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08/02/2022 | FRANCE | N°21DA00541

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 08 février 2022, 21DA00541


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B..., Mme G..., M. et Mme D... ont demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler :

- l'arrêté du 2 septembre 2019 par lequel le maire d'Evreux a délivré à la société Valorisation d'actifs France un permis de construire un immeuble de sept logements, ainsi que les décisions implicites rejetant leur recours gracieux ;

- l'arrêté du 25 novembre 2019 par lequel le maire d'Evreux a délivré à la même société un permis de construire modifiant le permis qui lui avait été déliv

ré le 2 septembre 2019 ;

- l'arrêté du 30 novembre 2020 par lequel le maire d'Evreux a déliv...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B..., Mme G..., M. et Mme D... ont demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler :

- l'arrêté du 2 septembre 2019 par lequel le maire d'Evreux a délivré à la société Valorisation d'actifs France un permis de construire un immeuble de sept logements, ainsi que les décisions implicites rejetant leur recours gracieux ;

- l'arrêté du 25 novembre 2019 par lequel le maire d'Evreux a délivré à la même société un permis de construire modifiant le permis qui lui avait été délivré le 2 septembre 2019 ;

- l'arrêté du 30 novembre 2020 par lequel le maire d'Evreux a délivré à cette même société un permis de construire modifiant le permis qui lui avait été délivré le 2 septembre 2019.

Par un jugement n° 2000727 du 4 janvier 2021, le tribunal administratif de Rouen a annulé les arrêtés du maire d'Evreux des 2 septembre 2019, 25 novembre 2019 et 30 novembre 2020.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 mars 2021 et un mémoire enregistré le 29 octobre 2021, la société Valorisation d'actifs France, représentée par Me Sandrine Gilet, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 4 janvier 2021 ;

2°) de rejeter les demandes présentées par Mme B..., Mme G..., M. et Mme D... ;

3°) à titre subsidiaire, de surseoir à statuer en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme dans l'attente d'une régularisation des vices qui entacheraient les arrêtés

attaqués ;

4°) de mettre solidairement à la charge de Mme B..., Mme G... et M. et Mme D... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Stéphane Eustache, premier conseiller,

- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,

- et les observations de Me Sandrine Gillet, représentant la société Valorisation d'actifs France ;.

Considérant ce qui suit :

1. La société Valorisation d'actifs France a déposé le 29 mars 2019 une demande de permis de construire un immeuble de sept logements, d'une surface de plancher totale de 712 m², sur une parcelle cadastrée XC 14 située rue Saint-Pierre à Evreux. Par un arrêté du 2 septembre 2019, le maire d'Evreux a délivré le permis sollicité. Par des arrêtés du 25 novembre 2019 et du 30 novembre 2020, le maire d'Evreux a modifié ce permis de construire. Par un jugement du 4 janvier 2021, le tribunal administratif de Rouen a annulé, à la demande de Mme B..., Mme G... et M. et Mme D..., les arrêtés des 2 septembre 2019, 25 novembre 2019 et du 30 novembre 2020 du maire d'Evreux. La société Valorisation d'actifs France et la commune d'Evreux relèvent appel de ce jugement.

Sur les conclusions d'appel principal présentées par la commune d'Evreux :

2. Aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R. 751-3 à R. 751-4-1 ".

3. La commune d'Evreux, à laquelle le jugement du 4 janvier 2021 du tribunal administratif de Rouen a été notifié le 12 janvier 2021, demande, par un mémoire enregistré le 27 septembre 2021 au greffe de la présente cour, la réformation de ce jugement et le rejet des conclusions présentées par Mme B..., Mme G... et M. et Mme D... devant ce tribunal. Ces conclusions d'appel principal, qui au demeurant n'ont pas été régulièrement présentées par un mandataire dans les conditions prévues par l'article R. 811-7 du code de justice administrative en dépit d'une demande de régularisation effectuée le 27 septembre 2021, ont été introduites après l'expiration du délai de deux mois prévu à l'article R. 811-2 du code de justice administrative et, par suite, doivent être rejetées comme irrecevables.

