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06/01/2022 | FRANCE | N°21DA00152

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 06 janvier 2022, 21DA00152


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B..., épouse C..., a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 3 octobre 2017 du commissaire central, chef de la circonscription de sécurité publique de Valenciennes, en tant que ce dernier a refusé de suivre les propositions de la commission administrative paritaire nationale du 30 mai 2017, relative à son compte-rendu d'entretien professionnel pour l'année 2015, à l'exception de la suppression des termes " lesquelles responsabilités doivent être de nature à remotiver

ce chef de service quelque peu émoussé par huit années passées au sein de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B..., épouse C..., a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 3 octobre 2017 du commissaire central, chef de la circonscription de sécurité publique de Valenciennes, en tant que ce dernier a refusé de suivre les propositions de la commission administrative paritaire nationale du 30 mai 2017, relative à son compte-rendu d'entretien professionnel pour l'année 2015, à l'exception de la suppression des termes " lesquelles responsabilités doivent être de nature à remotiver ce chef de service quelque peu émoussé par huit années passées au sein de la subdivision d'Aniche ". Elle a également demandé qu'il soit enjoint à l'administration de réviser son compte-rendu d'entretien professionnel au titre de l'année 2015, à titre principal, conformément à l'avis de la commission administrative paritaire du 30 mai 2017, et ce dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, ou subsidiairement de réviser ce compte-rendu, s'agissant de la seule appréciation littérale générale.

Par un jugement n° 1807512 du 24 novembre 2020, le tribunal administratif de Lille a annulé la décision implicite refusant de procéder à la révision de l'évaluation professionnelle de Mme C... en tant qu'elle refusait de supprimer les termes " lesquelles responsabilités doivent être de nature à remotiver ce chef de service quelque peu émoussé par huit années passées au sein de la subdivision d'Aniche " et a enjoint au préfet délégué pour la zone de défense et de sécurité Nord de supprimer ces termes de l'évaluation professionnelle au titre de l'année 2015 dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 23 janvier 2021 et le 28 janvier 2021, Mme C..., représentée par Me Philippe Gernez, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il n'a fait droit que partiellement à ses demandes ;

2°) d'annuler la décision du 3 octobre 2017 en ce qu'elle a refusé de suivre les propositions de la commission administrative paritaire nationale du 30 mai 2017 ;

3°) d'enjoindre à l'administration que son compte-rendu d'entretien professionnel au titre de l'année 2015 soit révisé conformément à l'avis de cette commission administrative paritaire, dans le délai d'un mois, à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 95-654 du 9 mai 1995 ;

- le décret n° 2010-888 du 28 juillet 2010 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller,

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... C... est commandante de police à l'échelon fonctionnel et exerçait les fonctions de chef de la circonscription de sécurité publique d'Aniche depuis le 1er février 2008. Au titre de son évaluation pour l'année 2015, sa note est passée de 6 à 5 sur 7. Elle a demandé, le 8 mars 2016, la révision de cette évaluation. La commission administrative paritaire nationale a proposé une modification sur certains points, dans son avis du 30 mai 2017. Le 3 octobre 2017, son supérieur hiérarchique, le commissaire central de Douai, n'a accepté de se rallier que partiellement à cet avis. Finalement, son évaluation n'a pas été modifiée. Mme C... a alors saisi le tribunal administratif de Lille qui a annulé la décision implicite refusant de procéder à la révision de son évaluation professionnelle en tant qu'elle refusait de supprimer les termes " lesquelles responsabilités doivent être de nature à remotiver ce chef de service quelque peu émoussé par huit années passées au sein de la subdivision d'Aniche " et a enjoint au préfet délégué pour la zone de défense et de sécurité Nord de supprimer ces termes de l'évaluation professionnelle au titre de l'année 2015 dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. Mme C... relève appel de ce jugement du 24 novembre 2020 en tant qu'il n'a pas annulé le rejet de sa demande de révision de sa notation pour 2015.

