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28/05/2019 | FRANCE | N°17DA00331

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3, 28 mai 2019, 17DA00331


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Les spoliés de Raimbeaucourt et M. C...A...ont demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir la délibération du 29 décembre 2014 par laquelle le conseil municipal de la commune de Raimbeaucourt a approuvé le plan local d'urbanisme.

Par un jugement n° 1501868 du 15 décembre 2016, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 février 2017, l'association Les spoli

s de Raimbeaucourt et M. C...A..., représentés par Me D...B..., demandent à la cour :

1°) d'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Les spoliés de Raimbeaucourt et M. C...A...ont demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir la délibération du 29 décembre 2014 par laquelle le conseil municipal de la commune de Raimbeaucourt a approuvé le plan local d'urbanisme.

Par un jugement n° 1501868 du 15 décembre 2016, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 février 2017, l'association Les spoliés de Raimbeaucourt et M. C...A..., représentés par Me D...B..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette délibération

3°) de mettre à la charge de la commune de Raimbeaucourt la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jimmy Robbe, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Amélie Fort-Besnard, rapporteur public,

- et les observations de Me D...B..., représentant l'association Les spoliés de Raimbeaucourt et M. C...A..., et de Me F...E..., représentant la commune de Raimbeaucourt.

Une note en délibéré présentée par la commune de Raimbeaucourt a été enregistrée le 15 mai 2019.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 20 juin 2008, le conseil municipal de la commune de Raimbeaucourt a prescrit l'élaboration d'un plan local d'urbanisme et défini les modalités de la concertation. Après la phase de concertation, le projet de plan local d'urbanisme a été arrêté par délibération du 8 février 2013, l'enquête publique s'étant déroulée du 21 mai au 20 juin 2013. Par une délibération du 18 octobre 2013, le conseil municipal de la commune de Raimbeaucourt a approuvé le plan local d'urbanisme. Le juge des référés du tribunal administratif de Lille, saisi sur le fondement des dispositions de l'article L. 123-16 du code de l'environnement, et estimant de nature à créer un doute sérieux le moyen tiré de ce que la délibération du conseil municipal du 20 juin 2008 organisant la concertation préalable n'a pas défini les objectifs poursuivis par la commune dans le cadre de l'élaboration de son plan local d'urbanisme en méconnaissance de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme, a suspendu l'exécution de cette délibération du 18 octobre 2013 par une ordonnance n° 1307592 du 21 janvier 2014, le pourvoi dirigé à l'encontre de cette ordonnance n'ayant ensuite pas été admis. Par une délibération du 28 avril 2014, le conseil municipal de la commune de Raimbeaucourt a décidé, en premier lieu de retirer la délibération du 18 octobre 2013 approuvant le plan local d'urbanisme, en deuxième lieu d'abroger la délibération du 8 février 2013 arrêtant le projet de plan local d'urbanisme, en troisième lieu de reprendre la procédure d'élaboration du plan local d'urbanisme à partir du 16 octobre 2012, soit le lendemain de la séance au cours de laquelle s'est tenu le débat sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durable, en quatrième lieu de reprendre les modalités de la concertation définies par la délibération du 20 juin 2008, en cinquième lieu d'organiser une réunion supplémentaire d'information et de concertation avec les agriculteurs, et enfin de fixer les objectifs poursuivis par le projet de plan local d'urbanisme. Le conseil municipal de la commune de Raimbeaucourt a, par une délibération du 2 juin 2014, arrêté le second projet de plan local d'urbanisme, la seconde enquête publique s'étant déroulée du 15 septembre au 14 octobre 2014, et, par une délibération du 29 décembre 2014, approuvé le plan local d'urbanisme. L'association Les spoliés de Raimbeaucourt et M. C...A...relèvent appel du jugement du 15 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cette délibération du 29 décembre 2014.

Sur les moyens tirés du caractère insuffisant du rapport d'enquête publique :

2. Aux termes des deux premiers alinéas de l'article R. 123-19 du code de l'environnement dans sa version en vigueur à la date de la délibération contestée : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. / Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions et contre-propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public (...) ".

3. D'une part, les pages 32 à 68 du rapport établi par le commissaire enquêteur sont consacrées aux observations du public. Il y est indiqué que l'enquête publique a recueilli 54 observations, dont le recensement est opéré au moyen d'un tableau synthétique. Ce tableau indique, pour chacune de ces 54 observations présentées, sa teneur, l'identité de la personne qui l'a exprimée, la réponse apportée par la commune ainsi que le commentaire du commissaire enquêteur. Selon la nature de l'observation, un extrait des documents graphiques y est également joint. Contrairement à ce que soutiennent les appelants, la circonstance alléguée que certains des commentaires du commissaire enquêteur seraient en substance identiques aux réponses apportées par la commune ne caractérise pas une insuffisance de ce rapport.