Sur le moyen d'annulation accueilli par le tribunal administratif :

4. Aux termes de l'article UC 6 du règlement du plan local d'urbanisme d'Evreux :

" 6.1. Dispositions générales / Les constructions nouvelles doivent être implantées à l'alignement des emprises publiques et des voies existantes ou à créer. / Des reculs peuvent néanmoins être autorisés à l'une des conditions suivantes : / - des reculs potentiels n'excédant par 5m de profondeur et limités à 30% du linéaire total de façade sont autorisés afin de permettre une animation architecturale de la façade ; / - un recul de 5m minimum peut être autorisé si la continuité urbaine est maintenue par la réalisation d'un mur de clôture tel que défini à l'article UC11 ou si une construction est déjà implantée à l'alignement des emprises publiques et des voies existantes ou à créer ; / - des reculs différents peuvent être autorisés si la construction doit réaliser une continuité avec les immeubles voisins situés en recul de l'alignement ou si la construction projetée concerne une extension d'un bâtiment existant situé en recul. / (...) / 6.3 Saillies en surplomb des voies et des marges de recul / Des saillies ponctuelles sur le domaine public peuvent être autorisées si elles sont placées à au moins 3,50 m au-dessus du sol ".

5. Il ressort des pièces du dossier et notamment des plans de masse produits que si la façade de la construction projetée est alignée en son rez-de-chaussée sur la rue Saint-Pierre, la même façade comporte, aux deuxième, troisième, quatrième et cinquième niveaux, des terrasses en gradin et en recul de cette voie publique, d'une profondeur maximale respective de 5,52 mètres, 8,44 mètres, 11,90 mètres et 14,26 mètres. Dès lors que la profondeur de ces terrasses excède 5 mètres, le projet méconnaît les prescriptions de l'article UC 6 du règlement du plan local d'urbanisme alors applicable. Par suite, la société Valorisation d'actifs France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a estimé que cette illégalité entachait l'arrêté du 2 septembre 2019.

Sur les conséquences de l'illégalité de l'arrêté du 2 septembre 2019 :

6. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé ".

7. Il résulte de ces dispositions qu'un vice entachant le bien-fondé de l'autorisation d'urbanisme est susceptible d'être régularisé, même si cette régularisation implique de revoir l'économie générale du projet en cause, dès lors que les règles d'urbanisme en vigueur à la date à laquelle le juge statue permettent une mesure de régularisation qui n'implique pas d'apporter à ce projet un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même.

8. En l'espèce, l'illégalité mentionnée au point 5 est susceptible d'être régularisée par la modification des terrasses en gradin de la façade implantée le long de la rue Saint-Pierre et, le cas échéant, des toitures au droit de ces terrasses. D'une part, cette modification n'implique pas d'apporter au projet un bouleversement qui en changerait la nature même. D'autre part, si le plan local d'urbanisme d'Evreux n'est plus applicable à la date du présent arrêt, cette illégalité ne peut être regardée comme régularisée dès lors que l'article UA 4 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal de la communauté d'agglomération Evreux-Portes de Normandie en vigueur à la date du présent arrêt impose d'implanter à l'alignement toute construction nouvelle en n'autorisant, comme l'article UC 6 précité du règlement du plan local d'urbanisme de la commune d'Evreux, que " des reculs ponctuels n'excédant pas 5 mètres de profondeur et limités à 30% du linéaire total de la façade (...) afin de permettre une animation architecturale de la façade (...) ". En outre, contrairement à ce que soutiennent Mme B... et autres, les dispositions du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal ne rendent pas impossible la modification du projet, lequel devra notamment être conforme aux prescriptions de l'article UA 9 relatives aux toitures.

9. Il résulte de ce qui précède que la société Valorisation d'actifs France est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen n'a pas fait application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.

10. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme B... et autres devant le tribunal administratif de Rouen et devant la cour.

Sur les autres moyens soulevés dans la demande de première instance :

En ce qui concerne les dispositions non modifiées de l'arrêté du 2 septembre 2019 :

11. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-14 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet porte sur des travaux nécessaires à la réalisation d'une opération de restauration immobilière au sens de l'article L. 313-4 ou sur un immeuble inscrit au titre des monuments historiques, sur un immeuble situé dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable ou dans les abords des monuments historiques, la notice mentionnée à l'article R. 431-8 indique en outre les matériaux utilisés et les modalités d'exécution des travaux ".

12. En l'espèce, la notice contenue dans le dossier de demande de permis de construire n'indique pas les modalités d'exécution des travaux alors que le projet sera situé dans les abords de monuments historiques. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la pétitionnaire a précisé dans sa demande initiale les caractéristiques du projet, notamment les matériaux et les couleurs choisis. En outre, si la construction prendra place dans les abords de monuments historiques, les travaux ne porteront pas sur un bien immeuble inscrit ou classé au titre des monuments historiques et le projet n'entretiendra pas de co-visibilité avec un bien immeuble bénéficiant d'une telle protection. Par suite, les lacunes qui entachent la notice n'ont pas été de nature, en l'espèce, à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 431-14 du code de l'urbanisme doit être écarté.