2. Mme C... demandait en première instance l'annulation du courrier du 3 octobre 2017 dans lequel son supérieur hiérarchique direct, le commissaire central de Douai, avait refusé de se rallier, sauf sur un point, à l'avis de la commission administrative paritaire nationale du 30 mai 2017 préconisant la révision de son évaluation pour 2015. Toutefois, ce courrier ne constitue pas la réponse définitive à la demande de révision formulée par Mme C..., le 8 mars 2016 et n'est donc pas une décision susceptible de recours. Les éléments du dossier révèlent en revanche l'existence d'une décision implicite de refus de réviser l'évaluation pour 2015 de Mme C..., le ministre reconnaissant dans ses écritures de première instance que la notation de l'intéressée n'avait pas été modifiée à la date de saisine du tribunal administratif. Celle-ci doit donc être considérée comme ayant saisi le tribunal administratif d'une demande d'annulation de cette décision implicite de rejet, comme l'a jugé à bon droit le tribunal administratif de Lille.

3. Aux termes de l'article 17 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires dans sa version en vigueur : " Les notes et appréciations générales attribuées aux fonctionnaires et exprimant leur valeur professionnelle leur sont communiquées. / Les statuts particuliers peuvent ne pas prévoir de système de notation. ". L'article 55 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa rédaction applicable : " Par dérogation à l'article 17 du titre Ier du statut général, l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires se fonde sur un entretien professionnel annuel conduit par le supérieur hiérarchique direct. / Toutefois, les statuts particuliers peuvent prévoir le maintien d'un système de notation. / A la demande de l'intéressé, la commission administrative paritaire peut demander la révision du compte rendu de l'entretien professionnel ou de la notation. ". L'article 16 du décret du 9 mai 1995 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale : " La notation des fonctionnaires actifs des services de la police nationale fait l'objet d'un ou plusieurs entretiens d'évaluation. Elle est établie annuellement sur une notice qui comporte : / 1. Une liste d'éléments d'appréciation non chiffrée permettant d'évaluer les qualités personnelles, professionnelles et les aptitudes manifestées dans l'exercice des fonctions ; / 2. Une grille de notation par niveau de 1 à 7 qui rend compte de la situation du fonctionnaire ; / 3. Une appréciation non chiffrée qui rend compte de l'évolution de la valeur du fonctionnaire. ". Le juge de l'excès de pouvoir exerce un contrôle restreint sur la notation du fonctionnaire.

4. En l'espèce, la notation de la fonctionnaire est passée d'une note globale de 6 sur 7 pour l'année 2014 à 5 sur 7 pour l'année 2015 soit d'une appréciation correspondant au niveau " excellent " à celle du niveau " très bon ".

5. Mme C... soutient d'abord que le refus de réviser sa notation n'explique pas la raison pour laquelle l'administration n'a pas suivi l'avis de la commission administrative paritaire nationale. Il n'est toutefois pas contesté qu'elle n'a pas demandé les motifs de la décision implicite rejetant sa demande de révision. Au demeurant, il ressort du courrier que son supérieur hiérarchique a adressé le 3 octobre 2017 au directeur départemental de la sécurité publique du Nord et qui a été communiqué à l'appelante, que celui-ci a précisément argumenté pour chacune des rubriques où la commission administrative paritaire nationale préconisait l'augmentation de l'appréciation chiffrée de la fonctionnaire, les raisons la conduisant à maintenir son évaluation initiale. Ce moyen ne peut donc qu'être écarté.

6. Mme C... soutient ensuite que ses appréciations se sont exclusivement fondées sur l'audit mené par la direction départementale de la sécurité publique du Nord, dont elle n'a pas eu les conclusions. D'une part, ainsi qu'elle l'indique elle-même dans sa requête d'appel, elle a pris connaissance de cet audit le 16 mai 2016, soit antérieurement à la décision refusant de réviser son évaluation pour 2015. Les conclusions de cet audit lui avaient également été communiquées oralement, dès mai 2015, soit antérieurement à la date de son évaluation, lors d'un déplacement à la direction départementale de la sécurité publique du Nord, comme elle l'avait reconnu dans un courriel du 11 juin 2015 adressé à son supérieur. En outre, les constats de cet audit ont fait l'objet, d'après son supérieur, d'échanges réguliers avec l'intéressée tout au long de l'année 2015. Mme C... avait donc connaissance des conclusions de l'audit. D'autre part, il ressort tant du compte-rendu de l'entretien professionnel d'évaluation au titre de l'année 2015, que de la réponse apportée à sa demande de révision, par son supérieur hiérarchique direct, le 16 mars 2016, que du refus, déjà cité du 3 octobre 2017, de ce même supérieur de se rallier à la position de la commission administrative paritaire, que son notateur s'est fondé dans l'évaluation de l'intéressée sur des éléments autres que l'audit. Ainsi son supérieur lui reprochait son absence de participation aux opérations de contrôle opérationnel sur la voie publique, ce qui ne faisait pas partie des constats de l'audit. Par ailleurs, si son supérieur a repris des constats issus de cet audit, il a explicité chacun d'entre eux et ne s'est pas borné à un simple renvoi à ce rapport. Ainsi, en particulier, en ce qui concerne la capacité d'écoute et de négociation et la gestion des conflits, son supérieur reproche à l'intéressée un traitement des dossiers judiciaires qui n'est pas effectué au plus près des équipes d'enquêteurs, se traduisant par un état préoccupant du contentieux et de leur méthodologie de traitement, constat issu du rapport d'audit mais repris à son compte et ainsi explicité par son supérieur.

