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24/02/2022 | FRANCE | N°21DA00209

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 24 février 2022, 21DA00209


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune d'Hénin-Beaumont a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'avis du 9 juin 2017 par lequel la commission de discipline de recours de la région Hauts-de-France a prononcé une sanction d'exclusion temporaire d'un an dont six mois avec sursis à l'encontre de M. A... B... et de mettre à la charge de M. B... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1708509 du 4 décembre 2020 le tribunal administratif de Lil

le a rejeté sa demande et mis à sa charge le versement à M. B... d'une somme...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune d'Hénin-Beaumont a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'avis du 9 juin 2017 par lequel la commission de discipline de recours de la région Hauts-de-France a prononcé une sanction d'exclusion temporaire d'un an dont six mois avec sursis à l'encontre de M. A... B... et de mettre à la charge de M. B... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1708509 du 4 décembre 2020 le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande et mis à sa charge le versement à M. B... d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 1er février et 2 décembre 2021, la commune d'Hénin-Beaumont, représenté par Me Frölich, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'avis du 9 juin 2017 par lequel la commission de discipline de recours de la région Hauts-de-France a prononcé une sanction d'exclusion temporaire d'un an dont six mois avec sursis à l'encontre de M. B... ;

3°) de mettre à la charge de M. B... une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président assesseur,

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,

- et les observations de Me Cliquennois, représentant la commune d'Hénin-Beaumont, et de Me Théry, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., adjoint technique territorial de 2ème classe de la commune d'Hénin-Beaumont depuis 2008, occupe, depuis le 1er juin 2016, la fonction d'agent d'entretien des locaux au sein de la direction des services techniques. Par un arrêté du 8 février 2017, notifié le 27 février 2017, le maire d'Hénin-Beaumont a prononcé une sanction de révocation à son encontre. Le 21 mars 2017, M. B... a saisi le conseil de discipline de recours de la région Hauts-de-France. Par un avis du 9 juin 2017, ce dernier a proposé de substituer à la sanction de révocation, une sanction d'exclusion temporaire d'une durée d'un an dont six mois avec sursis. Aussi, par un arrêté du 31 août 2017, le maire d'Hénin-Beaumont a prononcé la mesure disciplinaire d'exclusion temporaire d'une durée d'un an dont six mois avec sursis. Par un jugement n° 1708509 du 4 décembre 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande d'annulation de l'avis du 9 juin 2017 précité et mis à la charge de la commune le versement à M. B... d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative. La commune d'Hénin-Beaumont relève appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 visée ci-dessus : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale ". Aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : / Troisième groupe : l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans ; (...) Parmi les sanctions du premier groupe, seuls le blâme et l'exclusion temporaire de fonctions sont inscrits au dossier du fonctionnaire. Ils sont effacés automatiquement au bout de trois ans si aucune sanction n'est intervenue pendant cette période. / L'exclusion temporaire de fonctions, qui est privative de toute rémunération, peut être assortie d'un sursis total ou partiel (...) ". Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes. Il lui appartient également de rechercher si la sanction proposée par un conseil de discipline de recours est proportionnée à la gravité des fautes qui lui sont reprochées.

3. La commune d'Hénin-Beaumont a saisi le conseil de discipline de recours, dans le cadre d'une procédure de révocation de M. B..., à la suite de manquements graves et répétés de celui-ci à son devoir de réserve, de la tenue de propos injurieux, diffamants, homophobes et de la profération de menaces de mort et de chantage. Elle conteste l'avis du 9 juin 2017 de ce conseil, proposant de substituer à la sanction de révocation, une sanction d'exclusion temporaire d'une durée d'un an dont six mois avec sursis.

4. Il ressort des pièces du dossier et notamment de constats d'huissier que de février à juillet 2016, M. B... s'est livré, à l'occasion de discussions sur le réseau social " Facebook ", à des propos injurieux, a manqué à son devoir de réserve, a tenu des propos particulièrement triviaux à connotation homophobe envers un membre de la municipalité et porté atteinte à l'image de la municipalité, à plusieurs reprises en critiquant violemment les actions de la commune d'Hénin-Beaumont. Il a été jusqu'à publier une photographie d'un fusil équipé d'un viseur avec un commentaire menaçant. M. B... ne conteste pas ces faits. Il a d'ailleurs fait l'objet d'une condamnation par un jugement du tribunal correctionnel de Béthune du 24 octobre 2017 à une peine de deux mois d'emprisonnement avec sursis notamment pour injure publique et diffamation envers un dépositaire de l'autorité et pour menace de mort à l'encontre d'un élu municipal. De tels faits particulièrement graves et réitérés sur une durée de six mois sont de nature à justifier une sanction disciplinaire.

5. Toutefois ces faits prennent place dans un contexte conflictuel, généré par la suppression de la pointeuse et l'installation de caméras de surveillance à l'hôtel de ville, ayant créé un climat de tension entre la municipalité et M. B... en sa qualité de représentant syndical. La tension avec ce dernier a été exacerbée par des publications, sur le site internet " La Voie d'Hénin ", néanmoins sans lien direct avec la municipalité, d'attaques personnelles concernant M. B... et sa fille. Par ailleurs, comme l'indiquait M. B... devant le conseil de discipline de recours, il était alors suivi pour un syndrome antidépressif en lien avec son travail et au cours des six mois en question, la commune ne l'a pas rappelé aux devoirs liés à son statut de fonctionnaire territorial. Enfin, M. B... n'a fait l'objet d'aucune sanction disciplinaire antérieure. Dans ces conditions, la commune appelante n'est pas fondée à soutenir que l'avis de la commission de discipline de recours de la région Hauts-de-France comporte une proposition de sanction disproportionnée. Par suite, les moyens tirés d'une erreur d'appréciation ou d'une erreur de droit dont serait entaché l'avis du conseil de discipline de recours et le jugement du tribunal administratif de Lille doivent être écartés.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la commune d'Hénin-Beaumont n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Doivent par voie de conséquence, être rejetées ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, en revanche, en application de ces dispositions, de mettre à la charge de la commune d'Hénin-Beaumont une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune d'Hénin-Beaumont est rejetée.

Article 2 : La commune d'Hénin-Beaumont versera à M. B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Hénin-Beaumont et à M. A... B....

Copie en sera adressée pour information au préfet du Pas-de-Calais.

2

N°21DA00209


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21DA00209
Date de la décision : 24/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Discipline - Sanctions.

Fonctionnaires et agents publics - Discipline - Procédure - Conseil de discipline.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Marc Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : THERY

Origine de la décision
Date de l'import : 08/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-02-24;21da00209 ?
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