4. D'autre part, les pages 69 à 70 de ce rapport sont consacrées aux propositions du public. Chaque proposition y est retranscrite, avec, de même, l'identité de la personne qui l'a exprimée, la réponse apportée par la commune ainsi que le commentaire du commissaire enquêteur. Si les appelants se prévalent de l'insuffisance entachant le commentaire du commissaire enquêteur s'agissant de la proposition émise par l'association Les spoliés de Raimbeaucourt de permettre l'urbanisation de 55 parcelles, cette éventuelle insuffisance ne caractérise pas davantage une méconnaissance des dispositions citées au point 2, qui n'imposent pas que le commissaire enquêteur commente de façon détaillée chacune des propositions formulées durant l'enquête.

5. Par suite, les moyens tirés de ce que le rapport établi par le commissaire enquêteur ne comporterait aucune synthèse des observations du public, ni aucune analyse des propositions et contre-propositions produites durant l'enquête, doivent être écartés.

Sur le moyen tiré du caractère imprécis des conclusions du commissaire enquêteur :

6. Aux termes du troisième alinéa de l'article R. 123-19 du code de l'environnement dans sa version en vigueur à la date de la délibération contestée : " Le commissaire enquêteur (...) consigne, dans un document séparé, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet ". Si cette règle de motivation n'implique pas que le commissaire enquêteur soit tenu de répondre à chacune des observations présentées lors de l'enquête, elle l'oblige néanmoins à indiquer, au moins sommairement, en donnant son avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de cet avis.

7. Le commissaire enquêteur a consigné, dans un document séparé comprenant douze pages, ses conclusions motivées, exprimant un avis favorable au projet de plan local d'urbanisme, assorti de sept réserves et de dix recommandations. Ces sept réserves sont ainsi rédigées : " Intégrer les dispositions de la loi ALUR, / Modifier, par conséquence, le règlement, / Modifier, par conséquence, le plan de zonage, / Modifier, par conséquence, le bilan POS/PLU, / Retirer les parcelles 1256 et 1095 et 3441 du diagnostic des "dents creuses", / Modifier le règlement de la zone Nlzhi (projet d'étang), / Modifier le règlement des zones 1AU pour permettre la mixité fonctionnelle sur les zones de projet du centre ". Si les appelants soutiennent que ces réserves sont imprécises, cette formulation synthétique constitue, en avant-dernière page du document séparé, un résumé des réserves exprimées par le commissaire enquêteur tout au long de celui-ci. La teneur exacte de ces réserves ressort ainsi de la lecture complète de ce document séparé.

8. Par suite, le moyen tiré du caractère imprécis des conclusions du commissaire enquêteur doit être écarté.

Sur les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation :

9. D'une part, aux termes de l'article L. 110 du code de l'urbanisme, alors en vigueur : " (...) Afin d'aménager le cadre de vie, d'assurer sans discrimination aux populations résidentes et futures des conditions d'habitat, d'emploi, de services et de transports répondant à la diversité de ses besoins et de ses ressources, de gérer le sol de façon économe, d'assurer la protection des milieux naturels et des paysages ainsi que la sécurité et la salubrité publiques et de promouvoir l'équilibre entre les populations résidant dans les zones urbaines et rurales et de rationaliser la demande de déplacements, les collectivités publiques harmonisent, dans le respect réciproque de leur autonomie, leurs prévisions et leurs décisions d'utilisation de l'espace (...) ". D'autre part, aux termes de l'article L. 121-1 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " (...) Les plans locaux d'urbanisme et les cartes communales déterminent les conditions permettant d'assurer : / 1° L'équilibre entre le renouvellement urbain, un développement urbain maîtrisé, le développement de l'espace rural, d'une part, et la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestières et la protection des espaces naturels et des paysages, d'autre part, en respectant les objectifs du développement durable ; / 2° La diversité des fonctions urbaines et la mixité sociale dans l'habitat urbain et dans l'habitat rural, en prévoyant des capacités de construction et de réhabilitation suffisantes pour la satisfaction, sans discrimination, des besoins présents et futurs en matière d'habitat, d'activités économiques, notamment commerciales, d'activités sportives ou culturelles et d'intérêt général ainsi que d'équipements publics, en tenant compte en particulier de l'équilibre entre emploi et habitat ainsi que des moyens de transport et de la gestion des eaux ; / 3° Une utilisation économe et équilibrée des espaces naturels, urbains, périurbains et ruraux, la maîtrise des besoins de déplacement et de la circulation automobile, la préservation de la qualité de l'air, de l'eau, du sol et du sous-sol, des écosystèmes, des espaces verts, des milieux, sites et paysages naturels ou urbains, la réduction des nuisances sonores, la sauvegarde des ensembles urbains remarquables et du patrimoine bâti, la prévention des risques naturels prévisibles, des risques technologiques, des pollutions et des nuisances de toute nature ".

10. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Ils peuvent être amenés, à cet effet, à modifier le zonage ou les activités autorisées dans une zone déterminée, pour les motifs énoncés par les dispositions citées ci-dessus. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

11. L'incohérence, à la supposer établie, entre, d'une part, les données démographiques issues du rapport de présentation et, d'autre part, au sein de la troisième des six orientations du projet d'aménagement et de développement durable, intitulée " Asseoir une croissance démographique adaptée ", le deuxième des cinq objectifs qu'elle décline, misant sur un accroissement de la population de 12 % à l'horizon 2030, est insusceptible de caractériser, par elle-même, une illégalité affectant le plan local d'urbanisme. Il en va de même de la circonstance, à la supposer également établie, que cet objectif d'accroissement serait, ainsi que le soutiennent les appelants, irréaliste. Les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation résultant de cette incohérence et du caractère irréaliste de l'un des objectifs déclinés par l'une des orientations du projet d'aménagement et de développement durable, doivent par suite être écartés.

12. Les parcelles classées en zone N représentent 390,15 hectares, soit une augmentation d'environ 35 % par rapport au zonage fixé par le plan d'occupation des sols. Si les appelants soutiennent que cette augmentation résulte de ce que ces parcelles comprennent à tort celles classées en secteur Nj, délimitant les espaces occupés par les jardins d'agrément des constructions à vocation d'habitat, et que l'inclusion de ce secteur Nj en zone N est ainsi artificielle, ce secteur Nj, prévu par le projet de règlement, ne figure ni dans le règlement ni dans le rapport de présentation approuvés. S'agissant de la superficie des parcelles classées en zone A par le plan local d'urbanisme en litige, la seule circonstance invoquée par les appelants qu'elle a été réduite d'environ 82 hectares par rapport à celle du plan d'occupation des sols, soit une réduction d'environ 14 %, ne caractérise pas, à elle seule, une erreur manifeste d'appréciation. Pour contester la délimitation des parcelles classées en zone AU, les appelants se bornent à soutenir que si la superficie globale de cette zone n'a pas été modifiée par rapport à celle fixée par le plan d'occupation des sols, les parcelles ainsi classées ne sont pas les mêmes, alors que, selon eux, cette nouvelle délimitation n'obéit pas à une justification rationnelle. L'argument tiré de l'incohérence de ce zonage des parcelles classées en zone AU n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé. Le plan local d'urbanisme en litige a classé 426,80 hectares en zone N, pour 250,50 hectares qui étaient classés en zone ND par le plan d'occupation des sols. Si les appelants, à l'appui de leur contestation du zonage fixé par le plan local d'urbanisme en litige, se prévalent également du caractère irréaliste de l'objectif misant sur un accroissement de la population de 12 % à l'horizon 2030, il ressort des pièces du dossier que la superficie de la zone U a été réduite par rapport au plan d'occupation des sols, passant de 260,50 à 207,41 hectares.

13. Le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation entachant le zonage fixé par les auteurs du plan local d'urbanisme en litige doit par suite être écarté.

14. Il résulte de tout ce qui précède que l'association Les spoliés de Raimbeaucourt et M. A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Raimbeaucourt qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que l'association Les spoliés de Raimbeaucourt et M. A... demandent au titre des frais liés au litige.

16. En revanche, il y a lieu, sur le fondement de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge solidaire de l'association Les spoliés de Raimbeaucourt et de M. A... le paiement de la somme de 1 500 euros à la commune de Raimbeaucourt.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'association Les spoliés de Raimbeaucourt et de M. A... est rejetée.

Article 2 : L'association Les spoliés de Raimbeaucourt et M. A... verseront solidairement à la commune de Raimbeaucourt une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Les spoliés de Raimbeaucourt, à M. C... A...et à la commune de Raimbeaucourt.

N°17DA00331 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17DA00331
Date de la décision : 28/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d'urbanisme (PLU). Légalité des plans.


Composition du Tribunal
Président : M. Boulanger
Rapporteur ?: M. Jimmy Robbe
Rapporteur public ?: Mme Fort-Besnard
Avocat(s) : NOURY

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-05-28;17da00331 ?
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