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28/06/2022 | FRANCE | N°21DA02922

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 28 juin 2022, 21DA02922


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 25 mars 2021 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer une carte de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 2104960 du 17 septembre 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 décembre 2021, M. B... C... A..., représenté par Me Julie

Gommeaux, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté du préfet du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 25 mars 2021 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer une carte de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 2104960 du 17 septembre 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 décembre 2021, M. B... C... A..., représenté par Me Julie Gommeaux, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté du préfet du Nord ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard, de lui délivrer une carte de séjour ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation et, dans l'attente, de l'admettre provisoirement au séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son avocate, sous réserve qu'elle renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle, en application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance d'une carte de séjour :

- la décision méconnaît l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans la mesure où le préfet a fait une appréciation erronée du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation ;

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il a fixé le centre principal de ses intérêts en France ;

- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision attaquée sur sa situation.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'une carte de séjour ;

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision attaquée sur sa situation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mars 2022, le préfet du Nord conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

M. B... C... A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 novembre 2021 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Douai.

Par une ordonnance du 16 mars 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 5 mai 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Naïla Boukheloua, première conseillère,

- et les observations de M. B... C... A... et, à sa demande, de Mme E....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... C... A... relève appel du jugement du 17 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 mars 2021 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer une carte de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigé ".

3. Lorsqu'il examine une demande de titre de séjour portant la mention "salarié" ou "travailleur temporaire", présentée sur le fondement de ces dispositions dans le cadre de l'admission exceptionnelle au séjour, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans et qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle. Disposant d'un large pouvoir d'appréciation, il doit ensuite prendre en compte la situation de l'intéressé appréciée de façon globale au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Il appartient seulement au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation qu'il a portée.

4. Pour refuser de délivrer une carte de séjour à M. C... A..., le préfet du Nord s'est fondé sur le fait que l'intéressé, alors en deuxième année de certificat d'aptitude professionnelle " agent polyvalent de restaurant " à l'occasion duquel il a signé un contrat d'apprentissage de deux ans avec l'entreprise Mondial Burger, a manqué d'assiduité et de sérieux dans le suivi de sa formation.

5. D'une part, il ressort des pièces du dossier, et notamment des bulletins scolaires produits, que M. C... A... a multiplié les absences, ce qui n'a pas permis à la majorité de ses formateurs de l'évaluer en particulier durant le second semestre de l'année scolaire 2019/2020. Par ailleurs, il n'est pas suffisamment établi par les pièces du dossier que l'absentéisme de M. C... A... trouvait pour partie son origine dans le fait que son employeur l'avait empêché à plusieurs reprises de se rendre au lycée pour y suivre sa formation.

6. D'autre part, les bulletins scolaires de l'intéressé ont fait état de notes dans l'ensemble trop faibles. Ainsi, sa moyenne générale, même si elle s'est élevée de 4,79/20 à 8,71/20 avant la décision attaquée, est restée insuffisante pour permettre de regarder l'intéressé comme justifiant du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation. A cet égard, la circonstance invoquée selon laquelle ces mauvais résultats étaient imputables au difficultés logistiques rencontrées dans le suivi des enseignements à distance durant la crise sanitaire n'est pas démontrée.

7. Dans ces conditions, M. C... A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable.

8. En deuxième lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales prévoit que : " 1) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ".

9. M. C... A... soutient qu'il a fixé le centre principal de ses intérêts en France puisqu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance dès l'âge de 16 ans et qu'il y poursuit sa scolarité doublée d'un contrat d'apprentissage.

10. Toutefois, il est constant que l'intéressé est célibataire et sans charge de famille, et n'est pas dépourvu d'attaches privées et familiales au Pakistan, où il a vécu jusqu'à l'âge de 16 ans et où résident ses parents et ses frères et sœurs. En outre, s'il ressort des attestations produites au dossier, au demeurant insuffisamment précises et circonstanciées, que M. C... A... est un jeune homme agréable, investi et volontaire qui a su se faire des amis tant sur son lieu de travail que dans son établissement scolaire, ces éléments ne sauraient traduire une insertion sociale suffisante de l'intéressé sur le territoire français, lequel ne justifie pas davantage être dans l'impossibilité de poursuivre sa formation d'agent polyvalent de restauration au Pakistan.

11. Dans ces conditions, la décision de refus de titre n'a pas porté au droit de M. C... A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel elle a été prise et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

12. En dernier lieu, il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'en prenant la décision en litige, le préfet du Nord aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

13. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour doit être écarté.

14. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés précédemment, l'obligation faite à M. C... A... de quitter le territoire français n'est pas intervenue en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.

15. Il résulte de tout ce qui précède que le M. C... A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 mars 2021 du préfet du Nord.

16. Par voie de conséquence, les conclusions de M. C... A... à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., au ministre de l'intérieur, et à Me Julie Gommeaux.

Copie en sera transmise pour information au préfet du Nord.

Délibéré après l'audience publique du 14 juin 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Heinis, président de chambre,

- Mme Corinne Baes Honoré, présidente-assesseure,

- Mme Naïla Boukheloua, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 juin 2022.

La rapporteure,

Signé : N. Boukheloua

Le président de la 1ère chambre,

Signé : M. D...

La greffière,

Signé : C. Sire

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Christine Sire

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21DA02922
Date de la décision : 28/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: Mme Naila Boukheloua
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : GOMMEAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 02/08/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-06-28;21da02922 ?
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