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09/03/2023 | FRANCE | N°22DA01866

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 09 mars 2023, 22DA01866


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association " Essars terre rurale ", M. B... G..., Mme E... C... et Mme F... A... ont demandé au tribunal administratif de Lille, à titre principal, d'annuler, d'une part, l'arrêté du 20 janvier 2021 par lequel le maire d'Essars a délivré à la société Soamco un permis d'aménager un lotissement comprenant quarante-deux lots individuels et dix-huit logements locatifs sociaux sur un terrain situé rue Albert Warembourg et, d'autre part, la décision du 19 avril 2021 ayant rejeté leur recours gracieux.r>
Par un jugement n° 2105351 du 28 juin 2022, le tribunal administratif de Li...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association " Essars terre rurale ", M. B... G..., Mme E... C... et Mme F... A... ont demandé au tribunal administratif de Lille, à titre principal, d'annuler, d'une part, l'arrêté du 20 janvier 2021 par lequel le maire d'Essars a délivré à la société Soamco un permis d'aménager un lotissement comprenant quarante-deux lots individuels et dix-huit logements locatifs sociaux sur un terrain situé rue Albert Warembourg et, d'autre part, la décision du 19 avril 2021 ayant rejeté leur recours gracieux.

Par un jugement n° 2105351 du 28 juin 2022, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 août 2022, et un mémoire enregistré le 30 janvier 2023 et non communiqué, l'association " Essars terre rurale ", M. B... G... et Mme E... C..., représentés par Me Pierre-Etienne Bodart, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler le permis d'aménager du 20 janvier 2021 et la décision du maire d'Essars ayant rejeté leur recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Essars et de la société Soamco le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils présentent un intérêt pour agir ;

- le permis délivré méconnaît les articles R. 441-2 et R. 441-3 du code de l'urbanisme ;

- le pétitionnaire ne justifiait pas de sa qualité pour effectuer les travaux de raccordement du nouveau lotissement au réseau viaire ;

- le permis méconnaît les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

- il méconnaît également les dispositions de l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme ;

- il méconnaît aussi l'orientation d'aménagement applicable à la zone ainsi que l'article 4 du règlement du plan local d'urbanisme ;

- le projet aurait dû faire l'objet d'une évaluation environnementale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 décembre 2022, la société Soamco et la commune d'Essars, représentées par Me Paul Guillaume Balaÿ, concluent au rejet de la requête et à la mise à la charge des appelants de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles font valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés

Par une ordonnance du 28 décembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 janvier 2023 à 12 heures.

Les parties ont été informées qu'en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, la cour était susceptible de surseoir à statuer pendant un délai de six mois en vue de la régularisation du vice tiré de la méconnaissance de l'orientation d'aménagement programmée et de l'article 4 du plan local d'urbanisme.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller,

- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,

- les observations de Me Chloé Guilbaud représentant l'association " Essars terre rurale ", M. B... G... et Mme E... C... et de Me Béatrice Mortun, représentant la société Soamco et la commune d'Essars.

Considérant ce qui suit :

Sur l'objet du litige :

1. La société Soamco a déposé, le 29 juillet 2020, une demande de permis d'aménager pour 42 lots de constructions individuelles et 18 logements locatifs sur un terrain situé rue Albert Warembourg à Essars. Par arrêté du 20 janvier 2021, le maire d'Essars a délivré ce permis d'aménager. L'association " Essars terre rurale " et des particuliers ont formé, le 19 mars 2021, un recours gracieux contre ce permis qui a été rejeté par courrier du 19 avril 2021. L'association et trois des particuliers ont alors saisi le tribunal administratif de Lille qui a rejeté leurs demandes d'annulation du permis et de la décision de rejet de leur recours gracieux par un jugement du 28 juin 2022. L'association et deux des particuliers, Mme C... et M. G..., relèvent appel de ce jugement par leur requête du 30 août 2022.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance :

2. L'association " Essars terre rurale " a pour objet social selon l'article 3 de ses statuts de " de protéger de faire respecter le cadre de vie, l'environnement (...), de protéger les terres et les domaines agricoles ainsi que les espaces naturels et d'agir contre l'urbanisation intensive en milieu rural " et a pour champ d'intervention, d'après son titre, la commune d'Essars. Ses statuts ont par ailleurs été déposés en préfecture le 5 juin 2019, soit plus d'un an avant le dépôt de la demande de permis d'aménager. Cette association a donc intérêt pour agir contre le permis d'aménager en cause qui procède à l'urbanisation d'une zone aujourd'hui utilisée à des fins agricoles. Au surplus, Mme C... est propriétaire d'une parcelle mitoyenne du projet et M. G... est propriétaire d'une maison située en face de la voie d'accès au projet. Ils peuvent donc être considérés comme voisins immédiats et ont donc également intérêt pour agir. La fin de non-recevoir opposée en défense doit donc être écartée.