13. En second lieu, aux termes de l'article UC 11 du règlement du plan local d'urbanisme d'Evreux : " 11.1. Intégration des constructions dans le paysage : Les constructions nouvelles et les extensions doivent, par leur architecture, leurs dimensions ou leur aspect extérieur, respecter le caractère et l'intérêt des lieux avoisinants, des sites et des paysages naturels et urbains locaux. (...) / 11.2. Aspect extérieur des constructions : Des prescriptions particulières peuvent être édictées sur le traitement des façades visibles depuis une voie s'il est de nature à nuire à l'ambiance de la rue ou à son animation architecturale. Les matériaux tels que brique, silex, moellon, bloc de pierre peuvent être imposés compte tenu du caractère des constructions environnantes. (...) Le revêtement des façades doit être d'une tonalité neutre, semblable à celle des constructions avoisinantes ou faire l'objet d'une composition polychrome qui s'intègre à l'environnement. (...) 11.3. Toitures : Les toitures constituent la cinquième façade de la construction : elles doivent donc avant tout assurer un bon couronnement de la construction et être en harmonie avec les constructions voisines de par leurs formes, leurs couleurs ou leurs matériaux. Elles font partie intégrante du projet architectural. (...) ".

14. Il ressort des pièces du dossier que la construction projetée présentera une hauteur maximale de 18 mètres, qu'elle comportera des terrasses disposées en gradins visibles depuis la rue Saint-Pierre et qu'elle sera en partie couronnée par une toiture à pans inclinés recouverte de zinc. Le projet se distinguera ainsi, par ses caractéristiques, de certaines des constructions situées dans la rue Saint-Pierre, notamment de celles qui ne présentent que deux ou trois niveaux.

15. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que le projet sera construit dans un tronçon de cette rue à proximité d'un immeuble de facture contemporaine d'une hauteur de 12 mètres et il sera bordé, en fond de parcelle, par un immeuble de même facture d'une hauteur de 18 mètres et présentant des toitures recouvertes de zinc. De plus, si la façade du projet alignée sur la rue Saint-Pierre comporte des terrasses en gradin, cette disposition ne fait pas obstacle à son insertion dans l'environnement proche. En outre, si certains des murs du projet seront peints de couleur rouge, cette couleur a été choisie afin de rappeler celle des parements en brique de plusieurs constructions avoisinantes. Enfin, si le projet est situé dans le centre-ville d'Evreux, il ressort des pièces du dossier et notamment de l'avis émis le 19 juillet 2019 par l'architecte des bâtiments de France qu'il ne portera pas atteinte aux biens bénéficiant de la protection prévue au titre des abords de monuments historiques.

16. Il résulte de toute ce qui précède que Mme B... et autres ne sont pas fondés à soutenir que le projet ne respecte pas le caractère et l'intérêt des lieux avoisinants, des sites et des paysages urbains locaux. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UC 11 du règlement du plan local d'urbanisme doit être écarté.

En ce qui concerne l'arrêté du 25 novembre 2019 :

17. Mme B... et autres ne peuvent utilement soutenir que l'arrêté du 25 novembre 2019 méconnaît les articles R. 431-9, R. 431-10 et R. 431-14 du code de l'urbanisme et les articles UC 6, UC 11 et UC 12 du règlement du plan local d'urbanisme d'Evreux, dès lors que, par cet arrêté, le maire d'Evreux n'a modifié aucune des dispositions de l'arrêté du 2 septembre 2019 soumises au respect de ces articles et s'est borné à préciser que le projet devra respecter les prescriptions du règlement de la " zone jaune " du plan de prévention des risques d'inondation applicable dans la commune d'Evreux. Par suite, ces moyens doivent être écartés comme inopérants.

En ce qui concerne l'arrêté du 30 novembre 2020 :

18. En premier lieu, aux termes de l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente recueille auprès des personnes publiques, services ou commissions intéressés par le projet, les accords, avis ou décisions prévus par les lois ou règlements en vigueur ".

19. Il ressort des pièces du dossier que le permis de construire modificatif du 30 novembre 2020 a été délivré afin de compléter les plans du projet en y indiquant la cote " NGF " et les raccordements aux réseaux publics ainsi que pour augmenter la surface du local de stationnement des deux roues et des poussettes. Il ne ressort pas des pièces du dossier que, par leur objet et leur ampleur, les modifications ainsi apportées au projet auraient nécessité de consulter à nouveau le service communal chargé de la gestion des eaux pluviales. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 431-50 du code de l'urbanisme doit être écarté.

