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07/10/2021 | FRANCE | N°20DA01398

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 07 octobre 2021, 20DA01398


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 16 mars 2018 par lequel le président de la communauté d'agglomération de la région dieppoise a refusé de reconnaître sa maladie professionnelle imputable au service, d'enjoindre à la communauté d'agglomération de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie qu'elle a contractée et de lui verser les arriérés de rémunérations correspondant à l'intégralité de son traitement à compter du 12 mai 2017, subsidiai

rement, d'enjoindre à la communauté d'agglomération de réexaminer sa demande, dans un...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 16 mars 2018 par lequel le président de la communauté d'agglomération de la région dieppoise a refusé de reconnaître sa maladie professionnelle imputable au service, d'enjoindre à la communauté d'agglomération de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie qu'elle a contractée et de lui verser les arriérés de rémunérations correspondant à l'intégralité de son traitement à compter du 12 mai 2017, subsidiairement, d'enjoindre à la communauté d'agglomération de réexaminer sa demande, dans un délai d'un mois à compter du jugement, et de mettre à la charge de la communauté d'agglomération une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1801734 du 10 juillet 2020, le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 16 mars 2018 par lequel le président de la communauté d'agglomération de la région dieppoise a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie professionnelle de Mme B..., enjoint à ladite communauté d'agglomération de prendre un arrêté reconnaissant l'imputabilité au service de sa maladie professionnelle, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, et l'a renvoyée devant ladite communauté d'agglomération afin qu'il soit procédé à la régularisation de son plein traitement à compter du 12 mai 2017, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 9 septembre 2020, 15 janvier 2021 et 25 mars 2021, la communauté d'agglomération de la région dieppoise, représentée par Me Coquerel, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Rouen et ses conclusions d'appel ;

3°) de mettre à la charge de Mme B... une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller,

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,

- et les observations de Me Coquerel pour la communauté d'agglomération de la région dieppoise.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... B..., attachée principale, est agent de la communauté d'agglomération de la région dieppoise depuis 2004. Elle a été affectée, en 2011, au poste de responsable de la direction des relations humaines et a, en outre, été chargée, à compter du 1er juillet 2015, du suivi de la cellule d'instruction des autorisations d'urbanisme pour le compte de cinq communes de cette agglomération. Elle a demandé à ladite communauté d'agglomération de reconnaître imputable au service, à compter du 12 mai 2017, le syndrome dépressif réactionnel dont elle souffrait. Après un avis favorable de la commission de réforme en date du 11 janvier 2018, le président de la communauté d'agglomération a, par un arrêté du 16 mars 2018, refusé de reconnaître sa maladie imputable au service. La communauté d'agglomération de la région dieppoise relève appel du jugement du 10 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 16 mars 2018, lui a enjoint de prendre un arrêté reconnaissant l'imputabilité au service de la maladie professionnelle de Mme B... et a renvoyé cette dernière devant ladite communauté d'agglomération afin qu'il soit procédé à la régularisation de son plein traitement à compter du 12 mai 2017.

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif :

2. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version applicable à la date de la décision en litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ".

3. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... a exercé, à compter du 1er juillet 2015, en sus de ses fonctions de responsable de la direction des ressources humaines de la communauté d'agglomération de la région dieppoise, celles de responsable du service d'instruction des autorisations d'urbanisme, pour le compte de cinq communes de ladite communauté d'agglomération, créé à cette même date. La communauté d'agglomération de la région dieppoise soutient que l'intéressée n'exerçait ce poste qu'à hauteur de 25 % de son temps de travail, qu'elle était assistée d'un agent instructeur, qu'elle a pu suivre des formations, qu'elle a eu accès à des bases de données juridiques et qu'elle a fait l'objet d'une revalorisation indemnitaire. Mais, le fait, notamment, que l'adjoint de Mme B... se soit vu directement confier des missions en matière de ressources humaines par la directrice générale des services, sans qu'au demeurant Mme B... n'en ait été informée, ne saurait démontrer un allègement de sa charge de travail dès lors que celle-ci conservait ses fonctions de responsable des ressources humaines, les responsabilités associées et effectuait toujours le travail afférent ainsi que cela ressort notamment du courriel qu'elle a adressé le 11 mai 2017 à la directrice générale des services. Il ressort par ailleurs des comptes rendus d'entretien professionnel pour les années 2015 et 2016 de Mme B..., établis les 26 juillet 2016 et 14 décembre 2016, que la directrice générale des services a reconnu qu'une décision devait être prise concernant la situation de l'intéressée et qu'il a été envisagé que celle-ci soit uniquement affectée en 2017 au service d'instruction des autorisations d'urbanisme. Mais tel n'a pas été le cas puisque Mme B... continuait à exercer ses fonctions de responsable des ressources humaines au 12 mai 2017, date du début de son arrêt maladie. Il ressort également des expertises médicales des docteurs Dulieu, Lametrie et Jacob, sans que cette dernière puisse être regardée comme constituant un rapport de complaisance contrairement à ce que soutient ladite communauté d'agglomération, que les conditions de travail de Mme B..., et en particulier sa surcharge de travail, sont en lien direct avec le syndrome dépressif dont souffre l'intéressée. Dès lors, les circonstances mises en avant par la communauté d'agglomération ne sont pas suffisantes pour écarter l'existence d'une surcharge anormale de travail, et tant cette charge de travail de Mme B... depuis le 1er juillet 2015, que les conditions imprécises et inappropriées de l'exercice de ses fonctions, malgré ses demandes réitérées de clarification et d'évolution, doivent être regardées comme présentant un lien direct avec sa pathologie, en particulier à compter de son congé maladie du 12 mai 2017.

5. Il résulte de tout ce qui précède que la communauté d'agglomération de la région dieppoise n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 16 mars 2018 par lequel le président de la communauté d'agglomération de la région dieppoise a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie professionnelle de Mme B.... Par suite, ses conclusions à fin d'annulation de ce jugement et de rejet de la demande présentée par Mme B... doivent être rejetées.

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la communauté d'agglomération de la région dieppoise, au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la communauté d'agglomération de la région dieppoise la somme de 1 500 euros à verser à Mme B... sur le fondement de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la communauté d'agglomération de la région dieppoise est rejetée.

Article 2 : La communauté d'agglomération de la région dieppoise versera la somme de 1 500 euros à Mme B... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté d'agglomération de la région dieppoise et à Mme A... B....

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N°20DA01398

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20DA01398
Date de la décision : 07/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-01 Fonctionnaires et agents publics. - Positions. - Congés. - Congés de maladie.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Nil Carpentier-Daubresse
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : SCP LEMIEGRE ROISSARD LAVANANT

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-10-07;20da01398 ?
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