En ce qui concerne la composition du dossier de demande de permis d'aménager :

3. Aux termes de l'article R. 441-2 du code de l'urbanisme : " Sont joints à la demande de permis d'aménager : / a) Un plan permettant de connaître la situation du terrain à l'intérieur de la commune ; / b) Le projet d'aménagement comprenant les pièces mentionnées aux articles R. 441-3 et R. 441-4. " et aux termes de l'article R. 441-3 du même code : " Le projet d'aménagement comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords et indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : / a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; / b) La composition et l'organisation du projet, la prise en compte des constructions ou paysages avoisinants, le traitement minéral et végétal des voies et espaces publics et collectifs et les solutions retenues pour le stationnement des véhicules ; / c) L'organisation et l'aménagement des accès au projet ; / d) Le traitement des parties du terrain situées en limite du projet ; / e) Les équipements à usage collectif et notamment ceux liés à la collecte des déchets. ".

4. La circonstance que le dossier de demande d'une autorisation d'urbanisme ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

5. Le dossier de demande de permis d'aménager précise que la parcelle est un terrain plat, vierge de toutes constructions. Les photographies comprises dans ce dossier permettent de compléter l'appréciation sur l'état initial du site et son environnement. La notice décrit également les mesures prises pour favoriser l'insertion du projet dans l'environnement. Par ailleurs si les appelants soutiennent que le dossier aurait dû faire état des dispositions prises pour faire face au risque d'inondations, il n'est pas établi que le terrain support du projet serait particulièrement concerné par ce risque. Dans ces conditions, il n'est pas démontré que le dossier de demande était de nature à fausser l'appréciation portée par le maire d'Essars sur la conformité du projet à la règlementation applicable.

En ce qui concerne le terrain d'assiette du projet et la qualité pour déposer la demande de permis d'aménager :

6. Un permis de construire n'a d'autre objet que d'autoriser la construction d'immeubles conformes aux plans et indications fournis par le pétitionnaire. La circonstance que ces plans et indications pourraient ne pas être respectés ou que ces immeubles risqueraient d'être ultérieurement transformés et affectés à un usage non conforme aux documents et règles générales d'urbanisme n'est pas par elle-même, sauf le cas d'éléments établissant l'existence d'une fraude à la date de la délivrance du permis, de nature à affecter la légalité de celui-ci.

7. La société Soamco n'est pas propriétaire des parcelles reliant le projet au lotissement voisin par le prolongement de la rue des genêts et par celui de la rue des bleuets. Toutefois, il ne s'agit que d'accès secondaires. L'accès principal par la rue Albert Warembourg et les voiries internes du lotissement permettent de répondre de manière certaine aux exigences légales relatives à la desserte des lots, comme l'a jugé à bon droit le tribunal administratif de Lille, les accès secondaires n'étant pas justifiés par des exigences de sécurité mais par un souci d'améliorer la trame urbaine. Par ailleurs, la demande de permis mentionne la création des accès secondaires et le permis est accordé sous cette réserve. La circonstance que ces accès ne seraient pas réalisés n'est donc pas de nature à affecter la légalité du permis, dès lors que n'est pas établie une fraude à la date de délivrance du permis. Au surplus, l'impossibilité de réaliser ces accès n'est pas démontrée dès lors qu'ils supposent seulement de franchir un fossé et que le président de l'association foncière de remembrement, propriétaire du fossé séparant les deux lotissements atteste qu'il autorise la réalisation de deux ouvrages de franchissement de ce fossé pour la réalisation de ce raccordement. En outre, la société Tisserin, propriétaire de ces parcelles, confirme qu'elle s'engage à céder ces emprises à la commune pour qu'elle réalise les raccordements de voirie. Le maire atteste de son côté que la commune acceptera ces cessions et réalisera la voirie correspondante. Si ces attestations sont postérieures au permis d'aménager, elles sont antérieures aux travaux de viabilisation et rien ne démontre qu'elles seraient sérieusement remises en cause.