7. Si Mme C... soutient que les dysfonctionnements qui lui sont reprochés ne sont pas avérés, elle ne démontre pas l'inexactitude des remarques de son supérieur lors de son évaluation tant sur l'absence de présence lors des contrôles sur la voie publique que sur le traitement des dossiers judiciaires. Les conclusions de l'audit, telles que Mme C... a pu en prendre connaissance, faisaient, par ailleurs, état d'un nombre d'interpellations de droit commun faible, d'une direction de la sûreté par un de ses collaborateurs qui posait problème ainsi que d'une absence de contrôle interne de la part de la cheffe de circonscription. Ces griefs sont repris et explicités dans l'évaluation pour l'année 2015. Mme C... n'établit pas l'inexactitude de ces appréciations. Si elle produit un rapport d'évaluation de l'inspection générale de la police nationale sur l'accueil du public, réalisé le 7 août 2015, qui note que seul le contexte immobilier défavorable justifie un niveau moyen " sans remettre en cause les qualités professionnelles des agents ", ce seul élément ne suffit à démontrer le caractère inexact des appréciations qui visent principalement le domaine judiciaire ou l'action personnelle de la cheffe de circonscription. De même, les éléments produits par Mme C... lors de la demande de révision de son évaluation adressée à la commission administrative paritaire nationale démontrent qu'elle avait conscience des difficultés de la brigade de sûreté urbaine et qu'elle avait mis en place une revue des dossiers judiciaires deux fois par an pour y remédier mais ils n'établissent pas pour autant que l'implication personnelle de la cheffe de circonscription puisse être qualifiée d'excellente.

7. Par ailleurs, une évaluation ne porte en application des dispositions citées au point 2, que sur le comportement d'un fonctionnaire au cours d'une année donnée. Mme C... ne peut donc se prévaloir de ses notations des années antérieures. Si elle indique ne pas comprendre la baisse de sa notation en 2015 par rapport aux années précédentes, elle n'apporte, ainsi qu'il a été dit, aucun élément démontrant le caractère manifestement erroné des appréciations, ni ne démontre que les résultats obtenus en 2015 pour sa circonscription étaient équivalents à ceux des années précédentes. En effet, si l'analyse de l'activité de la brigade de sûreté urbaine qu'elle a jointe à sa demande de révision de notation adressée à la commission administrative paritaire démontre une croissance du nombre de dossiers sortis par rapport à 2014 malgré une augmentation des entrées, elle fait également état d'une légère augmentation du délai moyen de traitement des dossiers, malgré une baisse des arrêts maladie.

8. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, alors que la cour n'est saisie que de la teneur de l'évaluation de Mme C... pour l'année 2015 non supprimée par le tribunal administratif, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette évaluation et par suite le refus de la réviser , soient entachés d'erreur manifeste d'appréciation. Par suite, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lille a rejeté le surplus de ses demandes. Sa requête, y compris ses conclusions à fins d'injonction et celles au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit donc être rejetée, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée en défense et tirée de l'irrecevabilité des conclusions d'annulation de la décision du 3 octobre 2017.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., épouse C... et au ministre de l'intérieur.

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N°21DA00152

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21DA00152
Date de la décision : 06/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-06-01 Fonctionnaires et agents publics. - Notation et avancement. - Notation.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Denis Perrin
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS VEDESI

Origine de la décision
Date de l'import : 01/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-01-06;21da00152 ?
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