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10/11/2022 | FRANCE | N°22DA01313

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 10 novembre 2022, 22DA01313


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 14 février 2022 par lequel le préfet de l'Eure l'a obligé sans délai à quitter le territoire français.

Par un jugement n° 2200900 du 18 mars 2022, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 juin 2022, M. A..., représenté par Me Flora Berthet-Le Floch, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d

'annuler l'arrêté du 14 février 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Eure de réexaminer sa situation dans le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 14 février 2022 par lequel le préfet de l'Eure l'a obligé sans délai à quitter le territoire français.

Par un jugement n° 2200900 du 18 mars 2022, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 juin 2022, M. A..., représenté par Me Flora Berthet-Le Floch, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 14 février 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Eure de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente de ce réexamen, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît également l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- elle viole aussi les dispositions de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il réside habituellement en France d'une part depuis l'âge d'au moins treize ans et d'autre part depuis au moins vingt ans.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 septembre 2022, le préfet de l'Eure conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête d'appel n'est fondé.

La clôture de l'instruction a été fixée au 10 octobre 2022 à 12 heures par ordonnance du 14 septembre 2022.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 mai 2022 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Douai.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant sénégalais, né le 20 avril 1981 a été titulaire de cartes de résident à compter de 1999, la dernière étant valable jusqu'au 16 novembre 2019. Par arrêté du 7 mars 2019, la préfète de la Seine-Maritime lui a retiré ce titre. Puis par arrêté du 14 février 2022, le préfet de l'Eure l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit son retour sur le territoire français pendant une durée de trois ans. M. A... relève appel du jugement du tribunal administratif de Rouen qui a rejeté ses conclusions d'annulation dirigées uniquement contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai.

Sur la fin de non-recevoir opposée en première instance par le préfet de l'Eure :

2. Aux termes de l'article L. 614-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas assortie d'un délai de départ volontaire, le président du tribunal administratif peut être saisi dans le délai de quarante-huit heures suivant la notification de la mesure. / (... ) ".

3. L'article R. 776-19 du code de justice administrative, rendu applicable aux étrangers détenus par l'article R. 776-31 du même code, dispose que la requête de l'étranger détenu peut valablement être déposée, dans le délai du recours contentieux, auprès du chef de l'établissement pénitentiaire.

4. Pour rendre opposable le délai de recours contentieux, conformément à ce que prévoit l'article R. 421-5 du code de justice administrative, l'administration est tenue de faire figurer dans la notification de ses décisions la mention des délais et voies de recours contentieux ainsi que les délais des recours administratifs préalables obligatoires.

5. Depuis l'entrée en vigueur des articles R. 776-19, R. 776-29 et R. 776-31 du code de justice administrative, il incombe à l'administration, pour les décisions pour lesquelles le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a prévu un délai de recours bref, notamment les obligations de quitter le territoire français sans délai, de faire figurer, dans leur notification à un étranger retenu ou détenu, la possibilité de déposer sa requête dans le délai de recours contentieux auprès de l'administration chargée de la rétention ou du chef de l'établissement pénitentiaire.

6. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier de première instance que l'arrêté du 14 février 2022 a été notifié à M. A... le mardi 15 février 2022 à 11H05. L'arrêté notifié comprenait en annexe les voies et délais de recours précisant que le recours contentieux devait être effectué dans un délai de quarante-huit heures et qu'il pouvait être adressé par le biais du chef d'établissement.

7. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que, par un courrier du 4 mars 2022, le greffe du tribunal administratif de Rouen a informé M. A... que sa requête avait été enregistrée le lundi 21 février 2022. A cette date, le délai de recours était expiré et la requête était donc tardive comme le préfet de l'Eure l'a fait valoir en première instance. Aucune autre pièce du dossier ne démontre que la requête a été adressée dans le délai de recours, ni que M. A... ait été empêché de le faire dans ce délai.

8. En troisième lieu, la circonstance que l'intéressé a formé le 28 janvier 2022, avant la notification de la mesure d'éloignement, un recours contentieux contre la lettre du 26 janvier 2022 par laquelle le préfet de l'Eure l'avait invité à présenter des observations dans la perspective d'une éventuelle mesure d'éloignement, est sans incidence sur le délai de recours ouvert contre l'arrêté du 14 février 2022. Au surplus, ce recours avait été rejeté par une ordonnance du 2 février 2022 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen.

9. En quatrième lieu, l'interrogation formulée le 21 février 2022 par le service d'insertion et de probation sur la suite réservée à ce recours contre la lettre du 26 janvier 2022, ne démontre pas que M. A... n'a pas pu présenter de recours contre la mesure d'éloignement dans le délai et selon les modalités dont il avait été régulièrement informé.

10. Dans ces conditions, le préfet de l'Eure était fondé à soutenir que les conclusions de M. A... devaient être rejetées comme irrecevables car tardives. M. A... n'est donc pas fondé à se plaindre de ce que c'est à tort que le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

11. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions d'annulation de M. A... doivent être rejetées, compte tenu de l'irrecevabilité de la demande de première instance, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens de l'intéressé.

12. Par suite, ses conclusions à fins d'injonction et celles présentées sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Flora Berthet-Le Floch.

Copie en sera transmise, pour information, au préfet de l'Eure.

Délibéré après l'audience publique du 20 octobre 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Heinis, président de chambre,

- Mme Corinne Baes-Honoré, présidente assesseure,

- M. Denis Perrin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 novembre 2022.

Le rapporteur,

Signé: D. Perrin

Le président de la 1ère chambre,

Signé: M. C...

La greffière,

Signé: C. Sire

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Christine Sire

N°22DA01313 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22DA01313
Date de la décision : 10/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. Denis Perrin
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : BERTHET-LE FLOCH FLORA

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-11-10;22da01313 ?
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