La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/11/2020 | FRANCE | N°20DA00371

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 12 novembre 2020, 20DA00371


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B..., a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 22 août 2017 par lequel le préfet de la Somme lui a refusé un titre de séjour ainsi que d'enjoindre sous astreinte à l'autorité préfectorale de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou à défaut une autorisation provisoire de séjour.

Par un jugement n° 1703618 du 11 octobre 2019, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes

.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 février 2020, M. B...,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B..., a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 22 août 2017 par lequel le préfet de la Somme lui a refusé un titre de séjour ainsi que d'enjoindre sous astreinte à l'autorité préfectorale de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou à défaut une autorisation provisoire de séjour.

Par un jugement n° 1703618 du 11 octobre 2019, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 février 2020, M. B..., représentée par la SCP Bouquet- Fayein- Bourgois- Wadier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 22 août 2017 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Somme de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou à défaut de procéder au réexamen de sa situation dans le même délai et de réexaminer sa situation, le tout sous astreinte de 10 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller a été entendu au cours de l'audience publique :

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., de nationalité kosovare, né le 22 janvier 1965, est entré en France le 3 mai 1999 selon ses déclarations. Il a obtenu un titre de séjour en tant que salarié le 7 août 1999, régulièrement renouvelé depuis lors. Il a sollicité le 28 avril 2016, un titre en tant que commerçant. Le préfet de la Somme lui a refusé ce titre par un arrêté du 22 août 2017. M. B... relève appel du jugement du 11 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes que cet arrêté soit annulé et qu'il soit enjoint sous astreinte au préfet de la Somme de lui délivrer une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale ".

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; ... ". Lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux. Lorsque le préfet recherche d'office si l'étranger peut bénéficier d'un titre de séjour sur un ou plusieurs autres fondements possibles, l'intéressé peut se prévaloir, à l'encontre de la décision de rejet de sa demande de titre de séjour, de la méconnaissance des dispositions au regard desquelles le préfet a également fait porter son examen.

3. En l'espèce, il ressort des termes mêmes de l'arrêté contesté du 22 août 2017 que le préfet de la Somme a considéré que la situation de M. B... ne relevait ni de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Or, il est constant que M. B... avait obtenu la régularisation de sa situation et disposait en conséquence d'un titre de séjour depuis le 7 août 1999 jusqu'au 5 août 2016. Avant cette date, il avait demandé à bénéficier d'un titre de séjour en qualité de commerçant. Il ressort également des pièces du dossier que l'intéressé justifie avoir travaillé comme intérimaire à compter du 12 septembre 2001. S'il ne produit aucun justificatif d'emploi pour les périodes comprises entre octobre 2005 et mars 2010 et s'il n'établit avoir travaillé que quatre jours depuis novembre 2010, il démontre en revanche par les nombreux contrats d'intérim qu'il produits, avoir toujours recherché une activité économique permettant de subvenir à ses besoins. Il a en particulier travaillé de manière quasi-continue de juillet 2002 à fin décembre 2003 puis de juin 2004 à fin décembre 2005 et d'avril 2010 à fin octobre 2010, outre d'autres missions plus ponctuelles. Par ailleurs, M. B... fait valoir que ses enfants vivent pour l'un en Allemagne, pour l'autre aux Etats-Unis et aucune pièce du dossier ne permet d'établir qu'il ait gardé des attaches dans son pays qu'il avait quitté depuis près de vingt ans, à la date de la décision. Enfin, si l'intéressé ne fait valoir aucune attache familiale en France, il produit deux témoignages de l'église qu'il fréquente et qui attestent tant de son engagement au sein de cette communauté que de sa maîtrise du français. La commission du titre de séjour a, d'ailleurs émis, le 28 juin 2017, un avis favorable à la délivrance d'un titre de séjour à M. B.... Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, en particulier de la durée de son séjour régulier en France et alors qu'en vertu du 4° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ne pouvait faire l'objet d'une mesure d'éloignement, M. B... établit que le centre de ses attaches se trouve en France et qu'ainsi la décision de refus de titre porte, au regard des buts recherchés, une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale. Par suite, M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande d'annulation de cette décision du 22 août 2017. Il y a donc lieu d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 11 octobre 2019 et, pour le motif d'erreur d'appréciation exposé ci-dessus, la décision de la préfète de la Somme du 22 août 2017.

4. L'annulation du refus de titre contesté implique nécessairement, compte tenu du motif retenu au point 3, qu'il soit enjoint à la préfète de la Somme de délivrer à M. B..., une carte de séjour temporaire au titre de la vie privée et familiale. Il y a lieu de prescrire cette injonction dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette injonction d'une astreinte.

5. M. B... ayant été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, la somme de 1 000 euros, à verser à son conseil, en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 11 octobre 2019 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 22 août 2017 par lequel le préfet de la Somme a refusé de délivrer un titre de séjour à M. B... est annulé.

Article 3 : Il est enjoint à la préfète de la Somme de délivrer à M. B... une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à la SCP Bouquet- Fayein- Bourgois- Wadier au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la préfète de la Somme, au ministre de l'intérieur, à M. A... B... et à la SCP Bouquet-Fayein-Bourgois-Wadier.

----------------------------------------------------------------------------------------------------------

2

N° 20DA00371


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20DA00371
Date de la décision : 12/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Denis Perrin
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : SCP BOUQUET FAYEIN-BOURGOIS WADIER

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-11-12;20da00371 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award