20. En deuxième lieu, aux termes de l'article UC 4 du règlement du plan local d'urbanisme d'Evreux : " Le rejet des eaux pluviales dans le réseau d'eaux usées est interdit. / (...) / Les eaux pluviales doivent être prioritairement infiltrées dans le sol si la nature du sol et du sous-sol le permet. / Si l'infiltration est insuffisante, déconseillée ou techniquement non réalisable, l'excédent d'eaux non infiltrables est rejeté dans le réseau public avec un débit de fuite maximal autorisé de 2l/s/ha si, et seulement si, le réseau d'assainissement pluvial peut recueillir le début et le volume supplémentaire. / (...) / Afin de respecter le débit de fuite imposé, des solutions de stockage en surface, alternatives à l'utilisation de bassins de rétention, peuvent être mises en place. En dernier recours, sous réserve de justification, les eaux de pluie peuvent faire l'objet de rétention dans des ouvrages enterrés avant rejet dans le réseau pluvial. / Des solutions mixtes de gestion des eaux pluviales sont acceptées (infiltration, rétention en surface, stockage enterré) pour autant que la part dédiée à la gestion par l'infiltration cumulée à la part de gestion de surface soit majoritaire par rapport à la solution de stockage enterré ".

21. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le projet prévoit d'évacuer les eaux pluviales provenant des toitures en zinc dans des espaces de plein terre, et les eaux pluviales stockées dans les réservoirs des toitures terrasses au sein du réseau public d'assainissement. Contrairement à ce que soutiennent Mme B... et autres, en mentionnant ainsi deux systèmes d'évacuation des eaux pluviales, le projet ne comporte pas d'indications contradictoires.

22. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que les eaux pluviales ruisselant sur les toitures terrasses s'écouleront avec un débit de fuite de deux litres par seconde et par hectare vers le réseau public d'assainissement, tandis que les eaux pluviales provenant des toitures en zinc seront infiltrées en pleine terre dans la parcelle d'implantation. Contrairement à ce que soutiennent Mme B... et autres, il ne ressort pas des dispositions précitées de l'article UC 4 du règlement du plan local d'urbanisme d'Evreux que la pétitionnaire aurait été tenue de justifier de l'insuffisance des capacités d'infiltration des espaces de pleine terre pour proposer un tel dispositif mixte de gestion des eaux pluviales. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet comporterait un stockage enterré des eaux pluviales de nature à interdire le recours à un tel dispositif mixte.

23. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UC 4 du règlement du plan local d'urbanisme d'Evreux doit être écarté.

24. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme : " (...) Lorsqu'une demande d'autorisation ou une déclaration préalable est déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d'un certificat d'urbanisme, les dispositions d'urbanisme, le régime des taxes et participations d'urbanisme ainsi que les limitations administratives au droit de propriété tels qu'ils existaient à la date du certificat ne peuvent être remis en cause à l'exception des dispositions qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique (...) ".

25. Il est constant qu'un certificat d'urbanisme portant sur le projet litigieux a été délivré le 28 février 2019 à la pétitionnaire et que cette dernière a déposé une demande de permis de construire modificatif le 24 août 2020 qui portait, dès cette date, sur la surface du local dédié aux deux-roues et poussettes. Dès lors que cette demande, qui ne portait pas sur le nombre de places de stationnement des véhicules, a été déposée dans le délai de dix-huit mois prévu par l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme, la légalité des dispositions du projet, autres que celles qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique, doit être appréciée au regard du plan local d'urbanisme de la commune d'Evreux en vigueur au 28 février 2019. Par suite, Mme B... et autres ne peuvent utilement se prévaloir, pour contester le permis modificatif du 30 novembre 2020, des dispositions de l'article UA 15 du plan local d'urbanisme intercommunal de la communauté d'agglomération Eveux-Portes de Normandie. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance de cet article doit être écarté comme inopérant.

En ce qui concerne les dispositions de l'arrêté du 2 septembre 2019 qui ont été modifiées par l'arrêté du 25 novembre 2019 :

26. Si l'arrêté du 2 septembre 2019 a été signé par M. H..., adjoint au maire d'Evreux, les dispositions de cet arrêté ont été reprises dans l'arrêté du 25 novembre 2019 qui a été signé par le maire d'Evreux. Compte tenu de cette régularisation, Mme B... et autres ne peuvent utilement soutenir que l'arrêté du 2 septembre 2019 a été pris par une autorité ne bénéficiant pas d'une délégation de signature régulière. Par suite, le moyen tiré d'un vice d'incompétence doit être écarté.