8. Il résulte de ce qui précède que la société pétitionnaire, propriétaire des terrains d'assiette de l'accès principal, des voiries internes et des lots, disposait de la qualité pour déposer la demande de permis d'aménager et qu'elle pouvait prévoir dans son programme le raccordement de son projet au lotissement existant.

En ce qui concerne la soumission du projet à une évaluation environnementale :

9. Il résulte des dispositions des articles L. 122-1 et R. 122-2 du code de l'environnement que les opérations d'aménagement dont le terrain d'assiette est compris entre 5 et 10 ha, ou dont la surface de plancher au sens de l'article R. 111-22 du code de l'urbanisme ou l'emprise au sol au sens de l'article R. 420-1 du même code est supérieure ou égale à 10 000 m2 doivent être soumis à une évaluation environnementale. Aux termes du neuvième alinéa du III de l'article L. 122-1 du même code : " Lorsqu'un projet est constitué de plusieurs travaux, installations, ouvrages ou autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage, il doit être appréhendé dans son ensemble, y compris en cas de fractionnement dans le temps et dans l'espace et en cas de multiplicité de maîtres d'ouvrage, afin que ses incidences sur l'environnement soient évaluées dans leur globalité. ".

10. Il est constant que le projet, objet du permis, porte sur une surface de plancher de 9 000 m2 sur un terrain d'une superficie de 2,8355 hectares et ne devait donc pas être soumis en tant que tel à évaluation environnementale. Toutefois, les appelants soutiennent que le lotissement autorisé par le permis, constitue la deuxième phase d'un projet unique dont la première phase est le lotissement situé au nord et qui doit être relié au nouveau lotissement par deux voies. Néanmoins, les deux opérations ont lieu à plus de dix ans d'intervalle, sont réalisées par deux promoteurs différents et n'ont pas les mêmes caractéristiques, le lotissement réalisé comprenant un béguinage pour personnes âgées, de l'accession à la propriété, du locatif individuel et des lots libres alors que le projet litigieux ne porte que sur des lots libres et du logement collectif social. Par ailleurs la plaquette commerciale et le courrier du 30 novembre 2007 d'un promoteur, racheté par le promoteur ayant réalisé le lotissement situé au nord, envisageant une phase ultérieure de ce lotissement ne démontrent pas à eux seuls que le projet, objet du permis, constitue cette deuxième phase d'un projet d'ensemble. La circonstance que le maire ait fait un lien dans un courrier du 11 janvier 2021 aux élus entre ces deux lotissements ou que la zone soit couverte par une même orientation d'aménagement et de programmation démontre non pas une unicité du projet mais seulement son inscription dans une même opération d'urbanisation de la zone. Il n'est donc pas établi de lien entre les deux lotissements de nature à caractériser le fractionnement d'un projet unique. Le maire n'a donc commis aucune erreur de droit en n'exigeant pas que le projet soit soumis à évaluation environnementale.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme :

11. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ".

12. Les appelants n'apportent aucune précision sur les risques que comporterait le projet quant à son accès et à sa voirie interne alors qu'il n'est pas contesté qu'il a fait l'objet d'un avis favorable du service départemental d'incendie et de secours et qu'il est accessible par une voie d'accès à double sens d'une largeur de 5 mètres, limitée à une vitesse de 30 kilomètres par heure, provenant de la rue Albert Warembourg. Chaque parcelle du lotissement est ensuite desservie par une voirie interne à sens unique d'une largeur de 4 mètres et limitée à une vitesse de 20 kilomètres par heure. Au surplus, si les appelants soutiennent que le raccordement au lotissement voisin situé au nord ne pourra être réalisé, rien ne démontre le risque que créerait l'absence d'un tel raccordement, ni que ses accès secondaires soient nécessaires à la desserte des lots, outre le fait, ainsi qu'il a été dit, que l'impossibilité de ce raccordement n'est pas établie. Le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme doit donc être écarté.

En ce qui concerne la compatibilité avec le schéma de cohérence territoriale :

13. Le schéma de cohérence territoriale de l'Artois, approuvé le 29 février 2008, préconise, au titre de son objectif visant à assurer les continuités et sécuriser les cheminements au titre des modes doux de déplacement, que " chaque opération d'habitat devra également être raccordée au maillage extérieur de cheminements existants ou à venir ".

