Par voie de conséquence, il n'y pas lieu de statuer sur les conclusions présentées par la commune de Goeulzin à l'encontre de l'Etat, pour le cas où une condamnation serait prononcée à son encontre.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Goeulzin, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse quelque somme que ce soit à M. et Mme F...au titre des frais liés au litige.

8. Il en va de même des conclusions présentées par la commune de Goeulzin à l'encontre de l'Etat sur le même fondement, l'Etat n'étant pas partie perdante dans la présente instance.

9. La commune de Goeulzin ne saurait demander à la cour de mettre à la charge des époux F...la somme de 1 200 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens à raison de la procédure de première instance. Au surplus, par son jugement du 12 février 2015, le tribunal administratif de Lille a déjà mis à la charge des époux F...la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à verser à la commune.

10. Il y a lieu, sur le fondement des mêmes dispositions, de mettre à la charge des époux F...la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Goeulzin au titre des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme F...est rejetée.

Article 2 : M. et Mme F...verseront à la commune de Goeulzin la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la commune de Goeulzin est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...F..., à la commune de Goeulzin et au ministre de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Nord.

N°15DA00618 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 15DA00618
Date de la décision : 13/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité.

68 Urbanisme et aménagement du territoire.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Xavier Fabre
Rapporteur public ?: Mme Fort-Besnard
Avocat(s) : NOURY

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-09-13;15da00618 ?
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