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28/02/2019 | FRANCE | N°18DA02124

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3 (bis), 28 février 2019, 18DA02124


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 10 novembre 2017 par lequel le préfet de l'Eure a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français.

Par un jugement n° 1801516 du 31 juillet 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 23 octobre 2018, Mme B...D..., représentée par Me A...C..., demande

la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 10 novembre 2017 par lequel le préfet de l'Eure a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français.

Par un jugement n° 1801516 du 31 juillet 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 23 octobre 2018, Mme B...D..., représentée par Me A...C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Eure de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa demande et de lui délivrer dans l'attente de ce réexamen une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Charles-Edouard Minet, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

1. La décision par laquelle le préfet de l'Eure a rejeté la demande de titre de séjour de Mme D... comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Elle est dès lors suffisamment motivée.

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) 4) au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins (...) ".

3. Il résulte des termes mêmes de ces stipulations que les parties signataires de cet accord, pour le cas où le certificat de résidence " vie privée et familiale " est demandé par un ressortissant algérien au motif qu'il est parent d'un enfant français, ont subordonné la délivrance de plein droit de ce titre à la condition, notamment, que l'enfant réside en France. Ce faisant, les parties signataires de l'accord n'ont pas requis la simple présence de l'enfant sur le territoire français, mais ont exigé que l'enfant réside en France, c'est-à-dire qu'il y demeure effectivement de façon stable et durable. Il appartient dès lors, pour l'application de ces stipulations, à l'autorité administrative d'apprécier dans chaque cas sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, au vu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et des justifications produites, où se situe la résidence de l'enfant, entendue comme le lieu où il demeure effectivement de façon stable et durable à la date à laquelle le titre est demandé.

4. Il ressort des pièces du dossier que MmeD..., ressortissante algérienne née en 1991, est entrée en France au mois d'avril 2017, alors enceinte de plusieurs mois. Elle s'est maintenue sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa et y a donné naissance, le 4 août 2017, à sa fille Inès, qui a été reconnue par son père, ressortissant français vivant en Algérie et ancien époux de l'appelante. Mme D...a alors présenté, le 10 octobre 2017, une demande de certificat de résidence, sur le fondement des stipulations citées au point 2. Dans de telles conditions, à la date de la décision en litige, soit le 10 novembre 2017, la petite Inès, qui n'est âgée que de trois mois, ne saurait être regardée comme demeurant ...de façon stable et durable, ni, dès lors, comme résidant en France au sens de ces stipulations. Cette condition n'étant pas remplie, Mme D...n'est, par suite, pas fondée à soutenir que le refus du préfet de lui délivrer le certificat de résidence sollicité méconnaît les stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.

5. Ainsi qu'il a été dit au point précédent, Mme D...ne séjourne en France que depuis quelques mois à la date de la décision en litige. Elle n'est pas isolée dans son pays d'origine, où résident la plus grande partie des membres de sa famille, mais aussi le père de sa fille et la famille de celui-ci, et où elle a elle-même vécu jusqu'à son entrée en France. Dès lors, la décision de rejet de sa demande de titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel elle a été prise. Elle n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le préfet de l'Eure aurait fait une appréciation manifestement erronée des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'appelante.

6. La décision du préfet de l'Eure refusant de délivrer un titre de séjour à Mme D...n'impose nullement à celle-ci de se séparer de sa fille. Si l'appelante fait valoir que sa famille et celle de son ancien mari n'ont pas approuvé la naissance de cet enfant, elle n'établit pas l'impossibilité dans laquelle elle se trouverait de reconstituer, dans son pays d'origine, la cellule familiale qu'elle forme avec sa fille. En outre, il est constant que le père de la petite Inès réside en Algérie et il ne ressort pas des pièces du dossier que celui-ci ne souhaite pas entretenir de relations avec son enfant. Dès lors, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et alors même que la petite Inès possède la nationalité française, la décision en litige n'est pas contraire à l'intérêt supérieur de cet enfant garanti par l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

7. Il résulte de ce qui a été dit aux points 1 à 6 que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que la décision de refus de titre de séjour est entachée d'illégalité.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...). / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III (...) ".

9. Ainsi qu'il a été dit au point 1, la décision du préfet de l'Eure rejetant la demande de titre de séjour de Mme D...est suffisamment motivée. En application des dispositions citées au point précédent, l'obligation faite à l'intéressée de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. Mme D...n'est dès lors pas fondée à soutenir que la décision en litige est insuffisamment motivée.

10. Il ne ressort ni des motifs de l'arrêté en litige, ni des autres pièces du dossier que le préfet de l'Eure n'aurait pas fait procéder à un examen sérieux de la situation personnelle de l'appelante avant de l'obliger à quitter le territoire français.

11. Il résulte de ce qui a été dit au point 7 que Mme D...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision rejetant sa demande de certificat de résidence.

12. Pour les raisons déjà énoncées au point 5, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'obligation faite à Mme D...de quitter le territoire français soit entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée.

13. Il résulte de ce qui a été dit aux points 8 à 12 que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre par le préfet de l'Eure est entachée d'illégalité.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

14. L'arrêté en litige, qui vise l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lequel dispose que : " (...) L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office (...) ", et qui énonce que Mme D... est de nationalité algérienne, est suffisamment motivé en tant qu'il fixe l'Algérie comme pays de destination de son éloignement.

15. Il résulte de ce qui a été dit au point 13 que Mme D...n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.

16. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Eure aurait fait une appréciation manifestement erronée des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de Mme D... en fixant l'Algérie comme pays de destination de son éloignement.

17. Il résulte de ce qui a été dit aux points 14 à 16 que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination est entachée d'illégalité.

18. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées, de même que la demande présentée par son conseil au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...D..., au ministre de l'intérieur et à Me A...C....

Copie en sera transmise pour information au préfet de l'Eure.

N°18DA02124


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 18DA02124
Date de la décision : 28/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Boulanger
Rapporteur ?: M. Charles-Edouard Minet
Rapporteur public ?: Mme Fort-Besnard
Avocat(s) : SELARL MADELINE-LEPRINCE-MAHIEU

Origine de la décision
Date de l'import : 24/05/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-02-28;18da02124 ?
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