14. Le permis d'aménager est accordé, ainsi qu'il a été dit, sous réserve d'une liaison au lotissement existant par le raccordement des deux voiries secondaires du projet et il n'est pas démontré que ce raccordement soit impossible. La communauté d'agglomération Béthune-Bruay-Artois-Lys Romane a d'ailleurs émis, le 1er septembre 2020, un avis favorable au projet au regard des objectifs et orientations du schéma de cohérence territoriale. Par suite, le moyen tiré de l'incompatibilité avec les orientations du schéma de cohérence territoriale doit être écarté.

En ce qui concerne l'illégalité du plan local d'urbanisme :

15. Aux termes de l'article L. 600-12 du code de l'urbanisme : " Sous réserve de l'application des articles L. 600-12-1 et L. 442-14, l'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'un document d'urbanisme en tenant lieu ou d'une carte communale a pour effet de remettre en vigueur le schéma de cohérence territoriale, le plan local d'urbanisme, le document d'urbanisme en tenant lieu ou la carte communale immédiatement antérieur. ". Par suite, un requérant demandant l'annulation d'une autorisation de construire ne saurait utilement se borner à soutenir qu'il a été délivré sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal, quelle que soit la nature de l'illégalité dont il se prévaut. Dès lors, il peut être utilement soutenu devant le juge qu'une autorisation de construire a été délivrée sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal - sous réserve, en ce qui concerne les vices de forme ou de procédure, des dispositions de l'article L. 600-1 du même code -, à la condition que le requérant fasse en outre valoir que ce permis méconnaît les dispositions pertinentes ainsi remises en vigueur.

16. Les appelants soutiennent que le permis d'aménager est illégal par voie de conséquence de l'illégalité du plan local d'urbanisme de la commune d'Essars, approuvé le 13 octobre 2015. Ils prétendent que ce document est illégal au regard des dispositions de l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme compte tenu de l'importance de la zone à urbaniser dans laquelle se situe le projet. Toutefois, ils n'invoquent aucune disposition du précédent plan local d'urbanisme qui serait méconnue par le projet, outre le fait qu'il n'est pas sérieusement contesté que le plan approuvé en 2015 a réduit les zones à urbaniser de 7,7 hectares par rapport au document d'urbanisme précédent. Par suite, ce moyen doit être écarté comme inopérant.

En ce qui concerne la compatibilité avec les principes définis par l'orientation d'aménagement et de programmation :

17. Il résulte des dispositions du code de l'urbanisme qu'une autorisation d'urbanisme ne peut être légalement délivrée si les travaux qu'elle prévoit sont incompatibles avec les orientations d'aménagement et de programmation d'un plan local d'urbanisme et, en particulier, en contrarient les objectifs.

18. Le plan local d'urbanisme de la commune d'Essars, approuvé le 13 octobre 2015, comprenait une orientation d'aménagement et de programmation relative à la zone AU où se situe le projet.

19. En premier lieu, cette orientation prévoyait s'agissant de la trame viaire que : " Un accès sécurisé (routier et piéton) à la zone sera à aménager depuis la rue Warembourg à l'ouest. / Cet accès permettra l'aménagement d'une voie primaire structurant le site et se raccordant à la voie primaire de l'opération voisine (au nord-ouest). Cette voie sera accompagnée d'un cheminement piétonnier. / Les caractéristiques de la voirie principale doivent être compatibles avec une circulation confortable et sécurisée des automobilistes, cycles et piétons. Le traitement au sol de la nouvelle voie doit être réalisé de manière à limiter la vitesse de la circulation automobile et assurer une bonne sécurité routière. / Une voirie secondaire viendra s'appuyer et se raccorder sur la voirie primaire afin de contribuer à la bonne desserte des futurs logements. Celle-ci viendra également se raccorder à la voirie secondaire de la zone voisine (au nord-ouest). Elle devra présenter la même exigence de sécurité que l'axe primaire et sera également accompagnée d'un cheminement piétonnier. ".

20. Compte tenu de ce qui a été indiqué au point 12, sur l'accès principal par la rue Warembourg, sur les voiries internes du lotissement et sur les limitations de vitesse à l'intérieur du lotissement, le projet est compatible avec les orientations de sécurité routière de l'orientation précitée. Par ailleurs, la voirie secondaire est traitée en voirie partagée permettant la circulation des piétons et cyclistes, dont la sécurité est également assurée par les limitations de vitesse. Enfin et ainsi qu'il a été dit, le permis est accordé sous réserve de son raccordement au lotissement existant. Il résulte donc de l'ensemble de ces éléments que le projet ne contrarie pas les objectifs de l'orientation d'aménagement et de programmation relative à la trame viaire.