En ce qui concerne les dispositions de l'arrêté du 2 septembre 2019 qui ont été modifiées par l'arrêté du 30 novembre 2020 :

27. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. (...) Il indique également, le cas échéant, les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages seront raccordés aux réseaux publics ou, à défaut d'équipements publics, les équipements privés prévus, notamment pour l'alimentation en eau et l'assainissement. / (...) / Lorsque le projet est situé dans une zone inondable délimitée par un plan de prévention des risques, les cotes du plan de masse sont rattachées au système altimétrique de référence de ce plan ".

28. Il ressort des pièces du dossier que le dossier de demande initiale de permis de construire ne comportait pas de plan de masse coté dans les trois dimensions, indiquant les modalités de raccordement de la construction aux réseaux publics et des cotes rattachées au système altimétrique de référence du plan de prévention des risques d'inondation. Toutefois, la pétitionnaire a remédié à ces lacunes par les pièces qu'elle a versées dans le dossier de demande de permis modificatif, au vu duquel le maire d'Evreux a pris l'arrêté du 30 novembre 2020. Elle a notamment produit dans le dossier un plan du rez-de-chaussée mentionnant la note " NGF ". Par suite, et alors même que le débit de fuite pour une période de retour centennal n'a pas été précisé, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme doit être écarté comme inopérant.

29. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend également : / (...) / b) Un plan en coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain ; lorsque les travaux ont pour effet de modifier le profil du terrain, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; / c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; / d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse ".

30. Il est constant que le dossier de demande initiale de permis de construire ne comportait pas de document, graphique ou photographique, permettant d'apprécier avec une précision suffisante l'insertion du projet dans son environnement, alors que, par sa hauteur et son parti pris architectural, le projet se distinguait de plusieurs des constructions situées dans la rue Saint-Pierre. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la pétitionnaire a adressé le 24 août 2020 à la commune d'Evreux une demande de permis de construire modificatif comportant une analyse suffisamment précise du site, assortie d'éléments photographiques et d'un plan de repérage des hauteurs et des matériaux des constructions avoisinantes, au vu de laquelle l'arrêté attaqué du 30 novembre 2020 a été pris. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 431-10 doit être écarté comme inopérant.

31. En troisième lieu, Mme B... et autres ne peuvent utilement soutenir que la superficie du local de stationnement des deux-roues et des poussettes prévue par l'arrêté du 25 novembre 2019 est insuffisante dès lors que cette superficie a été modifiée par l'arrêté du 30 novembre 2020 pour être mise en conformité avec les prescriptions de l'article UC 12 du règlement du plan local d'urbanisme d'Evreux. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de cet article doit être écarté comme inopérant.

32. Il résulte de tout ce qui précède que, d'une part, l'arrêté du 2 septembre 2019 est illégal en tant qu'il méconnaît l'article UC 6 du règlement du plan local d'urbanisme d'Evreux et, d'autre part, qu'aucun des moyens dirigés contre les arrêtés du 25 novembre 2019 et du 30 novembre 2020 n'est fondé.

Sur la régularisation de l'illégalité de l'arrêté du 2 septembre 2019 :

33. En application des dispositions citées au point 6 de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et pour les motifs énoncés aux points 8 et 9, il y a lieu de surseoir à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation des arrêtés attaqués et d'impartir à la société Valorisation d'actifs France, pour remédier à l'illégalité mentionnée au point 5, un délai de six mois avant l'expiration duquel devra être communiqué à la présente cour un arrêté de régularisation.

DÉCIDE :

Article 1er : Les conclusions d'appel présentées par la commune d'Evreux sont rejetées.

Article 2 : Il est sursis à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation des arrêtés attaqués jusqu'à l'expiration du délai de six mois fixé au point 33.

Article 3 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... B..., Mme C... G..., Mme F... D..., M. A... D..., la société Valorisation d'actifs France et la commune d'Evreux.

Copie en sera transmise, pour information, au préfet de l'Eure.

N° 21DA00541 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21DA00541
Date de la décision : 08/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03-02 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire. - Légalité interne du permis de construire. - Légalité au regard de la réglementation locale.


Composition du Tribunal
Président : Mme Baes Honoré
Rapporteur ?: M. Stéphane Eustache
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : BOYER

Origine de la décision
Date de l'import : 17/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-02-08;21da00541 ?
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