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14/03/2023 | FRANCE | N°22DA02033

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 14 mars 2023, 22DA02033


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 10 mars 2020 par lequel la préfète de la Somme a refusé de faire droit à la demande d'introduction en France au bénéfice de son fils, au titre du regroupement familial.

Par un jugement n° 2002992 du 23 juin 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 5 octobre 2022, Mme B..., représentée par Me Pereira, demande à la Cou

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1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 10 mars 2020 ;

3°) d'enjoindre à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 10 mars 2020 par lequel la préfète de la Somme a refusé de faire droit à la demande d'introduction en France au bénéfice de son fils, au titre du regroupement familial.

Par un jugement n° 2002992 du 23 juin 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 5 octobre 2022, Mme B..., représentée par Me Pereira, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 10 mars 2020 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Somme d'accorder le bénéfice du regroupement familial à son fils dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir.

Elle soutient que :

- elle était fondée à demander l'annulation du refus d'accorder à son fils le bénéfice du regroupement familial : elle jouit d'une situation professionnelle stable lui ayant procurée des revenus de 12 656 euros au titre de l'année 2020, suffisants pour accueillir son fils à son domicile ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, son fils souffrance d'un handicap physique et mental qui nécessite la présence de sa mère à ses côtés ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 décembre 2022, le préfet de la Somme conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requérante ne soulève aucun moyen nouveau en appel, par rapport à ceux soulevés en première instance ;

- les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Douai le 8 septembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Baronnet, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... B..., ressortissante béninoise, a sollicité une autorisation de regroupement familial en faveur de son fils, M. .... Par une décision du 10 mars 2020, la préfète de la Somme a refusé le regroupement familial sollicité. Mme B... relève appel du jugement du 23 juin 2022 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 10 mars 2020.

2. Aux termes de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales, de l'allocation équivalent retraite et des allocations prévues à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles, à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale et aux articles L. 5423-1 et L. 5423-2 du code du travail. Les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 441-1 fixe ce montant qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième. (...) ". Aux termes de l'article R. 411-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " Pour l'application du 1° de l'article L. 411-5, les ressources du demandeur et de son conjoint qui alimenteront de façon stable le budget de la famille sont appréciées sur une période de douze mois par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance au cours de cette période. Ces ressources sont considérées comme suffisantes lorsqu'elles atteignent un montant équivalent à : - cette moyenne pour une famille de deux ou trois personnes (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que, pour justifier de ses revenus sur la période de douze mois précédant la demande de regroupement familial formulée le 20 novembre 2019 au profit de son fils, Mme B... a produit son avis d'impôt sur le revenu 2020, faisant apparaître des revenus perçus en 2019 d'un montant de 12 656 euros, dont le montant mensuel moyen est ainsi inférieur au salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) de référence fixé à 1 521,22 euros brut pour l'année 2019. Ainsi le montant mensuel des ressources de l'intéressée était inférieur à la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance au cours de la période de douze mois de référence. Par ailleurs, la requérante ne peut, en tout état de cause, utilement se prévaloir du niveau de ressources qui serait le sien, à la date de l'introduction de la requête, dès lors que la légalité de la décision contestée s'apprécie à la date de son édiction. Dans ces circonstances, alors même que l'intéressée produit des fiches de paye ultérieures et indique qu'elle dispose d'un logement susceptible d'accueillir son fils et que l'éloignement de son fils lui occasionne des frais supplémentaires, la préfète de la Somme, en relevant que les ressources de Mme B... étaient inférieures au montant minimum défini à l'article R. 411-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'a entaché sa décision d'aucune erreur de fait ou erreur de droit.

4. L'autorité administrative dispose toutefois d'un pouvoir d'appréciation et n'est pas tenue de rejeter la demande, notamment dans le cas où ce refus porterait une atteinte excessive au droit de mener une vie privée et familiale normale ou méconnaîtrait l'intérêt supérieur d'un enfant, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance - 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. "

6. Il ressort des pièces du dossier que le fils de A... B..., né le 6 mars 2004, a vécu au Bénin depuis sa naissance. Si Mme B... soutient que la présence de son fils est indispensable, et produit, à cet égard, un certificat médical émanant du ministère de la défense béninois, postérieur à la décision attaquée, mentionnant le handicap de son fils atteint d'un retard mental important, ce certificat mentionne également que les crises ont disparu depuis neuf ans et qu'aucun traitement n'est en cours. Dans ces circonstances, Mme B... ne justifie pas de la nécessité d'un regroupement familial, alors qu'elle déclare être entrée sur le territoire français le 2 octobre 2012, soit sept ans avant sa demande de regroupement familial. Dans ces conditions, en refusant d'accorder le bénéfice du regroupement familial, la préfète de la Somme n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de Mme B... au respect de sa vie privée et familiale et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

7. Aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. "

8. Ainsi qu'il a été dit au point 6, le fils de A... B..., âgé de quinze ans à la date de la demande de regroupement familial, vit séparé de sa mère au moins depuis 2012 Dans ces circonstances, et nonobstant le handicap de celui-ci, la préfète de la Somme ne peut être regardée comme ayant porté atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

9. En dernier lieu, compte tenu de ce qui précède, il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'en prenant sa décision, la préfète aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée.

10. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir soulevée par le préfet de la Somme, que Mme B... n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision de la préfète de la Somme du 10 mars 2020. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme D... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie sera adressée au préfet de la Somme.

Délibéré après l'audience du 21 février 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Baronnet, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller,

- Mme Sylvie Stefanczyk, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 mars 2023.

L'assesseur le plus ancien,

G. VandenbergheLe président-rapporteur,

M. C...

La greffière,

A.S. Villette

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

Anne-Sophie Villette

2

N°22DA02033


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA02033
Date de la décision : 14/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Baronnet
Rapporteur ?: M. Marc Baronnet
Rapporteur public ?: M. Toutias
Avocat(s) : SCP CARON-AMOUEL-PEREIRA

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-03-14;22da02033 ?
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