21. En second lieu, l'orientation d'aménagement et de programmation prévoit qu'il " conviendra de conserver à minima les fonctions hydrauliques du fossé en place en limite nord de parcelle. Il conviendra de prendre en compte les risques hydrauliques et de réaliser des études de détermination des enjeux hydrauliques. ".

22. Il n'est pas sérieusement contesté que le fossé situé au nord du projet est conservé et qu'une bande de 3,5 mètres à 4 mètres selon les endroits est préservée pour permettre son entretien. Si le projet prévoit le raccordement au lotissement voisin, séparé par ce fossé, il comprend le franchissement du fossé par des ouvrages. Il maintient la fonction drainante des eaux pluviales de ce fossé. Par suite, le moyen tiré de l'incompatibilité du projet avec les principes de l'opération d'aménagement et d'urbanisme, s'agissant du fossé existant, doit également être écarté.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article 4 du règlement du plan local d'urbanisme applicable à la zone :

23. Aux termes de l'article 4 applicable à la zone 1AU du règlement du plan local d'urbanisme de la commune d'Essars, approuvé le 13 octobre 2015 : " Il est recommandé que toute construction ou installation nouvelle évacue ses eaux pluviales en milieu naturel direct (canal, rivière, ru ou fossé) ou par infiltration au plus près de sa source (point de chute sur le sol ou la surface imperméabilisée). L'impact de ces rejets ou infiltrations doit toutefois être examiné. Un prétraitement éventuel peut être imposé. ".

24. Il ressort du dossier de demande de permis d'aménager que les eaux pluviales sont infiltrées à la parcelle et, s'agissant des voiries, qu'elles sont récupérées par des tranchées drainantes sous chaussée et ensuite orientées vers le fossé drainant situé au nord du lotissement. Toutefois, l'avis défavorable du 1er septembre 2020 du service assainissement de la communauté d'agglomération Béthune-Bruay-Artois-Lys Romane au projet de gestion des eaux pluviales demandait la transmission d'un dossier technique complet comprenant notamment une étude de sol. Cet avis indique également que des prescriptions techniques plus restrictives pourront être imposées selon le milieu récepteur. Si, le permis d'aménager a repris les prescriptions contenues dans cet avis, il apparaît que ces prescriptions n'étaient ni définitives, ni suffisamment précises. Dans ces conditions, en délivrant le permis d'aménager sans l'assortir de prescriptions précises relatives à la gestion des eaux pluviales, le maire a méconnu l'article 4 du plan local d'urbanisme.

Sur l'application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :

25. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé ".

26. Ces dispositions permettent au juge, lorsqu'il constate qu'un vice entachant la légalité du permis de construire peut faire l'objet d'une mesure de régularisation, de rendre un jugement avant dire droit par lequel il fixe un délai pour cette régularisation et sursoit à statuer sur le recours dont il est saisi. Le juge peut préciser, par son jugement avant dire droit, les modalités de cette régularisation.

27. Le vice mentionné au point 24 est susceptible d'être régularisé. Il y a lieu, dès lors, de surseoir à statuer et de fixer à la société Soamco et à la commune d'Essars un délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt, aux fins de notifier à la cour la mesure de régularisation nécessaire.

DÉCIDE :

Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête de l'association Essars terre rurale, de Mme C... et de M. G... jusqu'à l'expiration d'un délai de six mois afin de permettre la régularisation du vice tiré de la méconnaissance de l'article 4 du plan local d'urbanisme de la commune d'Essars

Article 2 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Essars terre rurale, à Mme C... et à M. G..., à la société Soamco et à la commune d'Essars.

Délibéré après l'audience publique du 16 février 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Heinis, président de chambre,

- Mme Corinne Baes-Honoré, présidente-assesseure,

- M. Denis Perrin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 mars 2023.

Le rapporteur,

Signé : D. PerrinLe président de la 1ère chambre,

Signé : M. D...

La greffière,

Signé : C. Sire

La République mande et ordonne au préfet du Pas-de-Calais en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

C. Sire

N° 22DA01866 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22DA01866
Date de la décision : 09/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. Denis Perrin
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : BODART

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-03-09;22da01866 ?
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